Jurisprudence : CA Bordeaux, 26-06-2023, n° 22/04813, Confirmation


COUR D'APPEL DE BORDEAUX


QUATRIÈME CHAMBRE CIVILE


--------------------------


ARRÊT DU : 26 JUIN 2023


N° RG 22/04813 - N° Portalis DBVJ-V-B7G-M6B5


Monsieur [Aa] [C]


c/


S.C.P. [R] - [D]


Nature de la décision : AU FOND


Notifié aux parties par LRAR le :


Grosse délivrée le :


aux avocats

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 26 juillet 2022 (R.G. 2018L01488) par le Tribunal de Commerce de BORDEAUX suivant déclaration d'appel du 19 octobre 2022



APPELANT :


Monsieur [O] [C], de … …, … [… …] … / [Localité 7]


représenté par Mâitre Stéphanie GARCIA, avocat au barreau de BORDEAUX


INTIMÉE :


S.C.P. [R] - [D], agissant ès-qualités de mandataire liquidateur de la SARLU AUTOS [Localité 6] et domiciliée en cette qualité au siège sis, [Adresse 3]


représentée par Maître Yves FRAGO de la SELARL DUCOS-ADER / OLHAGARAY & ASSOCIES, avocat au barreau de BORDEAUX



COMPOSITION DE LA COUR :


En application des dispositions de l'article 805 du Code de Procédure Civile🏛, l'affaire a été débattue le 24 avril 2023 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Marie GOUMILLOUX, Conseiller chargé du rapport,


Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :


Monsieur Jean-Pierre FRANCO, Président,

Madame Marie GOUMILLOUX, Conseiller,

Madame Sophie MASSON, Conseiller,


Greffier lors des débats : Monsieur Ab A


ARRÊT :


- contradictoire


- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile🏛.



EXPOSE DU LITIGE


La société à responsabilité limitée à associé unique Auto [Localité 6] exerce une activité de commercialisation de véhicules neufs et d'occasions depuis 2010. M. [O] [C] en est le gérant et l'unique associé.


Le 22 octobre 2014, M. [C] a sollicité l'ouverture d'une procédure de sauvegarde judiciaire à l'égard de la société Auto [Localité 6] arguant d'une rupture de ses concours bancaires. Il a été fait droit à sa demande par décision du 05 novembre 2014 du tribunal de commerce de Bordeaux. Maître [R] a été nommé en qualité de mandataire judiciaire.


Le 17 décembre 2014, la direction générale des finances publiques de la Gironde a notifié à la société Auto [Localité 6] une proposition de rectification de comptabilité pour la période du 1er novembre 2010 au 31 mai 2013 à hauteur de 409 438 euros.


A la requête du mandataire judiciaire, la procédure de sauvegarde judiciaire a été convertie en liquidation judiciaire par décision 25 mars 2015. La société [R]-[D] a été désignée en qualité de liquidateur judiciaire de la société Autos [Localité 6].


Par acte d'huissier de justice du 19 mars 2018, la société [R]-[D], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Autos [Localité 6], a assigné M. [C] devant le tribunal de commerce de Bordeaux aux fins de le voir condamner :

- à supporter l'insuffisance d'actif résultant de la procédure de liquidation judiciaire de la société Autos [Localité 6],

- à une mesure de faillite personnelle pour une durée de cinq années.


Par jugement contradictoire du 26 juillet 2022, le tribunal de commerce de Bordeaux a:

- condamné M. [C] à supporter l'insuffisance d'actif de la société Autos [Localité 6], telle qu'elle résultera à l'issue de la procédure de vérification des créances,

- ordonné l'exécution provisoire nonobstant appel et sans caution,

- prononcé à l'encontre de M. [C], né le [Date naissance 2] 1960 à [Localité 5], de … …, … [… …] … … [… …]' à [Localité 7], une mesure de faillite personnelle pour une durée de 5 ans,

- ordonné les mentions et publicités prévues à l'article R. 653-3 du code de commerce🏛,

- dit qu'en application des articles L. 128-1 et suivants et R. 128-1 et suivants du code de commerce🏛🏛, cette sanction fera l'objet d'une inscription au fichier national des interdits de gérer, dont la tenue est assurée par le Conseil National des Greffiers des tribunaux de commerce,

- débouté M. [C] de l'ensemble de ses demandes,

- condamné M. [C] à payer à la société [R]-[D] la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile🏛,

- condamné M. [C] aux dépens.


