Jurisprudence : Cass. crim., 16-05-2023, n° 23-80.982, F-B, Cassation

Cass. crim., 16-05-2023, n° 23-80.982, F-B, Cassation

A39449UM

Référence

Cass. crim., 16-05-2023, n° 23-80.982, F-B, Cassation. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/96049428-cass-crim-16052023-n-2380982-fb-cassation
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Abstract

L'article 803-7, alinéa 1, du code de procédure pénale, en application duquel une juridiction peut, lorsqu'elle ordonne la mise en liberté immédiate d'une personne dont la détention provisoire est irrégulière en raison du non-respect des délais ou formalités prévus par ce code, placer l'intéressée sous contrôle judiciaire si cette mesure est indispensable pour assurer l'un des objectifs énumérés à l'article 144 du même code, est applicable lorsque l'irrégularité de la détention provisoire résulte de la méconnaissance d'une formalité prévue par le code de la justice pénale des mineurs, dont l'article L. 13-1 opère, en l'absence de disposition spécifique de ce code, un renvoi aux dispositions du code de procédure pénale


N° Z 23-80.982 F-B

N° 00732


ODVS
16 MAI 2023


CASSATION SANS RENVOI


M. BONNAL président,


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 16 MAI 2023



M. [PB] [A] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 3e section, en date du 2 février 2023, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs d'homicide involontaire, infractions à la législation sur les stupéfiants, violences et vol, a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention le plaçant en détention provisoire.


Un mémoire a été produit.

Sur le rapport de M. Charmoillaux, conseiller référendaire, les observations de Me Bardoul, avocat de M. [PB] [A], et les conclusions de M. Lemoine, avocat général, après débats en l'audience publique du 16 mai 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Charmoillaux, conseiller rapporteur, Mme Ingall-Montagnier, conseiller de la chambre, et Mme Dang Van Sung, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale🏛, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.

2. M. [PB] [A], né le [Date naissance 2] 2003, a été mis en examen des chefs susvisés le 20 janvier 2023, pour des faits commis entre courant janvier 2021 et le 17 janvier 2023.

3. Par ordonnance du même jour, l'intéressé a été placé en détention provisoire.

4. M. [A] a relevé appel de cette décision.


Examen des moyens

Sur les premier et troisième moyens

5. Ils ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.

Mais sur le deuxième moyen

Enoncé du moyen

6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté l'exception de nullité, a ordonné à titre exceptionnel la détention provisoire de M. [Aa] et l'a placé sous mandat de dépôt, alors « que le recueil de renseignements socio-éducatifs est obligatoire avant toute réquisition ou décision de placement en détention provisoire ou de prolongation de la détention provisoire d'un mineur mis en examen ; que cette obligation s'applique même lorsque l'intéressé est devenu majeur le jour où les poursuites sont exercées dès lors qu'il n'a pas atteint ses vingt-et-un ans sans qu'y fasse obstacle la circonstance que l'intéressé serait également mis en examen pour des faits commis lorsqu'il était majeur ; qu'en retenant pour rejeter les demandes de nullité soulevées par M. [A], mis en examen âgé de moins de 21 ans, que les règles suscitées ne sont pas applicables au placement en détention provisoire d'une personne mise en examen pour des faits dont certains ont été commis alors qu'elle était âgée de plus de 18 ans et que M. [A] est mis en examen pour des faits commis, pour partie, pendant sa minorité, et, pour partie, pendant sa majorité, la cour d'appel a violé les articles L. 322-4, L. 322-5 et L. 322-6 du code de la justice pénale des mineurs🏛🏛🏛 et les articles 144, 591 et 593 du code de procédure pénale🏛🏛🏛. »



Réponse de la Cour

Vu les articles L. 322-4, L. 322-5 et L. 322-6 du code de la justice pénale des mineurs :

7. Selon les deux premiers de ces textes, lorsque le procureur de la République saisit le juge des enfants, le juge d'instruction ou le tribunal pour enfants, le recueil de renseignements socio-éducatifs (RRSE) est obligatoire avant toute réquisition ou décision de placement en détention provisoire ou de prolongation de la détention provisoire d'un mineur mis en examen ou convoqué devant une juridiction de jugement.

8. Selon le troisième, cette obligation s'applique lorsque l'intéressé est devenu majeur le jour où les poursuites sont exercées dès lors qu'il n'a pas atteint l'âge de vingt-et-un ans.

9. En l'espèce, pour rejeter l'exception de nullité de l'ordonnance de placement en détention provisoire de M. [A], tirée de l'absence de RRSE, la chambre de l'instruction énonce que l'intéressé était majeur au moment d'une partie des faits reprochés et qu'il a fait l'objet d'une enquête sociale rapide.

