Jurisprudence : CAA Marseille, 7e, 07-04-2023, n° 21MA03256


Références

Cour administrative d'appel de Marseille

N° 21MA03256

7ème chambre
lecture du 07 avril 2023
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet des Alpes-Maritimes a déféré au tribunal administratif de Nice, comme prévenus d'une contravention de grande voirie prévue et réprimée par les articles L. 2122-1 et L. 2132-3 du code général de la propriété des personnes publiques🏛🏛, la société Westmead Production et son gérant, M. C A, et a demandé, d'une part leur condamnation à l'amende maximale prévue par la loi ainsi que le remboursement des frais d'établissement du procès-verbal et des frais annexes engagés par l'administration, d'autre part, que soit ordonnée la démolition de tous les ouvrages et enfin que soit autorisée l'intervention directe de l'Etat aux frais et risques de la contrevenante en cas de non-exécution par cette dernière des mesures objet de la contravention en cause.

Par les articles 1er et 2 du jugement n° 1602244 du 21 novembre 2017, le tribunal administratif de Nice a constaté la prescription de l'action publique et rejeté la demande de l'administration tendant à la condamnation de la SARL Westmead Production au paiement d'une amende et des frais de procès-verbal. Par les articles 3 et 4 de ce jugement, le tribunal administratif de Nice a condamné la SARL Westmead Production à évacuer hors du domaine public maritime les installations et ouvrages visés dans le procès-verbal du 2 février 2016 dans un délai de six mois à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 300 euros par jour de retard et a autorisé l'administration à procéder d'office en cas d'inexécution de la société dans ce délai.

Par un arrêt n° 18MA00263, 18MA00639 du 16 novembre 2018, la Cour administrative d'appel de Marseille a, à l'article 1er, dit qu'il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 18MA00639 tendant au sursis à l'exécution des articles 3 et 4 du jugement du tribunal administratif de Nice du 21 novembre 2017, à l'article 2, annulé l'article 3 du jugement du tribunal administratif de Nice en tant qu'il condamne la société Westmead Production et M. A à démolir la portion d'embarcadère débordant de l'emprise de la terrasse, d'une superficie de 1,92 m² et à l'article 3, rejeté le surplus des conclusions de la requête de la société Westmead Production et de M. A.

Procédure devant la Cour :

Par une requête en tierce opposition et des mémoires, enregistrés les 3 et 25 août 2021, 22 juin 2022, 21 décembre 2022, 4 et 11 janvier 2023, sous le n° 21MA03256, le syndic de la copropriété " La Joie de Vivre ", représenté par Me Msellati, demande à la Cour :

1°) de sursoir à l'exécution de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 16 novembre 2018 ;

2°) de déclarer non avenu l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 16 novembre 2018 en tant qu'il confirme l'article 3 du jugement du 21 novembre 2017 du tribunal administratif de Nice qui condamne la SARL Westmead Production à évacuer hors du domaine public maritime les installations et ouvrages visés dans le procès-verbal du 2 février 2016 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛.

Il soutient que :

- il présente un intérêt pour agir en tierce opposition contre l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 16 novembre 2018 ;

- les droits de la défense n'ayant pas été respectés en application de l'article L. 774-2 du code de justice administrative🏛, la procédure de contravention de grande voirie doit être annulée ;

- la démolition ordonnée par l'article 3 du jugement du 21 novembre 2017 du tribunal administratif de Nice causerait une atteinte excessive à l'intérêt général ;

- le procès-verbal de contravention de grande voirie se fonde sur une limite présumée du rivage totalement erronée ;

- en raison du classement de site pittoresque de Saint-Jean Cap-Ferrat par le décret du 15 juillet 1975, la SARL Westmead Production ne peut être condamnée à évacuer hors du domaine public maritime les installations et ouvrages visés dans le procès-verbal du 2 février 2016 faute pour l'administration d'avoir versé au débat les avis favorables visés par l'article R. 341-12 du code de l'environnement🏛 ;

- les moyens exposés dans la présente requête sont sérieux ;

- l'exécution de l'arrêt en litige risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 décembre 2022, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires conclut au rejet de la requête du syndic de la copropriété " La Joie de Vivre ".

Il fait valoir que :

- la tierce opposition du syndic de la copropriété " La Joie de Vivre " est irrecevable ;

- les moyens soulevés par le syndic de la copropriété " La Joie de Vivre " ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B,

- les conclusions de M. Guillaumont, rapporteur public ;

- et les observations de Me Dolciani, substituant Me Msellati, représentant le syndic de la copropriété " La Joie de Vivre ".

