Jurisprudence : Cass. civ. 1, 25-10-2023, n° 21-23.999, F-D, Cassation

Cass. civ. 1, 25-10-2023, n° 21-23.999, F-D, Cassation

A89411Q9

Référence

Cass. civ. 1, 25-10-2023, n° 21-23.999, F-D, Cassation. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/101034003-cass-civ-1-25102023-n-2123999-fd-cassation
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Abstract

► Selon les articles 764 et 765-1 du Code civil, le conjoint survivant dispose d'un an à partir du décès pour manifester sa volonté de bénéficier de son droit viager au logement ; si cette manifestation de volonté peut être tacite, elle ne peut résulter du seul maintien dans les lieux.


CIV. 1

IJ


COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 25 octobre 2023


Cassation partielle


Mme CHAMPALAUNE, président


Arrêt n° 574 F-D

Pourvoi n° V 21-23.999


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 25 OCTOBRE 2023


M. [F] [L], domicilié [… …], a formé le pourvoi n° V 21-23.999 contre l'arrêt rendu le 12 août 2021 par la cour d'appel de Bourges (chambre civile), dans le litige l'opposant à Mme [C] [L], veuve [P], domiciliée [Adresse 2], défenderesse à la cassation.


Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Poinseaux, conseiller, les observations de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de M. [L], de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de Mme [Aa], veuve [L], après débats en l'audience publique du 12 septembre 2023 où étaient présents Mme Champalaune, président, Mme Poinseaux, conseiller rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, et Mme Layemar, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.


Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Bourges, 12 août 2021), [V] [L] est décédé le 16 décembre 2014, en laissant pour lui succéder son fils, [F], né d'une première union, et son épouse séparée de biens, Mme [Aa].

2. Des difficultés sont survenues lors du règlement de la succession.


Examen des moyens

Sur le premier moyen

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile🏛, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le second moyen, pris en sa troisième branche

Enoncé du moyen

4. M. [L] fait grief à l'arrêt de dire que Mme [L] dispose, jusqu'à son décès, d'un droit d'habitation et d'un droit d'usage sur le bien situé [Adresse 2] et sur le mobilier le garnissant, en application de l'article 764 du code civil🏛, alors « que le juge a l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; en l'espèce, pour dire que Mme [Aa], veuve [L] dispose, sur le logement sis [Adresse 2] et jusqu'à son décès, d'un droit d'habitation et un droit d'usage sur le mobilier le garnissant en application de l'article 764 du code civil, la cour d'appel a énoncé "qu' elle a formulé, dans son assignation du 16 décembre 2015, soit juste dans le délai d'un an après le décès de son mari, la demande tendant à se voir reconnaître le droit d'usage et d'habitation viager sur le domicile des époux" ; qu'en statuant ainsi quand à aucun moment, dans son assignation du 16 décembre 2015, Mme [L] ne formulait une telle demande, la cour d'appel a violé le principe susvisé. »


Réponse de la Cour

Vu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis :

5. Pour dire que Mme [L] dispose, jusqu'à son décès, d'un droit d'habitation et d'un droit d'usage sur le bien situé [Adresse 2] et sur le mobilier le garnissant, en application de l'article 764 du code civil, l'arrêt relève que, dans son assignation du 16 décembre 2015, celle-ci a demandé à se voir reconnaître le droit d'usage et d'habitation viager sur le domicile des époux.
6. En statuant ainsi, alors que, dans son assignation du 16 décembre 2015, Mme [Aa] ne formulait pas une telle demande, la cour d'appel, qui en a dénaturé les termes clairs et précis, a violé le principe susvisé.


Et sur le second moyen, pris en sa deuxième branche

Enoncé du moyen

7. M. [Aa] fait le même grief à l'arrêt, alors « que le conjoint survivant dispose d'un an à partir du décès pour manifester sa volonté de bénéficier du droit viager d'habitation sur l'immeuble ayant servi de logement d'habitation aux époux et du droit d'usage sur les meubles le garnissant ; que si cette manifestation de volonté peut être tacite, elle doit néanmoins résulter d'un faisceau d'indices manifestant sans équivoque la volonté du conjoint survivant de bénéficier de ces droits, sans pouvoir être caractérisée exclusivement à partir de factures relatives à l'assurance et l'entretien du bien ; qu'en se bornant à relever, pour considérer que Mme [Aa] avait manifesté sa volonté de bénéficier des droits d'usage et d'habitation sur l'immeuble situé [Adresse 2], "la production d'une attestation d'assurance jusqu'en 2018, qu'elle en assurait l'entretien au regard des factures d'intervention des 22 mai 2015, 22 juillet 2015, 20 octobre 2015, 10 novembre et 14 novembre 2015 et qu'elle employait un salarié à ce domicile en 2017 et 2018", la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 764, alinéa 1er et 765-1 du code civil🏛. »


Réponse de la Cour

Vu les articles 764 et 765-1 du code civil :

8. Selon ces textes, le conjoint survivant dispose d'un an à partir du décès pour manifester sa volonté de bénéficier de son droit viager au logement.

9. Si cette manifestation de volonté peut être tacite, elle ne peut résulter du seul maintien dans les lieux.

10. Pour dire que Mme [L] dispose, jusqu'à son décès, d'un droit d'habitation et d'un droit d'usage sur le bien situé [Adresse 2] et sur le mobilier le garnissant, l'arrêt retient encore que celle-ci justifie avoir occupé ce logement ayant constitué le domicile conjugal depuis le décès de son époux et y résider encore un an après, en avoir assuré l'entretien et y avoir employé un salarié et en déduit qu'elle a manifesté, de manière non équivoque, sa volonté de bénéficier du droit d'usage et d'habitation dans l'année qui a suivi le décès.

11. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.


PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que Mme [L] dispose sur le logement situé [Adresse 2], et jusqu'à son décès, d'un droit d'habitation et d'un droit d'usage sur le mobilier le garnissant en application de l'article 764 du code civil, en ce qu'il rejette toutes les demandes de M. [Aa] et en ce qu'il statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile🏛, l'arrêt rendu le 12 août 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Bourges ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Orléans ;

Condamne Mme [L] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq octobre deux mille vingt-trois.

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