Par déclaration du 19 octobre 2022, M. [C] a interjeté appel de cette décision, énonçant les chefs de la décision expressément critiqués, intimant la société [R]-[D], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Autos [Localité 6].


Par ordonnance du 14 novembre 2022, la présidente de la chambre commerciale à la cour d'appel de Bordeaux a fixé l'affaire à bref délai à l'audience du 24 avril 2023.



Par acte d'huissier du 21 novembre 2022, M. [C] a signifié sa déclaration d'appel à la société [R]-[D].


PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES



Par dernières écritures notifiées par RPVA le 11 avril 2023, auxquelles la cour se réfère expressément, M. [C], demande à la cour de :


- vu les articles L. 651-1 et suivants et les articles L. 653-1 et suivants du code de commerce🏛,

- vu les articles 16, 455 et 700 du code de procédure civile🏛🏛,


- infirmer le jugement du tribunal de commerce de Bordeaux du 26 juillet 2022 dans son intégralité,


- et statuant de nouveau,

- débouter la société [R]-[D], ès qualités, de l'ensemble de ses demandes,

- condamner la société [R]-[D], ès qualités, à verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société [R]-[D], ès qualités, aux entiers dépens de première instance et d'appel.


Par dernières écritures notifiées par RPVA le 20 février 2023, auxquelles la cour se réfère expressément, la société [R]-[D], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Autos [Localité 6], demande à la cour de :


- débouter M. [C] de l'ensemble de ses demandes,

- confirmer le jugement dont appel, sauf à juger que M. [C] sera condamné à payer la somme de 300 000 euros au titre de sa contribution à l'insuffisance d'actif,

- y ajoutant,

- condamner M. [C] à lui ès qualités la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [C] aux entiers dépens.


Par avis du 28 mars 2023, auxquelles la cour se réfère expressément, le ministère public, demande à la cour de :


- confirmer le jugement du tribunal de commerce de Bordeaux du 26 juillet 2022 en ce qu'il a constaté des fautes de gestion à l'origine de l'insuffisance d'actif,

- s'en rapporte sur le montant de la responsabilité de M. [C] à cet égard,

- dire que l'action en faillite personnelle n'est pas prescrite,

- condamner M. [C] à une mesure de faillite personnelle pour une durée de 5 ans.


Pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens des parties, il y a lieu de se référer au jugement entrepris et aux conclusions déposées.

Il a été demandé à l'audience au conseil du liquidateur de justifier du passif définitif et de l'actif en justifiant des réalisations intervenues. Il n'a pas été donné de suite à cette demande.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 24 avril 2023. L'affaire a été fixée à l'audience du 24 avril 2023, date à laquelle elle a été plaidée et mise en délibéré au 5 juin 2023. Le délibéré a été prorogé au 26 juin 2023.



MOTIFS DE LA DECISION


* sur la responsabilité pour insuffisance d'actif :

1- Aux termes des dispositions de l'article L 651-2 du code de commerce🏛, lorsque la liquidation judiciaire d'une personne morale fait apparaître une insuffisance d'actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d'actif, décider que le montant de cette insuffisance d'actif sera supporté, en tout ou en partie, par tous les dirigeants de droit ou de fait, ou par certains d'entre eux, ayant contribué à la faute de gestion. En cas de pluralité de dirigeants, le tribunal peut, par décision motivée, les déclarer solidairement responsables. Toutefois, en cas de simple négligence du dirigeant de droit ou de fait dans la gestion de la société, sa responsabilité au titre de l'insuffisance d'actif ne peut être engagée.


2- M. [C] explique que sa société a ouvert un compte bancaire auprès de la BPACA en 2012 qui lui a consenti une autorisation de découvert de 100 000 euros portée à 200 000 euros en juillet 2013 sans qu'aucun écrit ne soit formalisé à cette occasion. Il fait valoir que les autorisations de découvert ne sont dans la pratique pas toujours formalisées par un écrit et que cette autorisation a fonctionné pendant une année, jusqu'à ce que le banquier y mette fin brutalement.

L'appelant soutient encore que l'insuffisance d'actif est indéterminée. Il reproche au liquidateur de verser un état provisoire des créances datant de 2018 alors que la vérification des créances est intervenue depuis longtemps. Il indique que l'actif n'est pas inexistant puisqu'un véhicule appartenant à la société a été cédé par le liquidateur pour la somme de 15 000 euros. Il ajoute enfin que la faute qui lui est reprochée par le liquidateur, à savoir le fait de s'être contenté d'une autorisation de découvert obtenu par téléphone par la banque, est sans lien de causalité avec l'insuffisance d'actif.

