Jurisprudence : CE Contentieux, 08-07-1998, n° 159135




Conseil d'Etat


Statuant au contentieux


N° 159135


Association "Eglise de scientologie de Paris"


M Maïa, Rapporteur


M Bachelier, Commissaire du gouvernement


M Groux, Président


Lecture du 8 Juillet 1998


REPUBLIQUE FRANCAISE


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 7 juin et 7 octobre 1994 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'ASSOCIATION "EGLISE DE SCIENTOLOGIE DE PARIS", dont le siège est 65, rue de Dunkerque, à Paris (75009) ; l'ASSOCIATION "EGLISE DE SCIENTOLOGIE DE PARIS" demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 5 avril 1994 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête dirigée contre le jugement du 28 février 1992 du tribunal administratif de Paris qui a rejeté ses demandes en décharge ou en réduction des droits et pénalités auxquels elle a été assujettie, en matière d'impôt sur les sociétés et de retenue à la source, au titre des années 1981 à 1984, de taxe sur la valeur ajoutée, au titre de la période du 1er janvier 1984 au 31 décembre 1984, de taxe d'apprentissage au titre des années 1981 à 1984, de participation des employeurs à l'effort de construction et à la formation professionnelle continue au titre, respectivement, des années 1982 et 1984 et de l'année 1984, ainsi que de la pénalité fiscale prévue par l'article 1763 A du code général des impôts, à laquelle elle a été soumise à raison de distributions effectuées de 1981 à 1984 ;


Vu les autres pièces du dossier ;


Vu le code général des impôts ;


Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;


Vu l'ordonnance n 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;


Après avoir entendu en audience publique :


- le rapport de M Maïa, Auditeur,


- les observations de Me Brouchot, avocat de l'ASSOCIATION "EGLISE DE SCIENTOLOGIE DE PARIS",


- les conclusions de M Bachelier, Commissaire du gouvernement ;


Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'à la suite de la vérification, ayant porté sur les années 1981 à 1984, dont sa comptabilité a fait l'objet en 1985, l'ASSOCIATION "EGLISE DE SCIENTOLOGIE DE PARIS" a été assujettie, par voie de taxation d'office, d'une part et sur le fondement de l'article 206-1 du code général des impôts, à l'impôt sur les sociétés au titre des années 1981 à 1984, d'autre part et à raison des bénéfices retenus dans l'assiette de cet impôt, regardés comme des revenus distribués en vertu des articles 109-1-1 et 110 du code général des impôts, à la retenue à la source prévue par l'article 119 bis du même code, pour la fraction de ces revenus qui avaient été transférés aux églises de scientologie de Grande-Bretagne et des Etats-Unis, et pour le reste des mêmes revenus, dont l'identité des bénéficiaires n'avait pas été indiquée à l'administration dans le délai prévu par l'article 117 du même code, à l'amende fiscale prévue, dans ce cas, par l'article 1763 A, enfin, à la taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 1981 au 31 décembre 1984, à la taxe d'apprentissage, à la participation des employeurs à l'effort de construction et à la participation des employeurs au financement de la formation professionnelle continue, au titre, respectivement, des années 1981 à 1984, des années 1982 et 1984 et de l'année 1984 ; que l'ASSOCIATION "EGLISE DE SCIENTOLOGIE DE PARIS" se pourvoit contre l'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 5 avril 1994, qui, après avoir relevé qu'au cours des années vérifiées, elle avait tiré la plupart de ses ressources de la vente de livres, documents et matériels, ainsi que de l'organisation de cours et entretiens destinés à faire connaître la "scientologie", et estimé que ces opérations, effectuées à titre onéreux et procédant d'une recherche permanente d'excédents de recettes, pour l'obtention desquels elle avait largement recouru à des méthodes commerciales et, en particulier, à la publicité sous ses différentes formes, étaient caractéristiques d'une exploitation à caractère lucratif, a rejeté les demandes en décharge ou en réduction des différentes impositions ci-dessus mentionnées, ainsi que des majorations, prévues, pour défaut de déclaration, par l'article 1733 du code général des impôts, alors en vigueur et des intérêts ou indemnités de retard, dont, selon le cas, elles avaient été assorties, et de l'amende fiscale mise en recouvrement en application de l'article 1763 A du code général des impôts, auxquelles le tribunal administratif de Paris avait précédemment refusé de faire droit aux termes d'un jugement du 28 février 1992 ;