10. En statuant ainsi, alors que M. [A], né le [Date naissance 2] 2003, qui était mineur lors de la commission d'une partie des faits reprochés couvrant la période écoulée entre courant 2021 et le 17 janvier 2023, n'avait pas atteint l'âge de vingt-et-un ans le jour où les poursuites ont été exercées, la chambre de l'instruction a méconnu les textes susvisés.

11. La cassation est par conséquent encourue.

Portée et conséquences de la cassation

12. La cassation aura lieu sans renvoi, la Cour de cassation étant en mesure d'appliquer directement la règle de droit et de mettre fin au litige, ainsi que le permet l'article L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire🏛.

13. Elle entraînera la remise en liberté de M. [A], sauf s'il est détenu pour autre cause.

14. Cependant, les dispositions de l'article 803-7, alinéa 1er, du code de procédure pénale🏛 permettent à la Cour de cassation de placer sous contrôle judiciaire la personne dont la détention provisoire est irrégulière en raison de la méconnaissance des formalités prévues par ce même code, auquel renvoie l'article L. 13-1 du code de la justice pénale des mineurs🏛, dès lors qu'elle trouve dans les pièces de la procédure des éléments d'information pertinents et que la mesure apparaît indispensable pour assurer l'un des objectifs énumérés à l'article 144 du même code.

15. En l'espèce, il existe des indices graves et concordants rendant vraisemblable que M. [A] ait pu participer, comme auteur ou comme complice, à la commission des infractions dont le juge d'instruction est saisi.

16. La mesure de contrôle judiciaire est indispensable afin de :

- conserver les preuves ou les indices matériels qui sont nécessaires à la manifestation de la vérité ;

- éviter toute concertation frauduleuse entre chacun des mis en cause ;

en ce que l'information judiciaire qui débute a pour objet d'identifier et d'interpeller les différents protagonistes des faits, dont certains sont en fuite, et d'établir le degré de participation de chacun d'eux ;

- garantir le maintien de la personne mise en examen à la disposition de la justice ;

en ce que M. [A], célibataire, sans enfant, sans emploi ni formation et sans revenus licites, présente des garanties de représentation très insuffisantes au regard de la peine encourue ;

- mettre fin à l'infraction et prévenir son renouvellement ;

en ce que l'intéressé est mis en examen pour des faits commis de manière habituelle sur une période de plusieurs mois, dans le cadre d'une organisation structurée, qui n'ont pris fin que par son interpellation.

17. Afin d'assurer ces objectifs, M. [A] sera astreint à se soumettre aux obligations précisées au dispositif.

18. Le magistrat chargé de l'information est compétent pour l'application des articles 139 et suivants et 141-2 et suivants du code de procédure pénale🏛🏛.


PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, en date du 2 février 2023 ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

CONSTATE que M. [PB] [A] est détenu sans titre depuis le 20 janvier 2023 ;

ORDONNE la remise en liberté de M. [A] s'il n'est détenu pour autre cause ;

ORDONNE son placement sous contrôle judiciaire ;

DIT qu'il est soumis aux obligations suivantes :

- Ne pas sortir des limites territoriales suivantes : territoire national français métropolitain ;

- Ne pas se rendre dans les lieux suivants : [Localité 1] (75) ;

- Se présenter avant le 19 mai 2023 à 10 heures 00 et ensuite les lundis, jeudis et samedis de chaque semaine au commissariat de police de [Localité 3] (94) ;

- Remettre avant le 19 mai 2023 à 10 heures 00, en échange d'un récépissé valant justification de l'identité, au commissariat de police de [Localité 3], les documents justificatifs de l'identité suivants : passeport ;

- S'abstenir de recevoir ou de rencontrer, ainsi que d'entrer en relation avec elles, de quelque façon que ce soit, les personnes suivantes : MM. [P] [D], [F] [M], [W] [Y], [G] [IB], [V] [E], [C] [B], [K] [M], [L] [R], [U] [N] [S], [KX] [YO], [J] [Y], [T] [I], [Z] [X] et [H] [O] ;

- Ne pas détenir ou porter une arme ;

DESIGNE pour veiller au respect des obligations prévues aux rubriques ci-dessus, le commissaire de police de [Localité 3] (94) ;

DESIGNE le magistrat chargé de l'information au tribunal judiciaire de Paris, aux fins d'assurer le contrôle de la présente mesure de sûreté ;

RAPPELLE qu'en application de l'article 141-2 du code de procédure pénale, toute violation de l'une quelconque des obligations ci-dessus expose la personne sous contrôle judiciaire à un placement en détention provisoire ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du seize mai deux mille vingt-trois.

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