Jurisprudence : CA Versailles, 20-04-2023, n° 22/03485, Confirmation

CA Versailles, 20-04-2023, n° 22/03485, Confirmation

A08709RN

Référence

CA Versailles, 20-04-2023, n° 22/03485, Confirmation. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/95520514-ca-versailles-20042023-n-2203485-confirmation
Copier

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES


Code nac : 66C


3e chambre


ARRET N°


CONTRADICTOIRE


DU 20 AVRIL 2023


N° RG 22/03485


N° Portalis DBV3-V-B7G-VGYW


AFFAIRE :


[P] [W] divorcée [T]


C/


[N] [D] [H]

...


Décision déférée à la cour : Décision rendue le 21 Avril 2022 par le TJ de PONTOISE

N° Chambre : 2

N° RG : 21/00088


Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :


Me Claire RICARD


Me Michèle DE KERCKHOVE de la SELARL BVK AVOCATS ASSOCIES


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


LE VINGT AVRIL DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :


Madame [P] [W] divorcée [T]

née le … … … à [Localité 10]

[Adresse 4]

[Localité 9]


Représentant : Me Claire RICARD, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 622 - N° du dossier 2221761

Représentant : Me Philippe SACKOUN, Plaidant, avocat au barreau de PARIS



APPELANTE


****************


1/ Monsieur [N] [D] [H]

né le … … … à [Localité 12]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 7]


2/ Madame [Ba] [H]

née le … … … à [Localité 14]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 6]


3/ Monsieur [Aa] [H]

né le … … … à [Localité 14]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 8]


4/ Monsieur [Ab] [H]

né le … … … à [Localité 13]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 8]


Représentant : Me Michèle DE KERCKHOVE de la SELARL BVK AVOCATS ASSOCIES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : C.26 - N° du dossier 19729

Représentant : Me Xavier HUGON de la SCP P D G B, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : U0001


INTIMES


****************



Composition de la cour :


En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile🏛, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 10 Février 2023 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :


Madame Florence PERRET, Président,,

Madame Gwenael COUGARD, Conseiller,

Madame Odile CRIQ, Conseiller,


Greffier, lors des débats : Madame Ac A,


-----


FAITS ET PROCEDURE :


Le 5 juillet 2018, à [Localité 11], [N] [H] est décédé, laissant pour lui succéder quatre enfants : M. [N] [D] [H], Mme [B] [H], M. [C] [H] et M. [Ab] [H] issus de son union dissoute par jugement de divorce du 25 janvier 2017.


Au moment de son décès, [N] [H] était domicilié [Adresse 5], chez sa compagne, Mme [P] [W] divorcée [T].


Par acte du 21 décembre 2020, M. [N] [D] [H], Mme [B] [H], M. [C] [H] et M. [Ab] [H] (ci-après, les consorts [Aa]) ont fait assigner Mme [W] devant le tribunal judiciaire de Pontoise en paiement de la somme de 179 113, 50 euros sur le fondement de l'enrichissement sans cause, en restitution de divers biens et en indemnisation de leur préjudice.


Par conclusions d'incident des 31 décembre 2021 et 2 mars 2022, Mme [W] a soulevé la prescription de l'action en réduction de libéralité, engagée à titre subsidiaire par les consorts [Aa] par conclusions du 6 octobre 2021.


Par ordonnance d'incident du 21 avril 2022, le tribunal judiciaire de Pontoise a :


- dit que l'action en réduction exercée à titre subsidiaire par les consorts [Aa] n'est pas prescrite,

- condamné Mme [W] à verser aux consorts [H] la somme globale de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile🏛,

- renvoyé l'affaire à la mise en état.


Le juge de la mise en état a rejeté la fin de non-recevoir formée par Mme [W] en retenant qu'en application de l'article 921 du code civil🏛, si l'action en réduction se prescrit par cinq ans, le point de départ de ce délai peut être reporté à deux ans à compter du moment où les héritiers ont eu connaissance de l'atteinte portée à leur réserve, ce délai de deux ans ayant pour finalité de permettre aux héritiers d'exercer leurs droits à la réduction en cas de découverte tardive de ladite atteinte et ne pouvant avoir pour résultat de réduire leur délai pour agir.


Il a ajouté que ce délai de deux ans à compter de la découverte par les héritiers de l'atteinte portée à la réserve ne saurait avoir pour résultat de réduire leur délai pour agir en réduction, ce qui aboutirait à une situation absurde dans laquelle l'héritier qui a eu une connaissance tardive de l'atteinte portée à ses droits serait plus mal traité que les autres.