Sur le moyen relatif à la régularité de la vérification de comptabilité effectuée en 1985 :


Considérant qu'en jugeant que le fait, par l'administration, d'avoir fait suivre le premier avis, reçu le 25 juin 1985 par l'ASSOCIATION "EGLISE DE SCIENTOLOGIE DE PARIS", par lequel elle avait informé celle-ci de son intention de procéder à une vérification de sa comptabilité pour les années 1981 à 1984, à compter du 9 juillet suivant, de l'envoi de nouveaux avis de vérification destinés à tenir compte des changements de dénomination de l'association et reçus par cette dernière le 10 septembre 1985, à un moment où la vérification annoncée par l'avis du 25 juin 1985, était en cours, comme prévu, depuis le 9 juillet 1985 et, n'étant pas achevée, n'avait donné lieu à aucune notification d'éventuels redressements, n'avait eu pour effet, ni de donner aux investigations effectuées après l'envoi des avis confirmatifs du 10 septembre 1985 le caractère d'une "nouvelle vérification", prohibée par l'article L51 du livre des procédures fiscales, ni de porter atteinte aux droits de la défense et de restreindre l'étendue des garanties offertes au contribuable vérifié, la cour administrative d'appel n'a pas dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis, ni commis d'erreur de droit ;


Sur les moyens ayant trait à la régularité de l'emploi de la procédure de taxation d'office :


Considérant que la cour administrative d'appel a relevé que, si l'ASSOCIATION "EGLISE DE SCIENTOLOGIE DE PARIS" avait produit la déclaration "modèle n 2070", exigée notamment des associations qui sans être passibles de l'impôt sur les sociétés à raison de l'ensemble des bénéfice qu'elles réalisent en France, sont néanmoins redevables de cet impôt, en application de l'article 206-5 du même code, à raison de certains de leurs revenus, elle n'avait pas souscrit les déclarations de résultats prévues par l'article 223 du code général des impôts, qui correspondaient à la nature exacte de ses activités, la rendant redevable de l'impôt sur les sociétés dans les conditions de droit commun, en vertu de l'article 206-1 du code ; qu'en déduisant de cette constatation que l'administration avait pu légalement et sans être tenue d'engager au préalable avec elle un débat contradictoire sur le caractère lucratif de son exploitation, l'assujettir par voie de taxation d'office, à l'impôt sur les sociétés en application des dispositions du 2 de l'article L 66 du livre des procédures fiscales, dans leur rédaction alors applicable, la cour administrative d'appel n'a pas commis d'erreur de droit ;


Considérant que la cour a jugé, à bon droit aussi, que l'association ne pouvait utilement et en tout état de cause, se prévaloir, sur le fondement de l'article 1er du décret n 83-1025 du 28 novembre 1983, des indications contenues dans la note 13 L-7-88 du 6 mai 1988, quant à l'application du II de l'article 81 de la loi n 86-1317 du 30 décembre 1986, portant loi de finances pour 1987, dont les dispositions, ultérieurement reprises à l'article L68 du livre des procédures fiscales, subordonnent désormais la mise en oeuvre de la procédure de taxation d'office, notamment en matière d'impôt sur les sociétés, à la condition que le contribuable passible de cet impôt n'ait pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une première mise en oeuvre l'ayant invité à souscrire la déclaration de ses résultats, dès lors que l'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie au titre des années 1981 à 1984 avait été mis en recouvrement avant la publication de cette note au bulletin officiel des impôts ;


