COUR DE CASSATION
Troisième chambre civile
Audience publique du 29 Novembre 2000
Pourvoi n° 99-12.730
Société Agri-Jardins ¢
consorts ....
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Sur le moyen unique du pourvoi principal
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 7 janvier 1999), que les consorts ... ayant donné à bail des locaux à usage commercial à la société Agri-Jardins, lui ont délivré un congé avec refus de renouvellement et sans indemnité d'éviction pour changement de destination des lieux loués ; qu'au cours de l'instance qu'ils avaient engagée en validation de ce congé, ils ont demandé au tribunal de constater que le locataire était en tout état de cause forclos pour solliciter une indemnité d'éviction ;
Attendu que la société Agri-Jardins fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande en paiement d'une indemnité d'éviction, alors, selon le moyen, que si le locataire dispose d'un délai de deux ans à compter de la date d'effet du congé, il suffit qu'il ait contesté le congé pour demander ensuite une indemnité d'éviction, qu'en l'espèce, la contestation du congé donné par les consorts ... sur le fondement de l'article 9 du décret du 30 septembre 1953 valait nécessairement demande de paiement d'une indemnité d'éviction, ce d'autant plus que le bailleur venait d'être débouté d'une action en résiliation du bail, pour défaut de respect de la destination des lieux, motif avancé par le bailleur pour justifier sa prétention à l'exclusion de l'indemnité d'éviction ; qu'en déclarant le preneur forclos dans sa demande en paiement de cette indemnité, sans rechercher s'il n'avait pas contesté le congé avant l'expiration du délai de deux ans, l'arrêt attaqué a violé l'article 5, alinéa 5, du décret du 30 septembre 1953 ;
Mais attendu qu'ayant constaté que, par acte d'huissier de justice du 11 septembre 1990, les consorts ... avaient fait délivrer à la société Agri-Jardins un congé pour le 17 mars 1991 avec refus de renouvellement et d'indemnité d'éviction, et que ce congé mentionnait expressément que le locataire qui entend, soit contester le congé, soit demander le paiement d'une indemnité d'éviction, doit, à peine de forclusion, saisir le Tribunal avant l'expiration d'un délai de deux ans à compter de la date pour laquelle ce congé a été donné, et relevé l'absence de toute action du locataire à cette fin avant le 17 mars 1993, la cour d'appel en a exactement déduit que la société Agri-Jardins était forclose à solliciter une indemnité d'éviction ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi incident
Vu l'article 20 du décret du 30 septembre 1953 ;
Attendu que l'arrêt relève que l'indemnité d'occupation due par le locataire au bailleur à compter du 18 mars 1991 a été justement fixée par le premier juge au montant du loyer contractuel indexé sans qu'il y ait lieu d'ordonner une expertise à cette fin ;
Qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, quelle était la valeur locative des lieux loués, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a confirmé le jugement entrepris en sa disposition relative à la fixation de l'indemnité d'occupation due à compter du 18 mars 1991 aux consorts ..., l'arrêt rendu le 7 janvier 1999, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier.