Jurisprudence : CA Basse-Terre, 20-10-2023, n° 23/00892, Infirmation


ARRET N° 457


R.G : N° RG 23/00892 - N° Portalis DBV7-V-B7H-DTJZ


PROCUREUR GENENAL DE LA COUR D'APPEL DE [Localité 6]


C/


[K] [X]


CONSEIL DE L'ORDRE DES AVOCATS DU BARREAU DE LA GUADELOUPE, A & SAINT-BARTHELEMY


[R] [F], BATONNIER DE L'ORDRE DES AVOCATS


COUR D'APPELDE [Localité 6]


AUDIENCE SOLENNELLE


ARRET DU 20 OCTOBRE 2023



APPELANT :


LE PROCUREUR GENENAL PRES LA COUR D'APPEL DE [Localité 6]

Palais de Justice

[Adresse 5]

[Localité 6]


Comparant en personne,


INTIME :


Maître Charles NICOLAS

[Adresse 4]

[Localité 7]

présent


Assisté de :


Me [G], avocat au barreau de Fort-de-France,ancien bâtonnier

Me Marie Pompéi CULLIN, avocate aux barreaux de Rouen et Paris,

Me Roland EZELIN, ancien bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de la Guadeloupe/St Martin/St Barthélémy, membre de la SELARL CABINET ROLAND EZELIN, avocat au barreau de GUADELOUPE/ST B C (TOQUE 96)

Me Christian CHARRIERE-BOURNAZEL, ancien bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Paris, avocat au barreau de Paris,

Me Jean GONTIER, avocat au barreau de Bordeaux, absent lors des débats


EN PRESENCE DE :


- LE CONSEIL DE L'ORDRE DES AVOCATS DU BARREAU DE LA GUADELOUPE, A & SAINT-BARTHELEMY

[Adresse 1]

[Localité 7]


Représenté par Me Josselin TROUPE, avocat au barreau de GUADELOUPE/ST B C (TOQUE 87), bâtonnier en exercice,


- Maître [R] [F], ès qualités de bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de la Guadeloupe/Saint Martin/St Barthélémy

[Adresse 2]

[Localité 7]


Comparant en personne,


DECISION ATTAQUEE : délibération du conseil de l'ordre des avocats du barreau de la Guadeloupe/St Martin/St Barthélémy en date du 21 août 2023.



COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :


L'affaire a été débattue le 29 septembre 2023, conformément aux dispositions de l'article R. 312-9 du code de l'organisation judiciaire🏛, devant la cour réunie en audience solennelle et composée de :


M. Frank ROBAIL, président de chambre, délégué aux fonctions de président de l'audience solennelle par le premier président empêché,

Mme Judith DELTOUR, présidente de chambre, présidente de la première chambre civile,

Mme Rozenn LE GOFF, conseillère faisant fonction de présidente de la chambre sociale,

Mme Annabelle CLEDAT, conseillère,

M. Thomas Habu GROUD, conseiller.


GREFFIER LORS DES DEBATS ET DU PRONONCE :


Mme Yolande MODESTE, greffière.


DEBATS :


L'affaire a été débattue le 29 septembre 2023, en audience publique à la demande expresse de Me [K] [X] en application de l'article 16 al 4 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat.


ARRET :


- Contradictoire, prononcé ce jour en chambre du conseil, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du code de procédure civile.


- Signé par M. Frank ROBAIL, président de chambre délégué par le premier président et par Mme Yolande MODESTE, greffière, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.


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EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE


Monsieur [K] [X] est né le [Date naissance 3] 1967 à [Localité 6] et a prêté le serment des avocats devant cette cour en 1993 ; il exerce dans le cadre de la SELARL [X]/[W], en association avec son épouse, Me [W] ;


Il a été mis en examen le 8 février 2023 par le magistrat instructeur de la 'JIRS' du tribunal judiciaire de FORT-DE-FRANCE des chefs d'abus de confiance commis au préjudice d'une personne vulnérable, de blanchiment aggravé, d'escroquerie ;


Sur décision du juge d'instruction en même date, il a été placé sous contrôle judiciaire avec les obligations suivantes :


- interdiction de quitter le territoire national sauf autorisation du juge d'instruction ou de la juridiction de jugement en cas de renvoi devant celle-ci,

- répondre aux convocations du juge d'instruction,

- s'abstenir de recevoir ou de rencontrer ou d'entrer en contact de quelque façon que ce soit avec les témoins, victimes, experts judiciaires médicaux et les médecins conseils de la SELARL [X]/[W],

- interdiction de se livrer à l'activité professionnelle d'avocat, avec cette précision que, 'afin de garantir l'effectivité de cette interdiction, le conseil de l'ordre des avocats de Guadeloupe sera saisi, afin de statuer dans les 15 jours de sa saisine, en tant qu'organe disciplinaire et à charge d'appel, dans les conditions des articles 23 et 24 de la loi du 31 décembre 1971🏛🏛" ;