Considérant ce qui suit :

1. La copropriété " La Joie de Vivre " comprenant plusieurs lots est située sur la parcelle cadastrée section AA n° 179, sur le territoire de la commune de Saint-Jean-Cap-Ferrat. Le lot n° 1 de cette copropriété appartient à la société Westmead Production dont M. A est le gérant et comprend un espace aménagé en jardin sur pilotis créé en 1935 et surplombant le domaine public maritime. A ce titre, par arrêté du 3 février 1997, le préfet des Alpes-Maritimes a renouvelé l'autorisation d'occupation temporaire du domaine public présentée par la société Westmead Production pour occuper le domaine public maritime au droit de sa propriété " Le Jardin de la Mer ", à titre personnel, précaire et révocable, pour une durée de cinq ans à compter du 1er janvier 1997, se terminant le 31 décembre 2001. Cet arrêté précisait dans son article 7 que l'occupation devrait cesser de plein droit à cette date, à défaut de renouvellement. Par décision du 19 mai 2003, le directeur départemental de l'équipement a refusé de renouveler cette autorisation au motif tiré de l'impact négatif sur l'environnement des constructions en cause édifiées dans un site naturel classé. Le recours pour excès de pouvoir dirigé à l'encontre de ce refus a été rejeté par un jugement n° 0305099 du 17 juin 2008 du tribunal administratif de Nice. Sur déféré du préfet des Alpes-Maritimes, par les articles 3 et 4 du jugement du 21 novembre 2017, le tribunal administratif de Nice a condamné la SARL Westmead Production à évacuer hors du domaine public maritime les installations et ouvrages visés dans le procès-verbal du 2 février 2016 dans un délai de six mois à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 300 euros par jour de retard, et a autorisé l'administration à procéder d'office en cas d'inexécution de la société dans ce délai. Le syndic de la copropriété " La Joie de Vivre ", par la voie de la tierce opposition, demande à la Cour de déclarer non avenu l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 16 novembre 2018 en tant qu'il confirme l'article 3 du jugement du 21 novembre 2017 du tribunal administratif de Nice condamnant la SARL Westmead Production à évacuer hors du domaine public maritime les installations et ouvrages visés dans le procès-verbal du 2 février 2016.

Sur la recevabilité de la tierce opposition :

2. Aux termes de l'article R. 832-1 du code de justice administrative🏛 : " Toute personne peut former tierce opposition à une décision juridictionnelle qui préjudicie à ses droits, dès lors que ni elle ni ceux qu'elle représente n'ont été présents ou régulièrement appelés dans l'instance ayant abouti à cette décision ".

3. Dans la présente instance, le syndic de la copropriété " La Joie de Vivre " forme tierce opposition à l'arrêt du 16 novembre 2018 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a confirmé l'article 3 du jugement du 21 novembre 2017 du tribunal administratif de Nice qui a condamné la SARL Westmead Production à évacuer hors du domaine public maritime les installations et ouvrages visés dans le procès-verbal du 2 février 2016 constitués par une terrasse en béton armé utilisée en sa partie supérieure à des fins de jardin d'agrément, un appontement situé sous cette terrasse entièrement bâti sur le sol de la mer et un escalier d'accès à la mer construit sur les roches existantes situés sur le domaine public, à l'exception de la portion d'embarcadère débordant de l'emprise de la terrasse, d'une superficie de 1,92 m². Il produit une expertise, réalisée le 29 juillet 2021 par un expert près la cour administrative de Marseille, concernant les conséquences de l'arrêt contesté et de la destruction des ouvrages sur les biens de la copropriété qui sont susceptibles d'engager sa responsabilité. Cette étude conclut que cette démolition imposera la réalisation de travaux en tréfonds, c'est-à-dire dans une partie commune de la copropriété " La Joie de Vivre " ainsi qu'un impact sur le terrain et les murs communs aux six propriétaires. Toutefois, il résulte du procès-verbal de l'assemblée générale du 24 juin 1994 des copropriétaires que ces derniers ont autorisé des travaux portant sur les ouvrages litigieux, ayant pour finalité de les maintenir sur le domaine public maritime. Par ailleurs, la société Westmead Production, d'une part, propriétaire du lot n° 1 de la copropriété " La Joie de Vivre " comprenant l'espace aménagé en jardin sur pilotis, en tant que contrevenant tenu de démolir les installations et les ouvrages visés dans le procès-verbal de grande voirie, dont la terrasse, et le syndic de la copropriété " La Joie de Vivre ", d'autre part, en tant qu'il revendique la propriété du tréfonds du mur de soutènement dont la destruction n'est pas prescrite mais qui serait susceptible d'être endommagé par la démolition de la terrasse, ont tous les deux intérêts au maintien des ouvrages dont la démolition est ordonnée par l'arrêt en litige du 16 novembre 2018. Ils avaient ainsi des intérêts concordants dans l'instance ayant donné lieu à cet arrêt. Par suite, le syndic de la copropriété " La Joie de Vivre " qui n'était ni présent ni appelé à l'instance ayant donné lieu à l'arrêt contesté doit être regardé comme ayant été représenté devant la Cour par la SARL Westmead Production au sens des dispositions de l'article R. 832-1 du code de justice administrative.

4. Il résulte de tout ce qui précède que la requête en tierce opposition présentée par le syndic de la copropriété " La Joie de Vivre " n'est pas recevable et doit être rejetée. Par voie de conséquence et en tout état de cause, il y a lieu de rejeter ses conclusions à fin de sursis à l'exécution de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 16 novembre 2018.

Sur les frais liés au litige :

5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par le syndic de la copropriété " La Joie de Vivre " au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête du syndic de la copropriété " La Joie de Vivre " est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au syndic de la copropriété " La Joie de Vivre " et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Copie en sera adressée à la SARL Westmead Production et à M. C A.

Délibéré après l'audience du 24 mars 2023, où siégeaient :

- Mme Chenal-Peter, présidente de chambre,

- Mme Ciréfice, présidente assesseure,

- Mme Marchessaux, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 avril 2023.

bb

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