Jurisprudence : CJCE, 02-12-1997, aff. C-188/95, Fantask A/S e.a. c/ Industriministeriet (Erhvervministeriet)

CJCE, 02-12-1997, aff. C-188/95, Fantask A/S e.a. c/ Industriministeriet (Erhvervministeriet)

A1985AWG

Référence

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Cour de justice des Communautés européennes

2 décembre 1997

Affaire n°C-188/95

Fantask A/S e.a.
c/
Industriministeriet (Erhvervministeriet)



61995J0188

Arrêt de la Cour
du 2 décembre 1997.

Fantask A/S e.a. contre Industriministeriet (Erhvervministeriet).

Demande de décision préjudicielle: Østre Landsret - Danemark.

Directive 69/335/CEE - Droits d'enregistrement des sociétés - Délais procéduraux nationaux.

Affaire C-188/95.

Recueil de Jurisprudence 1997 page I-6783

1 Dispositions fiscales - Harmonisation des législations - Impôts indirects frappant les rassemblements de capitaux - Immatriculation des sociétés de capitaux - Droits ayant un caractère rémunératoire - Notion - Droits directement proportionnels au capital souscrit - Exclusion

(Directive du Conseil 69/335, art. 12, § 1, e))

2 Dispositions fiscales - Harmonisation des législations - Impôts indirects frappant les rassemblements de capitaux - Droits perçus en violation de la directive 69/335 - Remboursement - Modalités - Application du droit national - Limites - Application d'un principe de droit national excluant le remboursement des droits perçus en violation du droit communautaire pendant une longue période et à l'insu tant des autorités nationales que des assujettis - Inadmissibilité

(Directive du Conseil 69/335)

3 Dispositions fiscales - Harmonisation des législations - Impôts indirects frappant les rassemblements de capitaux - Droits perçus en violation de la directive 69/335 - Remboursement - Délai de prescription - Application du droit national - Admissibilité - Conditions

(Directive du Conseil 69/335)

4 Dispositions fiscales - Harmonisation des législations - Impôts indirects frappant les rassemblements de capitaux - Directive 69/335 - Articles 10 et 12, paragraphe 1, sous e) - Effet direct

(Directive du Conseil 69/335, art. 10 et 12, § 1, e))

5 L'article 12, paragraphe 1, sous e), de la directive 69/335, concernant les impôts indirects frappant les rassemblements de capitaux, doit être interprété en ce sens que, pour revêtir un caractère rémunératoire, les montants des droits perçus à l'occasion de l'immatriculation des sociétés anonymes et des sociétés à responsabilité limitée et lors des augmentations de capital dont ces sociétés font l'objet doivent être calculés sur la base du seul coût des formalités en cause, étant entendu que ces montants peuvent également couvrir les dépenses engendrées par des opérations mineures effectuées gratuitement. Pour calculer ces montants, un État membre est en droit de prendre en compte l'ensemble des coûts liés aux opérations d'enregistrement, y compris la fraction des frais généraux qui leur sont imputables. En outre, un État membre a la faculté de prévoir des droits forfaitaires et d'établir leurs montants pour une durée indéterminée, dès lors qu'il s'assure, à intervalles réguliers, que ces montants continuent de ne pas dépasser le coût moyen des opérations en cause. Il s'ensuit qu'un droit dont le montant augmente directement et sans limites en proportion du capital nominal souscrit ne saurait constituer un droit à caractère rémunératoire au sens de l'article 12, paragraphe 1, sous e), de la directive, le montant d'un tel droit étant généralement sans rapport avec les frais concrètement exposés par l'administration lors des formalités d'immatriculation.