Un cautionnement avait été ordonné dans les motifs de la décision du juge d'instruction, qui n'a pas été fixé en son quantum et a été omis du dispositif de l'ordonnance de contrôle judiciaire ;


Par arrêt du 28 mars 2023, sur appel de Me NICOLAS, la chambre de l'instruction de la cour d'appel de FORT-DE-FRANCE a confirmé l'ordonnance de contrôle judiciaire du 8 février 2023 et dit n'y avoir lieu à cautionnement ;


Par ordonnance du 9 février 2023, le juge d'instruction a saisi le conseil de l'ordre des avocats du barreau de Guadeloupe, Saint-Martin et Saint-Barthélemy aux fins de voir prononcer l'interdiction de l'activité de Maître [K] [X] sur le fondement des dispositions de l'article 138 alinéa 2 12° du code de procédure pénale🏛 ;


Par délibération du 24 février 2023, le conseil de l'ordre a décidé de rejeter les moyens de nullité soulevés par Me [X], de ne pas surseoir à statuer et de prononcer la suspension provisoire du sus-nommé de ses fonctions d'avocat pour une durée de six mois à compter de la notification de sa décision ;


Pour statuer ainsi, il a retenu :


- que sa saisine par lettre recommandée du 17 février 2023 était régulière, tout comme la communication des pièces par le juge d'instruction, de sorte que le conseil se trouvait valablement saisi,


- que 'la nature des faits, la gravité des infractions visées, l'ampleur présumée du préjudice et l'émoi provoqué en Guadeloupe et ailleurs appelaient à une décision immédiate', justifiant le rejet de la demande de sursis à statuer,


- et que 'les faits reprochés à Maître [K] [X] sont liés à l'exercice de son activité professionnelle d'avocat' et 'sont de nature à porter atteinte à la confiance que le public porte à la profession d'avocat', justifiant le prononcé de la suspension provisoire de l'activité d'Avocat de Maître [K] [X] pour une durée de six mois, 'en considération de la gravité des faits pour lesquels (il) est mis en examen, de la durée de la prévention, du nombre de victimes présumées', 'sans préjuger de l'issue de la procédure pénale' et en faisant rappel 'du principe impérieux de la présomption d'innocence'.


Me [K] [X] a relevé appel de cette décision, demandant son annulation et, en tout cas, son infirmation et, par arrêt du 25 avril 2023, la cour d'appel de [Localité 6], après débats en audience solennelle, a, au visa des articles R. 312-9 du code de l'organisation judiciaire et 138, alinéa 2, 12° du code de procédure pénale, de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971🏛 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, en particulier son article 24 et du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991🏛 organisant la profession d'avocat, en particulier ses articles 16 et 198 :

- déclaré recevable en la forme l'appel interjeté sur le fondement des dispositions de l'article 16 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991🏛 organisant la profession d'avocat,

- constaté que la defense de l'appelant a renoncé à ses demandes se rapportant à un sursis à statuer,

- débouté Me [K] [X] de ses demandes en nullité,

- confimé la décision du conseil de l'ordre déférée,

- condamné Me [K] [X] aux dépens,

- et dit que, conformément aux dispositions du 5ème alinéa de l'article 16 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991, cet arrêt serait notifié par le greffe par lettre recommandée avec demande d'avis de réception au procureur général, au bâtonnier et à l'intéressé.

Cet arrêt a fait l'objet d'un pourvoi en cassation non à ce jour tranché.


***

Par ordonnance du 7 août 2023, le magistrat instructeur de la JIRS de [Localité 8] a saisi le conseil de l'ordre des avocats du barreau de BASSE-TERRE, A et SAINT-BARTHELEMY 'aux fins qu'il soit statué sous 15 jours et de voir prononc(er) la prolongation de l'interdiction d'exercer l'activité d'avocat de Me [K] [X]';

Par délibération du 21 août 2023, ledit conseil a déclaré recevable sa saisine par le magistrat instructeur après que Me [X] eut renoncé à en soulever l'irrecevabilité, mais a rejeté la demande de renouvellement de sa suspension provisoire ;


Pour ce faire, ledit conseil :

- a rappelé :

** les dispositions de l'article 24 de la loi n° 70-1130 du 31 décembre 1971 aux termes duquel, lorsque l'urgence ou la protection du public l'exigent, le conseil de l'ordre peut, à la demande du procureur général ou du bâtonnier, suspendre provisoirement de ses fonctions l'avocat qui en relève lorsque ce dernier fait l'objet d'une poursuite pénale ou disciplinaire et ce, pour une durée de six mois, renouvelable une fois, ou au-delà de cette limite lorsque l'action publique a été engagée contre l'avocat à raison des faits qui fondent la suspension,

** et que la mesure de suspension provisoire, tout comme son renouvellement, est une mesure exceptiponnelle et provisoire qui exige l'existence de conditions alternatives, urgence et protection du public,

- a constaté que le juge d'instruction :

** reprend à l'identique les termes de sa première saisine du conseil sans caractériser la persistance des critères de l'urgence ou de la protection du public,

