Jurisprudence : CA Lyon, 22-02-2023, n° 22/00629, Infirmation


N° RG 22/00629 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OCLR


décision du

TJ hors JAF, JEX, JLD, Aa A, … … …

Au fond

du 05 janvier 2022

Chambre 1 -Cab 01 A


RG :16/09027


LA PROCUREURE GENERALE

LE PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE DE LYON


C/


[H] [T]

[P] [A]

PRESIDENTE DE LA COMMISSION DE DROIT DES MINEURS


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


COUR D'APPEL DE LYON


2ème chambre A


ARRET DU 22 Février 2023



APPELANTS :


Mme LA PROCUREURE GENERALE

[Adresse 2]

[Localité 7]


M. LE PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE DE LYON

TJ de Lyon [Adresse 6]

[Localité 7]/FRANCE


représentés par Ab B, substitut général


INTIMES :


Mme [C] [H] [T] agissant tant en son nom personnel et en qualité de représentant légal de sa fille mineure [K] [W] [T] [D], née le … … … à Ac (C)

née le … … … à … (…)

[… …]

[… …]


Non représentée


M. [M] [P] [A]

né le … … … à … (…)

[Adresse 5]

[Localité 1]


Non représenté


Mme la Présidente de la commission des Mineurs, es qualité d'administrateur ad hoc de [K] [T] [D] née le … … … à AMBILLY (HAUTE-SAVOIE)

[Adresse 3]

[Localité 7]


représentée par Me Nathalie CARON, avocat au barreau de LYON


(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/006054 du 02/06/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de LYON)


Date de clôture de l'instruction : 15 Décembre 2022


Date des plaidoiries tenues en Chambre du Conseil: 11 Janvier 2023


Date de mise à disposition : 22 Février 2023



Composition de la Cour lors des débats et du délibéré:

- Isabelle BORDENAVE, présidente

- Georges PÉGEON, conseiller

- Géraldine AUVOLAT, conseillère


assistée pendant les débats de Sophie PENEAUD, greffière


A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile🏛.


Arrêt par défaut rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile🏛,


Signé par Isabelle BORDENAVE, présidente, et par Sophie PENEAUD, greffière, auquel la minute a été remise par la magistrate signataire.


* * * * *


SYNTHESE DES FAITS ET PROCEDURE


Le 07 février 2007, Mme [C] [H] [T], de nationalité camerounaise et M. [M] [P] [A], de nationalité française, procèdent, devant l'officier de l'état civil de [Localité 10], à une reconnaissance prénatale et conjointe d'une enfant à naître dont Mme se déclare enceinte.


Le 22 juillet 2007, nait à Ambilly (Haute Savoie), l'enfant [K], qui sera déclarée par son père M. [P] [A] à la mairie sous le nom de [T] [D], alors même que figurent comme père et mère, les auteurs de la reconnaissance prénatale Mme [C] [H] [T] et M. [M] [P] [A] .


Le 12 mars 2008, un certificat de nationalité française est délivré à cette enfant.


Le 14 novembre 2009, Mme [C] [H] [T] épouse, à [Localité 9], M. [X] [D] [G], de nationalité camerounaise.


Le 30 septembre 2012, le préfet de Haute-Savoie adresse un signalement au parquet de [Localité 11], faisant valoir une présomption de reconnaissance frauduleuse, consistant à faire reconnaître par un ressortissant français une enfant, afin de conférer à sa mère, étrangère, en situation irrégulière, un droit au séjour en France.


Les services préfectoraux relèvent que Mme [C] [H] [T] a obtenu un titre de séjour en se prévalant de sa qualité de mère d'une enfant française, à savoir [K] [W] [T] [D], née en France d'un père français, en la personne de M. [M] [P] [A], alors que la mère s'est mariée, deux ans plus tard avec un ressortissant camerounais, [X] [D], dont la fillette portait déjà le nom.


Après enquête confiée à la PAF de Gaillard, le procureur de la République de Thonon Les Bains fait assigner M. [M] [P] [A] et Mme [H] [T] devant le tribunal de grande instance de Thonon les Bains, afin de voir annuler la reconnaissance prénatale conjointe souscrite au profit de l'enfant à naître.


Par ordonnance du 17 juin 2016, le juge de la mise en état de Thonon Les Bains se déclare déclaré incompétent, au profit du tribunal de grande instance de Lyon.


Par ordonnance du 16 mars 2017, Mme la présidente de la commission des mineurs est désignée en qualité d'administrateur ad hoc, chargé de représenter la mineure [K] [T] [D], dans le cadre de cette procédure en annulation de la reconnaissance de paternité faite par M. [P] [A].


