TA Montreuil, du 10-06-2024, n° 2217372
A25005KS
Référence
Par une requête et un mémoire enregistrés les 2 décembre 2022 et 26 septembre 2023, M. B C demande au tribunal d'annuler la décision du 29 juin 2022 par laquelle la cheffe du service pratiques restrictives de concurrence de la direction régionale et interdépartementale de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités (DRIEETS) d'Île-de-France a refusé de valider sa demande de jours de télétravail " flottants " pour les semaines 26 et 27 du mois de juillet 2022, ensemble la décision implicite de rejet de son recours hiérarchique.
Il soutient que :
- la décision attaquée est susceptible de recours dès lors qu'elle lui refuse le droit de télétravailler et qu'elle a été prise dans le seul but de le discriminer ;
- elle est entachée d'un défaut de motivation ;
- elle méconnaît les dispositions de la note de service du 4 février 2021 ;
- elle constitue une discrimination à son égard ;
- elle est entachée d'un détournement de pouvoir.
Par un mémoire en défense, enregistré le 9 août 2023, la Direction régionale et interdépartementale de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités (DRIEETS) d'Ile-de-France conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que :
- la requête, dirigée contre une mesure d'ordre intérieur, est irrecevable ;
- les moyens qu'elle contient sont infondés.
La clôture de l'instruction a été fixée au 23 octobre 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983🏛 ;
- la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012🏛 ;
- le décret n° 2016-151 du 11 février 2016🏛 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Van Maele ;
- les conclusions de Mme de Bouttemont, rapporteure publique,
- les observations de M. C et celles de M. A, pour la DRIEETS Ile-de-France.
Une note en délibéré, présentée par M. C, a été enregistrée le 27 mai 2024.
1. M. C, inspecteur de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes au sein de la brigade des relations inter-entrerprises du pôle concurrence, consommation, répression des fraudes et métrologie légale (pôle C), demande l'annulation de la décision du 29 juin 2022 en tant que sa cheffe de service a refusé de valider sa demande de jours de télétravail " flottants " pour les semaines 26 et 27 du mois de juillet 2022, ensemble la décision implicite de rejet de son recours hiérarchique.
2. Aux termes de l'article 133 de la loi du 12 mars 2012🏛 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique : " Les fonctionnaires relevant de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires peuvent exercer leurs fonctions dans le cadre du télétravail tel qu'il est défini au premier alinéa de l'article L. 1222-9 du code du travail🏛. L'exercice des fonctions en télétravail est accordé à la demande du fonctionnaire et après accord du chef de service. Il peut y être mis fin à tout moment, sous réserve d'un délai de prévenance. Les fonctionnaires télétravailleurs bénéficient des droits prévus par la législation et la réglementation applicables aux agents exerçant leurs fonctions dans les locaux de leur employeur public. / Le présent article est applicable aux agents publics non fonctionnaires et aux magistrats. () ".
3. Aux termes de l'article 2 du décret du 11 février 2016🏛 relatif aux conditions et modalités de mise en œuvre du télétravail dans la fonction publique et la magistrature : " Le télétravail désigne toute forme d'organisation du travail dans laquelle les fonctions qui auraient pu être exercées par un agent dans les locaux où il est affecté sont réalisées hors de ces locaux de façon régulière et volontaire en utilisant les technologies de l'information et de la communication. / Le télétravail peut être organisé au domicile de l'agent, dans un autre lieu privé ou dans tout lieu à usage professionnel () ". Aux termes de l'article 3 de ce décret : " La quotité des fonctions pouvant être exercées sous la forme du télétravail ne peut être supérieure à trois jours par semaine. Le temps de présence sur le lieu d'affectation ne peut être inférieur à deux jours par semaine. / Les seuils définis au premier alinéa peuvent s'apprécier sur une base mensuelle. ". Aux termes de son article 5 : " L'exercice des fonctions en télétravail est accordé sur demande écrite de l'agent. Celle-ci précise les modalités d'organisation souhaitées () Le chef de service, l'autorité territoriale ou l'autorité investie du pouvoir de nomination apprécie la compatibilité de la demande avec la nature des activités exercées et l'intérêt du service () ".
4. Les mesures prises à l'égard d'agents publics qui, compte-tenu de leurs effets, ne peuvent être regardées comme leur faisant grief, constituent de simples mesures d'ordre intérieur insusceptibles de recours. Il en va ainsi des mesures qui, tout en modifiant leur affectation ou les tâches qu'ils ont à accomplir, ne portent pas atteinte aux droits et prérogatives qu'ils tiennent de leur statut ou à l'exercice de leurs droits et libertés fondamentaux, ni n'emportent perte de responsabilités ou de rémunération. Le recours contre de telles mesures, à moins qu'elles ne traduisent une discrimination, est irrecevable.
5. Il ressort de la note de service du 4 février 2021, applicable à la date de la décision attaquée, que les agents de la DRIEETS d'Ile-de-France disposent d'un jour de télétravail fixe et d'un jour de télétravail flottant par semaine. Les jours de télétravail flottants sont cumulables sur le mois calendaire et ne peuvent être reportés d'un mois sur l'autre. La demande de M. C tendant à prendre un jour de télétravail fixe et un jour de télétravail flottant sur chacune des semaines 28 et 29 ayant été acceptée, l'intéressé conteste la décision du 29 juin 2022 en tant qu'elle rejette sa demande tendant à bénéficier de deux jours de télétravail flottants sur chacune des semaines 26 et 27 du mois de juillet 2022. Toutefois, une telle décision ne porte pas atteinte aux droits et prérogatives qu'il tient de son statut ou à l'exercice de ses droits et libertés fondamentaux, ni n'emporte perte de ses responsabilités ou de sa rémunération. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que cette mesure, justifiée par la circonstance que le requérant avait épuisé ses possibilités de télétravail en jours flottants, résulterait d'une discrimination ou constituerait une sanction déguisée. Dans ces conditions, la DRIEETS d'Ile-de-France est fondée à soutenir que la décision contestée est constitutive d'une mesure d'organisation du service, insusceptible de recours contentieux. Par suite, les conclusions à fin d'annulation du requérant doivent être rejetées comme étant irrecevables.
Article 1er : La requête de M. C est rejetée.
Article 2 : Le présent jugement sera notifié à M. B C et à la ministre du travail, de la santé et des solidarités.
Copie en sera adressée au directeur de la direction régionale et interdépartementale de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités (DRIEETS) d'Île-de-France.
Délibéré après l'audience du 17 mai 2024, à laquelle siégeaient :
Mme Ribeiro-Mengoli, présidente,
Mme Van Maele, première conseillère,
Mme Caro, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 juin 2024.
La rapporteure,
S. Van Maele
La présidente,
N. Ribeiro-Mengoli La greffière,
P. Demol
La République mande et ordonne à la ministre du travail, de la santé et des solidarités en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Loi, 2012-347, 12-03-2012 Loi, 83-634, 13-07-1983 Décret, 2016-151, 11-02-2016 Article, 3, décret, 11-02-2016 Article, 2, décret, 11-02-2016 Décision implicite de rejet Défaut de motivation Note de service Détournement de pouvoir Mesure d'ordre intérieur Fonctionnaire Autorité investie du pouvoir de nomination Libertés fondamentales