** ne lui a transmis aucune des pièces de fond actualisées depuis la première saisine, lui interdisant par là même d'apprécier la nécessité du renouvellement de la suspension provisoire,

- et a dit qu'il n'était pas davantage démontré que les autres obligations du contrôle judiciaire ne seraient pas suffisantes pour assurer la protection du public ;

Cette décision a été notifiée au procureur général près la cour de ce siège par courrier daté du 22 août 2023 et parvenu au greffe du parquet général le 24 août suivant ;


*

Par déclaration remise au greffe de cette cour le 5 septembre 2023, le procureur général a relevé appel de la décision du conseil de l'ordre, requérant, par un mémoire remis au greffe le 6 septembre 2023 :

- que son appel soit déclaré recevable,

- que la décision déférée soit infirmée en ce qu'elle a rejeté la demande de renouvellement de la suspention provisoire de Me [K] [X],

- et que la mesure de suspension soit renouvelée pour une durée de six mois supplémentaires ;


*

Les parties intéressées, en ce compris, en application de l'article 16 al 3 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 modifié par l'article 3 du décret n° 2022-1258 du 26 septembre 2022🏛, s'agissant d'une procédure qui n'est pas disciplinaire, le conseil de l'ordre des avocats au barreau de GUADELOUPE, SAINT-MARTIN et SAINT-BARTHELEMY, ont été invitées à comparaître à l'audience solennelle du vendredi 29 septembre 2023 à 14 heures par LRAR du 12 septembre 2023 ;


***

Le 27 septembre 2023, les conseils de Me [K] [X], savoir Me Philippe EDMOND-MARIETTE, avocat au barreau de la Martinique, Me Marie-Pompéi CULLIN, avocate au barreau de PARIS, Me Jean GONTHIER, avocat au barreau de BORDEAUX, Me Roland EZELIN, avocat au barreau de GUADELOUPE, SAINT-MARTIN et SAINT-BARTHELEMY, et Me Christian CHARRIERE BOURNAZEL, avocat au barreau de PARIS, ont remis au greffe des conclusions datées du même jour, avec copie à l'appelant ;


Par acte daté du 28 septembre 2023, mais remis au greffe le 29 suivant, le bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de GUADELOUPE, A et SAINT-BARTHELEMY a présenté des observations qui font rappel des conditions dans lesquelles il a été saisi par le magistrat instructeur d'une demande de prolongation de l'interdiction d'exercer à l'encontre de Me [X], des modalités de la procédure suivies devant lui et des motifs de sa décision de rejet ;

Ces observations sont accompagnées de 7 pièces, notamment, suivant bordereau joint, l'acte de saisine du juge d'instruction de la JIRS de FORT DE FRANCE du 7 août 2023 non communiqué par l'appelant;

Ces écritures ont fait l'objet d'un échange contradictoire entre les parties avant l'audience ;


***



Avant l'ouverture des débats à l'audience du 29 septembre 2023, le président a rappelé les termes de l'article 16 al 4 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 modifié, fondement procédural de l'appel interjeté à l'encontre de la décision déférée, selon lesquels :

- la cour d'appel statue en audience solennelle dans les conditions prévues à l'article R. 312-9 du code de l'organisation judiciaire et, par principe, en chambre du conseil, après avoir invité le bâtonnier à présenter ses observations,

- cependant, à la demande de l'intéressé, les débats se déroulent en audience publique et mention en est faite dans la décision ;

Interrogé par le président, Me [K] [X] a indiqué souhaiter que les débats se déroulassent en audience publique, ce qui fut immédiatement ordonné ;


***

Après ouverture des débats en audience publique, le président a été entendu en son rapport et Me NICOLAS a pu présenter ses premières observations sur la base de ce rapport ;

Le ministère public, en la personne de M. le procureur général, appelant, a été entendu en ses réquisitions ;

Le conseil de l'ordre, en la personne de M. le bâtonnier de l'ordre, a été entendu en ses observations ;

Chacun des cinq avocats de Me [X] a été entendu en sa plaidoirie ;

Me Charles NICOLAS a eu la parole en dernier ;


PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES


1°/ M. le procureur général, en son mémoire remis au greffe le 6 septembre 2023, souhaite voir :

- déclarer son appel recevable,

- infirmer la décision du conseil de l'ordre des avocats du barreau de GUADELOUPE, A et SAINT-BARTHELEMY en ce qu'elle a rejeté la demande de suspension provisoire de Me NICOLAS en sa qualité d'avocat,

- renouveler la mesure de suspension provisoire pour une durée de 6 mois supplémentaires ;

A ces fins, il soutient notamment :

- que lorsque, comme en l'espèce, la mesure de suspension provisoire d'un avocat a été prononcée, sur le fondement de l'article 138 al 2 12° du code de procédure pénale, dans le cadre du contrôle judiciaire ordonné par le magistrat instructeur qui a mis cet avocat en examen, seul ce magistrat, ou le juge des libertés et de la détention selon le cas, a compétence pour saisir le conseil de l'ordre aux fins de renouvellement d'une telle mesure,