Par acte du 23 mai 2022, Mme [W] a interjeté appel de cette ordonnance d'incident et prie la cour, par dernières écritures du 25 juillet 2022, de :


- la recevoir en son appel et l'y dire bien fondée,

- infirmer l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions et statuant à nouveau,

- juger irrecevable comme prescrite l'action en réduction intentée à titre subsidiaire par les consorts [H] à l'encontre de Mme [W],

- débouter les consorts [H] de toutes leurs demandes, fins et conclusions,

- condamner les consorts [Aa] à payer à Mme [W] une indemnité de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner les consorts [Aa] aux entiers dépens de première instance et d'appel avec recouvrement direct des dépens d'appel dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile🏛.


Mme [W] fait valoir qu'en vertu de l'article 921 du code civil, lorsque les héritiers découvrent l'existence de la libéralité portant atteinte à la réserve après l'ouverture de la succession, l'action en réduction est enfermée dans un délai de deux ans et que ce délai et expiré.


Par dernières écritures du 11 août 2022, les consorts [Aa] prient la cour de :


- juger mal fondée en ses demandes et prétentions Mme [W],

En conséquence,

- confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance déférée,

- débouter Mme [W] de toutes ses demandes, fins et conclusions,

- condamner Mme Mme [W] à verser aux consorts [H] la somme globale de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour l'appel,

- condamner Mme [W] aux entiers dépens de la présente instance avec recouvrement direct dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.


La cour renvoie aux écritures des parties en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile🏛 pour un exposé complet de leur argumentation.


L'ordonnance de clôture a été rendue le 15 décembre 2022.



SUR QUOI :


L'article 921 du code civil dispose en son alinéa 2 : " Le délai de prescription de l'action en réduction est fixé à cinq ans à compter de l 'ouverture de la succession ou à deux ans à compter du jour où les héritiers ont eu connaissance de l'atteinte portée à leur réserve, sans jamais pouvoir excéder dix ans à compter du décès".


Mme [W] considère que le premier juge a ajouté au texte en invoquant un délai minimal de 5 ans.


Elle expose la façon dont l'article 921 du code civil règle les différents cas qui peuvent se présenter dans l'hypothèse où d'une part, les héritiers ignorent l'atteinte portée à leur réserve et d'autre part, celle où ils en prennent conscience :


- dans le premier cas, les héritiers auraient un délai de cinq ans à compter de l'ouverture de la succession pour agir,

- dans le deuxième cas, ils disposeraient d'un délai spécifique de deux ans à compter de la découverte de l'atteinte portée à leur réserve,

- enfin, dans le cas où la découverte de l'atteinte portée à leur réserve intervient plus de cinq ans après l'ouverture de la succession, les héritiers ont deux ans, à compter de la découverte de l'atteinte portée à leur réserve , pour intenter leur action, sans que celle-ci ne puisse être intentée plus de dix ans après l'ouverture de la succession.


Les consorts [Aa] se trouvant dans le 2e cas, ils disposaient selon Mme [W] de deux ans à compter de mai 2019, date à laquelle ils prétendent avoir découvert le versement d'une sommme de 122 000 euros par leur père à Mme [W], pour agir . Les conclusions par lesquelles ils ont pour la 1e fois demandé l'action en réduction à la suite de l'assignation qu'ils ont délivrée le 21 décembre 2020, seraient donc trop tardives.


Les consorts [H] considèrent que les deux délais de l'article 921 du code civil ne sont pas alternatifs et que tant quele délai de 5 ans n'est pas expiré, ils peuvent l'invoquer à leur bénéfice quand bien même auraient-ils découvert l'atteinte à leur réserve avant son expiration.


Sur ce,


Les parties sont d'accord sur le fait que les consorts [H] n'ont pu découvrir qu'en mai 2019 que leur auteur avait versé le 16 mars 2018, soit trois mois avant sa mort, la somme de 122 000 euros à Mme [W] en utilisant de l'argent tiré de deux rachats de son assurance-vie.


