Jurisprudence : CA Lyon, 30-05-2023, n° 20/02660, Infirmation partielle


N° RG 20/02660 - N° Portalis DBVX-V-B7E-M6XB


Décision du

TJ hors JAF, JEX, JLD, Aa A, JCP de LYON

Au fond

du 16 janvier 2020


RG : 18/6831

ch n°1 cab 01 B


[D]


C/


[D]


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


COUR D'APPEL DE LYON


1ère chambre civile B


ARRET DU 30 Mai 2023



APPELANTE :


Mme [F] [D] épouAbe [Z]

née le … … … à [… …] (…)

[Adresse 2]

[Localité 5]


Représentée par Me Edouard NEHMAN, avocat au barreau de LYON, toque : 1590, avocat postulant

ayant pour avocat plaidant Me Julien TAMBE de la SCP FICHTER TAMBE, avocat au barreau de GRENOBLE, toque : B114


INTIMEE :


Mme [Ac] [Ad] épouse [B]

née le … … … à [… …] (…)

[Adresse 3]

[Localité 8]


Représentée par Me Catherine VEROT-FOURNET, avocat au barreau de LYON, toque : 630


* * * * * *


Date de clôture de l'instruction : 05 Mai 2022


Date des plaidoiries tenues en audience publique : 20 Février 2023


Date de mise à disposition : 23 mai 2023 prorogée au 30 Mai 2023, les avocats dûment avisés conformément au code de procédure civile


Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Olivier GOURSAUD, président

- Stéphanie LEMOINE, conseiller

- Bénédicte LECHARNY, conseiller


assistés pendant les débats de Elsa SANCHEZ, greffier


A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile🏛.


Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile🏛,


Signé par Olivier GOURSAUD, président, et par Elsa SANCHEZ, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.


* * * *



FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :


[V] [D] et [N] [K] ont eu deux filles :

- Mme [Ac] [Ad] épouse [Ae], née le … … …,

- Mme [F] [D] épouse [Ab], née le … … ….


[V] [D] est décédé le 23 mai 2012 et [N] [K] veuve [D] est décédée le 20 septembre 2016.


Aux termes d'un testament authentique reçu le 29 février 2012 par Maître [H], notaire à [Localité 7] et Maître [U], notaire à [Localité 9], [N] [K] a institué pour légataire à titre universel Mme [I] [B].


La succession se compose activement de :

- une maison de 85 m² estimée à 218 000 €,

- un compte de dépôt ouvert à la caisse d'épargne Rhône Alpes dont le solde au jour du décès, intérêts inclus est de 1 375,24 €,

- plusieurs comptes ouverts à la caisse d'épargne Rhône Alpes dont le solde au jour du décès, intérêts inclus, est de 2 352,34 €.


Par exploit d'huissier de justice du 25 mai 2018, Mme [I] [D] a fait assigner Mme [F] [D] en partage.


Par jugement du 16 janvier 2020, le tribunal judiciaire de Lyon a :

- ordonné l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de [N] [K],

- fixé la créance de Mme [Ac] [Ad] épouse [B] contre la succession de [N] [D] à la somme de 2 690 €,

- fixé les droits respectifs de [F] [D] et de [I] [D] dans la succession de [N] [D] de la manière suivante :

- Mme [F] [D] : 1/3 des biens composant la succession,

- Mme [I] [D] : 2/3 des biens composant la succession,

- renvoyé les parties devant le notaire pour dresser l'acte de partage conformément aux droits de chacune des héritières tels que fixés au présent jugement et désigné Maître [P], [Adresse 1], pour y procéder,

préalablement au partage et pour y parvenir,

- ordonne la licitation, sur le cahier des charges qui sera établi par Maître Verot Fournet, ou tout autre avocat qui s'y substituerait, à l'audience des criées du tribunal judiciaire de Lyon du bien immobilier, constitué d'une maison d'habitation située [Localité 7] au [Adresse 4] à [Localité 7] et cadastrée section BA feuille 000ba 01 n° [Cadastre 6] sur une mise à prix de 220 000€, avec possibilité de baisse immédiate d'un quart à défaut d'enchère,

