Jurisprudence : Cass. crim., Conclusions, 09-11-2022, n° 21-85.655

Cass. crim., Conclusions, 09-11-2022, n° 21-85.655

A83482RM

Référence

Cass. crim., Conclusions, 09-11-2022, n° 21-85.655. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/105408921-cass-crim-conclusions-09112022-n-2185655
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AVIS DE Mme BELLONE, AVOCATE GÉNÉRALE

Arrêt n° 1304 9 novembre 2022 – Chambre criminelle Pourvoi n° 21-85.655 Décision attaquée : cour d'appel de Versailles (9e chambre ) du 15 septembre 2021

Le Procureur général près la cour d'appel de Versailles C/ M. [X] [Z] _________________

▸ Le présent avis tend à approfondir l'une des questions posées par les pourvois formés à l'encontre de l'arrêt de la cour d'appel de Versailles du 15 septembre 2021 relatif à l'affaire dite de la « chaufferie de la Défense ». Cette question a trait au délai de traitement des affaires judiciaires. ▸ Le rapport de la justice au temps est une thématique ancienne, faisant régulièrement l'objet d'études et de débats. Elle n'est effectivement pas dénuée de subtilités et d'enjeux. La justice ne doit en effet pas être rendue avec une célérité excessive, sous le joug de l'émotion ; mais, elle ne doit pas non plus être rendue trop lentement afin de conserver toute sa portée.

La justice doit ainsi être rendue dans un délai raisonnable - concept éminemment relatif - afin de répondre à l'exigence supérieure de qualité qui est attendue d'elle, indispensable pour lui permettre de remplir sa mission, dont la finalité est d'assurer à chacun le respect de l'Etat de droit. L'importance du traitement des procédures judiciaires dans un délai raisonnable, ainsi énoncée, s'appréhende concrètement par la multitude de textes destinés à le garantir. La première formulation moderne du droit d'être jugé dans un délai raisonnable résulterait du VIème amendement de la Constitution des Etats-Unis1. Le paragraphe 3 de l'article 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques dispose que « Toute personne accusée d'une infraction pénale a droit, en pleine égalité, au moins aux garanties suivantes : (...) c) A être jugée sans retard excessif ; (...)». L'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme (Conv EDH) dispose en son premier paragraphe que « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. (...)». L'article 47 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne intitulé « Droit à un recours effectif et à accéder à un tribunal impartial » dispose, quant à lui, que « Toute personne dont les droits et libertés garantis par le droit de l'Union ont été violés a droit à un recours effectif devant un tribunal dans le respect des conditions prévues au présent article. Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable par un tribunal indépendant et impartial, établi préalablement par la loi. Toute personne a la possibilité de se faire conseiller, défendre et représenter. (...) ». Le neuvième alinéa de l'article préliminaire du code de procédure pénale pose qu' « Il doit être définitivement statué sur l'accusation dont cette personne fait l'objet dans un délai raisonnable ». L'article L. 111-3 du code de l'organisation judiciaire indique encore que « Les décisions de justice sont rendues dans un délai raisonnable ».

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« Dans toutes poursuites criminelles, l'accusé aura le droit d'être jugé promptement et publiquement par un jury impartial de l'Etat et du district où le crime aura été commis – le district ayant été préalablement délimité par la loi – d'être instruit de la nature et de la cause de l'accusation, d'être confronté avec les témoins à charge, d'exiger par des moyens légaux la comparution de témoins à décharge, et d'être assisté d'un conseil pour sa défense. » https://fr.usembassy.gov/wp-content/uploads/sites/50/2017/06/pub_constitution.pdf

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Le code de procédure pénale fait enfin référence au délai raisonnable dans ses articles 175-22 et D. 43-63. ▸ Malgré l'importance du traitement des affaires judiciaires dans un délai raisonnable, il ne peut qu'être constaté que depuis de nombreuses années, la lenteur de la justice est dénoncée. Le récent rapport du comité des Etats généraux de la Justice (octobre 2021 - avril 2022), remis au Président de la République le 8 juillet 2022, confirme que les Français reprochent, au premier chef, à la justice sa lenteur4. ▸ L'affaire objet du présent pourvoi ne peut qu'accréditer une telle critique ; entre l'ouverture de l'information judiciaire et celle des débats devant le tribunal correctionnel en janvier 2021, une durée de plus de 18 ans s'est écoulée. Le tribunal correctionnel de Nanterre, constatant le délai déraisonnable de la procédure, a alors annulé les actes d'enquête et d'information judiciaire.

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« En toute matière, la durée de l'instruction ne peut excéder un délai raisonnable au regard de la gravité des faits reprochés à la personne mise en examen, de la complexité des investigations nécessaires à la manifestation de la vérité et de l'exercice des droits de la défense. (...) » 3

« Lorsqu'en application aux articles 41-4,41-6,99,706-153 et 778 ou de toute autre disposition législative, le président de la chambre de l'instruction est compétent pour statuer seul sur une demande, un recours ou un contentieux, il se prononce dans un délai raisonnable et dans le respect du contradictoire, après avoir recueilli les observations écrites du procureur général et des parties. » 4

Rendre justice aux citoyens - Avril 2022 - Rapport du comité des Etats généraux de la justice (Octobre 2021- avril 2022) : p. 69 : « Selon une récente étude CSA sur le rapport des Français à la justice publiée par la commission des lois du Sénat le 27 septembre 2021, la lenteur est le premier reproche que les Français adressent à leur justice. La justice est vue comme lente ou « plutôt lente » par 93 % des sondés. » p. 70 : « La consultation menée par le ministère de la justice dans le cadre des États généraux de la justice par l'intermédiaire de la plateforme www.parlonsjustice a suscité un nombre significatif de contributions individuelles de citoyens (18 545 citoyens ont participé). Leur analyse fait émerger certains enseignements sur leur perception de la justice ainsi que sur leurs attentes. Les citoyens interrogés dénoncent majoritairement la lenteur de la justice (55 % des verbatim).»

Sur appel du procureur de la République et des parties civiles, la cour d'appel de Versailles, faisant le même constat, a annulé les poursuites pour une partie des faits ; elle a ainsi sanctionné le dépassement du délai raisonnable de traitement de la procédure, pour certains faits, motifs pris, en l'occurrence, de l'atteinte irrémédiable qu'il engendre à l'ensemble des principes de fonctionnement de la justice pénale, notamment au respect des droits de la défense et aux règles d'administration de la preuve, relevant le décès d'un des prévenus ainsi que l'âge et l'état de santé de deux autres prévenus, qui ne leur permettent pas de participer effectivement à leur procès, ces circonstances compromettant la possibilité de se défendre tant pour les prévenus affaiblis que pour les autres5. La cour d'appel de Versailles a réitéré le raisonnement ainsi tenu dans un arrêt postérieur du 29 septembre 2021, que votre chambre aura également à connaître, un pourvoi ayant été formé à son encontre (S2186027). Dans cette affaire, elle a de même constaté le dépassement du délai raisonnable de la procédure mais n'en a pas tiré de conséquence en l'absence de retentissement sur la tenue d'un procès équitable. ▸ D'autres juridictions du territoire national se sont de même engagées dans le prononcé de sanctions procédurales au dépassement du délai raisonnable de traitement des procédures. Certaines ont considéré que le dépassement du délai raisonnable doit entraîner ipso facto une sanction procédurale. D'autres juridictions, comme la cour d'appel de Versailles, n'ont sanctionné procéduralement ce dépassement que s'il a engendré une « atteinte irrémédiable » à l'ensemble des principes de fonctionnement de la justice pénale, ceci devant s'entendre des autres principes garantissant le droit au procès équitable 6. Les sanctions prononcées ont été diverses ; les juridictions ont annulé les procédures, mis fin aux poursuites ou annulé les poursuites. D'une façon générale, elles cherchent à sanctionner de façon effective le dépassement du délai raisonnable de traitement des procédures ; la cour d'appel de Versailles fait néanmoins dépendre d'une « atteinte irrémédiable » aux autres