L'interprétation du texte faite par l'appelante enferme le délai pour agir de ceux qui prennent tardivement conscience de l'atteinte à leur réserve et dont la raison pourrait être un acte de dissimulation de l'actif de la succession, dans une période beaucoup plus courte que pour les héritiers visés de façon générale par le premier membre de la phrase de l'article 921 du code civil sans que cette discrimination ait le moindre fondement textuel et même logique. Le législateur a voulu laisser un peu plus de temps par le biais de ce report du terme à ceux envers lesquels d'éventuelles manoeuvres auraient été commises pour les spolier.


C'est avec raison que le premier juge a procédé à une interprétation de ce texte, selon laquelle le délai de principe et donc minimal de l'action en réduction est, selon un principe général s'appliquant à n'importe quel héritier, de cinq ans à compter de l'ouverture de la succession, et en cas de méconnaissance de l'acte ou de l'événement qui porterait atteinte à leur réserve, leur donne un délai supplémentaire de deux ans à compter de leur possible prise de conscience si jamais elle a lieu après l'expiration du délai de 5 ans.


Néanmoins, un garde-fou est posé par le texte qui instaure un délai maximal de 10 ans aux fins de sécurité juridique.


Si jamais les héritiers découvrent l'atteinte à leur réserve dans le délai de principe de 5 ans à compter de l'ouverture de la succession et notamment dans les trois premières années, ils ont a minima jusqu'à 5 ans après la date du décès ou bien jusqu'à deux ans après la découverte de cette méconnaissance si elle intervient entre 5 ans et 8 ans après le décès, puisqu'une limite totale maximale de dix ans est posée par le texte régissant le délai de prescription de l'action.


En l'espèce, les consorts [Aa] ont 5 ans à compter du 5 juillet 2018, jour de l'ouverture de la succession de M. [N] [H], la date de la découverte de l'atteinte portée à leur réserve n'ayant aucune incidence en l'espèce.


La décision de première instance sera confirmée en toutes ses dispositions, y compris en ce qui concerne les frais irrépétibles et les dépens.


Mme [W] sera condamnée à payer aux intimés la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens d'appel avec recouvrement direct selon les dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.



PAR CES MOTIFS :


La cour,


Confirme en toutes ses dispositions l'ordonnance d'incident du 21 avril 2022,


Déboute Mme [Ad] [M] [W] de toutes ses demandes,


Condamne Mme [P] [M] [W] à verser à M. [N] [D] [H], Mme [B] [H], M. [C] [H] et M. [Ab] [H] la somme globale de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles engagés en appel,


Condamne Mme [P] [M] [W] aux entiers dépens de l'instance d'appel et autorise Maître [M] [O] à en poursuivre le recouvrement direct dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.


- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile🏛.


- signé par Madame F. PERRET, Président, et par Madame K. FOULON, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire


Le Greffier, Le Président,

Agir sur cette sélection :

Revues liées à ce document

Ouvrages liés à ce document

Chaîne du contentieux

Décisions similaires

Lancer la recherche par visa

Domaine juridique - IMPOTS ET TAXES

  • Tout désélectionner
Lancer la recherche par thème
La Guadeloupe
La Martinique
La Guyane
La Réunion
Mayotte
Tahiti

Utilisation des cookies sur Lexbase

Notre site utilise des cookies à des fins statistiques, communicatives et commerciales. Vous pouvez paramétrer chaque cookie de façon individuelle, accepter l'ensemble des cookies ou n'accepter que les cookies fonctionnels.

En savoir plus

Parcours utilisateur

Lexbase, via la solution Salesforce, utilisée uniquement pour des besoins internes, peut être amené à suivre une partie du parcours utilisateur afin d’améliorer l’expérience utilisateur et l’éventuelle relation commerciale. Il s’agit d’information uniquement dédiée à l’usage de Lexbase et elles ne sont communiquées à aucun tiers, autre que Salesforce qui s’est engagée à ne pas utiliser lesdites données.

Réseaux sociaux

Nous intégrons à Lexbase.fr du contenu créé par Lexbase et diffusé via la plateforme de streaming Youtube. Ces intégrations impliquent des cookies de navigation lorsque l’utilisateur souhaite accéder à la vidéo. En les acceptant, les vidéos éditoriales de Lexbase vous seront accessibles.

Données analytiques

Nous attachons la plus grande importance au confort d'utilisation de notre site. Des informations essentielles fournies par Google Tag Manager comme le temps de lecture d'une revue, la facilité d'accès aux textes de loi ou encore la robustesse de nos readers nous permettent d'améliorer quotidiennement votre expérience utilisateur. Ces données sont exclusivement à usage interne.