- que c'est bien le juge d'instruction de la JIRS de [Localité 8] qui a en charge le dossier d'information concernant Me NICOLAS, qui a saisi le conseil de l'ordre des avocats du bareau de GUADELOUPE, [Localité 10] et [Localité 9] à ces fins,

- que la suspension provisoire d'un avocat n'est pas une sanction disciplinaire, mais une simple mesure de sûreté conservatoire qui ne viole en rien le principe de la présomption d'innocence et ne préjuge en rien des suites de la procédure pénale,

- que les conditions d'une telle suspension sont édictées par l'article 24 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, aux termes duquel lorsque l'urgence ou la protection du public l'exigent, le conseil de l'ordre peut, à la demande du procureur général ou du bâtonnier, suspendre provisoirement de ses fonctions l'avocat qui en relève lorsque ce dernier fait l'objet d'une poursuite pénale ou disciplinaire, et ce pour une durée qui ne peut excéder six mois, renouvelable une fois, ou au-delà de cette limite lorsque l'action publique a été engagée contre l'avocat à raison des faits qui fondent la suspension,

- qu'il en résulte que les deux critères sus-rappelés, celui de l'urgence et celui de la protection du public, sont alternatifs et non cumulatifs,

- mais qu'en toute hypothèse, s'il n'a pas été destinataire de l'ordonnance du juge d'instruction qui a saisi le conseil de l'ordre de la demande de renouvellement de la mesure de suspension et n'en connaît donc pas les motivations, l'analyse des pièces communiquées par l'ordre des avocats permet de déterminer que les deux critères de l'urgence et de la protection du public sont encore à ce jour caractérisés, qui justifient de reconduire la suspension de Me [X] de l'exercice de sa profession d'avocat;


2°/ Par ses écritures remises au greffe de la cour et au procureur général le 27 septembre 2023, Me [K] [X], par ses avocats, conclut à la confirmation de la décision de rejet du conseil de l'ordre et fait valoir pour l'essentiel à ces fins :

- qu'aucun élément matériel ne permet de caractériser l'urgence fixée par l'article 24 al 1 de la loi de 1971 comme l'une des deux conditions permettant la suspension d'un avocat de ses fonctions, sachant que l'enquête préliminaire le concernant est vieille de plus de 34 mois, la désignation du juge d'instruction, de près d'un an et demi et la perquisition qui a été faite chez lui, de bientôt une année,

- que la prévention vise des faits remontant à février 2014, à telle enseigne qu'un débat sur la prescription pourrait s'engager,

- que de toute façon, en son premier arrêt du 25 avril 2023, celui par lequel sa suspension par le conseil de l'ordre avait été confirmée, la cour relevait elle-même que l'urgence n'était pas caractérisée,

- et que la condition liée à la protection du public n'est pas davantage constituée dès lors que :

** au soutien de sa mise en examen, le magistrat instructeur fait une lecture inédite du délit d'abus de confiance en omettant que c'est le défaut de remise à première demande qui doit le caractériser et non le délai de cette remise qui est ici inopérant,

** l'action publique n'est pas soutenue ou accompagnée par ses clients en qualité de parties civiles, aucune plainte spontanée n'ayant été enregistrée et, sur les 297 clients entendus, moins d'une dizaine seulement ayant déposé plainte lorsque la question leur a été expressément posée,

** aucun avis à victime n'a été adressé par le juge d'instruction,

** depuis février 2023, aucune plainte ou doléance pour des faits qui seraient intervenus depuis sa mise en examen, n'est intervenue ;


***

A l'ouverture des débats, à l'audience du 29 septembre 2023, l'un des conseils de Me [X] a soulevé et fait acter par le greffe un moyen tiré de l'irrégularité de la composition la cour en son audience solennelle en ce que, hors le président de chambre délégué par le premier président pour la présider, seul un autre président de chambre et trois conseillers en étaient membres, alors même, selon lui, que les assesseurs auraient dû être légalement de deux présidents de chambre au moins et de deux conseillers au plus ;

Dans leurs plaidoiries, les conseils de Me [X] ont ensuite prétendu que la décision initiale de suspension de ce dernier prise par le conseil de l'ordre suivant délibération du 24 février 2023 était exécutoire de droit par provision et que, dès lors, pour avoir pris effet à cette date pour une durée de 6 mois, elle était à ce jour expirée; ils ont en outre développé oralement leurs conclusions du 27 septembre 2023 ;

Le bâtonnier de l'ordre, en son nom et au nom du conseil de l'ordre, entendu en ses observations, a estimé que la seule question que la cour devait se poser, tout comme le conseil de l'ordre l'avait fait en sa délibération querellée, avait trait au point de savoir si la suspension de Me [X] avait encore une utilité, tout en précisant que ledit conseil, par une décision qui n'a pas été unanime, a répondu par la négative et est le mieux placé, en tant qu'organe ordinal, pour répondre à cette question ; il a conclu sa plaidoirie en demandant à la cour de laisser cette instance ordinale régler les difficultés posées par la mise en examen de Me [X] au regard de l'exercice de ses fonctions d'avocat ;