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« La cour constate que le délai déraisonnable de la procédure a eu pour conséquence directe d'empêcher M.M [U] et [V] de participer à leur procès (...) et ainsi, d'exercer de manière effective les droits de la défense, éléments essentiels à la tenue d'un procès équitable (...) ». « Elle relève (...), à l'instar des premiers juges, que si le recours indemnitaire prévu en droit interne pour sanctionner la méconnaissance du délai raisonnable apparaît insuffisant eu égard aux violations irrémédiables constatées qui empêchent la tenue d'un procès équitable, l'annulation de l'entière procédure constituerait pour autant une sanction disproportionnée, le délai raisonnable de la procédure ne portant pas atteinte à l'exercice effectif des droits de la défense de M. [O] et de M. [W] s'agissant des faits concernant les parties civiles ». Arrêt p. 25 et 28. Comme indiqué dans l'avis initial, la cour d'appel ne fonde « pas sa décision sur le dépassement d'une durée raisonnable de la procédure mais sur une atteinte au droit à un procès équitable, au principe du contradictoire et aux droits de la défense » ; néanmoins, au regard de sa motivation, elle sanctionne le dépassement du délai raisonnable de la procédure, en ce qu'il engendre une atteinte irrémédiable aux autres principes du procès équitable. 6

au regard de la motivation du présent arrêt de la cour d'appel de Versailles qui relève diverses atteintes au procès équitable et au regard de celle de l'arrêt de la cour d'appel de Versailles du 29 septembre 2021 relevant, à l'inverse, la possibilité de tenir un procès équitable.

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principes du procès équitable le prononcé d'une sanction procédurale à ce dépassement. ▸ La première question que pose le présent pourvoi est dès lors de savoir si le prononcé d'une sanction procédurale au dépassement du délai raisonnable de traitement des procédures devrait dépendre d'une « atteinte irrémédiable » aux autres principes du procès équitable. ∙ Il pourrait être considéré que la Cour de cassation belge a répondu à cette question par l'affirmative. Elle a en effet estimé que « l'irrecevabilité de la poursuite sanctionne le caractère déraisonnable de la durée de la procédure si cette longueur excessive a entraîné une déperdition des preuves ou rendu impossible l'exercice normal des droits de la défense»7. En réalité, elle ne fait qu'appliquer le principe dégagé par elle selon lequel l'irrecevabilité de l'action publique ou son exercice constitue la sanction de circonstances qui empêchent d'intenter ou de continuer les poursuites pénales dans le respect du droit au procès équitable8. La Cour suprême finlandaise avait, quant à elle, estimé dans un arrêt du 5 novembre 20039 que, bien que le principe de base est qu'une affaire ne peut être rejetée simplement parce qu'elle n'a pas été portée devant un tribunal dans un délai raisonnable, dans certaines circonstances exceptionnelles, la sauvegarde d'un procès équitable pour l'accusé peut signifier que le rejet ou l'irrecevabilité de l'accusation soit le seul recours effectif au sens de l'article 13 de la Conv EDH.

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Cass., 10 mai 2017, ECLI:BE:CASS:2017:ARR.20170510.2 : « L'irrecevabilité de la poursuite sanctionne le caractère déraisonnable de la durée de la procédure si cette longueur excessive a entraîné une déperdition des preuves ou rendu impossible l'exercice normal des droits de la défense.» « compromet, de façon décisive, l'exercice des droits de la défense et rend impossible l'administration contradictoire de la preuve dès lors que les défendeurs n'ont plus la possibilité de faire valoir, de manière réelle et effective, des moyens de défense et de présenter toutes demandes utiles au jugement de la cause, et plus spécialement des éléments de preuve à décharge à propos d'une enquête clôturée il y a plus de dix-sept ans. » « de nouveaux devoirs pourraient s'avérer nécessaires et les défendeurs pourraient estimer utile d'en solliciter, dès lors notamment que l'irrégularité de certaines preuves est constatée plus de vingt ans après qu'elles ont été recueillies, nouveaux devoirs qui seraient vains vu le temps écoulé. » « vingt-trois témoins sont décédés parmi ceux qui apparaissent relatifs aux faits et à la question de la culpabilité, dont cinq, cités nommément à titre d'exemple, sont qualifiés de déterminants, de sorte que leurs déclarations ne sont plus susceptibles d'être soumises à la contradiction dans le respect de l'oralité des débats. » « Par ces considérations, l'arrêt a pu légalement justifier sa décision que le délai raisonnable est dépassé et que l'exercice normal des droits de la défense des défendeurs est irrémédiablement compromis. » 8 9

Cass., 27 février 2013, ECLI:BE:CASS:2013:ARR.20130227.3

Oikeus, 5 novembre 2003, KKO:2004:58, § 24 https://finlex.fi/fi/oikeus/kko/kko/2004/20040058

Cependant, depuis lors, la loi finlandaise sur l'indemnisation en cas de retard de procédure du 29 mai 2009 a été adoptée sans reprendre cette possibilité et la Cour européenne des droits de l'homme (Cour EDH) a estimé que les recours disponibles en Finlande pour éviter ou compenser le retard dans les procédures pénales et civiles répondent aux exigences d'effectivité requises par l'article 13 de la Conv EDH10. Par un arrêt du 22 juin 2016, la Cour suprême finlandaise est alors revenue sur sa précédente décision, estimant que la durée déraisonnable d'une procédure est compensée dans le jugement principal par sa prise en compte lors du prononcé d'une sanction et, si nécessaire, par une compensation monétaire à la place ou en plus de celle-ci ; qu'il n'existe aucune disposition dans la législation qui permettrait le rejet ou l'irrecevabilité de l'accusation et de la demande d'indemnisation fondée sur celle-ci au motif que la procédure a duré un temps déraisonnable et qu'il n'y a pas d'exception pour les situations où la durée de la procédure a été anormalement longue11. Elle ne sanctionne ainsi plus le dépassement du délai déraisonnable par le rejet ou l'irrecevabilité de l'accusation et ne le lie plus, pour ce faire, à la sauvegarde d'un procès équitable. ∙ L'appréhension séparée du droit à être jugé dans un délai raisonnable d'une part, et des autres principes du procès équitable d'autre part, parait, en effet, être l'approche pertinente à adopter. Une atteinte aux principes du procès équitable n'est, en effet, pas nécessairement le résultat du temps qui passe. Le décès d'un mis en cause, l'affection d'une maladie physique ou mentale rendant difficile voire impossible la présence d'un mis en cause au procès ou sa participation effective à celui-ci ainsi que l'exercice normal des droits de la défense ne sont pas nécessairement la conséquence de l'écoulement du temps. Ces circonstances peuvent survenir rapidement après la commission des faits objets de la procédure par l'effet d'un événement malheureux extrinsèque à la conduite de celle-ci. En outre, même si une telle atteinte pouvait être liée à l'écoulement du temps, celuici peut ne pas être considéré comme de nature à caractériser une durée déraisonnable de traitement de procédure, au regard, par exemple, de la complexité de l'affaire ou du comportement des parties. Ainsi, lorsqu'une difficulté se présente relativement au procès équitable, elle doit être appréhendée pour elle-même et il ne peut en être tiré conséquence que relativement à l'atteinte à laquelle elle correspond.

