COUR DE CASSATION
Chambre commerciale
26 avril 1963.
Cassation.
Pourvoi n° 59-10.395.
Société à responsabilité limitée " Les Sorbiers "
c/
dame Fournés-Bert.
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Sur le premier moyen
Vu l'article 45 de la loi du 6 août 1953
Attendu qu'aux fermes de ce texte, il est interdit à tout magistrat de rappeler ou de laisser subsister soirs quelque forme que ce soit dans un dossier judiciaire nu de police ou dans un document quelconque. les condamnations, les peines disciplinaires et déchéances effacées par l'amnistie ;
Attendu que pour refuser à la dame Gilabert et à son ayant droit la société " Les Sorbiers " le renouvellement d'un bail du 27 septembre 1937 dont la première était devenue cessionnaire en vertu d'un acte du 12 novembre 1948, la Cour d'appel relève la réputation défavorable de l'intéressée en faisant état " d'une procédure pénale suivie contre la dame Gilabert sous la prévention de tenue de maison de débauche... clôturée par arrêt définitif de la Cour de céans du 15 janvier 1948 portant condamnation à deux mois d'emprisonnement avec sursis et 6.000 francs d'amende ";
Attendu qu'en rappelant ainsi ladite condamnation, tout en constatant "qu'elle a été prononcée avec bénéfice immédiat de l'amnistie accordée par l'article 12 de la loi du 11 août 1947 ", la Cour d'appel a violé le texte ci-dessus visé ;
Et sur le troisième moyen
Vu l'article 9 du décret du 30 septembre 1953
Attendu que la Cour d'appel a refusé à la dame Gilabert et à son avant droit la société " Les Sorbiers" l'indemnité d'éviction qu'elles réclamaient en énonçant, d'une part, "que si après l'expertise pratiquée en première instance, dame Gilabert n'a pas après son acquisition du fonds de commerce d'hôtel-restaurant, toléré des faits de débauche dans son établissement, la dame Fournès-Bert n'en est pas moins fondée à étendre ses griefs à toute la période de temps écoulée depuis la prise d'effet du bail écrit conclu pour neuf années à compter du 1er septembre 1937 puisqu'aussi bien en vertu de cet acte écrit comme aussi d'ailleurs du droit commun du Code civil, les cessionnaires successifs d'un bail sont responsables de l'exécution de leurs obligations et de celles des cédants "; qu'elle relève, d'antre part, en ce qui concerne diverses modifications matérielles apportées aux lieux "que si les changements sont le fait des précédents locataires, ses cédants, elle ne reste pas moins responsable de cette nouvelle infraction aux clauses du bail, sauf pour elle à rapporter la preuve d'une autorisation écrite de la bailleresse, ce qu'elle ne fait pas "
Attendu qu'en se décidant par de tels motifs, alors que l'article 9 du décret du 30 septembre 1953 ne permet au bailleur de relever comme motifs graves et légitimes de refus de renouvellement que des faits imputables an locataire sortant lui-même, et tans préciser quelle clause du bail cédé à la dame Gilabert permettrait de lui imputer comme motifs graves et légitimes de refus de renouvellement de celui-ci des actes accomplis par son auteur; l'arrêt attaqué n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le deuxième moyen du pourvoi
Casse et annule l'arrêt rendu le 4 novembre 1958, par la Cour d'Appel de Toulouse remet en conséquence la cause et les parties au même et semblable état où elles étaient avant ledit arrêt et pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel d'Agen.
Premier président M. Battestini. - Rapporteur M. .... Avocat général M.. Corne. - Avocat général MM. Nicolay et ....