- rappelé que cette licitation est faite selon les règles prévues par les articles 1271 à 1281 du code de procédure civile🏛🏛,

- autorisé l'organisation d'une visite des lieux avec le concours de tout huissier de justice compétent, à la date qui aura sa convenance, l'huissier pouvant se faire assister si besoin de deux témoins, de serrurier et de la force publique,

- dit que l'huissier pourra également se faire assister d'un ou plusieurs professionnels agréés, chargé d'établir et de réactualiser les différents diagnostics immobiliers prévu par des règlements en vigueur et qu'il devra aviser les sollicitant ou mandataire de cette visite, 15 jours au moins avant la date fixée par lettre recommandée avec accusé de réception,


- dit que si aucune enchère n'atteint le montant de la mise à prix, le notaire, peut constater l'offre la plus élevée et adjuger le bien à titre provisoire pour le montant de cette offre et dit que sauf renonciation du vendeur, le tribunal qui a fixé la mise à prix, saisi à la requête du notaire, de l'avocat ou de tout intéressé, peut soit déclarer l'adjudication définitive et la vente réalisée, soit ordonner qu'une nouvelle vente aura lieu ; en ce dernier cas, il fixe le délai de la nouvelle vente sans que celui-ci puisse être inférieur à quinze jours, la mise à prix ainsi que les modalités de la publicité,

- dit que l'ensemble des frais correspondants seront pris en frais privilégié de vente,

- rejette l'ensemble des demandes formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile🏛,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

- ordonne l'emploi des dépens de la présente procédure en frais privilégiés de partage que les avocats de la cause pourront recouvrer par application de l'article 699 du code de procédure civile🏛 et sous réserve des règles applicables en matière d'aide juridictionnelle.



Par déclaration du 18 mai 2020, Mme [F] [D] a interjeté appel.


Au terme de ses dernières conclusions notifiées le 2 mars 2022, Mme [F] [D] épouse [Z] demande à la cour de :

- infirmer le jugement rendu le 16 janvier 2020 par le tribunal judiciaire de Lyon et statuant à nouveau,

- rejeter la demande de fixation d'une créance de Mme [Ae] contre la succession de [N] [D],

- annuler le testament rédigé par [N] [K] veuve [D] qui lègue la totalité de la quotité disponible à Mme [Ac] [Ad] épouse [B], à son détriment,

- en conséquence, fixer les droits des parties dans la succession de [N] [D] à ¿ pour elle et à ¿ pour Mme [B], à l'exception des biens recelés,

- constater l'existence d'un recel successoral, et par conséquent, condamner Mme [B] au rapport des sommes recelées soit à minima la somme de 63 018,60 €, somme à parfaire devant notaire en cas de découverte d'autres détournements et la priver de droits sur celles-ci,

- constater que la somme de 450 000 € a intégré l'actif à partager en lieu et place de la maison indivise situé [Adresse 4] à [Localité 7],

- dire et juger que Mme [B] a bénéficié d'un avantage indirect rapportable à la succession pour la jouissance privative du bien immobilier depuis mai 2012 ou à tout le moins d'une indemnité d'occupation pour l'occupation du bien depuis le 21 septembre 2016, jusqu'au 25 mars 2021 et l'y condamner,

- dire et juger que Mme [B] est redevable envers l'indivision, au titre de l'avantage indirect et de l'indemnité d'occupation due, de la somme de 168 848 € ou à tout le moins de la somme de 86 022 €, s'il est retenu que l'indemnité court depuis septembre 2016, date du décès de Mme [D] (54 mois à 1 593 €) et l'y condamner,

- condamner Mme [B] à lui payer la somme de 4 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonner l'emploi des dépens en frais privilégiés de partage, et dire que chacun des avocats pourra les recouvrer, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.


Au terme de ses dernières conclusions notifiées le 1er février 2022, Mme [Ac] [Ad] épouse [B] demande à la cour de :

- juger qu'en tant que légataire universel, elle est recevable et bien fondée en ses demandes et débouter Mme [F] [D] de l'intégralité de ses demandes,

- à titre infiniment subsidiaire, le montant mensuel de la créance au titre de l'indemnité d'occupation de son fils sera fixé à 256 € par mois du 21 septembre 2016 au jour de son départ le 1er mars 2021,

- juger que le testament de [N] [K] veuve [D] est valable,

- juger que Mme [F] [D] lui est redevable, en sa qualité de légataire universelle, d'une indemnité d'1/3 de la valeur des biens composant la succession,

- confirmer le jugement dont appel qui a :

- ordonné l'ouverture des opérations de compte, liquidation de la succession de [N] [K] veuve [D],

- fixé sa créance contre la succession de [N] [D] à la somme de 2 690 €,

à titre subsidiaire et si sa qualité de légataire universelle n'était pas reconnue,

- fixer les droits respectifs de [F] [D] et de [I] [D] dans la succession de [N] [D] de la manière suivante :

- Mme [F] [D] : 1/3 des biens composant la succession

- Mme [I] [D] : 2/3 des biens composant la succession,

- ordonner le partage et renvoyer les parties devant le notaire désigné, Maître [P] pour établir l'acte de partage,

- condamner Mme [F] [D] à lui verser la somme de 6 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.



Par ordonnance du 6 janvier 2022, le conseiller de la mise en état a rejeté la demande de Mme [I] [D] tendant à voir prononcer l'irrecevabilité des prétentions de Mme [F] [D] en appel au motif qu'il s'agit de demandes nouvelles.


L'ordonnance de clôture est intervenue le 5 mai 2022.


Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile🏛, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.



MOTIFS DE LA DECISION


1. Sur la fixation de la créance de Mme [I] [D] au titre des dépenses afférentes à la chaudière


Mme [F] [D] conteste la créance reconnue au profit de Mme [I] [D], par le jugement déféré, contre la succession de [N] [D], à hauteur de 2 690 €, pour le financement d'une chaudière.


Elle fait valoir:

- que la preuve n'est pas rapportée de ce que le financement de l'installation de la chaudière n'a pas été fait avec une intention libérale,

- que le fils de Mme [Ac] [D] vit dans la maison indivise dépendant de la succession depuis 2012 et que cette dépense a été engagée, en 2014, pour son confort,

- que Mme [I] [D] avait la possibilité de financer l'achat de la chaudière directement avec le compte bancaire de [N] [D] pour lequel elle avait procuration et qui permettait cette dépense,

- que Mme [I] [D] profite de la présente procédure pour se faire rembourser un seconde fois une somme importante.


Mme [I] [D] fait valoir qu'elle et son conjoint ont financé une nouvelle chaudière car la précédente n'était plus aux normes et qu'un agent GDF était venu couper le gaz en raison de la dangerosité de l'installation.


Réponse de la cour


Il est constant entre les parties que Mme [I] [D] et son époux ont financé en 2014 une nouvelle chaudière, installée dans la maison de la défunte, dans laquelle vit M. [M] [Ae], le fils de Mme [Ac] [D], depuis 2012.


S'il est indéniable que M. [M] [Ae] a profité de cette chaudière, force est de retenir qu'elle constitue une amélioration de la maison d'habitation appartenant à la défunte.


En conséquence, par confirmation du jugement, il convient, selon facture du 4 décembre 2014 émise par la société BM, de fixer à la somme de 2.690 euros, la créance de Mme [I] [D] contre la succession de [N] [D].


2. Sur la nullité du testament


Mme [F] [D] soutient :

- que [N] [D] était âgée de 80 ans le 29 février 2012 lorsqu'elle a signé le testament,

- qu'il est curieux qu'elle ait attendu d'avoir 80 ans pour décider d'avantager l'une de ses filles " pour des raisons qui lui étaient personnelles ",

- qu'elle était très proche de sa famille, ce qui rend encore plus curieux les termes de ce testament,

- que [N] [D] ne savait ni lire ni écrire le français, de sorte qu'il est particulièrement étrange qu'elle ait pu apposer sa signature sur le testament litigieux sans qu'un traducteur n'ait pu lui en donner la teneur,

- que la signature apposée sur le testament ne correspond pas à celle que [N] [D] a pu apposer sur d'autres documents, notamment sur sa carte de séjour,