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CEDH, 9 novembre 2010, décision, Ahlskog, requête n° 5238/07 ; CEDH, 24 janvier 2012, décision S. V., requête n° 66399/09 11

Oikeus, 22 juin 2016, KKO:2016:45, § 32 https://finlex.fi/fi/oikeus/kko/kko/2016/20160045

La commission de réexamen distingue d'ailleurs bien les conséquences d'une atteinte au délai raisonnable de la procédure de celles d'autres atteintes au procès équitable. Elle a en effet jugé dans une décision du 30 novembre 2000 (Comm. réexamen, 30 novembre 2000, n° 00 RDH 003) que « si la satisfaction équitable octroyée à X a été de nature à mettre un terme aux conséquences dommageables de la violation du droit à être jugé dans un délai raisonnable, il n'en est pas ainsi des violations constatées du droit à disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense et de celui d'avoir l'assistance d'un défenseur de son choix, droits dont la violation par sa nature et sa gravité entraîne, en l'espèce, pour le condamné des conséquences dommageables auxquelles seul le réexamen de l'affaire peut mettre un terme ». ∙ Ensuite, les atteintes qui pourraient être portées aux principes du procès équitable, autres que le droit à être jugé dans un délai raisonnable, doivent être endiguées par les mécanismes prévus à cet effet ; leur putativité ne peut fonder le prononcé d'une sanction à l'atteinte au délai raisonnable lequel viendrait, en outre, ainsi les sanctionner par anticipation. Les difficultés relevées dans le cadre de procédures dont le délai de traitement est important tiennent généralement dans le décès d'un ou plusieurs mis en cause ou en leur état de santé physique ou mental défaillant rendant difficile voire impossible leur présence au procès ou leur participation effective à celui-ci ainsi que l'exercice normal des droits de la défense. Ces difficultés peuvent, naturellement, être de nature à porter atteinte aux droits protégés, au premier chef, par la Conv EDH. En effet, l'article 6 §3 de la Conv EDH reconnaît le droit de disposer des facilités nécessaires pour préparer sa défense, le droit d'interroger ou de faire interroger les témoins à charge. Au-delà, la Conv EDH garantit la faculté pour l'accusé de prendre part à l'audience, d'être associé à son procès, ce qui inclut, notamment, le droit d'y assister ainsi que d'entendre et de suivre les débats. Le principe d'égalité des armes a aussi été déduit de l'article 6 §1 de la Conv EDH ; cette égalité veut que chaque partie ait la possibilité de présenter sa cause dans un cadre qui ne la place pas dans une situation de net désavantage par rapport à son adversaire. La Cour EDH considère, de façon générale, que le principe clé de l'article 6 de la Conv EDH est le principe d'équité. Elle apprécie cette équité à l'aune de la conduite de la procédure dans son ensemble. Elle précise néanmoins, au cours de son analyse, les droits qu'elle protège au cas d'espèce. En outre, il ne semble pas ressortir de sa jurisprudence qu'elle sanctionne une atteinte aux principes du procès équitable qui ne serait pas concrète. Celle-ci peut être irrémédiable ou irréparable (par exemple, des déclarations faites en l'absence d'avocat) mais elle doit exister. Ce ne sont, finalement, que les effets de l'atteinte qui sont irrémédiables. Or, lorsque la cour d'appel de Versailles retient des « violations irrémédiables » empêchant la tenue d'un procès équitable, elle refuse ex ante, en réalité, de

prendre en charge le procès craignant d'aboutir au terme de la procédure à une atteinte aux principes du procès équitable, et d'en avoir ainsi été l'acteur. Elle ne tire pas les conséquences d'une atteinte, existante, aux principes du procès équitable mais d'atteintes seulement putatives. Pourtant, les violations qu'elle craint, ou qui pourraient être craintes pour des procès de cette nature, peuvent être endiguées, au cours de la procédure, par les mécanismes prévus à cet effet, de sorte qu'aucune atteinte réelle aux principes du procès équitable ne devrait pouvoir être constatée au terme de celle-ci. La Cour EDH estime que « La « participation réelle » [au procès] (...) présuppose que l'accusé comprenne globalement la nature et l'enjeu pour lui du procès, notamment la portée de toute peine pouvant lui être infligée. Il doit être à même d'exposer à ses avocats sa version des faits, de leur signaler toute déposition avec laquelle il ne serait pas d'accord et de les informer de tout fait méritant d'être mis en avant pour sa défense »12. Elle considère dès lors que des garanties particulières peuvent être imposées pour protéger les individus qui ne sont pas entièrement capables d'agir pour leur compte13. Ainsi, dans l'affaire Vaudelle c/ France, elle a précisé que les autorités nationales « auraient (...) pu sommer le requérant à se rendre à la convocation en vue de l'examen psychiatrique (...) ainsi qu'à comparaître à l'audience et, à défaut, y faire assurer sa représentation par son curateur ou par un avocat. Cela aurait permis au requérant de comprendre la procédure en cours et d'être informé d'une manière détaillée de la nature et de la cause de l'accusation portée contre lui au sens de l'article 6 § 3 a) de la Convention, et au tribunal correctionnel de prendre sa décision en toute équité. » Or, le dernier alinéa de l'article 417 du code de procédure pénale prévoyait déjà que « L'assistance d'un défenseur est obligatoire quand le prévenu est atteint d'une infirmité de nature à compromettre sa défense (...) ». L'article 706-113 du code de procédure pénale, introduit par la loi n°2007-308 du 5 mars 2007, prévoit, désormais, quant à lui, que « lorsque la personne fait l'objet de poursuites, le procureur de la République ou le juge d'instruction en avise le curateur ou le tuteur ainsi que le juge des tutelles. Il en est de même si la personne fait l'objet d'une alternative aux poursuites consistant en la réparation du dommage ou en une médiation, d'une composition pénale ou d'une comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité ou si elle est entendue comme témoin assisté », que « Le curateur ou le tuteur peut prendre connaissance des pièces de la procédure dans les mêmes conditions que celles prévues pour la personne poursuivie », que « Le procureur de la République ou le juge d'instruction avise le curateur ou le tuteur des décisions de non-lieu, de relaxe, d'acquittement, d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental, ou de condamnation dont la 12

CEDH, 23 février 2012, G.c/ France, requête n° 27244/09, §52

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CEDH, 30 janvier 2001, Vaudelle c/ France, requête n° 35683/97, §60

