Jurisprudence : CE Contentieux, 27-07-1984, n° 34580

CONSEIL D'ETAT

Statuant au Contentieux

N° 34580

Ministre du budget
contre
S.A. "Aux Nouvelles Galeries de Dunkerque"

Lecture du 27 Juillet 1984

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)



Sur le rapport de la 9ème Sous-Section


Vu le recours, enregistré, au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le 27 mai 1981, présenté par le ministre du budget, et tendant à ce que le Conseil d'Etat:

1° annule le jugement du 3 février 1981, par lequel le tribunal administratif de Lille a accordé à la société anonyme "Aux Nouvelles Galeries de Dunkerque" la réduction des compléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des années 1971 à 1974, dans les rôles de la ville de Dunkerque;

2° décide que la société anonyme "Aux Nouvelles Galeries de Dunkerque" sera rétablie au rôle de l'impôt sur les sociétés, au titre des années 1971 à 1974, à raison des sommes dont la décharge a été ordonnée par les premiers juges;


Vu le code général des impôts;


Vu le code des tribunaux administratifs;


Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945 et le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953;


Vu la loi n° 77-1468 du 30 décembre 1977;


Vu l'article 93-II de la loi n° 83-1179 du 29 décembre 1983, portant loi de finances pour 1984.

Considérant que la société anonyme "Aux Nouvelles Galeries de Dunkerque" exploite, dans cette ville, un magasin de détail à commerces multiples; qu'à l'issue d'une vérification portant sur les exercices clos de 1971 à 1974, l'administration a procédé à divers redressements en matière d'impôt sur les sociétés; que, notamment, elle a estimé que les commissions versées par la société requérante à la "société française des Nouvelles Galeries", en pourcentage des achats réalisés pour son compte par l'intermédiaire de cette dernière devaient être incluses dans le calcul de la valeur des stocks de clôture de chacun des exercices concernés, lesquels stocks avaient été évalués à leur prix de revient; que le ministre du budget fait appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lille a accordé à la société anonyme "Aux Nouvelles Galeries de Dunkerque" la réduction sollicitée des compléments d'impôt sur les sociétés mis à sa charge au titre des années 1971 à 1974, pour des montants s'élevant, respectivemet, à 100 665 F, 17 429 F, 19 392 F et 6 920 F;


Sur l'objet des commissions versées par la société "Aux Nouvelles Galeries de Dunkerque" à la "société française des Nouvelles Galeries":

Considérant qu'aux termes de l'article 38 du code général des impôts: ". . . 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt. . . L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiées. 3. Pour l'application des 1 et 2, les stocks sont évalués au prix de revient ou au cours du jour de la clôture de l'exercice si ce cours est inférieur au prix de revient"; que, selon les dispositions de l'article 38 nonies de l'annexe III au même code; "Les marchandises, matières, fournitures, emballages non récupérables et produits en stock au jour de l'inventaire sont évalués pour leur coût réel. Le coût réel est constitué; pour les marchandises, les matières et les emballages commerciaux achetés, par le prix d'achat augmenté des frais accessoires d'achats, tels que frais de transport et droits de douane";

Considérant que la société "Aux nouvelles Galeries de Dunkerque" avait passé, le 8 novembre 1968, avec la société française des Nouvelles Galeries" un contrat de fournitures générales" destiné à lui procurer, de la part des fournisseurs, les meilleurs conditions possibles d'achat; qu'en contre-partie de ce service, la société "Aux Nouvelles Galeries de Dunkerque" versait à la "Société française des Nouvelles Galeries" une rémunération consistant en une commission calculée exclusivement au pourcentage du montant des achats effectués pour son compte par cette dernière, pour l'ensemble des fournitures; que si, pour soutenir que ces commissions avaient pour objet de rémunérer d'autres services, la société "Aux Nouvelles Galeries de Dunkerque" produit un document émanant de la société française des Nouvelles Galeries", intitulé "travaux et services", il ressort de l'examen de ce document qu'il contient des tarifs afférents à des prestations qui ne sont pas comprises dans le contrat susmentionné, en date du 8 novembre 1968, liant les deux sociétés susmentionnées, et que ledit document ne peut, dès lors, être regardé comme modifiant l'objet et la portée de ce contrat; que, dans ces conditions, c'est à bon droit que l'administration a estimé que les commissions versées à la "Société française des Nouvelles Galeries" constituaient, pour la société "Aux Nouvelles Galeries de Dunkerque", des "frais accessoires d'achat", soit un élément du prix de revient des marchandises acquises par elle, lequel, en application des dispositions précitées de l'article 38 nonies de l'annexe-II au code général des impôts, devait être pris en compte pour le calcul de la valeur du stock;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif de Lille a estimé que, les commissions dont s'agit, rémunérant, outre des facilités d'achat, un ensemble d'autres services, a, par ce motif, accordé la décharge des impositions litigieuses;