6 Le droit communautaire s'oppose à ce que des actions en remboursement de droits perçus en violation de la directive 69/335 puissent être rejetées au motif que l'imposition de ces droits a procédé d'une erreur excusable des autorités de l'État membre dans la mesure où les droits en cause ont été perçus pendant une longue période sans que ni celles-ci ni les assujettis n'aient été conscients de leur illégalité. En effet, si, en l'absence de réglementation communautaire en la matière, le remboursement des sommes perçues en violation du droit communautaire ne peut être pourvuivi que dans le cadre des conditions, de fond et de forme, fixées par les différentes législations nationales, il n'en reste pas moins que ces conditions ne sauraient être moins favorables que celles concernant des réclamations semblables de nature interne, ni rendre pratiquement impossible ou excessivement difficile l'exercice des droits conférés par l'ordre juridique communautaire. Or, l'application d'un principe général de droit national, selon lequel les juridictions d'un État membre devraient rejeter les demandes de remboursement de droits perçus en violation du droit communautaire, dès lors que ceux-ci ont été perçus pendant une longue période sans que ni les autorités de cet État ni les assujettis n'aient été conscients de leur illégalité, serait de nature à rendre excessivement difficile l'obtention du remboursement de taxes contraires au droit communautaire et aboutirait en outre à favoriser les violations du droit communautaire qui se sont poursuivies sur une longue période.

7 En son état actuel, le droit communautaire n'interdit pas à un État membre, qui n'a pas correctement transposé la directive 69/335, d'opposer aux actions en remboursement de droits perçus en violation de la directive un délai de prescription national qui court à compter de la date d'exigibilité des droits en cause, dès lors qu'un tel délai n'est pas moins favorable pour les recours fondés sur le droit communautaire que pour les recours fondés sur le droit interne et qu'il ne rend pas pratiquement impossible ou excessivement difficile l'exercice des droits conférés par l'ordre juridique communautaire.

8 Les dispositions combinées de l'article 10 et de l'article 12, paragraphe 1, sous e), de la directive 69/335 engendrent des droits dont les particuliers peuvent se prévaloir devant les juridictions nationales. En effet, l'interdiction posée par l'article 10 de la directive de même que la dérogation à cette interdiction qui figure à l'article 12, paragraphe 1, sous e), sont formulées en termes suffisamment précis et inconditionnels pour pouvoir être invoquées par les justiciables devant leurs juridictions nationales à l'encontre d'une disposition de droit national contraire à la directive.

Dans l'affaire C-188/95,

ayant pour objet une demande adressée à la Cour, en application de l'article 177 du traité CE, par l'Østre Landsret (Danemark) et tendant à obtenir, dans le litige pendant devant cette juridiction entre

Fantask A/S e.a.

Industriministeriet (Erhvervsministeriet),

une décision à titre préjudiciel sur l'interprétation de la directive 69/335/CEE du Conseil, du 17 juillet 1969, concernant les impôts indirects frappant les rassemblements de capitaux (JO L 249, p. 25), telle que modifiée, en dernier lieu, par la directive 85/303/CEE du Conseil, du 10 juin 1985 (JO L 156, p. 23),

LA COUR,

composée de MM. G. C. Rodríguez Iglesias, président, C. Gulmann, H. Ragnemalm et M. Wathelet, présidents de chambre, G. F. Mancini, J. C. Moitinho de Almeida, P. J. G. Kapteyn, J. L. Murray, D. A. O. Edward, J.-P. Puissochet (rapporteur), G. Hirsch, P. Jann et L. Sevón, juges,

avocat général: M. F. G. Jacobs,

greffier: M. H. von Holstein, greffier adjoint,

considérant les observations écrites présentées:

- pour Fantask A/S, par Me Thomas Rørdam, avocat à Copenhague,

- pour Norsk Hydro Danmark A/S, Tryg Forsikring skadesforsikringsselskab A/S et Tryg Forsikring livsforsikringsselskab A/S, par Mes Kai Michelsen, Claus Høeg Madsen et Henning Aasmul-Olsen, avocats à Copenhague,

