Jurisprudence : TA Bordeaux, du 23-11-2023, n° 2100123


Références

Tribunal Administratif de Bordeaux

N° 2100123

4ème chambre
lecture du 23 novembre 2023
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 11 janvier 2021 et les 5 et 26 mai 2023, M. A B demande au tribunal, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler la décision implicite de rejet née le 7 décembre 2020 du silence gardé par le président de Bordeaux Métropole sur sa demande tendant au versement à compter du 16 mars 2020 des indemnités compensatrices de repas ;

2°) d'enjoindre à Bordeaux Métropole de lui verser les indemnités compensatrices de repas dues en application du protocole du 20 septembre 2018 à compter du 16 mars 2020 ;

3°) de mettre à la charge de Bordeaux Métropole une somme de 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛.

Il soutient que :

- par délibération n° 2015-824 du 18 décembre 2015, Bordeaux Métropole a décidé de maintenir l'indemnité compensatrice de repas, et la délibération du 23 décembre 2016 relative au télétravail à Bordeaux Métropole adopte une charte du télétravail, qui dispose dans son article 15 que le télétravailleur " peut prétendre au versement de l'indemnité de panier pour les jours télétravaillés " ;

- il a signé un protocole de télétravail, et aucune décision d'en suspendre l'application n'a été prise par Bordeaux Métropole ;

- Bordeaux Métropole n'établit pas qu'à compter du 16 mars 2020, le télétravail aurait été remplacé par le " travail à distance ".

Par des mémoires en défense, enregistrés le 12 avril 2023 et le 4 juillet 2023, Bordeaux Métropole, représentée par Me Dacquin, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge de M. B au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative

Elle fait valoir que les moyens soulevés par M. B ne sont pas fondés.

M. B a présenté une note en délibéré, enregistrée le 9 novembre 2023.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984🏛 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

- la loi n° 2020-856 du 9 juillet 2020🏛 organisant la sortie de l'état d'urgence sanitaire ;

- la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012🏛 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique ;

- le décret n° 2020-524 du 5 mai 2020🏛 modifiant le décret n° 2016-151 du 11 février 2016🏛 relatif aux conditions et modalités de mise en œuvre du télétravail dans la fonction publique et la magistrature ;

- le décret n°2016-151 du 11 février 2016 relatif aux conditions et modalités de mise en œuvre du télétravail dans la fonction publique et la magistrature ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Munoz-Pauziès, présidente-rapporteur ;

- les conclusions de M. Bongrain, rapporteur public ;

- et les observations de M. B, requérant et de Me Dacquin, représentant Bordeaux Métropole.

Considérant ce qui suit :

1. M. A B, ingénieur territorial, exerce ses fonctions au sein des services informatiques de Bordeaux Métropole depuis 2007. Il a conclu le 2 septembre 2018 avec son employeur un protocole individuel d'exercice du télétravail l'autorisant à télé-travailler pendant trois jours par semaine et percevait pour ces trois jours une indemnité compensatrice de repas d'un montant de 3,30 euros. A compter du 16 mars 2020, dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire, il a été placé en télétravail à temps complet, avant de reprendre le télétravail au rythme de trois jours par semaine à compter du 11 mai 2020. Toutefois, l'indemnité compensatrice de repas a cessé de lui être versée à compter du 16 mars 2020, et le versement n'a pas repris à la fin du confinement.

2. Par courrier du 6 octobre 2020 réceptionné le 7 octobre suivant, M. B a sollicité le versement à compter du 16 mars 2020 des indemnités compensatrices de repas. M. B demande au tribunal d'annuler la décision implicite de rejet née le 7 décembre 2020 du silence gardé par le président de Bordeaux Métropole sur cette demande.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

3. D'une part, la délibération du conseil de Bordeaux Métropole n° 2015-824 du 18 décembre 2015, dans son chapitre IV intitulé " Maintien de certaines primes versées au titre des avantages collectivement acquis conformément à l'article 111 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée🏛 ", prévoit qu'" une indemnité compensatrice de repas d'un montant de 3,30 euros par repas est donnée aux agents qui ne bénéficient pas de possibilités de restauration sur place ou qui ne peuvent pas avoir accès à l'offre de restauration proposée par la métropole et dont le cycle de travail se termine au plus tôt à 14 heures. Dans les cas où la métropole a passé une convention avec un organisme de restauration l'agent a le choix suivant : / - Renoncer à l'indemnité compensatrice de repas et déjeuner à prix subventionné au restaurant conventionné. / - Disposer de l'indemnité compensatrice de repas et se restaurer par ses propres moyens. () ".