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personne fait l'objet » et enfin que « Le curateur ou le tuteur est avisé de la date d'audience » et « Lorsqu'il est présent à l'audience, (...) est entendu par la juridiction en qualité de témoin ». L'article 706-116 du code de procédure pénale précise que « La personne poursuivie doit être assistée par un avocat. A défaut de choix d'un avocat par la personne poursuivie ou son curateur ou son tuteur, le procureur de la République ou le juge d'instruction fait désigner par le bâtonnier un avocat, l'intéressé étant informé que les frais seront à sa charge sauf s'il remplit les conditions d'accès à l'aide juridictionnelle ». S'agissant de situations plus obérées, pouvant correspondre à celle d'une personne privée de discernement ou de toute capacité de communication, votre chambre considère depuis longtemps qu'il convient de surseoir à statuer14. Elle a jugé qu' « il se déduit des articles 6, § 1, et § 3, a et c, de la Convention européenne des droits de l'homme ainsi que de l'article préliminaire du code de procédure pénale qu'il ne peut être statué sur la culpabilité d'une personne que l'altération de ses facultés physiques ou psychiques met dans l'impossibilité de se défendre personnellement contre l'accusation dont elle fait l'objet, fût-ce en présence de son tuteur ou de son curateur et avec l'assistance de son avocat. »15 En ce cas, votre chambre a estimé qu' « En l'absence de l'acquisition de la prescription de l'action publique ou de disposition légale lui permettant de statuer sur les intérêts civils, la juridiction pénale, qui ne peut interrompre le cours de la justice, est tenue de renvoyer l'affaire à une audience ultérieure et ne peut la juger qu'après avoir constaté que l'accusé ou le prévenu a recouvré la capacité à se défendre »16. C'est ainsi que votre chambre a considéré qu'encourt la cassation : - « l'arrêt qui, malgré l'audition du tuteur à l'audience et l'assistance d'un avocat, déclare le prévenu coupable et prononce une peine, alors qu'il résulte des motifs de la décision que l'intéressé, se trouvant sous tutelle et hospitalisé dans un service psychiatrique, ne peut effectivement exercer les droits de la défense lui étant reconnus et est inaccessible à une sanction pénale »17, - mais aussi « l'arrêt qui renvoie le prévenu des fins de la poursuite, en dehors des cas prévus par l'article 470 du code de procédure pénale, en raison de son

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Voir pour exemple : - Crim., 23 décembre 1859, Bull. Crim. 287 : « La démence régulièrement constatée d'un condamné, après son pourvoi en cassation et avant jugement par la Cour de cassation, oblige cette cour à surseoir à statuer sur le pourvoi jusqu'à ce qu'un changement soit survenu dans l'état mental du demandeur ». - Crim., 31 octobre 1912, Bull. Crim. 525 : « Attendu qu'il résulte des pièces produites, qu'à la date à laquelle il a été statué sur les pourvois, le demandeur était interné dans un asile d'aliénés, et se trouvait par suite dans l'impossibilité de faire valoir ses moyens à l'appui de ses recours ; Par ces motifs, Rapporte son arrêt (...) ; Dit qu'il sera sursis à statuer jusqu'à ce qu'il soit justifié que le demandeur a recouvré l'exercice de ses facultés mentales. » 15

Crim., 5 septembre 2018, pourvois n° 17-83.683 et 17-84.402

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Crim., 5 septembre 2018, pourvois n° 17-83.683 et 17-84.402

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Crim., 5 septembre 2018, pourvoi n° 17-83.683

impossibilité absolue, définitive et objectivement constatée d'assurer sa défense devant la juridiction de jugement »1819 Enfin, l'article 10 du code de procédure pénale prévoit désormais qu'il sera uniquement statué sur l'action civile lorsque l'état mental ou physique d'une personne citée ou renvoyée devant une juridiction de jugement rend durablement impossible sa comparution personnelle dans des conditions lui permettant d'exercer sa défense, sur constatation d'expertise, et que la prescription de l'action publique se trouve ainsi suspendue20. En outre, si l'état d'un ou de plusieurs mis en cause empêche de réaliser, lors de l'audience, une confrontation, pourtant nécessaire, la conséquence ne consistera qu'en l'impossibilité de prendre en compte certains éléments de preuve, venant ainsi amoindrir les éléments à charge. Enfin, l'impossibilité d'interroger un témoin ne poserait difficulté, selon la jurisprudence de la Cour EDH, que si la condamnation se fondait à un degré déterminant sur les dépositions faites par ce témoin que le mis en cause, ou son 18

Crim., 5 septembre 2018, pourvoi n° 17-84.402

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Voir en outre : - pour la phase d'instruction : Crim., 11 juillet 2007, pourvoi n° 07-83.056 : « Il se déduit des dispositions de l'article 6 § 1 et 3 a et c de la Convention européenne des droits de l'homme et de l'article préliminaire du code de procédure pénale que, lorsque l'altération des facultés d'une personne mise en examen est telle que celle-ci se trouve dans l'impossibilité absolue d'assurer effectivement sa défense, serait-elle assistée d'un avocat, il doit être sursis à son renvoi devant la juridiction de jugement. Encourt, dès lors, la censure l'arrêt d'une chambre de l'instruction qui, après avoir relevé qu'aux termes d'un rapport d'expertise psychiatrique la personne mise en examen est, à la suite d'un accident vasculaire cérébral survenu en cours d'information, inapte à être auditionnée ou interrogée et inaccessible à une sanction pénale, confirme l'ordonnance du juge d'instruction ayant ordonné sa mise en accusation devant la cour d'assises. » Voir aussi Crim., 19 septembre 2018, pourvoi n° 18-83.868 et Crim., 18 novembre 2020, pourvoi n° 20-84.872 et pour une déclinaison en matière de saisie : Crim., 22 juin 2022, pourvois n° 21-86.620, 21-86.621, 21-86.622, 21-86.623, 21-86.624, 21-86.625, 21-86.626, 21-86.627 - devant la Cour de cassation : Crim., 5 juin 1997, pourvoi n° 96-82.783 : « Si l'état de santé du prévenu, condamné par l'arrêt d'une cour d'appel et demandeur au pourvoi, le prive de l'exercice de ses facultés intellectuelles et l'empêche de communiquer avec son avocat, il y a lieu, pour la Cour de Cassation, de surseoir à statuer jusqu'à ce qu'il soit justifié que l'état de santé du demandeur lui permette de présenter sa défense lors de l'instance de cassation, et, notamment, d'exercer la faculté de produire un mémoire personnel ou de se désister de son pourvoi. » 20

