Jurisprudence : CE Contentieux, 29-03-1978, n° 4460

CONSEIL D'ETAT

Statuant au Contentieux

N° 4460

Ministre de l'Economie et des Finances contre sieur Delaporte

Lecture du 29 Mars 1978

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)



Sur le rapport de la 8ème Sous-Section

Vu le recours du ministre de l'Economie et des Finances, ledit recours enregistré au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 31 août 1976 et tendant à ce qu'il plaise au Conseil annuler un jugement en date du 25 mai 1976 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a accordé au sieur Delaporte décharge des taxes sur la valeur ajoutée au titre qui lui ont été notifiées par un avis de mise en recouvrement en date du 6 juillet 1973 pour la période du 1er janvier 1968 au 31 décembre 1971;

Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953;

Vu le code général des impôts;

Vu la loi du 30 décembre 1977.
Considérant que, par le jugemént attaqué, le Tribunal administratif d'Amiens a donné décharge au sieur Delaporte de la taxe sur la valeur ajoutée à laquelle il a été assujetti pour la période du 1er janvier 1968 au 31 décembre 1971 à raison des affaires réalisées par lui dans l'exploitation d'un garage; que le ministre délégué à l'Economie et aux Finances demande l'annulation de ce jugement;
Considérant que si, aux termes des articles 1949 septies à 1649 septies F du Code général des impôts, les vérifications doivent se dérouler chez le contribuable, il résulte de l'instruction que si, aprés avoir commencé chez le sieur Delaporte la vérification du chiffre d'affaires déclaré pour la période en litige s'est poursuivie et achevée dans le cabinet de son comptable, c'est xxxxx le contribuable lui-même qui avait emporté et déposé chez celui-ci les livres et les pièces qui en étaient l'objet; que, dans ces circonstances, la possibilité d'un débat oral et contradictoire ayant été offerte au sieur Delaporte, la vérification doit être tenue pour régulière, sans qu'il y ait lieu de rechercher si ce dernier avait donné à son comptable un mandat exprés de le représenter; que, dès lors, le ministre délégué à l'Economie et aux Finances est fondé à soutenir que c'est à tort que, pour donner décharge au sieur Delaporte de la taxe contestée, les premiers juges ont retenu le motif que la vérification s'était déroulée hors de chez celui-ci;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige, par l'effet dévolutif de l'appel, de statuer sur les autres moyens de la demande présentée par le sieur Delaporte au Tribunal administratif;

Sur la procédure d'imposition
En ce qui concerne les autres irrégularités qui entâcheraient la vérification:
Considérant qu'il résulte de l'article 1649 septies F du Code général des impôts que, dans le cas des entreprises de l'importance de celle du sieur Delaporte, la durée de la vérification doit être limitée à trois mois: qu'il résulte de l'instruction que le vérificateur a commencé ses opérations le 30 août 1972; qu'ainsi, le vérificateur a pu le 12 novembre suivant, demander au sieur Delaporte de tenir à sa disposition divers documents comptables, sans dépasser le délai rappelé ci-dessus;
Considérant que l'avis de mise en recouvrement litigieux a été émis le 6 juillet 1973; que si, le 18 décembre suivant, l'inspecteur est revenu chez le sieur Delaporte et y a consulté à nouveau sa comptabilité pour l'instruction de la réclamation, en date du 26 juillet, par laquelle le contribuable avait contesté l'imposition, cette procédure entre dans les prévisions de l'article 1649 septies F du Code;
En ce qui concerne l'avis de la commission départementale des impôts;
Considérant que, faute pour le contribuable de présenter une comptabilité sincère et probante, l'administration est en droit de rectifier d'office le chiffre d'affaires déclaré et n'est pas tenue de saisir la Commission Départementale;
Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à l'appui des écritures globales par lesquelles il constatait ses recettes au comptant, le sieur Delaporte n'a pu présenter aucun des agendas sur lesquels il avait noté le détail de celles-ci entre le début de 1968 et la fin de 1970, ni aucune autre sorte de justification; qu'ainsi, sa comptabilité n'était pas probante et son chiffre d'affaires pouvait être rectifié d'office: que, par suite, la Commission départementale des impôts n'avait pas à être consultée; qu'il suit de là que la circonstance que la commission département le se serait prononcée sur des questions qui n'étaient pas de sa compétence et que son avis ne serait pas suffisamment motivé, est sans influence sur la régularité de la procédure d'imposition;

Sur les bases d'imposition:
Considérant qu'il appartient au sieur Delaporte de démontrer que la base d'imposition fixée par voie de rectification d'office est exagérée;
Considérant que le chiffre d'affaires imposé par l'administration est la somme de la valeur reconstituée par elle des marchandises livrées par le sieur Delaporte durant la période d'imposition et de celle des travaux de réparation effectués par l'intéressé pendant la même période; qu'elle a calculé chacun de ces termes par l'application de coefficients de bénéfice brut aux achats de l'entreprise d'une part, et en fonction des salaires payés à son personnel d'autre part; que le sieur Delaporte soutient que le coefficient de bénéfice brut employé xxxxx pour reconstituer le prix de vente des pièces de rechange livrées par lui est supérieur au coefficient réel et que la méthode suivie par l'administration conduit à un résultat exagéré en ce qu'elle englobe dans le chiffre d'affaires imposé le prix d'objets livrés et de travaux achevés avant le 1er janvier 1972, mais qui n'étaient ni facturés, ni par suite, payés à cette date;
Considérant, sur le premier point, que faute pour le requérant, d'apporter aucun élément propre à établir la marge bénéficiaire qu'il pratiquait sur ses ventes de pièces de rechange, la circonstance que le coefficient de bénéfice brut a été calculé d'après l'analyse d'un nombre restreint d'opérations, n'établit pas à elle seule que ce coefficient est exagéré;
Considérant, sur le second point, qu'il résulte des dispositions de l'article 269 du Code général des impôts que le fait générateur de la taxe sur la valeur ajoutée est constitué, pour les ventes, par la livraison de la marchandise et, pour les prestations de service, par l'encaissement de leur prix;
Considérant, d'une part, qu'il résulte de ces dispositions que la valeur de marchandises facturées après le 31 décembre 1971 a été à bon droit comprise dans la base d'imposition dès lors que ces marchandises avaient été livrées auparavant;
Considérant, d'autre part, que si le prix des travaux de réparation exécutés par le sieur Delaporte avant le 1er janvier 1972 et qui lui ont été réglés depuis lors, doit être en principe exclu du chiffre d'affaires imposé, le contribuable n'en établit pas le montant et ne fait état à cette fin d'aucun élément propre à être utilement soumis à l'examen d'un expert;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le Ministre Délégué à l'Economie et aux Finances est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué et le versement par le sieur Delaport des frais de timbre dont le Tribunal administratif a ordonné le remboursement.
DECIDE
Article 1 - Le jugement susvisé du Tribunal administratif d'Amiens en date du 25 mai 1976 est annulé.
Article 2 - Les droits et pénalités auxquels le sieur Delaporte a été assujetti au titre de la taxe sur la valeur ajoutée pour la période du 1er janvier 1968 au 31 décembre 1971 sont remis à sa charge.
Article 3 - Le sieur Delaporte reversera au Trésor Public les frais de timbre dont les premiers juges ont ordonné le remboursement et qui s'élèvent à la somme de 57 francs.

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