- que le testament a été rédigé trois mois avant le décès de [V] [D] dans un contexte particulier puisque Mme [I] [D] a menacé sa mère de ne plus l'amener voir son mari qui était malade si elle ne signait pas un document,

- que [N] [D] prenait du Lexomil depuis décembre 2011 dont les effets indésirables peuvent être des sensations d'ivresse, somnolence, ralentissement des idées, fatigue, augmentation de l'anxiété, agitation, confusion des idées,

- que [N] [D] était régulièrement hospitalisée pour des dialyses à l'occasion desquelles elle perdait beaucoup de poids, notamment pour une dialyse la veille de la signature du testament, de sorte qu'il est impossible d'imaginer qu'elle avait toutes ses capacités physiques et mentales pour tester.


Mme [I] [D] fait valoir :

- que [N] [D] parlait très bien le français dès lors qu'elle vivait en France depuis 50 ans lorsque le testament a été rédigé et qu'en tout état de cause, il n'est pas démontré qu'elle ne parlait ni ne comprenait pas le français,

- que [N] [D] avait la volonté de la favoriser car elle était un soutien dans sa vie comme dans sa maladie,

- qu'il n'est pas démontré que la signature portée sur le testament soit une fausse signature et aucune action en faux et usage de faux n'a été engagée par Mme [Z],

- que [N] [D] était entourée de deux notaires lorsqu'elle a signé le testament litigieux,

- que Mme [Ab] a été informée du testament puisqu'elle a pris rendez-vous avec le notaire pour que sa mère modifie l'acte,

- que [N] [D] a refusé de modifier le testament, de sorte que sa volonté de l'avantager dans sa succession a été réitéré.


Réponse de la cour


Suivant un testament authentique du 29 février 2012, [N] [K] a légué à sa fille, Mme [I] [D], la quotité disponible de ses biens.


En premier lieu, il est rappelé que la dénégation de signature d'un testament authentique ne peut être poursuivie que suivant la procédure en inscription de faux, qui n'a pas été introduite en l'espèce, alors que Me [H], qui est l'un des notaires ayant reçu l'acte, mentionne expressément que la signature du testateur a été recueillie par ses soins. Ce moyen ne peut donc qu'être rejeté.


Pour les mêmes motifs, Mme [F] [D] ne peut soutenir, sans introduire une procédure en inscription de faux, que [N] [K] ne comprenait pas le français et qu'elle aurait eu besoin d'un traducteur alors que les deux notaires ayant reçu l'acte mentionnent que les termes du testament leur ont été dictés par le testateur. Ce moyen doit donc également être rejeté.


En second lieu, les simples doutes émis par Mme [F] [D] sur la validité du testament, puisqu'elle se borne à soutenir qu'il est 'curieux' que sa mère favorise sa soeur à son détriment, ou que son âge, le contexte familial ou son état de santé et les médicaments qu'elle prenait seraient de nature à rendre inimaginable 'qu'elle avait toutes ses facultés physiques et mentales pour tester', qui ne sont que de simples suppositions, ne sauraient établir l'insanité d'esprit de [N] [K] au moment de la rédaction du testament. En effet, le simple fait qu'elle prenne des médicaments pouvant avoir des effets indésirables ne signifie pas nécessairement que ces effets indésirables se sont produits et encore moins qu'ils auraient altéré sa volonté. Il en va de même pour son état dépressif et sa fatigue. En outre, sa lucidité jusqu'à la date de son décès est attestée par l'une des ses amies, Mme [S]. Ce moyen ne peut donc qu'être rejeté.


Au regard de l'ensemble de ces éléments, il convient de rejeter la demande d'annulation du testament.


Par voie de conséquence, il convient de confirmer le jugement ayant fixé les droits respectifs de Mmes [F] et [I] [D] dans la succession de [N] [D] de la manière suivante:

- 1/3 des biens composant la succession pour Mme [F] [D],

- 2/3 des biens composant la succession pour Mme [I] [D].