Loi n°2019-222 du 23 mars 2019 de programmation de la justice 2018-2022 - Projet de loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice - 1ère lecture Assemblée nationale - Amendement n°1041 : « cet amendement vise à régir la situation dans laquelle l'état mental ou physique d'une personne en attente de jugement s'est dégradé au point de rendre durablement impossible sa comparution personnelle devant la juridiction de jugement. C'est par exemple l'hypothèse d'une personne qui, bien qu'étant lucide et responsable de ces actes au moment des faits, a été ensuite placée en hospitalisation sous contrainte, ou de celle d'une personne atteinte de la maladie d'Alzheimer en raison de son grand âge. Dans ces cas, il est traditionnellement admis par la jurisprudence que l'action publique est suspendue et que la personne ne peut pas être jugée. Cette situation, qui s'impose naturellement au regard des droits de la défense en ce qui concerne la décision sur l'action publique, peut néanmoins s'avérer préjudiciable aux intérêts des victimes lorsque l'impossibilité de juger perdure dans le temps, car en raison de la règle selon laquelle le criminel tient le civil en état, la victime ne peut pas obtenir un jugement de réparation. C'est pourquoi le présent amendement vise à permettre qu'il puisse être statué sur les intérêts civils malgré l'impossibilité de statuer sur l'action publique. Le président du tribunal pourra décider, après avoir ordonné une expertise permettant de constater cette impossibilité de statuer, qu'une audience publique se tiendra sur l'action civile. La personne devra alors être obligatoirement représentée par un avocat. En matière correctionnelle, cette audience se tiendra à juge unique, conforment au quatrième alinéa de l'article du code de procédure pénale. En matière criminelle, cette audience sera tenue par le président de la cour d'assises, conformément au nouvel article 731-1 de ce code prévu par l'article 42 du présent projet de loi. Cela permettra un jugement rapide de l'affaire, ce qui est dans l'intérêt des victimes. »

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défenseur, n'aurait pu interroger à un quelconque stade de la procédure (« règle de la preuve unique ou déterminante » ; par exemple, CEDH, 13 novembre 2003, Rachdad c/ France, requête n° 71846/01 ; CEDH, Grande chambre, 15 décembre 2011, Al-Khawaja c/ Royaume-Uni, requête n° 26766/05, 22228/06). Dès lors, si des difficultés résultant de l'impossibilité pour un ou plusieurs mis en cause de se présenter ou de participer réellement au procès ou d'exercer normalement les droits de la défense surviennent lors de l'audience, la juridiction se doit de les identifier et d'y répondre en fonction des mécanismes de résolution propres à chacune afin que la procédure soit conduite, dans son ensemble, conformément au principe d'équité. Il pourrait ainsi en résulter une audience, dans un premier temps ou in fine, seulement sur les intérêts civils ou bien même une relaxe des (ou de certains) mis en cause, solution qui serait d'ailleurs bien plus satisfaisante pour ceux-ci qu'une sanction procédurale. Dès lors, la juridiction confrontée à de telles difficultés, en ce qu'il n'en résulte pas d'atteintes consommées au procès équitable, ne peut en faire dépendre le prononcé d'une sanction procédurale à l'atteinte au délai raisonnable de traitement des procédures. lequel viendrait, en outre, ainsi les sanctionner par anticipation. Il n'est par ailleurs pas évident qu'une telle sanction doive s'attacher à une telle atteinte. ▸ La seconde question que peut ainsi poser le présent pourvoi est de savoir si le dépassement du délai raisonnable de traitement d'une procédure doit être sanctionné procéduralement. ∙ En matière de sanction au dépassement du délai raisonnable des procédures pénales, la jurisprudence de votre chambre est constante 21 : le dépassement du délai raisonnable « n'entraîne pas la nullité de la procédure », «est sans incidence sur la validité des procédures » ; « il ne constitue pas une cause d'extinction de l'action publique » ; « il ne saurait être utilisé comme fondement d'une demande d'annulation de (...)[la] procédure » ; mais « la partie concernée peut (...) engager la responsabilité de l'Etat à raison du fonctionnement défectueux du service public de la justice ». Plus spécialement, trois questions prioritaires de constitutionnalité, soutenant que les droits de la défense ou les droits de la défense et le droit au procès équitable imposent que le dépassement du délai raisonnable soit procéduralement sanctionné, n'ont pas été jugées sérieuses par votre chambre. Celle-ci a tout d'abord estimé que le respect du délai raisonnable est servi par les droits de la défense, garantis par des dispositions visant à éviter le retard des procédures (et ne s'y oppose donc pas) 22. 21

Arrêts de 1998 à 2021 : Crim., 22 septembre 1998, pourvoi n° 98-83.555 ; Crim., 3 mai 2012, pourvoi n° 11-88.725 ; Crim., 24 avril 2013, Bull. Crim. 100 ; Crim., 9 avril 2015, pourvoi n° 13-86.112 ; Crim., 9 mars 2016, pourvoi n° 1485.847 ; Ass. Plén., 4 juin 2021, pourvoi n° 21-81.656

Dans le dernier arrêt, elle semble s'être placée sur un autre terrain, celui de la nature du droit à être jugé dans un délai raisonnable, qui ne serait pas, au regard de la motivation adoptée, une condition de validité de la procédure - pas plus d'ailleurs qu'une cause d'extinction de l'action publique23. Il peut en effet être considéré que la prescription tenant en ce que la durée des procédures ne dépasse pas un délai raisonnable ne consiste pas en une formalité substantielle de validité de la procédure ; elle ne dessine pas, en effet, les contours de la procédure. Il peut être estimé qu'il s'agit d'une exigence supérieure 24 consistant à rendre une justice de qualité, qualité prise sous le prisme de la durée de traitement des procédures. Ainsi, même s'il est vrai que la chambre criminelle a déjà considéré que la violation de l'article préliminaire du code de procédure pénal peut avoir des conséquences procédurales25, la nature du droit au respect d'un délai raisonnable de traitement 22

Crim., 31 août 2011, pourvoi n° 11-90.075 : « Et attendu que la question posée ne revêt pas, à l'évidence, un caractère sérieux, dès lors que le droit à être jugé dans un délai raisonnable, que proclame l'article préliminaire, n'entre aucunement en contradiction avec les autres principes directeurs du procès pénal énoncés par ce texte, qui garantissent le respect, sous le contrôle de la Cour de cassation, des droits de la défense, eux-mêmes servis par de nombreuses autres dispositions du code de procédure pénale visant à éviter tout retard dans le développement de la procédure jusqu'à la décision définitive mettant fin à l'action publique et, le cas échéant, à l'action civile ; que la partie concernée peut en outre, en cas de durée excessive de la procédure, engager la responsabilité de l'Etat à raison du fonctionnement défectueux du service public de la justice ; » Crim., 03 décembre 2013, pourvoi n° 13-90.027 : « Et attendu que la question posée ne revêt pas, à l'évidence, un caractère sérieux, dès lors que le droit à être jugé dans un délai raisonnable, que proclame l'article préliminaire, est sauvegardé par les autres principes directeurs du procès pénal énoncés par ce texte, assurant le respect, sous le contrôle de la Cour de cassation, des droits de la défense, qui sont garantis par de nombreuses autres dispositions du code de procédure pénale visant à éviter tout retard dans le développement de la procédure jusqu'à la décision définitive ; que la partie concernée peut en outre, en cas de durée excessive de la procédure, engager la responsabilité de l'Etat à raison du fonctionnement défectueux du service public de la justice ; » 23

Crim., 15 juin 2021, pourvoi n° 21-80.496 : « La question posée ne revêt pas un caractère sérieux, dès lors que le dépassement du délai raisonnable est sans incidence sur la validité de la procédure et que, sous réserve des lois relatives à la prescription, il ne constitue pas une cause d'extinction de l'action publique. 4. En outre, la partie concernée peut, en cas de durée excessive de la procédure, engager la responsabilité de l'Etat à raison du fonctionnement défectueux du service public de la justice. » 24

