MOTIFS DE LA DÉCISION
1) Sur la demande de dommages et intérêts pour exécution de mauvaise foi du contrat de travail
M. [P] reproche à la SAS Ateliers Aubert-Labansat, d'une part, divers manquements ayant conduit à l'accident du travail du 12 septembre 2016, d'autre part, un manquement dans le cadre de son obligation de rechercher son reclassement après sa déclaration d'inaptitude.
' Le premier manquement évoqué relatif à l'aménagement de son poste de travail ou à des manquements à l'obligation de sécurité se sont produits, au plus tard, le jour de l'accident du travail, le 12 septembre 2016. M. [P] était en mesure de les connaître dès cette date puisqu'il reproche à son employeur de lui avoir affecté, le 12 septembre, un aide lui-même handicapé ce qui, selon lui, ne répondait pas aux préconisations édictées le 30 août 2016 par le médecin du travail ou de ne pas avoir mis en place des équipements de protection collective sur le chantier. La reconnaissance par la CPAM d'un accident du travail étant donc sans conséquence sur sa connaissance des faits lui permettant d'exercer son droit, une prescription de deux ans a donc commencé à courir à la date de l'accident et non à la date de reconnaissance de l'accident du travail.
Ce délai avait expiré quand M. [P] a saisi le 7 octobre 2019 le conseil de prud'hommes.
De surcroît, aucun préjudice résultant des manquements allégués n'est clairement énoncé si ce n'est l'accident du travail lui-même. Or ce préjudice ne peut donner lieu qu'à l'octroi d'une réparation forfaitaire par le biais de la Sécurité Sociale et ne permet pas au salarié d'agir contre l'employeur sauf à se prévaloir, devant le pôle social du tribunal judiciaire, d'une faute inexcusable de l'employeur. Si la demande avait été recevable, M. [P] en aurait, en toute hypothèse, été débouté.
' Le second manquement évoqué peut conduire à dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse mais ne constitue pas un manquement à l'exécution de bonne foi du contrat de travail.
La demande de dommages et intérêts pour exécution de mauvaise foi du contrat de travail est donc irrecevable en ce qu'elle porte sur un manquement à l'obligation de sécurité et mal fondée en ce qu'elle porte sur un manquement à l'obligation de reclassement.
2) Sur le licenciement
M. [P] fait valoir que son licenciement est cause réelle et sérieuse parce que :
- la consultation des instances représentatives du personnel a été défectueuse (pas de consultation des quatre délégués du personnel existants, information insuffisante donnée aux délégués, pas de consultation du CSE)
- parce qu'un poste, disponible, de métreur ne lui a pas été proposé
- la SAS Ateliers Aubert-Labansat n'a pas étendu sa recherche de reclassement à toutes les sociétés du groupe.
Sur ce dernier point, M. [P] fait valoir que cette recherche aurait dû s'étendre à toutes les sociétés détenues par la holding Gilathelo Investissements et notamment à la SARL Maison d'histoire faisant, selon lui, partie du même groupe.
La SAS Ateliers Aubert-Labansat conteste ce point et soutient que ces trois société ne font pas partie du même groupe au sens de l'
article L1226-10 du code du travail🏛 puisque'il n'existe pas, parmi elles, d'entreprise dominante au sens des
articles L233-1; L233-3 et L233-16 du code de commerce🏛🏛. Pour en justifier elle produit un document d'une page établi par son expert comptable.
Celui-ci écrit qu'en 2018, la SAS Ateliers Aubert-Labansat était détenue à 100% par la SAS le Vaudome, elle-même détenue par la SARL Gilathelo Investissements à 18,51% et détenait 36,6% dans la SARL Maisons d'Histoire conjointement avec M. [G], actionnaire majoritaire à 54,4%.
La SAS Ateliers Aubert-Labansat ne produit toutefois aucun organigramme des différentes sociétés liées à la holding Gilathelo Investissements. Il est donc impossible vérifier si, au sein de cet ensemble de sociétés, n'existerait pas une entreprise dominante au sens des articles précités, oubliée dans ce document qui se focalise sur trois sociétés : la SAS Ateliers Aubert-Labansat, la SARL Maisons d'Histoire et la SARL Gilathelo Investissements.
Les informations fournies sont en outre parcellaires : la (ou les) sociétés détenant 81,49% de la SAS Vaudome est (sont) inconnue(s), comme l'entité détenant 9,1% de la SARL Maisons d'Histoire, il n'est pas non plus spécifié les autres participations que M. [G] pourrait avoir au sein de cet ensemble de sociétés.
La SAS Ateliers Aubert-Labansat a choisi de ne pas fournir ces informations essentielles, alors qu'elle était la seule à pouvoir le faire. Dès lors, elle n'apporte aucun élément réfutant l'existence d'un groupe comprenant la SAS Ateliers Aubert-Labansat et la SARL Maisons d'Histoire, sociétés domiciliées sur le même site et effectuant des chantiers en commun selon les dires non contredits de M. [P].
Au vu des éléments et explications données par les parties, il sera donc retenu l'existence d'un groupe comprenant, à tout le moins, ces deux sociétés. Il est constant que la SAS Ateliers Aubert-Labansat n'a pas recherché le reclassement de M. [P] dans cette société au sein de laquelle elle n'établit, ni ne soutient d'ailleurs que la permutation de personnel aurait été impossible.
En conséquence, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens soulevés par M. [P], le licenciement s'avère sans cause réelle et sérieuse.
Il est fondé à obtenir des dommages et intérêts égaux au plus, compte tenu de son ancienneté (23 ans), à 17 mois de salaire.
Il ne justifie pas de sa situation depuis son licenciement. Compte tenu des autres éléments connus : son âge (58 ans), son ancienneté (23 ans), son salaire (2 688,45€) au moment du licenciement, il y a de confirmer le jugement qui lui a alloué 21 507,45€ de dommages et intérêts.
3) Sur les points annexes
La somme allouée à titre de dommages et intérêts produira intérêts au taux légal à compter du 13 décembre 2021, date de notification du jugement confirmé sur ce point.
La SAS Ateliers Aubert-Labansat devra rembourser à Pôle Emploi les allocations chômage éventuellement versées à M. [P] entre la date du licenciement et la date du jugement dans la limite de trois mois d'allocations.
Il serait inéquitable de laisser à la charge de M. [P] ses frais irrépétibles. De ce chef, la SAS Ateliers Aubert-Labansat sera condamnée à lui verser 3 000€.