3. Sur le recel successoral


Mme [F] [D] soutient que Mme [I] [D] doit rapporter a minima à la succession la somme de 63 018,60 €. Elle fait valoir :

- que plusieurs mouvements suspects ont été réalisés sur les comptes bancaires de [N] [D], qui ne savait ni lire ni écrire, et était donc dans l'incapacité de faire un retrait ou un virement de compte à compte ou de rédiger des chèques,

- que seule Mme [I] [D] disposait d'une procuration sur les comptes de ses parents,

- que Mme [I] [D], qui ne conteste pas être à l'origine des retraits, ne produit aucune facture de nature à confirmer la réalité des travaux de rénovation de la façade de la villa dont elle se prévaut,

- que les sommes retirées du compte de [N] [D] ou du compte-joint ne correspondent en rien à son train de vie et à ses besoins,

- que les comptes bancaires de [N] [D] démontrent que d'importantes sommes ont été retirées, parfois à une heure tardive, et que de nombreux chèques ont été émis alors qu'elle ne savait ni lire ni écrire,

- que Mme [I] [D] ne conteste pas avoir encaissé ou profité de ces sommes,

- que les assurances-vie souscrites à la caisse d'épargne ont également été vidées,


Mme [I] [D] fair valoir :

- que les assurances-vie ne dépendent pas de la succession,

- que la somme de 63 018,60 € correspond à des retraits effectués depuis 2006, soit en moyenne 458 € par mois, ce qui correspond aux dépenses courantes d'un foyer,

- que les retraits d'espèce correspondent à la rémunération de travaux de rénovation de la façade de la villa,

- qu'elle ne bénéficie pas d'une procuration sur le compte de ses parents.


Réponse de la cour


Ainsi que l'observe Mme [I] [D], Mme [F] [D] ne rapporte pas la preuve qu'elle bénéficiait d'une procuration sur les comptes de sa mère, ce qu'elle conteste, et qu'elle est à l'origine des retraits, virements et chèques litigieux, ce qu'elle conteste également.


En outre, la somme de 63 018, 60 euros dont il est fait état correspond à l'intégralité des retraits effectués de 2006 à 2016, soit à une somme inférieure à 500 euros par mois, ce qui correspond à des dépenses courantes et ne sauraient en tout état de cause être considérées comme des mouvements suspects ainsi que Mme [F] [D] l'affirme.


Enfin, les produits des assurances-vie ne font pas partie de l'actif de la succession et ils ne sauraient donc être pris en compte au titre d'un recel successoral.


Au regard de l'ensemble de ces éléments, il convient de débouter Mme [F] [D] de ses demandes au titre d'un recel successoral.


4. Sur la vente de la maison


Mme [F] [D] fait valoir que le bien immobilier situé [Adresse 4], à [Localité 7], dont la licitation a été ordonnée par le jugement dont appel a été vendu pour la somme de 450 000 euros, par acte notarié reçu le 1er octobre 2021 et sollicite en conséquence que cette valeur soit intégrée à l'actif à partager.


Si Mme [F] [D] ne produit pas l'acte de vente dont elle fait état, force est de constater que Mme [I] [D] ne conteste pas la vente au prix invoqué.


Il convient, en conséquence, d'infirmer le jugement ayant ordonné la licitation du bien et de dire que la somme de 450 000 euros doit être ajoutée à l'actif successoral.


5. Sur l'indemnité d'occupation


Mme [F] [D] soutient que M. [M] [Ae], fils de [I] [D], occupe la maison depuis mai 2012 sans qu'elle ne puisse avoir accès à la maison et sans qu'il ne s'acquitte des frais fonciers. Elle en déduit que Mme [I] [D] bénéficie de la jouissance privative du bien.