MOTIFS DE LA DECISION


Attendu qu'aux termes de l'article 138 al 2 12° du code pénal en sa version applicable aux faits de l'espèce, lorsque, dans le cadre d'une instruction ouverte à l'encontre d'un avocat en exercice qui y a été mis en examen, le magistrat instructeur a ordonné le placement de cet avocat sous contrôle judiciaire avec interdiction notamment d'exercer son activité professionnelle d'avocat, « le conseil de l'ordre, saisi par (ce même magistrat) (') a seul le pouvoir de prononcer cette mesure à charge d'appel dans les conditions prévues à l'article 24 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques », à charge pour ledit conseil de statuer dans les 15 jours ;

Attendu que cet article 24, tel qu'il résulte de la modification de la loi de1971 par celle du 22 décembre 2021 entrée en vigueur le 1er juillet 2022, dispose que :

- lorsque « l'urgence ou la protection du public l'exigent, le conseil de l'ordre peut (') suspendre provisoirement de ses fonctions l'avocat qui en relève lorsque ce dernier a fait l'objet d'une poursuite pénale ou disciplinaire », et ce pour une durée de 6 mois « renouvelable une fois, ou au-delà de cette limite lorsque l'action publique a été engagée contre l'avocat à raison des faits qui fondent la suspension. » ;

- « les décisions du conseil de l'ordre prises en application (de cet) article peuvent être déférées à la cour d'appel par l'avocat intéressé, le bâtonnier dont il relève ou le procureur général. » ;

Attendu qu'il résulte de cette dernière disposition que le souhait du bâtonnier de l'ordre de laisser le conseil de l'ordre des avocats du barreau de GUADELOUPE, SAINT-MARTIN et SAINT-BARTHELEMY, régler les difficultés posées par l'un des siens, se heurte à la volonté du législateur de prévoir sur ce thème un double degré de juridiction;

Attendu qu'en application cette fois de l'article16 du décret n° 91-1197 du 7 novembre 1991 organisant la profession d'avocat, « le délai d'appel suspend l'exécution de la décision du conseil de l'ordre » et « l'appel exercé dans ce délai est également suspensif. » ;

Attendu qu'il est constant que c'est dans le strict cadre de ces dispositions que, après mise en examen de Me Charles NICOLAS, avocat au barreau de GUADELOUPE, A et X C, le juge d'instruction de la JIRS du tribunal judiciaire de POINTE-A-PITRE :


avait saisi (le 9 février 2023) et obtenu du conseil de l'ordre des avocats de ce barreau (par délibération du 24 février suivant, confirmée en appel par arrêt du 25 avril 2023 notifié aux intéressés le même jour) le prononcé de la suspension provisoire de Me [K] [X] de ses fonctions d'avocat pour une durée de 6 mois,

et a saisi à nouveau le conseil de l'ordre, par ordonnance du 7 août 2023, pour, cette fois, obtenir la prolongation de « l'interdiction d'exercer » ;


Attendu que c'est également dans ce cadre législatif et réglementaire que le conseil de l'ordre a rejeté la demande du magistrat instructeur en prolongation de cette interdiction et que le procureur général a relevé appel de cette décision ;

I- Sur la recevabilité de l'appel

Attendu qu'il résulte des éléments incontestés du dossier que la délibération du conseil de l'ordre déférée à la cour a été rendue le 21 août 2023, a été notifiée au procureur général par courrier daté du 22 août 2023 et parvenu à son secrétariat le 24 suivant et a été frappée d'appel par celui-ci suivant acte remis au greffe de la cour le 5 septembre 2023 ; que cet appel sera donc déclaré recevable ;

II- Sur le moyen tiré de la composition de la juridiction en son audience solennelle

Attendu que le moyen soulevé par le conseil de Me [X] du chef de l'irrégularité de la composition de la juridiction a été acté par le greffe à toutes fins, ainsi que demandé expressément par Me [G], cependant qu'il n'appartient par à la cour d'y statuer, un tel moyen relevant, le cas échéant, de la seule compétence de la juridiction supérieure qui est, en l'espèce, la cour cassation ;

III- Sur la demande de renouvellement de la suspension provisoire des fonctions d'avocat de Me [K] [X]

1°/ Attendu que lors des débats à l'audience du 29 septembre 2023 Me [X], lui-même et par la voix de ses conseils, a prétendu que la mesure de suspension initiale le concernant, d'une durée de 6 mois, était expirée depuis plusieurs semaines dès lors que la décision du conseil de l'ordre datait du 24 février 2023, qu'elle était exécutoire de droit par provision et qu'il avait cessé toute activité d'avocat dès cette date ;