3- Le liquidateur soutient que l'appelant a commis une faute de gestion en ne mettant pas en place ' des moyens de financement adéquats ' pour sa société et en se contentant d'une autorisation de découverte obtenue par téléphone alors que son activité de négoce de véhicules neufs nécessitait une importante trésorerie.

Sur ce :

[Adresse 4]- L'application des dispositions de l'article L 651-2 du code de commerce implique la démonstration :

- d'une insuffisance d'actif,

- d'une faute du dirigeant,

- d'un lien de causalité entre cette insuffisance d'actif et cette faute.


Sur l'insuffisance d'actif

5- S'il n'est pas nécessaire pour qu'il puisse être fait application des dispositions susvisées que le passif soit entièrement chiffré, contrairement à ce qui est soutenu, ni que l'actif ait été réalisé, il faut que l'insuffisance d'actif soit certaine à hauteur du montant de la condamnation sollicitée.

6- L'existence et le montant de l'insuffisance d'actif doivent être appréciés au moment où statue la juridiction saisie de l'action tendant à la faire supporter par un dirigeant social. Il appartient au liquidateur d'établir le montant de cette insuffisance d'actif en communiquant le montant du passif non contesté et en justifiant de la valeur de l'actif, que celui-ci soit d'ores et déjà réalisé ou pas.

7- En l'espèce, le liquidateur n'a pas déféré à la demande qui lui a été faite de communiquer le passif actualisé et tout élément justifiant de l'actif tel que l'inventaire réalisé lors de l'ouverture de la liquidation judiciaire. Il ne produit ainsi aux débats aucun élément sur l'actif. S'agissant du passif, sa pièce 6 qui est la liste succincte des créances avec observations arrêtée au 5 mars 2018 mentionne un passif total non définitif de 658 804,44 euros. Le passif non contesté , qui est le seul que cette juridiction puisse retenir, n'est que de 18 596,16 euros.

8- Le débiteur produit cependant un état du passif plus récent daté du 15 février 2021 qui fait apparaître un passif définitif de 383 674,13 euros. Il reconnaît en outre en page 15 que les éléments d'actifs corporels inventoriés lors de l'ouverture de la procédure de sauvegarde résultent d'une erreur de la société et que cet actif 'n'a jamais été constitué'. Il sera dès lors retenu qu'il n'existe pas d'actif mis à part un tracteur routier et un semi-remorque qui ont été cédés pour la somme de 15 000 euros.


9- Il sera dès lors jugé que l'insuffisance d'actif s'élève à 368 674,13 euros (38 3674,13-15 000⚖️)

Sur la faute

10- M. [C] soutient que le fait de ne pas avoir formalisé par écrit le nouveau découvert bancaire à hauteur de 200 000 euros que lui avait consenti la banque ne constitue pas une faute majeure alors que son activité était en pleine croissance et bénéficiaire.

11- Il indique cependant lui-même que cette trésorerie était absolument nécessaire à son activité, qui nécessite une trésorerie importante pour acquérir les véhicules destinés à la vente, et que la banque l'a placée en difficulté lorsqu'elle a sollicité le remboursement de son découvert à hauteur de 188 046,39 euros le 15 juillet 2014, et ce même si la banque avait accepté un plan d'apurement sur 10 mois.

12- La cour note que M. [C] ne justifie d'aucune autorisation de découvert, la précédente autorisation à hauteur de 100 000 euros n'étant pas plus justifiée par la production d'un écrit. La société Autos [Localité 6] a ainsi fonctionné depuis 2012 sans autorisation de découvert alors que son compte bancaire n'était pas suffisamment approvisionné.

13-Il ressort de ces éléments que M. [C] a commis une grave faute d'imprudence, qui va au-delà de la simple négligence d'un commerçant de bonne foi, puisque son activité, de ses propres dires, ne pouvait perdurer sans le maintien de cette ouverture de crédit d'un montant important qui n'avait été concrétisée par aucun écrit engageant la banque, dont les termes du remboursement ne faisaient l'objet d'aucun accord contractuel précis, et qui mettait ainsi sa société en péril puisque la banque pouvait à tout moment en solliciter le remboursement.


