Jurisprudence : CE 3/8 ch.-r., 14-04-2023, n° 467129, mentionné aux tables du recueil Lebon

CE 3/8 ch.-r., 14-04-2023, n° 467129, mentionné aux tables du recueil Lebon

A18739QG

Référence

CE 3/8 ch.-r., 14-04-2023, n° 467129, mentionné aux tables du recueil Lebon. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/95317104-ce-38-chr-14042023-n-467129-mentionne-aux-tables-du-recueil-lebon
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Abstract

19-01-03-02-02 Il résulte des articles L. 57 et L. 76 du livre des procédures fiscales (LPF) que, 1) s’il appartient en principe à l’administration fiscale de notifier la proposition de rectification (PR) à l’adresse indiquée par le contribuable, 2) elle peut toutefois, lorsqu’elle apporte la preuve de ce que le domicile dont l’adresse lui a été indiquée présente un caractère fictif, retenir une autre adresse, sous réserve d’établir que cette adresse est celle où le contribuable réside effectivement....3) Cour administrative d’appel s’étant fondée, pour juger que l’administration établissait que l’adresse que lui avaient indiquée les contribuables revêtait un caractère fictif, sur ce que le contribuable avait communiqué à l’administration une adresse dans un territoire soumis à un régime fiscal avantageux dans le but d’accréditer que leur domicile fiscal s’y situait....En statuant ainsi, alors qu’il lui appartenait de rechercher si cette adresse était inexistante ou n’avait été communiquée à l’administration fiscale que dans le but d’égarer celle-ci dans la conduite de la procédure de contrôle et de rectification de l’impôt, la cour administrative d’appel a entaché ses arrêts d’une erreur de droit.



CONSEIL D'ETAT

Statuant au contentieux

N° 467129

Séance du 29 mars 2023

Lecture du 14 avril 2023

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d'Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 8ème et 3ème chambres réunies)


Vu les procédures suivantes :

1° M. B C a demandé au tribunal administratif de Lyon de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2012 et 2013, ainsi que des pénalités correspondantes. Par un jugement n° 1904352 du 9 mars 2021, ce tribunal a prononcé la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2013, ainsi que des pénalités correspondantes, et rejeté le surplus de sa demande.

Par un arrêt n° 21LY01560 du 30 juin 2022, la cour administrative d'appel de Lyon⚖️ a, sur appel du ministre de l'économie, des finances et de la relance, annulé l'article 1er du jugement du tribunal administratif et remis à la charge de M. C les impositions dont le tribunal administratif avait prononcé la décharge.

Sous le n° 467129, par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 30 août 2022, 30 novembre 2022 et 27 mars 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. C demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel du ministre de l'économie, des finances et de la relance ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛.

2° M. B C et Mme A C ont demandé au tribunal administratif de Lyon de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2014, ainsi que des pénalités correspondantes. Par un jugement n° 1904353 du 9 mars 2021, ce tribunal a fait droit à leur demande.

Par un arrêt n° 21LY01558 du 30 juin 2022, la cour administrative d'appel de Lyon⚖️ a, sur appel du ministre de l'économie, des finances et de la relance, remis à la charge de M. et Mme C les impositions dont le tribunal administratif avait prononcé la décharge, à l'exception d'un montant résultant d'une réduction des bases d'imposition à hauteur de 719 euros, réformé l'article 1er du jugement du tribunal administratif en ce qu'il avait de contraire à son arrêt et rejeté le surplus des conclusions de son appel.

Sous le n° 467132, par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 30 août 2022, 30 novembre 2022 et 27 mars 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. et Mme C demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt, en tant qu'il a partiellement accueilli l'appel du ministre de l'économie, des finances et de la relance;

2°) réglant l'affaire au fond dans cette mesure, de rejeter l'appel du ministre ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales🏛 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Benjamin Duca-Deneuve, auditeur,

- les conclusions de M. Romain Victor, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Célice, Texidor, Perier, avocat de M. et Mme C ;

Considérant ce qui suit :

1. Les pourvois formés par M. C, d'une part, et par M. et Mme C, d'autre part, présentent à juger les mêmes questions. Il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision.

2. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. C a fait l'objet d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle à l'issue duquel il a été assujetti à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre des années 2012 et 2013 et, conjointement avec son épouse, à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre de l'année 2014. Par deux jugements du 9 mars 2021, le tribunal administratif de Lyon a prononcé la décharge des impositions établies, respectivement, au titre de l'année 2013 et de l'année 2014. M. C, d'une part, M. et Mme C, d'autre part, se pourvoient en cassation contre les arrêts par lesquels la cour administrative d'appel de Lyon, statuant sur appel du ministre de l'économie, des finances et de la relance, a remis à leur charge ces impositions, en totalité pour ce qui concerne celles établies au titre de l'année 2013 et partiellement pour ce qui concerne celles établies au titre de l'année 2014.

3. Aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales🏛, dans sa rédaction applicable au litige : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation () ". Aux termes de l'article L. 76 du même livre : " Les bases ou éléments servant au calcul des impositions d'office et leurs modalités de détermination sont portées à la connaissance du contribuable trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions () ". Il résulte de ces dispositions que, s'il appartient en principe à l'administration fiscale de notifier la proposition de rectification à l'adresse indiquée par le contribuable, elle peut toutefois, lorsqu'elle apporte la preuve de ce que le domicile dont l'adresse lui a été indiquée présente un caractère fictif, retenir une autre adresse, sous réserve d'établir que cette adresse est celle où le contribuable réside effectivement.

4. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que M. et Mme C ont, au début des opérations de contrôle dont a fait l'objet leur situation fiscale, indiqué à l'administration fiscale l'adresse d'un appartement dont M. C est propriétaire à Saint-Martin comme étant celle à laquelle cette administration devait leur adresser l'ensemble des courriers relatifs à ces opérations. Il en ressort également que l'administration a toutefois notifié les propositions de rectification marquant la fin de ces contrôles à l'adresse du domicile de M. et Mme C à Caluire-et-Cuire (Rhône), dont elle a estimé qu'elle constituait l'adresse à laquelle les intéressés résidaient effectivement.

5. Pour juger que l'administration établissait que l'adresse située à Saint-Martin que lui avaient indiquée les contribuables revêtait un caractère fictif, de sorte qu'elle avait pu régulièrement leur notifier les propositions de rectification litigieuses à l'adresse de Caluire-et-Cuire qu'elle estimait être celle de leur résidence effective, la cour administrative d'appel s'est fondée sur ce que M. et Mme C avaient communiqué à l'administration cette adresse située à Saint-Martin dans le but d'accréditer que leur domicile fiscal se situait dans cette collectivité et de pouvoir par suite bénéficier des avantages fiscaux attachés à une telle domiciliation. En statuant ainsi, alors qu'il lui appartenait de rechercher si l'adresse située à Saint-Martin était inexistante ou n'avait été communiquée à l'administration fiscale que dans le but d'égarer celle-ci dans la conduite de la procédure de contrôle et de rectification de l'impôt, la cour administrative d'appel de Lyon a entaché ses arrêts d'une erreur de droit.

6. Par suite, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens des pourvois, M. C, d'une part, M. et Mme C, d'autre part, sont fondés à demander l'annulation, respectivement totale et partielle, des arrêts qu'ils attaquent.

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à M. et Mme C, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt n° 21LY01560 du 30 juin 2022 et les articles 3 et 4 de l'arrêt n° 21LY01558 du même jour de la cour administrative d'appel de Lyon sont annulés.

Article 2 : Les affaires sont renvoyées, dans cette mesure, à la cour administrative d'appel de Lyon.

Article 3 : L'Etat versera à M. et Mme C une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. B C et Mme A C et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré à l'issue de la séance du 29 mars 2023 où siégeaient : Mme Christine Maugüé, présidente adjointe de la section du contentieux, présidant ; M. Pierre Collin, M. Stéphane Verclytte, présidents de chambre ; M. Jonathan Bosredon, M. Hervé Cassagnabère, M. Christian Fournier, M. Frédéric Gueudar Delahaye, M. Pierre Boussaroque, conseillers d'Etat et M. Benjamin Duca-Deneuve, auditeur-rapporteur.

Rendu le 14 avril 2023.

La présidente :

Signé : Mme Christine Maugüé

Le rapporteur :

Signé : M. Benjamin Duca-Deneuve

La secrétaire :

Signé : Mme Magali Méaulle

Nos 467129, 467132

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