Par jugement avant dire droit du 05 septembre 2018, le tribunal de grande instance, a :


- dit que la demande est recevable,


Avant dire droit,


- ordonné une expertise, et commis pour y procéder le docteur [U] [V], en qualité d'expert avec pour mission de :


- procéder à l'examen comparatif des sangs de [K] et M. [P] [A],

- dire si M. [P] [A] peut ou ne peut pas être le père biologique de l'enfant et préciser la valeur des résultats obtenus,

- dit que l'expert devra faire connaitre sans délai son acceptation de la mission et commencer ses opérations dès qu'il sera avisé par le greffe et qu'en cas d'empêchement il sera pourvu à son remplacement par ordonnance rendue sur requête,

- dit que l'expertise se fera aux frais avancés par l'Etat, la demande émanant du Ministère public et de l'avocat mandaté pour assister l 'enfant au bénéfice de l'aide juridictionnelle,

- dit que l'expert commis devra déposer son rapport en double exemplaire au greffe au tribunal de grande instance avant le 31 décembre 2018,

- rappelé que les parties qui seront convoquées par l'expert sont tenues de concourir à la mesure et qu'à défaut, le tribunal peut en tirer toute conséquence de droit,

- réservé les demandes des parties, ainsi que les dépens.


Par jugement du 05 février 2020, le tribunal judiciaire, a :

- relevé que les adresses données étaient inexactes,

- ordonné une expertise et commis pour y procéder le docteur [U] [V] en qualité d'expert avec pour mission de :

- procéder à l 'examen comparatif des sangs de [K] et de M. [P] [A],

- dire si M. [P] [A] peut ou ne peut pas être le père biologique de l'enfant et préciser la valeur des résultats obtenus,

- dit que l'expert devra faire connaitre sans délai son acceptation de la mission et commencer ses opérations dès qu'il sera avisé par le greffe et qu'en cas d'empêchement, il sera pourvu à son remplacement par ordonnance rendue sur requête,

- dit que l'expertise se fera aux frais avancés par l'Etat, la demande émanant du Ministère public et de l'avocat mandaté pour assister l'enfant au bénéfice de l'aide juridictionnelle,

- dit que l'expert commis devra déposer son rapport en double exemplaire au greffe au tribunal de grande instance avant le 31 juillet 2020,

- rappelé que les parties qui seront convoquées par l'expert sont tenues de concourir å la mesure et qu'à défaut, le tribunal peut en tirer toute conséquence de droit,

- dit que l'adresse des parties est Mme [Ad] domiciliée [Adresse 4], et pour M. [P] [A], domicilié au [Adresse 5], et qu'en cas de changement il leur incombe de contacter l'expert précisant que les parties peuvent se rapprocher de l'expert pour prendre date pour les prélèvements l'effectuer ;

- réservé les demandes des parties, ainsi que les dépens.


L'expert a convoqué les parties, la mère et l'enfant se sont présentées mais non M. [P] [A], bien qu'il ait retiré la convocation. Une nouvelle fois l'expertise n'a pas eu lieu.



Par jugement du 05 janvier 2022, le tribunal judiciaire de Lyon, a :


- débouté le ministère public de sa demande d'annulation de l'acte de reconnaissance souscrit le 07 février 2007 à la mairie de Prevessins Moens par M. [P] [A],


- rejeté la demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile🏛,

- condamné le ministère public en tous les dépens, qui comprendront les frais taxés des expertises.


Par déclaration reçue au greffe le 18 janvier 2022, M. le procureur de la République relève appel de cette décision critiquant les chefs du jugement portant sur :


l'acte de reconnaissance,

les dépens.



MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES


Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 14 avril 2022, le ministère public, demande à la cour, de :


- infirmer le jugement du tribunal judiciaire de Lyon du 5 janvier 2022,

- prononcer l'annulation de la reconnaissance anticipée de paternité faite le 07 février 2007 devant l'officier de l'état civil de la mairie de [Localité 10] (Ain) par M. [P] [A], né le … … … à Douala, au Cameroun, à l'égard de l'enfant à naitre de Mme [H] [T],

- ordonner la mention de la présente décision en marge de l'acte de reconnaissance n°4 de l'année 2007 de la mairie de [Localité 10] (Ain),

- ordonner la mention de la présente décision en marge de l'acte de naissance n°789 de l'année 2007 de la mairie de Ambilly (Haute-Savoie) de l'enfant [K], née le … … …,

- condamner Mme [H] [T] et M. [P] [A] aux entiers dépens.