- pour Aalborg Portland A/S, par Me Karen Dyekjær-Hansen, avocat à Copenhague,

- pour Forsikrings-Aktieselskabet Alka, Robert Bosch A/S, Uponor A/S, Uponor Holding A/S et Pen-Sam ApS e.a., par Mes Vagn Thorup, Henrik Stenbjerre, Jørgen Boe et Lau Normann Jørgensen, du cabinet Kromann et Münter, avocats à Copenhague,

- pour le gouvernement danois, par M. Peter Biering, chef de division au ministère des Affaires étrangères, en qualité d'agent, assisté de Me Karsten Hagel-Sørensen, avocat à Copenhague,

- pour le gouvernement français, par Mme Catherine de Salins, sous-directeur à la direction des affaires juridiques du ministère des Affaires étrangères, et M. Frédéric Pascal, chargé de mission à la même direction, en qualité d'agents,

- pour le gouvernement suédois, par M. Erik Brattgård, conseiller au département du commerce extérieur du ministère des Affaires étrangères, en qualité d'agent,

- pour le gouvernement du Royaume-Uni, par M. John E. Collins, Assistant Treasury solicitor, en qualité d'agent, assisté de Mme Eleanor Sharpston, barrister,

- pour la Commission des Communautés européennes, par MM. Anders C. Jessen et Enrico Traversa, membres du service juridique, en qualité d'agents, assistés de Mes Susanne Helsteen et Jens Rostock-Jensen, du cabinet Reumert et Partnere, avocats à Copenhague,

vu le rapport d'audience,

ayant entendu les observations orales de Fantask A/S, représentée par Me Preben Jøker Thorsen, avocat à Copenhague, de Norsk Hydro Danmark A/S, de Tryg Forsikring skadesforsikringsselskab A/S et de Tryg Forsikring livsforsikringsselskab A/S, représentées par Me Henning Aasmul-Olsen, d'Aalborg Portland A/S, représentée par Me Lars Hennenberg, avocat à Copenhague, de Forsikrings-Aktieselskabet Alka, de Robert Bosch A/S, d'Uponor A/S, d'Uponor Holding A/S et de Pen-Sam ApS e.a., représentés par Me Henrik Peytz, avocat à Copenhague, d'Industriministeriet (Erhvervsministeriet), représenté par Me Karsten Hagel-Sørensen, du gouvernement danois, représenté par M. Peter Biering, du gouvernement français, représenté par M. Gautier Mignot, secrétaire des affaires étrangères à la direction des affaires juridiques du ministère des Affaires étrangères, en qualité d'agent, du gouvernement italien, représenté par M. Danilo Del Gaizo, avvocato dello Stato, du gouvernement du Royaume-Uni, représenté par M. John E. Collins, assisté de Mme Eleanor Sharpston, et de la Commission, représentée par MM. Anders C. Jessen et Enrico Traversa, assistés de Mes Jens Rostock-Jensen et Hans Henrik Skjødt, avocat à Copenhague, à l'audience du 29 avril 1997,

ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 26 juin 1997,

rend le présent

Arrêt

1 Par ordonnance du 8 juin 1995, parvenue à la Cour le 15 juin suivant, l'Østre Landsret a posé, en application de l'article 177 du traité CE, huit questions préjudicielles relatives à l'interprétation de la directive 69/335/CEE du Conseil, du 17 juillet 1969, concernant les impôts indirects frappant les rassemblements de capitaux (JO L 249, p. 25), telle que modifiée, en dernier lieu, par la directive 85/303/CEE du Conseil, du 10 juin 1985 (JO L 156, p. 23, ci-après la "directive").

2 Ces questions ont été soulevées dans le cadre de litiges opposant la société Fantask A/S (ci-après "Fantask") et plusieurs autres sociétés ou groupes de sociétés à l'Industriministeriet (Erhvervsministeriet) [ministère de l'Industrie danois (ministère du Commerce)] à propos des droits perçus à l'occasion de l'immatriculation de nouvelles sociétés anonymes et sociétés à responsabilité limitée et lors de l'enregistrement d'augmentations de capital dont celles-ci font l'objet.