Mais attendu qu'aux termes de l'article 16 alinéa 6 du décret n° 91-1197 du 7 novembre 1991, « le délai d'appel suspend l'exécution de la décision du conseil de l'ordre », de même que « l'appel exercé dans ce délai », si bien que la mesure de suspension prise à l'encontre de Me [X] pour une durée de 6 mois suivant délibération du conseil de l'ordre du 24 février 2023 n'a pu prendre effet, compte tenu de l'appel dont l'avait frappée Me [X], qu'à la date de la notification de l'arrêt confirmatif de la délibération du 24 février 2023, en date du 25 avril 2023, et n'est donc toujours pas à ce jour expirée ;

2°/ Attendu que la mesure sollicitée par le magistrat instructeur, tout comme celle qu'avait déjà ordonnée pour 6 mois le conseil de l'ordre à l'encontre de Me [X], est une simple mesure de sûreté qui ne préjuge en rien du fond de l'instruction en cours à son égard pour des faits d'escroquerie, blanchiment aggravé et abus de confiance au préjudice d'une personne vulnérable et n'est pas de nature à porter atteinte au principe de la présomption d'innocence dont, d'ailleurs, en sa première décision de suspension du 24 février 2023, ledit conseil avait tenu à faire rappel ;

3°/ Attendu que, dans sa première délibération qui a fait droit à la demande du juge d'instruction, en date du 24 février 2023, soit 16 jours après la mise en examen et le placement sous contrôle judiciaire de Me [X], le conseil de l'ordre a motivé la suspension ainsi ordonnée au double constat :


que la nature des faits, la gravité des infractions visées, l'ampleur du préjudice et l'émoi provoqué en GUADELOUPE et ailleurs appelaient une décision immédiate,

que les faits reprochés à Me [X] et pour lesquels il a été mis en examen, étaient liés à l'exercice de son activité professionnelle d'avocat et de nature à porter atteinte à la confiance que le public porte à la profession d'avocat, justifiant, en considération de leur gravité, de la durée de la prévention, du nombre de victimes présumées, le prononcé de sa suspension provisoire pour 6 mois ;


Mais attendu que le critère de l'urgence ainsi adopté en premier lieu par le conseil en février 2023, qui se définit comme l'urgence à prononcer une mesure de suspension au regard de la nature et de la date des faits reprochés, n'a pas à être retenu aujourd'hui dans le cadre du renouvellement d'une mesure prononcée en avril dernier, puisque la mise en examen est maintenant ancienne, que les faits le sont plus encore et que la mesure de suspension est toujours en cours d'exécution, en l'absence, en l'état, d'expiration du délai de 6 mois originel et en l'absence à ce jour de toute cassation de l'arrêt de la cour du 25 avril 2023 ;

Attendu que, s'agissant du second critère, celui de la protection du public, il vise la protection des clients passés, actuels et futurs du cabinet de Me [X] ;

Or, attendu qu'il échet de constater tout d'abord que la mise en examen de cet avocat et sa confirmation par la chambre de l'instruction de [Localité 8], en un arrêt dont le pourvoi en cassation qui l'a frappé a été rejeté, révèlent, à travers l'analyse qui a été faite par le juge d'instruction et ladite chambre des dossiers d'indemnisation, des déclarations de clients, témoins et médecins, que, dans le cadre de son activité professionnelle, Me [X] a pu utiliser sa qualité d'avocat pour déterminer de multiples clients-victimes, dont certaines étaient particulièrement vulnérables, à lui confier leurs procédures d'indemnisation dans des conditions financières abusives, notamment des conditions de rémunération parfois discrétionnaires et souvent exorbitantes s'agissant à la fois du taux des honoraires imposé par Me [X] et du délai de remise des fonds reliquataires aux intéressés après paiement sur le compte CARPA de ce dernier ;

Attendu que, sur la demande de renouvellement de la mesure de suspension, la cour de ce siège, pas plus que le conseil de l'ordre et pas davantage qu'en son arrêt du 25 avril dernier, n'est aujourd'hui habile à porter une appréciation de fond sur les faits reprochés à Me [X] et ne peut que constater qu'ils lui sont reprochés dans le cadre d'une information jusqu'ici validée par un arrêt irrévocable de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de FORT-DE-FRANCE et que cette information est toujours en cours, étant observé par surcroît que si Me [X] produit aux débats une requête adressée à la même chambre de l'instruction aux fins d'annulation de l'ensemble des actes qui ont conduit à sa mise en examen et ont suivi celle-ci, cette requête n'a pas été tranchée à ce jour ; qu'ainsi, les moyens opposés par Me [X] à la demande de renouvellement de sa suspension, en ce qu'ils sont tirés de l'éventuelle prescription des faits à lui reprochés et d'une prétendue lecture 'inédite' par le juge d'instruction du délit d'abus de confiance, sont-ils inopérants au regard des dispositions de l'article 24 de la loi de 1971 ;

Attendu qu'en sa délibération déférée, celle du 21 août 2023, le conseil de l'ordre, pour rejeter la demande de renouvellement de la suspension qu'il avait lui-même estimée nécessaire en février 2023 pour les motifs ci-avant repris, s'est bornée  :


