Jurisprudence : CE 2/6 SSR, 29-06-1998, n° 157110

CONSEIL D'ETAT

Statuant au Contentieux

N° 157110

SOCIETE ANONYME DES EAUX MINERALES D'EVIAN

Lecture du 29 Juin 1998

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)


Le Conseil d'Etat statuant au Contentieux, (Section du contentieux, 2ème et 6ème sous-sections réunies),
Sur le rapport de la 2ème sous-section, de la Section du Contentieux,

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 18 mars et 18 juillet 1994 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE ANONYME DES EAUX MINERALES D'EVIAN dont le siège social est 22, avenue des Sources à Evian-les-Bains (74503) ; la SOCIETE ANONYME DES EAUX MINERALES D'EVIAN demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler l'arrêt du 22 février 1994 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 22 septembre 1993 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé, à la demande de M. Lagrange, l'acte par lequel le maire d'Evian-les-Bains ne s'est pas opposé à l'installation d'un appareil aéroréfrigérant sur la toiture d'un bâtiment lui appartenant ; 2°) de renvoyer l'affaire devant la cour administrative d'appel de Lyon ; 3°) de condamner M. Lagrange à lui verser la somme de 15 000 F au titre des dispositions de l'article 75-I de la loi n° 91-647 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;

Après avoir entendu en audience publique : - le rapport de M. Mary, Maître des Requêtes, - les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de la SOCIETE ANONYME DES EAUX MINERALES D'EVIAN - SAEME et de Me Vincent, avocat de M. Joseph Lagrange, - les conclusions de M. Abraham, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que, pour rejeter la demande de la SOCIETE ANONYME DES EAUX MINERALES D'EVIAN tendant à l'annulation du jugement du 22 septembre 1993 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé la décision du maire d'Evian-les-Bains de ne pas s'opposer à l'installation d'un appareil aéroréfrigérant sur le toit d'un immeuble appartenant à ladite société, la cour administrative d'appel de Lyon s'est fondée, dans son arrêt du 22 février 1994, sur l'absence dans le plan d'occupation des sols de la commune d'Evian-les-Bains de dispositions applicables à la modification des immeubles existants ; que cependant, aux termes de l'article 5 de ce plan d'occupation des sols : "Les réparations, transformations, restaurations et légères extensions de toute construction existante ainsi que les dépendances techniques nécessaires à ces constructions peuvent être autorisées en toute zone sous réserve, en particulier, que les viabilités soient satisfaisantes et que la sécurité des personnes puisse être assurée en permanence" ; que la cour ne pouvait, alors même que les parties n'avaient produit devant elle qu'un document incomplet et que la société ne s'était pas prévalue de l'article 5 précité, affirmer l'absence dans le plan d'occupation des sols de toute disposition régissant la modification des constructions existantes sans l'avoir vérifié en demandant la production de l'intégralité du règlement ; qu'en se méprenant sur le contenu du plan d'occupation des sols la cour a entaché son arrêt d'erreur de droit ; que la SOCIETE ANONYME DES EAUX MINERALES D'EVIAN est, dès lors, fondée à en demander l'annulation ;

Considérant qu'aux termes de l'article 11 de la loi susvisée du 31 décembre 1987, le Conseil d'Etat, s'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort, peut régler l'affaire au fond, si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au fond ;

Considérant que, pour annuler la décision du maire d'Evian-les-Bains de ne pas s'opposer à la déclaration de travaux de la SOCIETE ANONYME DES EAUX MINERALES D'EVIAN, le tribunal administratif de Grenoble s'est fondé sur ce que la construction méconnaissait le sixième alinéa de l'article UA 11 du règlement du plan d'occupation des sols interdisant des toitures en terrasses sur les bâtiments comportant plus d'un niveau et sur ce que la modification sollicitée par la déclaration de travaux, qui n'était pas étrangère aux dispositions méconnues, n'avait pas pour objet de rendre l'immeuble plus conforme à ces dispositions ; qu'eu égard aux dispositions précitées de l'article 5 du règlement, spécialement applicables à la modification des immeubles existants, le tribunal administratif ne pouvait se fonder sur le motif susanalysé pour annuler la décision du maire d'Evian-les-Bains ;

Considérant toutefois qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. Lagrange devant le tribunal administratif de Grenoble ; Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par la SOCIETE ANONYME DES EAUX MINERALES D'EVIAN :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 422-2 du code de l'urbanisme : "Les constructions ou travaux exemptés du permis de construire, à l'exception de ceux couverts par le secret de la défense nationale, font l'objet d'une déclaration auprès du maire de la commune avant le commencement des travaux. / Sauf opposition d–ment motivée, notifiée par l'autorité compétente en matière de permis de construire dans le délai d'un mois à compter de la réception de la déclaration, les travaux peuvent être exécutés sous réserve, le cas échéant, du respect des prescriptions notifiées dans les mêmes conditions (...)" ; qu'il résulte de ces dispositions que l'absence d'opposition à une déclaration de travaux de la part de l'autorité compétente en matière de délivrance du permis de construire peut intervenir après le commencement des travaux qui se trouvent ainsi régularisés rétroactivement, à la condition que ceux-ci soient conformes aux dispositions législatives ou réglementaires en vigueur à la date de la décision ;

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le dossier accompagnant la déclaration de travaux que la société intéressée a produit en application des dispositions de l'article R. 422-3 du code de l'urbanisme ait été incomplet ;

Considérant que M. Lagrange ne saurait utilement soutenir, à l'encontre d'une décision de régularisation, que la déclaration de travaux litigieuse n'a pas été affichée avant le commencement des travaux, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 422-10 du même code ;

Considérant que l'appareil aéroréfrigérant contesté constitue à la fois une légère extension de la construction existante et une dépendance technique nécessaire à cette construction au sens de l'article 5 précité du plan d'occupation des sols ; qu'en conséquence, la méconnaissance des dispositions des articles UA6 et UA 10 du règlement du plan d'occupation des sols ne saurait être utilement soulevée à l'appui de conclusions dirigées contre la décision ayant pour objet de ne pas s'opposer à la déclaration de travaux d'installation de cet appareil sur le toit d'un immeuble existant ;

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en ne s'opposant pas à la déclaration de travaux présentée par la société, le maire de la commune ait commis, eu égard notamment aux dimensions de cet appareil, une erreur manifeste quant à l'appréciation de l'atteinte portée aux caractères des lieux avoisinants ; que, dès lors, M. Lagrange n'est pas fondé à demander l'annulation de l'acte attaqué ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 :

Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi susvisée du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que la SOCIETE ANONYME DES EAUX MINERALES D'EVIAN qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante soit condamnée à verser à M. Lagrange la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des mêmes dispositions et decondamner M. Lagrange à verser à la SOCIETE ANONYME DES EAUX MINERALES D'EVIAN la somme de 5000 F qu'elle demande au titre des mêmes frais ;

D E C I D E :

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon en date du 22 février 1994 et le jugement du tribunal administratif de Grenoble en date du 22 septembre 1993 sont annulés.

Article 2 : La demande présentée par M. Lagrange devant le tribunal administratif de Grenoble est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de la SOCIETE ANONYME DES EAUX MINERALES D'EVIAN et de M. Lagrange tendant à l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE ANONYME DES EAUX MINERALES D'EVIAN, à M. Joseph Lagrange, à la commune d'Evian-les-Bains et au ministre de l'équipement, des transports et du logement.

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