4. D'autre part, aux termes de l'article 133 alors en vigueur de la loi du 12 mars 2012🏛 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique : " Les fonctionnaires relevant de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983🏛 portant droits et obligations des fonctionnaires peuvent exercer leurs fonctions dans le cadre du télétravail tel qu'il est défini au premier alinéa de l'article L. 1222-9 du code du travail🏛. L'exercice des fonctions en télétravail est accordé à la demande du fonctionnaire et après accord du chef de service. Il peut y être mis fin à tout moment, sous réserve d'un délai de prévenance. Les fonctionnaires télétravailleurs bénéficient des droits prévus par la législation et la réglementation applicables aux agents exerçant leurs fonctions dans les locaux de leur employeur public. / Le présent article est applicable aux agents publics non fonctionnaires et aux magistrats. ". Aux termes de l'article 5 du décret susvisé du 11 février 2016 : " L'exercice des fonctions en télétravail est accordé sur demande écrite de l'agent. Celle-ci précise les modalités d'organisation souhaitées. () ". La délibération n° 2016-766 du conseil de Bordeaux Métropole du 16 décembre 2016 définit le cadre juridique du télétravail et précise notamment qu'il est soumis au " double volontariat de l'agent et de son encadrant ". Par ailleurs, cette délibération approuve la charte du télétravail à Bordeaux Métropole, qui précise en préambule : " Les conditions générales du dispositif sont définies au sein de la présente charte. / Ce document de cadrage doit être complété par le protocole individuel que chaque agent télétravailleur signera avec son encadrant direct. " S'agissant de l'indemnité compensatrice de repas, l'article 15 de ladite charte précise que le télétravailleur " peut prétendre au versement de l'indemnité de panier pour les jours télé travaillés. "

En ce qui concerne le droit à percevoir l'indemnité compensatrice de repas pendant la crise sanitaire :

5. La situation des agents de Bordeaux Métropole, contraints de travailler depuis leur domicile plusieurs jours par semaine à compter du 16 mars 2020 en raison des conditions sanitaires, ne résulte pas d'une volonté commune de ces agents et de la Métropole, matérialisée par une demande des agents et un accord de la Métropole. Dans ces conditions, la délibération précitée du 16 décembre 2016, qui a vocation à régir exclusivement les agents de Bordeaux Métropole ayant présenté une demande écrite de télétravail acceptée par leur employeur, ne leur est pas applicable. Par suite, M. B ne peut en tout état de cause se fonder sur cette délibération pour obtenir le paiement pendant la période de confinement de l'indemnité compensatrice de repas.

En ce qui concerne le droit de percevoir l'indemnité compensatrice de repas pendant les jours de télétravail :

6. La délibération du 23 décembre 2015, dont les termes sont rappelés au point 3 du présent jugement, réserve le versement de l'indemnité compensatrice de repas " aux agents qui bénéficient pas de possibilités de restauration sur place ou qui ne peuvent pas avoir accès à l'offre de restauration proposée par la métropole et dont le cycle de travail se termine au plus tôt à 14 heures. " Elle n'a ainsi pas vocation à s'appliquer aux agents qui exercent leurs fonctions depuis leur domicile, dès lors que ces derniers bénéficient de la possibilité de se restaurer chez eux.

7. M. B fait valoir qu'il est signataire d'un protocole individuel d'exercice du télétravail, et que la délibération n° 2016-766 du conseil de Bordeaux Métropole du 16 décembre 2016 approuve la charte du télétravail à Bordeaux Métropole, laquelle prévoit dans son article 15 que le télétravailleur " peut prétendre au versement de l'indemnité de panier pour les jours télé travaillés. " Toutefois, et alors que cet article 15 ne prévoit que la possibilité pour le télétravailleur de prétendre au versement de l'indemnité litigieuse, cette même charte précise qu'elle n'est qu'un document de cadrage qui " doit être complété par le protocole individuel que chaque agent télétravailleur signera avec son encadrant direct ". Or, le protocole conclu le 20 septembre 2018 entre le requérant et son supérieur hiérarchique ne prévoit pas le versement de l'indemnité compensatrice de repas.

8. Il résulte de ce qui précède que M. B, qui n'a pas droit au versement de l'indemnité compensatrice de repas, n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision implicite de rejet née le 7 décembre 2020 du silence gardé par le président de Bordeaux Métropole sur sa demande tendant au versement de cette indemnité à compter du 16 mars 2020.

Sur le surplus des conclusions de la requête :

9. Le présent jugement n'appelle aucune mesure d'exécution, et les conclusions à fin d'injonction présentées par M. B doivent être rejetées.

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Bordeaux Métropole, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme de M. B demande au titre des frais de l'instance. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées sur ce fondement par Bordeaux Métropole.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de Bordeaux Métropole tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent jugement sera notifié à M. A B et à Bordeaux Métropole.

Délibéré après l'audience du 9 novembre 2023, à laquelle siégeaient :

Mme Munoz-Pauziès, présidente,

M. Bilate, premier conseiller,

M. Bourdarie, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 novembre 2023.

La présidente-rapporteure,

F. MUNOZ-PAUZIÈS

L'assesseur le plus ancien dans l'ordre du tableau,

X. BILATE

La présidente-rapp

L'assesseur le plus ancien dans l'ordre du tableau,

La présidente-rapporteure,

F. MUNOZ-PAUZIÈS

L'assesseur le plus ancien dans l'ordre du tableau,

La greffière,

C. POTTIER

La République mande et ordonne au préfet de la Gironde ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

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