à « rappeler que la mesure de suspension provisoire, tout comme son renouvellement, est une mesure exceptionnelle et provisoire qui exige l'existence de conditions alternatives : l'urgence et la protection du public »,

à prétendre que « le juge d'instruction reprend à l'identique les termes de sa première saisine du conseil sans caractériser la persistance des critères de l'urgence ou de la protection du public »,

à estimer « au surplus » que, « le juge d'instruction n'ayant transmis au conseil aucune des pièces de fond actualisée depuis la première saisine, (il) n'est pas en mesure d'apprécier la nécessité du renouvellement de la suspension provisoire »,

et à dire qu'« il n'est pas davantage démontré que les autres obligations du contrôle judiciaire ne seraient pas suffisantes pour assurer la protection du public » ;


Or, attendu que, d'une part, le caractère exceptionnel de toute mesure de suspension provisoire d'un avocat n'est certes pas un motif valable de rejet d'une demande de suspension ou de renouvellement, dès lors que la loi, celle de 1971 en son article 24, l'autorise expressément à titre de mesure conservatoire dans de strictes conditions et pour une durée de 6 mois qui, au cas d'espèce, peut être renouvelée plus d'une fois puisque « l'action publique a été engagée contre l'avocat (Me [X]) à raison des faits qui fondent la suspension » ; et qu'ainsi, les seuls critères qu'avait à envisager le conseil de l'ordre, tout comme la cour sur appel du parquet général, sont ceux du même article en son 1er alinéa, l'urgence ou/et la protection du public ;

Attendu que, de seconde part, il est faux de prétendre qu'en sa saisine du conseil de l'ordre aux fins de renouvellement de la mesure de suspension confirmée en avril 2023, le juge d'instruction se serait contenté de reprendre « à l'identique les termes de sa première saisine du conseil sans caractériser la persistance des critères de l'urgence ou de la protection du public », puisqu'il résulte de l'ordonnance de saisine du 7 août 2023 qu'elle est minutieusement motivée au regard d'abord d'un complet rappel des faits qui avaient fondé la mise en examen de Me [X] en février 2023, faisant notamment état de la nécessité d'analyser, au cours de ses investigations en cours et à venir, près de 300 dossiers du cabinet de cet avocat pouvant participer des chefs de sa mise en examen (escroquerie, blanchiment et abus de confiance au préjudice d'une personne vulnérable), ce qui prend nécessairement beaucoup de temps ; qu'il en résulte enfin qu'aux trois derniers paragraphes de ses motifs, le magistrat instructeur ajoute explicitement à la saisine initiale du conseil de l'ordre, en indiquant :


que, depuis la décision de ce dernier du 24 février 2023, les investigations se poursuivent à un rythme soutenu, faites notamment de l'étude de ces centaines de dossier de la SELARL d'avocat de Me [X] et son épouse, de l'audition de centaines de plaignants susceptibles d'avoir été victimes des agissements du mis en examen et d'une expertise comptable, toutes choses qui démontrent que l'information en cours n'est pas inerte et est menée sans désemparer ;

que le volume et la complexité de ces investigations ne permettent pas d'envisager un terme à celles-ci avant fin 2023, ce pourquoi il lui apparaissait nécessaire de renouveler l'interdiction d'exercice « avant la date butoir du 24 août 2023 » ;

et que toutes les décisions prises en matière de contrôle judiciaire et d'interdiction d'exercer ont été confirmées par les juridictions supérieures, ce qui, selon ce magistrat, confirme l'importance des charges pesant sur Me [X] ;


Attendu qu'ainsi, la cour dispose-t-elle de tous les éléments qui lui permettent de constater que l'information n'est pas abusivement retardée au regard des impératifs liés à la vie professionnelle de Me [X] actuellement suspendue à titre exceptionnel et à la présomption d'innocence qui le protège de toute condamnation prématurée, mais aussi que ce qui était vrai en février et avril dernier au plan de la nécessaire protection du public, savoir les clients actuels et futurs du cabinet de Me [X], l'est toujours près de 6 mois après au regard des investigations nécessaires et légitimes en cours ;

Attendu qu'en effet, des termes de ladite ordonnance de saisine, il résulte que, tout comme relevé à juste titre en février 2023 par le conseil de l'ordre en sa décision de suspension, les faits qui sont reprochés à Me [X] au regard des indices graves ou concordants validés par la chambre de l'instruction en son arrêt de mars 2023, et non depuis remis en cause par une quelconque décision juridictionnelle, sont encore et toujours liés à l'exercice de son activité professionnelle d'avocat, sont toujours de nature à porter atteinte à la confiance du public dans la profession d'avocat, et justifient en conséquence, en considération de leur gravité, de la durée de la prévention, du nombre de victimes présumées, le renouvellement de la suspension provisoire de Me [X] pour 6 nouveaux mois ; et que la circonstance, invoquée par ce dernier, qu'un seul de ses clients se serait à ce jour constitué partie civile, loin d'être de nature à exclure toute nécessité de 'protection du public', la confirme tout à l'inverse, puisqu'elle caractérise une forme de crainte révérentielle toujours actuelle des clients de Me [X] à son égard, crainte qui participe des faits de la cause ;