Considérant, toutefois, qu'il appartieent au conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la société "Aux Nouvelles Galeries de Dunkerque" devant le tribunal administratif de Lille;


Sur les autres moyens de la demande présentée par la société "Aux Nouvelles Galeries de Dunkerque" devant le tribunal administratif:

Considérant, en premier lieu, que, si le contribuable soutient que l'évaluation des stocks devait tenir compte des ristournes accordées par les fournisseurs, il n'apporte aucun élément; ni aucune précision, permettant au juge de l'impôt d'apprécier le bien fondé de cette àllégation;

Considérant, en deuxième lieu, qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, aux termes de l'article 38-2 du code général des impôts, applicable à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code, le bénéfice net imposable à l'impôt sur les sociétés "est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture" de l'exercice; que, d'une part, dans l'hypothèse où les bénéfices imposables d'un exercice ont été déterminés en application des dispositions précitées de l'article 38 et où leur montant a servi de base à une imposition qui est devenue définitive en raison de l'expiration du délai de répétition ouvert à l'administration par l'article 1966 du code général des impôts, la valeur de l'actif net ressortant du bilan de clôture de cet exercice, telle qu'elle a été retenue pour l'assiette de l'impôt, doit elle-même être regardée comme définitive et, par suite, si ce bilan comporte des erreurs qui ont entraîné une sous-estimation ou une surestimation de l'actif net de l'entreprise, ces erreurs ne peuvent être réparée dans ce bilan; que, d'autre part, la valeur de l'actif net à l'ouverture d'un exercice n'est autre que la valeur de l'actif net à la clôture de l'exercice précédent, de sorte que, si l'entreprise entend établir un bilan d'ouverture qui diffère du bilan de clôture de l'exercice précédent, elle ne peut le faire que par des opérations ou écritures qui doivent être réputées faites au titre du nouvel exercice; qu'ainsi, dans l'hypothèse susmentionnée et durant toute la période qui suit la clôture du dernier exercice prescrit, les erreurs qui entachent un bilan et qui entraînent une sous-estimation ou une surestimation de l'actif net de l'entreprise peuvent, à l'initiative du contribuable ou à celle de l'administration à la suite d'une vérification, être corrigées dans les bilans de clôture des exercices non couverts par la prescription et, par suite, dans les bilans d'ouverture de ces exercices, à l'exception du premier; que, dans ces conditions, la société "Aux Nouvelles Galeries de Dunkerque" n'est pas fondée à demander la rectification de la valeur du stock d'entrée du premier exercice non prescrit, à savoir l'exercice clos en 1971;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 38 quater de l'annexe III au code général des impôts: "Sous réserve des dispositions de l'article 38 ter, les inscriptions aux différents postes figurant aux comptes, au bilan et aux tableaux dont les modèles sont établis conformément à l'article 38 bis, doivent respenter les définitions édictées par le plan comptable général, dans la mesure où ces définitions ne sont pas incompatibles avec les règles applicables pour l'assiette de l'impôt; que la société ne peut utilement exciper de la faculté qui lui aurait été offerte par le plan comptable professionnel des établissements à commerce multiple d'opter pour l'insoription en frais généraux des commissions dont s'agit, dès lors qu'une telle inscription serait en contradiction avec les dispositions précitées du code général des impôts;

Considérant, en dernier lieu, que la société "Aux Nouvelles Galeries de Dunkerques" ne peut utilement se prévaloir, sur le fondement des dispositions de l'article 1649 quinquiès E du code général des impôts, applicable en l'espèce, de ce que, lors de précédentes vérifications de comptabilité, l'administration n'aurait pas contesté la méthode d'évaluation de ses stocks, conferme à celle maintenant critiquée, cette circonstance ne pouvant à elle seule constituer une interprétation administrative du texte fiscal au sens de ces dispositions;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre du budget est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a accordé à la société anonyme "Aux Nouvelles Galeries de Dunkerque" la réduction sollicitée des compléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des années 1971, 1972, 1973 et 1974.

DECIDE

Article 1er: Le jugement, en date du 3 février 1981, du tribunal administratif de Lille est annulé.

Article 2: Les compléments d'impôt sur les sociétés auxquels la société anonyme "Aux Nouvelles Galeries de Dunkerque" a été assujettie au titre des années 1971, 1972, 1973 et 1974 sont remis intégralement à sa charge.

Article 3: La demande présentée par la société anonyme "Aux Nouvelles Galeries de Dunkerque" devant le tribunal administratif de Lille est rejetée.

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