Au soutien de son appel, le ministère public valoir, après avoir énoncé les règles de droit applicables en matière d'établissement de la filiation et de sa contestation, que l'enfant [K] [W] a été instrumentalisée aux fins de permettre à sa mère de demeurer sur le territoire français, alors qu'elle était sans titre pour y séjourner et que la souscription par M. [P] [A] est de pure complaisance, s'appuyant en cela sur l'enquête réalisée par les services de la PAF, et tirant tout enseignement du refus de [P] [A] de se soumettre à une expertise biologique, qui aurait pu lever tout doute sur la filiation paternelle de l'enfant à son égard.


Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 10 juin 2022, agissant tant en son nom qu'en sa qualité d'administrateur ad hoc de la mineure [K] [T] [D], la présidente de la commission de droit des mineurs, demande à la cour, au visa des articles 311-17 du code civil🏛, 321, 334, 36 du code civil, de l'article 339 du code civil🏛 camerounais, et de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant, de :


À titre principal,


- débouter Mme la procureure générale de toutes demandes fins et prétentions,

- confirmer le jugement dont appel,


À titre subsidiaire, si la décision du tribunal judiciaire de Lyon en date du 05 janvier 2022 devait être infirmée, de


- ordonner la transcription du jugement sur l'acte d'état civil de l'enfant d'[K] [W] [T] [D] née le … … … à …, Haute-Savoie,

- condamner M. [P] [A] à payer la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts à Mme la présidente de la commission des mineurs en qualité d'administrateur ad hoc de l'enfant [K] [W] [T] [D],

- statuer ce que de droit sur les dépens.


En réponse, la présidente de la commission de droit des mineurs, rappelant notamment la position de la cour d'appel de Lyon, et celle de la CEDH, conclut au débouté du parquet, rappelant que l'enfant est âgée de 13 ans, et que n'est nullement démontrée l'intention frauduleuse de M. [P] [A], eu regard notamment à ses déclarations devant les services de police selon lesquels il a cru en sa paternité, aucune conséquence ne devant être tirée de sa non présenttaion devant l'expert désigné aux fins d'expertise génétique.


Subsidiairement, il est fait observer qu'une contestation de la filiation de M. [P] [A] n'aurait aucune conséquence sur le nom de l'enfant, puisque le patronyme de ce dernier ne ressort pas de l'acte de naissance de l'enfant. En revanche, elle emportera un certain nombre de conséquences, notamment administratives, l'enfant ne pouvant plus se prévaloir de la nationalité française de M. [P], ce qui lui cause un préjudice, pour lequel il est demandé sa condamnation à lui verser 5000 euros.


Mme [H] [T] et M. [P] [A], n'ont pas conclu et n'ont pas constitué avocat. Les déclarations d'appel ont été signifiées à la requête du parquet le 10 mars 2022 pour M.[P] [A], à domicile et le 16 mars 2022 pour Mme [H] [T], l'acte étant converti en procès-verbal de recherches.


En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile🏛, il est expressément renvoyé aux conclusions récapitulatives visées ci-dessus pour un exposé plus précis des faits, prétentions, moyens et arguments des parties.


La clôture a été prononcée le 15 décembre 2022. L'affaire a été appelée à l'audience de plaidoiries du 11 janvier 2023.



MOTIFS DE LA DÉCISION


Sur l'étendue de la saisine de la cour


L'article 562 du code de procédure civile🏛 dispose que l'appel ne défère à la cour que la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent.


Aux termes de l'article 564 du code de procédure civile🏛, les parties ne peuvent, à peine d'irrecevabilité soulevée d'office, soumettre à la cour de nouvelles prétentions, si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.


En application de l'article 566 du même code🏛, les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence et le complément nécessaire.


Conformément à l'article 954 du code de procédure civile🏛, la cour n'est tenue de statuer que sur les demandes figurant dans le dispositif des conclusions des parties.


Du fait de l'effet dévolutif de l'appel, elle connaît des faits survenus au cours de l'instance d'appel postérieurement à la décision déférée et statue au vu de tous les éléments justifiés même s'ils n'ont été portés à la connaissance de l'adversaire qu'au cours de l'instance d'appel.


Sont déférées à la cour et discutées par les parties, les dispositions du jugement du 05 janvier 2022 concernant la filiation paternelle de M. [P] [A] et ses incidences à l'égard de l'enfant mineure [K] [T] [D], outre la demande de dommages-intérêts.


Sur la contestation de la reconnaissance de paternité de M. [P] [A] pour reconnaissance frauduleuse


Selon l'article 311-17 du code civil🏛, la reconnaissance volontaire de paternité ou de maternité est valable si elle est faite en conformité, soit de la loi personnelle de son auteur, soit de la loi personnelle de l'enfant.