3 La loi n° 468, du 29 septembre 1917, première loi relative aux sociétés anonymes (Lovtidende A 1917, p. 1117), a rendu obligatoire l'inscription des sociétés anonymes et de leurs augmentations de capital dans un registre des sociétés. Cette inscription était soumise au paiement de droits dont il appartenait au ministre compétent de fixer les taux. Déjà profondément remaniée une première fois en 1930, cette loi a fait l'objet d'une révision générale par la loi n° 370, du 13 juin 1973, relative aux sociétés anonymes (Lovtidende A 1973, p. 1025). Le même jour, a été adoptée la loi n° 371 relative aux sociétés à responsabilité limitée, qui prévoit, en ce qui concerne ces dernières, des formalités d'enregistrement analogues à celles en vigueur pour les sociétés anonymes (Lovtidende A 1973, p. 1063).

4 L'article 154, paragraphe 3, de la loi relative aux sociétés anonymes et l'article 124, paragraphe 3, de la loi relative aux sociétés à responsabilité limitée habilitaient initialement le ministre compétent à fixer les taux des droits d'enregistrement pour ces deux catégories de sociétés.

5 Depuis l'intervention de la première loi sur les sociétés anonymes, et jusqu'en 1992, la structure des droits perçus lors de l'enregistrement des nouvelles sociétés et des augmentations de capital dont celles-ci font l'objet n'a pas évolué. Elle est composée d'un droit de base, fixe, et d'un droit complémentaire, calculé proportionnellement au montant du capital nominal souscrit. Leurs taux ont, en revanche, été modifiés à plusieurs reprises.

6 Au cours de la période comprise entre le 1er janvier 1974 et le 1er mai 1992, le droit de base a varié entre 500 et 1 700 DKR pour l'inscription d'une nouvelle société anonyme et d'une nouvelle société à responsabilité limitée et entre 200 et 900 DKR pour l'enregistrement d'une augmentation de capital, pour l'une et l'autre catégorie de sociétés. Pendant la même période, le droit complémentaire s'est élevé à 4 o/oo du capital souscrit, en cas d'inscription d'une nouvelle société, et à 4 o/oo de l'augmentation de capital, dans ce dernier cas.

7 Le "registre des sociétés anonymes" (ci-après le "registre"), institué par la loi n° 468, précitée, constituait une direction du ministère du Commerce, en charge de l'enregistrement des déclarations concernant les sociétés anonymes ainsi que, à partir de 1974, les sociétés à responsabilité limitée. Par la loi n° 851, du 23 décembre 1987, portant notamment modification de la loi relative aux sociétés anonymes et de la loi relative aux sociétés à responsabilité limitée (Lovtidende A 1987, p. 3229), le registre est devenu l'Erhvervs- og Selskabsstyrelsen (direction du commerce et des sociétés, ci-après "Styrelsen"). Outre l'exécution des tâches d'enregistrement, la fixation et la perception des droits y afférents, Styrelsen participe à l'élaboration de la législation portant sur le droit des sociétés et le droit des affaires et veille à son application. Elle exerce en outre diverses activités de conseil et d'information.

8 A la suite d'un rapport de la Cour des comptes du Danemark qui, constatant les importants excédents des recettes sur les dépenses de Styrelsen, auxquels la perception du droit complémentaire avait donné lieu, mettait en doute la validité de ce dernier au regard du droit danois, le droit complémentaire a été supprimé par arrêté n° 301, du 30 avril 1992 (Lovtidende A 1992, p. 1149), à compter du 1er mai 1992. Parallèlement, le droit de base a été porté à 2 500 DKR pour l'inscription d'une nouvelle société anonyme et à 1 800 DKR pour l'inscription d'une nouvelle société à responsabilité limitée. Pour l'enregistrement d'une augmentation de capital, le montant à acquitter s'élève désormais, pour l'une et l'autre catégorie de sociétés, à 600 DKR.

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