Quelle sanction pour la violation du délai raisonnable de jugement ? Hania Kassoul, attachée temporaire d'enseignement et de recherche, Université Nice Sophia Antipolis, Gazette du Palais, n°264, 21 septembre 2013 25

Crim., 2 février 2005, pourvoi n° 04-86.805 : « Vu les articles préliminaire et 154 du Code de procédure pénale ; Attendu que, selon le premier de ces textes, les mesures de contrainte dont une personne peut faire l'objet sont prises sur décision ou sous le contrôle de l'autorité judiciaire ; que, selon le second de ces textes, l'officier de police judiciaire qui est amené, pour les besoins de l'exécution d'une commission rogatoire, à garder une personne à sa disposition a le devoir d'en informer le juge d'instruction saisi des faits dès le début de cette mesure ; que tout retard, non justifié par une circonstance insurmontable, dans l'information donnée au juge d'instruction du placement en garde à vue fait nécessairement grief aux intérêts de la personne concernée ; (...) Attendu que, pour dire n'y avoir lieu à annulation d'aucun acte de la procédure, l'arrêt attaqué prononce par les motifs reproduits au moyen ; Mais attendu qu'en statuant ainsi, alors que les formalités prévues par l'article 154 du Code de procédure pénale avaient été méconnues, à défaut pour l'officier de police judiciaire d'avoir avisé le juge d'instruction saisi des faits dès le début de la garde à vue et que Mustapha X... avait été, contrairement aux instructions données ultérieurement par ce magistrat, irrégulièrement maintenu à la disposition d'un officier de police judiciaire après la levée de sa garde à vue qui lui a été notifiée le 31 juillet à 9 heures 25, la chambre de l'instruction a méconnu le principe ci-dessus rappelé et les textes susvisés ; D'où il suit que l'arrêt attaqué encourt la censure ; »

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des procédures - qu'il garantit - ne permettrait pas de le sanctionner procéduralement26. Il ne constitue pas, en outre, une cause d'extinction de l'action publique puisque l'article 6 du code de procédure pénale prévoit seulement que « L'action publique pour l'application de la peine s'éteint par la mort du prévenu, la prescription, l'amnistie, l'abrogation de la loi pénale et la chose jugée ». ∙ Pourtant, dans notre espèce, le tribunal correctionnel de Nanterre ainsi que la cour d'appel de Versailles, comme plusieurs juridictions sur l'ensemble du territoire, ont choisi de se départir de la jurisprudence de votre chambre en sanctionnant procéduralement le dépassement constaté du délai raisonnable de traitement des procédures. Ces positions dissidentes sont généralement justifiées par la nécessité d'appliquer une sanction effective à ce dépassement. - Cependant, il ne peut qu'être constaté que la Cour EDH considère que le recours indemnitaire, tel que prévu en France pour répondre au dépassement du délai raisonnable de traitement des procédures, est une sanction effective.

26

Voir d'ailleurs Comm. réexamen, 21 juin 2001, n° 00 RDH 004 et Comm. réexamen, 6 avril 2006, n° 05 RDH 005, qui confortent cette analyse : « la violation de l'exigence du délai raisonnable prévu par l'article 6-1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'est pas de nature à entraîner le réexamen du pourvoi et de la décision de la juridiction de jugement » ; le non-respect du délai raisonnable est une violation qui, de par sa nature, ne peut donner lieu à réexamen.

Depuis l'arrêt Kudla27, par lequel elle a posé que « ce sont les autorités nationales qui sont responsables au premier chef de la mis en oeuvre et de la sanction des droits et libertés garantis », que « le mécanisme de plainte devant la Cour revêt donc un caractère subsidiaire par rapport aux systèmes nationaux de sauvegarde des droits de l'homme », que « cette subsidiarité s'exprime dans les articles 13 et 35 §1 de la Convention », elle considère comme sanction efficace au droit à un délai raisonnable de procédure les recours préventifs ou indemnitaires 28, même si elle exprime sa préférence pour les recours préventifs29. Le comité des ministres aux Etats membres a une position identique. Il recommande « lorsque les procédures sont devenues excessivement longues, de veiller à ce que la violation soit reconnue expressément ou en substance et : a. que les procédures soient accélérées, si cela est possible ; ou b. qu'une réparation soit accordée aux victimes pour tout désavantage qu'elles ont subis ; ou, de préférence, c. qu'une combinaison des deux mesures soit permise »30.

27

CEDH, 26 octobre 2000, Kudla c/ Pologne, requête n° 30210/96

28

CEDH, 26 octobre 2000, Kudla c/ Pologne, requête n° 30210/96, § 159 ; CEDH, 11 septembre 2002, décision sur la recevabilité, Mifsud, requête n° 57220/00, §17 ; CEDH, 29 mars 2006, Cocchiarella c. Italie, requête n° 64886/01, § 86 ; CEDH, 8 juin 2006, Sürmeli c. Allemagne, requête n° 75529/01, § 99 29

CEDH, 29 mars 2006, Cocchiarella c. Italie, requête n° 64886/01, § 74 ; CEDH, 8 juin 2006, Sürmeli c. Allemagne, requête n° 75529/01, § 100 30

Recommandation CM/Rec (2010)3 du Comité des ministres aux Etats membres sur des recours effectifs face à la durée excessive des procédures adoptée le 24 février 2010. Voir aussi le guide des bonnes pratiques qui accompagne la recommandation.

En outre, la Cour EDH a validé le système français d'indemnisation, fondé sur l'article L.141-1 du COJ31 32. Le guide des bonnes pratiques adossé à la recommandation du comité des ministres aux Etats membres précitée indique d'ailleurs à propos des recours juridictionnels indemnitaires français, judiciaire et administratif, que « la Cour de Strasbourg les considère comme effectifs »33. - Il peut d'ailleurs être remarqué qu'en matière administrative, par sa décision d'assemblée plénière du 28 juin 2002, Magiera, le Conseil d'Etat a consacré, sur le fondement, d'une part, des articles 6 §1 et 13 de la Conv EDH et, d'autre part, « des principes généraux qui gouvernent le fonctionnement des juridictions administratives », le droit des justiciables « à ce que leurs requêtes soient jugées dans un délai raisonnable» et ouvert un recours indemnitaire « causé par le fonctionnement défectueux du service public de la justice » (faute simple), précisant que « la méconnaissance de cette obligation est sans incidence sur la validité de la décision juridictionnelle prise à l'issue de la procédure ». Il est intéressant de relever qu'un commentateur34 de cette décision indique, lui aussi, relativement à la sanction choisie au dépassement du délai raisonnable que cette solution s'expliquerait par le fait que « Le délai irraisonnable est un délai anormal sans pour autant être totalement illégal. À tout le moins, le délai de jugement est inconventionnel en ce qu'il viole la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme. Lorsque le juge constate une violation du délai raisonnable de jugement, il l'attribue à un dysfonctionnement de la justice administrative. Cette dernière, quelle que soit sa régularité, a excédé le temps considéré comme raisonnable pour trancher le litige dont elle devait connaître. Pour autant, le dysfonctionnement ne peut être rapproché d'une quelconque illégalité substantielle. Il s'agit davantage d'une irrégularité formelle, liée aux juridictions ou à la justice administrative en général. Le Conseil d'État intervient en tant que régulateur ex post du contentieux et doit se contenter de réparer les dommages causés par la lenteur éventuelle de la justice administrative. Il n'existe pas ici de faute grave du juge, telle son impartialité ou une erreur matérielle, pouvant influencer le raisonnement juridique lui-même ».