Considérant qu'aux termes du 2 de l'article 119 bis, déjà mentionné, du code général des impôts : "Sous réserve des dispositions de l'article 239 bis B, les produits visés aux articles 108 à 117 bis donnent lieu à application d'une retenue à la source dont le taux est fixé par l'article 187-1 lorsqu'ils bénéficient à des personnes qui n'ont pas leur domicile fiscal ou leur siège en France" ; que, selon l'article 1672 du même code : " 2 La retenue à la source prévue au 2 de l'article 119 bis est versée au Trésor par la personne qui assure le paiement des revenus Un décret fixe les modalités et les conditions d'application de la présente disposition et, notamment, les obligations auxquelles doivent se soumettre les personnes chargées d'opérer la retenue" ; que le I de l'article 378 de l'annexe II au code général des impôts précise, dans sa rédaction , que : "Les sommes prélevées au titre de la retenue à la source prévue au 2 de l'article 119 bis du code général des impôts par un établissement payeur au cours de chaque trimestre fait l'objet, dans le mois suivant, d'un versement à la recette des impôts du lieu de cet établissement payeur" et que lorsque l'établissement payeur est la société, l'entreprise ou la collectivité débitrice des revenus, la recette compétente est celle du lieu où est souscrite la déclaration des résultats de revenus" ; que le II du même article indique que "chaque versement est accompagné du dépôt d'une déclaration établie sur une formule délivrée par l'administration" ; qu'en l'absence de production, dans le délai prescrit, de la déclaration prévue par les dispositions précitées, l'administration est en droit de soumettre les produits distribués à la retenue à la source, par voie de taxation d'office ; qu'ainsi, en jugeant que, faute par l'ASSOCIATION "EGLISE DE SCIENTOLOGIE DE PARIS" d'avoir déclaré les sommes versées par elle aux associations de scientologie de Grande-Bretagne et des Etats-Unis, qui devaient donner lieu à l'application de la retenue à la source prévue par le 2 de l'article 119 bis du code général des impôts, que l'administration était fondée à les soumettre à cette retenue, par voie de la taxation d'office, la cour administrative d'appel n'a pas commis d'erreur de droit ;


Sur les moyens relatifs à la régularité des notifications de redressements adressés les 12 décembre 1985 et 4 novembre 1986 à l'ASSOCIATION "EGLISE DE SCIENTOLOGIE DE PARIS" :


Considérant que la cour administrative d'appel a relevé, sans en dénaturer les termes, que la notification du 12 décembre 1985 mentionnait qu'elle était effectuée selon la procédure de taxation d'office ; que, dans ces conditions, l'association ne peut utilement critiquer le motif erroné, mais surabondant, par lequel la cour a cru devoir ajouter que l'administration n'était pas tenue d'indiquer au contribuable, lorsqu'elle lui notifie des redressements, la nature de la procédure d'imposition selon laquelle elle a procédé à ces derniers ;


Considérant qu'en estimant que les bases de calcul des impositions d'office mentionnées dans les notifications des 12 décembre 1985 et 4 novembre 1986, étaient suffisamment précises pour satisfaire aux prescriptions de l'article L 76 du livre des procédures fiscales, la cour a porté , à cet égard, sur ces pièces du dossier, une appréciation souveraine, qui ne peut être discutée devant le juge de cassation ;


Sur le moyen relatif aux pénalités dont les droits en principal assignés à l'ASSOCIATION "EGLISE DE SCIENTOLOGIE DE PARIS" ont été assortis :


Considérant que l'association n'est pas recevable, pour demander la décharge de ces pénalités, à invoquer, pour la première fois devant le juge de cassation, les dispositions de l'article L 80 CA du livre des procédures fiscales ;


Sur le moyen ayant trait à l'amende fiscale prévue par l'article 1763 A du code général des impôts :


Considérant qu'en jugeant qu'il ne découle pas du fait que cette amende a pour fait générateur l'expiration du délai dans lequel, en vertu de l'article 117 du code, la personne morale qui a distribué des revenus d'un montant supérieur à celui des bénéfices qu'elle a déclaré avoir répartis entre ses associés, actionnaires ou porteurs de parts ou mis à leur disposition au cours de la période retenue pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés, aurait dû faire connaître à l'administration l'identité des bénéficiaires de cet excédent de distribution, que cette amende doive être établie au titre d'une année déterminée, qui serait celle de la réalisation des bénéfices ainsi distribués, la cour administrative d'appel n'a entaché son arrêt, ni de contradiction de motifs, ni d'erreur de droit ;


Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'ASSOCIATION "EGLISE DE SCIENTOLOGIE DE PARIS" n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;


DECIDE :


Article 1er : La requête de l'ASSOCIATION "EGLISE DE SCIENTOLOGIE DE PARIS" est rejetée.


Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'ASSOCIATION "EGLISE DE SCIENTOLOGIE DE PARIS" et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

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