Elle fait valoir:

- qu'elle avait les clefs de la maison mais qu'elle ne pouvait pas y entrer, sous peine de violation de domicile,

- que Mme [I] [D] est redevable d'une indemnité d'occupation du 23 mai 2012 au 25 mars 2021,

- que même s'il devait être considéré que l'occupation de la maison par M. [M] [B] s'est faite avec l'accord de [N] [D], l'indemnité d'occupation doit courir au moins à partir du 21 septembre 2016, lendemain du décès,

- que le bien étant occupé, elle n'a pas pu en jouir ni profiter des fruits en louant le bien à un tiers,

- que Mme [I] [D] ne peut, compte tenu de la nullité du testament, prétendre qu'en tant que légataire universel, elle serait devenue propriétaire du patrimoine de [N] [D] à la date du décès,

- que compte tenu du prix de vente de la maison, sa valeur locative est estimée à 1.593 € par mois après abattement, de sorte que Mme [I] [D] est redevable d'une indemnité d'occupation de 168 858 €, s'il est retenu que l'indemnité court depuis mai 2012 ou de 86 022 €, s'il est retenu que l'indemnité court depuis septembre 2016.


Mme [B] fait valoir :

- que la demande d'indemnité d'occupation pour la période antérieure au décès de [N] [D] est infondée, dès lors que celle-ci avait parfaitement le droit d'héberger son petit-fils à titre gracieux,

- que le fait pour M. [M] [B] de bénéficier d'un logement gratuit n'est pas constitutif d'un avantage successoral,

- que Mme [F] [D] détenait un jeu de clefs de la maison, dès lors qu'elle a fait visiter la maison en mars 2021, de sorte que la jouissance de la maison n'était pas exclusive au profit de son fils,

- qu'en tant que légataire universel, elle est devenue propriétaire du patrimoine de sa mère au jour de son décès, de sorte qu'aucune indemnité d'occupation ne peut être due,

- que pour calculer le montant de la prétendue indemnité d'occupation, Mme [Ab] ne se base pas sur la valeur du marché locatif qui serait de l'ordre de 600 € au regard de la surface et de l'état de vétusté du bien,

- que l'éventuel montant mensuel de l'indemnité d'occupation ne pourrait être que de 256 €,

- que l'indemnité d'occupation ne peut courir antérieurement au décès de [N] [D].


Réponse de la cour


En premier lieu, il est constant entre les parties que Mme [F] [D] détenait les clés de la maison, de sorte qu'elle n'est pas fondée à soutenir que Mme [I] [D] bénéficiait de sa jouissance exclusive.


En second lieu, il est constant entre les parties que c'est M. [M] [Ae] qui occupait la maison d'habitation dépendante de la succession jusqu'à sa vente, de sorte que la demande en paiement d'une éventuelle indemnité d'occupation doit être dirigée contre lui et non pas contre Mme [I] [D].


En conséquence, il convient de débouter Mme [F] [D] de ses demandes en paiement au titre d'une indemnité d'occupation.


6. Sur les autres demandes


Le jugement est confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à l'application de l'article 700 du code de procédure civile.


L'équité commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de Mme [I] [D], en appel. Mme [F] [D] est condamnée à lui payer à ce titre la somme de 3.000 €.


Les dépens d'appel sont à la charge de Mme [F] [D], qui succombe en sa tentative de remise en cause du jugement.



PAR CES MOTIFS


LA COUR,


Confirme le jugement déféré sauf en ce qu'il ordonne la licitation à l'audience des criées du tribunal judiciaire de Lyon du bien immobilier, constitué d'une maison d'habitation située [Adresse 4] à [Localité 7] cadastrée section BA Feuille 000BA 01 n°[Cadastre 6] sur une mise à prix de 220 000 euros,


statuant à nouveau et y ajoutant,


Déboute Mme [F] [D] épouse [Z] de sa demande d'annulation du testament authentique du 29 février 2012;


Déboute Mme [F] [D] épouse [Z] de ses demandes au titre du recel successoral;


Dit que la somme de 450 000 euros perçue suite à la vente du bien immobilier dépendant de la succession situé [Adresse 4] à [Localité 7] doit être ajoutée à l'actif successoral;


Déboute Mme [F] [D] épouse [Z] de ses demandes au titre d'une indemnité d'occupation;


Condamne Mme [F] [D] épouse [Z] à payer à Mme [Ac] [Ad] épouse [B], la somme de 3.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, en cause d'appel,


Déboute les parties de toutes leurs autres demandes.


Condamne Mme [F] [D] épouse [Z] aux dépens de la procédure d'appel, et accorde aux avocats qui en ont fait la demande le bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.


La greffière, Le Président,

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