Attendu que, de troisième part, il n'est pas permis de prétendre que « le juge d'instruction n'ayant transmis au conseil aucune des pièces de fond actualisée depuis la première saisine », le conseil et aujourd'hui la cour ne sont « pas en mesure d'apprécier la nécessité du renouvellement de la suspension provisoire », puisque :

- ainsi que rappelé par la cour en son arrêt du 25 avril 2023, il ne lui appartient pas, non plus qu'à l'institution du premier degré qu'est le conseil de l'ordre, dans le cadre de la demande d'une simple mesure de sûreté conservatoire qu'il lui est demandé d'ordonner, d'analyser la pertinence de la mise en examen de Me [X] et des faits qui lui sont reprochés dans ce cadre, et ne peut que se reporter à l'analyse conduite sur ce point par le magistrat instructeur et la chambre de l'instruction qui a confirmé cette mise en examen, notamment la dernière saisine par le premier dudit conseil dans laquelle, comme relevé supra, il a détaillé l'état d'avancement de l'information,

- il est ainsi indifférent que le conseil ait pu ou non avoir accès aux pièces du dossier de cette information,

- et, en toute hypothèse, il résulte des mentions de l'ordonnance de saisine du 7 août 2023, page 5/5, que le juge d'instruction y indique qu''afin de permettre au conseil de l'ordre de statuer en pleine connaissance de cause, il sera transmis la totalité de la cote de fond à jour des défèrements ainsi que l'ordonnance du contrôle judiciaire', sans qu'il soit démontré qu'à réception de ce acte de saisine ledit conseil ait protesté d'un manquement à cet égard ;

Attendu que, de quatrième et dernière part, il n'est pas permis de considérer qu''il n'est pas (...) démontré que les autres obligations du contrôle judiciaire ne seraient pas suffisantes pour assurer la protection du public » ;

Attendu qu'en effet, ces obligations ont pour principal objet, qui est un impératif au regard de la spécificité des faits reprochés à l'intéressé, d'empêcher Me [X], à titre conservatoire, de poursuivre l'exercice d'un métier à l'occasion duquel ces faits ont pu être commis; et que ces 'autres obligations', notamment celle qui le contraint à 's'abstenir de recevoir ou de rencontrer ou d'entrer en contact de quelque façon que ce soit avec les témoins, victimes, experts judiciaires médicaux et les médecins conseils de la SELARL [X]/[W]', ne peuvent suffire à s'assurer de cet empêchement ;

Attendu que la chambre de l'instruction, confortée en cela par la cour de cassation en son arrêt de rejet du 27 juin 2023, a en effet considéré à juste titre que cette seule interdiction de contact avec les témoins, victimes, experts et médecins conseils de sa société d'avocats, n'était pas de nature à priver Me [X] des prérogatives attachées à sa qualité d'avocat, en ce qu'il lui était loisible d'exercer sa profession au sein d'un autre cabinet, soit comme associé soit comme collaborateur soit comme avocat salarié et pour des affaires ou un contentieux qui ne sont pas de nature à faire appel aux professionnels sus-visés ;

Attendu qu'il est ainsi manifeste que seule une suspension complète d'exercice des fonctions d'avocat fût et soit toujours de nature à parvenir au but poursuivi par le contrôle judiciaire ordonné par le juge d'instruction et validé par la chambre de l'instruction et la cour de cassation ;

Attendu qu'il y a lieu en conséquence d'infirmer la délibération déférée en ce que le conseil de l'ordre y a refusé de renouveler ladite suspension, et, statuant à nouveau sur ce point, de prononcer ce renouvellement dans les conditions prévues par l'article 138 al 2 12° du code pénal, soit pour une nouvelle durée de 6 mois ;

IV- Sur les dépens

Attendu que, succombant en cet appel, Me [K] [X] en supportera tous les dépens ;



PAR CES MOTIFS

La cour,


Dit recevable l'appel formé par le procureur général près la cour d'appel de ce siège à l'encontre de la délibération du conseil de l'ordre des avocats du barreau de BASSE-TERRE, A et SAINT-BARTHELEMY en date du 21 août 2023,

Infirme cette décision en ce que le conseil de l'ordre y a rejeté la demande de renouvellement de la suspension provisoire de Me [K] [X],


Statuant à nouveau,


Ordonne le renouvellement, pour une durée de 6 mois à compter de l'expiration de la première suspension, de la suspension provisoire de Me [K] [X] de ses fonctions d'avocat,

Condamne Me [K] [X] aux entiers dépens,

Dit que, conformément à l'article 16 al 5 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991, le présent arrêt sera notifié par le greffe par lettre recommandée avec accusé de réception, au procureur général, au bâtonnier de l'ordre et à Me [K] [X].


Et ont signé le présent arrêt,


Le greffier Le président de chambre

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