31

Article L. 141-1 du COJ : « L'Etat est tenu de réparer le dommage causé par le fonctionnement défectueux du service public de la justice. Sauf dispositions particulières, cette responsabilité n'est engagée que par une faute lourde ou par un déni de justice. » 32

CEDH, 12 juin 2001, décision sur la recevabilité, Guimmarra, requête n° 61166/00 ; CEDH, 9 juillet 2002, Nouhaud et autres c/ France, requête n° 33424/96 ; CEDH, 11 septembre 2002, décision sur la recevabilité, Mifsud, requête n° 57220/00 ; elle avait dans un premier temps estimé que le recours n'était pas effectif en raison des conditions d'ouverture très strictes de l'article L. 781-1 du COJ, devenu L. 141-1 du COJ (CEDH, 20 février 1991, affaire Vernillo c/ France, requête n° 11889/85) mais le recours a fait l'objet d'un usage de plus en plus fréquent, les juridictions appliquant cette disposition en se référant à l'article 6 §1 de la CEDH et il peut être relevé que la Cour de cassation a adopté une définition plus large de la notion de faute lourde, condition à l'indemnisation (Ass. plén., 23 février 2001, pourvoi n° 99-16.165). 33

Guide des bonnes pratiques accompagnant la recommandation CM/Rec (2010)3 du Comité des ministres aux Etats membres sur des recours affectifs face à la durée excessive des procédures adoptée le 24 février 2010, p. 21 34

M. Mezaguer, docteur en droit, « L'appréciation du délai raisonnable de jugement par le Conseil d'État : la mise en lumière d'un principe structurant du contentieux administratif », Droit administratif, n° 7, 2014, étude 13

Le Conseil d'Etat et la Cour de cassation adoptent ainsi une position commune, validée par la Cour EDH. - La question peut alors se poser de savoir s'il peut être fait appel, comme l'a fait le tribunal correctionnel de Nanterre, à la Constitution et, plus spécialement, à l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen (DDHC) pour imposer une sanction effective qui ne pourrait consister en un recours indemnitaire mais devrait résider en une sanction procédurale tel un recours en annulation. Pour fonder son jugement, le tribunal correctionnel de Nanterre cite deux décisions du Conseil constitutionnel. L'une déclare inconstitutionnelle, sur le fondement de l'article 16 de la DDHC, l'article 308 du code de procédure pénale prévoyant que les débats de la cour d'assises font l'objet d'un enregistrement sonore sous le contrôle du président de cette cour au motif qu'est interdite toute forme de recours en annulation en cas d'inobservation de cette formalité35. L'autre considère que « l'impossibilité d'exercer une voie de recours devant la chambre de l'instruction ou toute autre juridiction en l'absence de tout délai déterminé imparti au juge d'instruction pour statuer conduit à ce que la procédure applicable méconnaisse les exigences découlant de l'article 16 de la Déclaration de 1789 et prive de garanties légales la protection constitutionnelle du droit de propriété »36 (demande de restitution). Il ressort de la lecture de ces décisions, et plus largement de la jurisprudence du Conseil constitutionnel, que celui-ci attache, sur le fondement de l'article 16 de la DDHC, une grande importance à la possibilité d'exercer un recours juridictionnel effectif pour garantir les droits accordés. Cependant, il peut tout d'abord être relevé que le Conseil constitutionnel n'a jamais consacré en tant que tel le droit à être jugé dans un délai raisonnable, même s'il fait une utilisation du terme37. 35

C. cst, 20 novembre 2015, décision n° 2015-499 QPC : « sont garantis par cette disposition le droit des personnes intéressées à exercer un recours juridictionnel effectif ainsi que le respect des droits de la défense qui implique le droit à une procédure juste et équitable.» 36 37

C. cst, 16 octobre 2015, décision n° 2015-494 QPC

Cf : - le rapport de Mme Gouanvic sur Crim., 15 juin 2021, pourvoi n° 21-80.496 : « Le droit à être jugé dans un délai raisonnable n'est pas reconnu en tant tel que par les textes constitutionnels. Le Conseil constitutionnel a reconnu l'exigence de délais raisonnables sans la rattacher à un principe constitutionnel particulier. » - « Quel regard sur la jurisprudence du Conseil constitutionnel sur le procès équitable », Patrice Spinosi, Les nouveaux cahiers du Conseil constitutionnel, n°44, juin 2014, p. 31 : « Si le domaine d'application de la notion de procès équitable est plus large en droit constitutionnel qu'en droit conventionnel, à l'inverse, certaines garanties qui sont consacrées par la jurisprudence de la Cour européenne ne l'ont toujours pas été par le Conseil constitutionnel. Ainsi, le droit à être jugé dans un délai raisonnable n'a jamais fait l'objet, ne serait-ce que partiellement, d'une quelconque consécration constitutionnelle », - « Précisions sur le droit constitutionnel au procès équitable. A propos de la décision du Conseil constitutionnel 2010-10 QPC du 2 juillet 2010 Consorts C. et A. », Damien Fallon, RFDC, n° 86, 2011/2, p. 271 : « si les sages du Palais royal veillent généralement à ce que les mesures susceptibles de porter atteinte à la liberté individuelle soient placées « sous le contrôle et l'intervention dans le plus court délai possible du juge », il n'a jamais fait usage d'un droit constitutionnel au délai raisonnable de jugement pour censurer une loi venant alourdir ou allonger inutilement la procédure ».