Sur le lien de causalité :

14- Il ressort de la liste des créances produites par le débiteur que sa principale créance est une créance du pôle de recouvrement spécialisé de la Gironde, qui fait suite au contrôle dont sa société a fait l'objet postérieurement à l'ouverture de la sauvegarde judiciaire et qui est d'un montant de 233 439 euros.

15- Cette créance est sans lien avec la faute reprochée par le liquidateur à M. [C]. L'aggravation du passif qui en est résultée ne peut pas être mise à la charge de M. [C].

16- En revanche, le surplus du passif, soit la somme de 135 235,13 euros, est bien en lien avec la faute commise par M. [C] qui a laissé perdurer son activité sans financement de la trésorerie nécessaire à celle-ci.

17- M. [C] sera ainsi condamné à verser la somme de 135 235,13 euros à la liquidation de la société Autos [Localité 6] au titre de sa contribution à l'insuffisance d'actif. Le tribunal de commerce sera ainsi infirmé uniquement sur le montant de la condamnation prononcée à l'encontre de M. [C].


* sur la faillite personnelle :

18- Aux termes de l'article L 653-1 du code de commerce,

I.-Lorsqu'une procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire est ouverte, les dispositions du présent chapitre sont applicables :


1° Aux personnes physiques exerçant une activité commerciale ou artisanale, aux agriculteurs et à toute autre personne physique exerçant une activité professionnelle indépendante y compris une profession libérale soumise à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé ;

2° Aux personnes physiques, dirigeants de droit ou de fait de personnes morales ;

3° Aux personnes physiques, représentants permanents de personnes morales, dirigeants des personnes morales définies au 2°.

Ces mêmes dispositions ne sont pas applicables aux personnes physiques ou dirigeants de personne morale, exerçant une activité professionnelle indépendante et, à ce titre, soumises à des règles disciplinaires.

II.-Les actions prévues par le présent chapitre se prescrivent par trois ans à compter du jugement qui prononce l'ouverture de la procédure mentionnée au I. Toutefois, la prescription de l'action prévue à l'article L. 653-6 ne court qu'à compter de la date à laquelle la décision rendue en application de l'article L. 651-2 a acquis force de chose jugée.


19- Aux termes de l'article L 653-[Adresse 4] du code de commerce, le tribunal peut prononcer la faillite personnelle de tout dirigeant, de droit ou de fait, d'une personne morale, contre lequel a été relevé l'un des faits ci-après :

....

5° Avoir détourné ou dissimulé tout ou partie de l'actif ou frauduleusement augmenté le passif de la personne morale.

20- Aux termes de l'article L 653-[Adresse 4] du code de commerce, le tribunal peut prononcer la faillite personnelle de toute personne mentionnée à l'article L. 653-1 contre laquelle a été relevé l'un des faits ci-après :

....

5° Avoir, en s'abstenant volontairement de coopérer avec les organes de la procédure, fait obstacle à son bon déroulement ;

6° Avoir fait disparaître des documents comptables, ne pas avoir tenu de comptabilité lorsque les textes applicables en font obligation, ou avoir tenu une comptabilité fictive, manifestement incomplète ou irrégulière au regard des dispositions applicables.

21- M. [C] fait valoir que l'action du liquidateur est prescrite sur le fondement de l'article L 653-1 du code de commerce. Sur le fond, il soutient :

- qu'il est retiré des affaires, ayant fait valoir ses droits à la retraite, de sorte que la sanction ne se justifie plus,

- qu'il n'a jamais détourné d'actifs, que cet actif n'a jamais été constitué et résulte d'une erreur de son comptable,

- qu'il a toujours répondu aux sollicitations du mandataire judiciaire,

- qu'il n'a pas pu transmettre au mandataire les chiffres de la période d'observation du fait de la carence de son expert comptable,

- qu'il ne peut lui être imputé des faits postérieurs à l'ouverture de la procédure collective

22- Le liquidateur ne répond pas sur la fin de non recevoir tirée de la prescription mais sollicite la confirmation de la décision de première instance. Sur le fond, le liquidateur reproche à l'appelant :

- un détournement d'actif, dès lors que les actifs corporels inventoriés à l'ouverture de la procédure de sauvegarde n'ont pas été retrouvés à l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire, sans aucune autre explication ou justificatif que l'affirmation selon laquelle ceux-ci auraient été inventoriés par erreur et alors même que les éléments de comptabilité de l'exercice 2013 font apparaître à l'actif un poste matériel pour 134 000 euros et que les éléments de comptabilité de l'exercice 2012 font apparaître des immobilisations pour 111 000 euros.