Surtout, il n'est pas évident de déduire du droit au recours effectif l'obligation de sanctionner procéduralement, par un recours en annulation, le dépassement du délai raisonnable de traitement des procédures. Sur ce fondement, il serait tout autant possible d'estimer - à considérer que le recours indemnitaire ne soit pas suffisant - qu'un recours préventif, plus efficient et moins radical qu'un recours en annulation, doive être mis en place. Toutefois, dans ses analyses, « le Conseil s'attache, en premier lieu, à vérifier qu'un (...) recours existe. (...) en l'absence de recours spécifique, il apprécie, en second lieu, si une autre voie de recours est de nature à permettre à la personne en cause d'obtenir des effets équivalents. »38 Or, en l'occurrence, il ne peut qu'être relevé que le code de procédure pénal contient de nombreuses dispositions qui permettent aux mis en cause d'agir sur le délai des procédures : - article 706-105 : « Lorsque, au cours de l'enquête, il a été fait application des dispositions des articles 706-80 à 706-95, la personne ayant été placée en garde à vue six mois auparavant et qui n'a pas fait l'objet de poursuites peut interroger le procureur de la République dans le ressort duquel la garde à vue s'est déroulée sur la suite donnée ou susceptible d'être donnée à l'enquête. » - article 116, alinéa 9 : « S'il estime que le délai prévisible d'achèvement de l'information est inférieur à un an en matière correctionnelle ou à dix-huit mois en matière criminelle, le juge d'instruction donne connaissance de ce délai prévisible à la personne et l'avise qu'à l'expiration dudit délai, elle pourra demander la clôture de la procédure en application des dispositions de l'article 175-1. Dans le cas contraire, il indique à la personne qu'elle pourra demander, en application de ce même article, la clôture de la procédure à l'expiration d'un délai d'un an en matière correctionnelle ou de dix-huit mois en matière criminelle. » - article 175-1 : « La personne mise en examen, le témoin assisté ou la partie civile peut, à l'expiration du délai qui lui a été indiqué en application du neuvième alinéa de l'article 116 ou du deuxième alinéa de l'article 89-1 à compter, respectivement, de la date de la mise en examen, de la première audition ou de la constitution de partie civile, demander au juge d'instruction, selon les modalités prévues au dixième alinéa de l'article 81, de prononcer le renvoi ou la mise en accusation devant la juridiction de jugement ou de déclarer qu'il n'y a pas lieu à suivre, y compris en procédant, le cas échéant, à une disjonction. Cette demande peut également être formée lorsque aucun acte d'instruction n'a été accompli pendant un délai de quatre mois. » - article 221-2 : « Lorsqu'un délai de quatre mois s'est écoulé depuis la date du dernier acte d'instruction, les parties peuvent saisir la chambre de l'instruction dans les conditions prévues par le troisième alinéa de l'article 173. Ce délai est ramené à deux mois au profit de la personne mise en examen lorsque celle-ci est placée en détention provisoire. » 38

Commentaire de la décision du Conseil constitutionnel du 16 avril 2021 n° 2021-898 QPC

- article 221-3 : « I.-Lorsqu'un délai de trois mois s'est écoulé depuis le placement en détention provisoire de la personne mise en examen, que cette détention est toujours en cours et que l'avis de fin d'information prévu par l'article 175 n'a pas été délivré, le président de la chambre de l'instruction peut, d'office ou à la demande du ministère public ou de la personne mise en examen, décider de saisir cette juridiction afin que celle-ci examine l'ensemble de la procédure. En cas de demande du ministère public ou d'une partie, il statue dans les huit jours de la réception de cette demande. (...) II.-La chambre de l'instruction, après avoir le cas échéant statué sur ces demandes, peut : 1° Ordonner la mise en liberté, assortie ou non du contrôle judiciaire, d'une ou plusieurs des personnes mises en examen, même en l'absence de demande en ce sens ; 2° Prononcer la nullité d'un ou plusieurs actes dans les conditions prévues par l'article 206 ; 3° Evoquer et procéder dans les conditions prévues par les articles 201,202,204 et 205 ; 4° Procéder à une évocation partielle du dossier en ne procédant qu'à certains actes avant de renvoyer le dossier au juge d'instruction ; 5° Renvoyer le dossier au juge d'instruction afin de poursuivre l'information, en lui prescrivant le cas échéant de procéder à un ou plusieurs actes autres que ceux relatifs à la détention provisoire ou au contrôle judiciaire, dans un délai qu'elle détermine ; 6° Désigner un ou plusieurs autres juges d'instruction pour suivre la procédure avec le juge ou les juges d'instruction déjà saisis, conformément à l'article 83-1 ; 7° Lorsque cette décision est indispensable à la manifestation de la vérité et à la bonne administration de la justice et qu'il n'est pas possible de procéder aux désignations prévues au 6°, procéder au dessaisissement du juge d'instruction et à la désignation, aux fins de poursuite de la procédure, d'un ou plusieurs juges d'instruction de la juridiction d'origine ou d'une autre juridiction du ressort ; 8° Ordonner le règlement, y compris partiel, de la procédure, notamment en prononçant un ou plusieurs non-lieux à l'égard d'une ou plusieurs personnes. L'arrêt de la chambre de l'instruction doit être rendu au plus tard trois mois après la saisine par le président, à défaut de quoi les personnes placées en détention sont remises en liberté. Six mois après que l'arrêt est devenu définitif, si une détention provisoire est toujours en cours, et sauf si l'avis de fin d'information prévu par l'article 175 a été délivré, le président de la chambre de l'instruction peut à nouveau saisir cette juridiction dans les conditions prévues par le présent article. » Il apparaît ainsi que les principes constitutionnels ne conduisent pas à imposer l'exigence d'une sanction procédurale au dépassement du délai raisonnable des procédures qui tiendrait en un recours en annulation, pas plus d'ailleurs que la mise en place d'un système de recours préventif. A ce propos, il doit être rappelé que la Cour EDH n'exige pas l'existence d'un recours préventif en matière de dépassement du délai raisonnable à la différence de sa position en matière de conditions indignes de détention 39 qui avait conduit votre chambre à précéder le législateur en la matière. 39

CEDH, 30 janvier 2020, affaire J.M.B. et autres c. France, requête n° 9671/12 et 31 autres

∙ Enfin, il peut être relevé, à l'instar de la Cour constitutionnelle tchèque qui a eu à se prononcer sur la question de savoir si l'abandon des poursuites peut être considéré comme une compensation suffisante du préjudice moral causé par la durée disproportionnée des poursuites, qu'en cas d'abandon de la procédure pénale justifié par la durée de la procédure, le niveau de réparation ne serait pas suffisant dans la mesure où il ne serait pas statué sur la culpabilité des personnes poursuivies, qui auraient éventuellement pu bénéficier d'une décision bien plus favorable consistant en un acquittement40. Il ne doit pas non plus être oublié que le passage du temps sera nécessairement pris en considération, en cas de culpabilité, dans le prononcé de la peine, comme il l'aura été relativement aux éléments de preuve, le juge devant apprécier la valeur des preuves qui lui sont soumises sur le fondement de l'article 427 du code de procédure pénale. Il doit encore être souligné que sanctionner le dépassement du délai raisonnable par la nullité des procédures, des poursuites ou par une extinction des poursuites ferait bien peu de cas des parties civiles. Enfin, ne peuvent être écartées les différentes règles qui ne permettraient pas, ou seulement sous certaines conditions, aux juridictions de sanctionner procéduralement le dépassement du délai raisonnable de traitement des procédures à savoir : - s'agissant d'une affaire prise sur ordonnance de renvoi du juge d'instruction, la purge des nullités, - l'impossibilité de relever d'office les nullités même substantielles et d'ordre public. Au regard de l'ensemble de ces éléments, le dépassement du délai raisonnable de traitement des procédures ne paraît donc pas pouvoir être sanctionné procéduralement par une nullité, pas plus d'ailleurs que par une extinction des poursuites. La cour d'appel de Versailles ne pouvait dès lors annuler une partie des poursuites dont elle était saisie en relevant le dépassement du délai raisonnable de traitement de la procédure, pas plus en subordonnant cette annulation à une « atteinte irrémédiable » aux autres principes du procès équitable pour les raisons précédemment exposées. Compte tenu des éléments ainsi développés, l'arrêt déféré devrait donc faire l'objet de votre censure. 40

Arrêt du 26 septembre 2017, I. ÚS 741/17, § 30 https://www.usoud.cz/fileadmin/user_upload/Tiskova_mluvci/Publikovane_nalezy/2017/I._US_741_17_an.pdf

PROPOSITION : Cassation

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