- de s'être abstenu volontairement de coopérer avec les organes de la procédure et ainsi d'avoir fait obstacle à son bon déroulement, en se dispensant de communiquer toute pièce justificative de la situation de l'entreprise, ce qui indubitablement contraint la conversion de la procédure de sauvegarde en liquidation judiciaire.

- de ne pas avoir tenu de comptabilité, ou d'avoir tenu une comptabilité manifestement incomplète ou irrégulière, cette situation étant démontrée en l'espèce par l'impossibilité d'une remise des pièces comptables postérieures à la clôture de l'exercice du 30 septembre 2013 et ce jusqu'à la date du prononcé de la liquidation judiciaire le 25 mars 2015, étant au surplus observé que nonobstant l'ouverture de la procédure de sauvegarde intervenue le 5 novembre 2014, la comptabilité de l'exercice clos le 30 septembre 2014 n'a jamais été communiquée aux organes de la procédure et en réalité semble n'avoir jamais été établie


sur la prescription de l'action :

23- S'il est exact, comme le soutient l'appelant, que dans l'hypothèse de la conversion d'une procédure de redressement en procédure de liquidation judiciaire, la prescription court du jugement de redressement judiciaire, considéré comme le jugement d'ouverture de la procédure, cette règle n'est pas transposable à la conversion d'une procédure de sauvegarde en une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire. Dans cette hypothèse, le point de départ est fixé au jugement d'ouverture de la seconde procédure, en l'espèce à la date d'ouverture de la liquidation, intervenue moins de trois ans avant l'assignation du liquidateur.

24- La décision de première instance sera confirmée en ce qu'elle a jugé que l'action n'était pas prescrite.

sur le fond :

25- M. [C] ne fournit aucune explication satisfaisante quant à la disparition de l'actif de sa société spécialisée dans la vente de véhicules et possédant à ce titre nécessairement un stock et dont les derniers comptes réalisés font apparaître des immobilisations corporelles à hauteur de 134 146 euros. L'erreur alléguée de son comptable n'est en effet pas démontrée. La soustraction d'actif est établie.

26- En outre, M. [C] qui n'était pas en état de cessation de paiement à la date de l'ouverture de la procédure de sauvegarde aurait dû avoir les fonds nécessaires pour régler son expertise comptable pour l'exercice 2013/2014. Il a en tout état de cause manqué à son obligation de tenir une comptabilité.

27- Il convient dès lors de confirmer la décision rendue par le tribunal de commerce de Bordeaux le 26 juillet 2022 qui a condamné M. [C] à une interdiction de gérer de 5 ans, le fait que M. [C] ait de lui-même décidé de faire valoir ses droits à la retraite étant sans incidence.


* sur les demandes accessoires :

28- M. [C] qui succombe partiellement sera condamné aux dépens de cette instance d'appel.

30- La SCP [R] es qualités sera déboutée de sa demande d'indemnité de procédure.



PAR CES MOTIFS

La cour

statuant publiquement, par décision contradictoire et en dernier ressort,

Confirme la décision rendue le 26 juillet 2022 par le tribunal de commerce de Bordeaux sauf en ce qui concerne le montant de l'insuffisance d'actif mis à la charge de M. [O] [C],

et statuant à nouveau,

Condamne M. [O] [C] à verser la somme de 135 235,13 euros à la société [R]-[D], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Autos [Localité 6], au titre de sa contribution à l'insuffisance d'actif de celle-ci,

Condamne M. [O] [C] aux dépens d'appel,

Déboute la SCP [R] en sa qualité de liquidateur de la société Auto [Localité 6] de sa demande d'indemnité de procédure,


Le présent arrêt a été signé par M. Franco, président, et par M. Goudot, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

Agir sur cette sélection :

Cookies juridiques

Considérant en premier lieu que le site requiert le consentement de l'utilisateur pour l'usage des cookies; Considérant en second lieu qu'une navigation sans cookies, c'est comme naviguer sans boussole; Considérant enfin que lesdits cookies n'ont d'autre utilité que l'optimisation de votre expérience en ligne; Par ces motifs, la Cour vous invite à les autoriser pour votre propre confort en ligne.

En savoir plus