En l'espèce, M. [P] [A] et l'enfant sont de nationalité française, étant également observé que l'article 339 du code civil🏛 camerounais prévoit que toute reconnaissance de paternité ou de maternité pourra être contestée par tous ceux qui y ont un intérêt.


L'article 336 du code civil🏛 confère au ministère public la possibilité de contester une filiation établie lorsque des indices tirés des actes eux-mêmes la rendent invraisemblable ou en cas de fraude à la loi.


Un intérêt d'ordre public s'attache à ce que les filiations frauduleusement établies soient annulées. Constitue une reconnaissance frauduleuse toute reconnaissance souscrite par son auteur en vue de procurer un avantage particulier dont la finalité est étrangère à l'intérêt de l'enfant et à son éducation, notamment à des fins migratoires.


Lorsque le ministère public est demandeur à l'action, comme en l'espèce, il lui incombe de rapporter la preuve de l'inexactitude de la filiation, selon les règles de droit commun.


En application de l'article 332 alinéa 2 du code civil🏛, la paternité peut être contestée en rapportant la preuve que le mari ou l'auteur de la reconnaissance n'est pas le père.


L'article 333 du même code🏛 précise que, lorsque la possession d'état est conforme au titre, seuls peuvent agir l'enfant, l'un de ses père et mère ou celui qui se prétend le parent véritable. L'action se prescrit par cinq ans à compter du jour où la possession d'état a cessé ou du décès du parent dont le lien de filiation est contesté. Nul, à l'exception du ministère public, ne peut contester la filiation lorsque la possession d'état conforme au titre a duré au moins cinq ans depuis la naissance ou la reconnaissance si elle a été faite antérieurement.


Par ailleurs, l'article 321 du code civil🏛 prévoit que, sauf lorsqu'elles sont enfermées par la loi dans un autre délai, les actions relatives à la filiation se prescrivent par dix ans à compter du jour où la personne a été privée de l'état qu'elle réclame, ou a commencé à jouir de l'état qui lui est contesté. A l'égard de l'enfant, ce délai est suspendu pendant sa minorité.


En application de l'article 310-3 alinéa 2 du code civil🏛, si une action est engagée en application du chapitre III du présent titre, la filiation se prouve et se conteste par tous moyens sous réserve de la recevabilité de l'action.


La cour relève que la recevabilité de l'action engagée par le ministère public n'est pas contestée.


Ainsi que le conclut le ministère public, Mme [H] [T] a refusé en octobre 2014 que soit réalisée une analyse comparée des sangs pour confirmer la paternité d'[M] [P] [A]. De plus, cette expertise biologique, ordonnée, n'a pu être réalisée à l'égard de M. [P] [A], ce dernier ne s'étant pas présenté à l'expert, expliquant notamment être à l'étranger alors qu'il avait clairement indiqué à trois reprises lors de son audition du 19 mai 2017 par les services d'enquête ne pas vouloir se soumettre à une telle mesure.


Il ressort de l'enquête diligentée par le procureur de la République de Thonon les Bains, et en particulier de l'audition de M. [P] [A] par les services de police compétents, que, s'il avait accepté de reconnaître l'enfant de Mme [T] croyant de bonne foi en être le père, alors que la mère résidait de façon discontinue avec lui et qu'il se fréquentait ponctuellement, il était dans l'incapacité de donner le lieu de naissance de l'enfant.


Par ailleurs, les éléments produits aux débats n'établissent aucun contact réel entre M. et l'enfant depuis sa naissance, les pièces fournies ne démontrant aucun exercice d'un quelconque droit de visite et d'hébergement,aucune participation à son éducation et son entretien, aucun investissement dans des responsabilités paternelles et parentales à l'égard de cette enfant.


L'intention frauduleuse de M. [P] [A], auteur de la reconnaissance de paternité litigieuse, ressort clairement de la chronologie même des démarches et initiatives prises par M. [P] [A]. En effet, si la cour retient qu'aucun élément génétique ne vient objectiver sa non-paternité, comme indiqué ci-dessus, elle observe que M. [P] [A] n'a pas hésité à conférer à la fillette, au moment de la déclaration de sa naissance à l'officier d'état civil, le nom du futur mari ([D]) de la mère, et cela deux ans avant ledit mariage de Mme [T] avec M. [D] et ce alors même que M. [Ae] [A] affirme être le père,


et se déclare comme tel dans l'acte de reconnaissance prénatale du 07 février 2007, et lors de la déclaration de naissance de l'enfant le 22 juillet 2007.


Aussi, compte tenu de ces éléments pris dans leur ensemble, permettant d'établir l'existence d'une reconnaissance mensongère à des fins migratoires constitutive d'une fraude à la loi, il convient de faire droit à la demande d'annulation formée par Mme la procureure générale, d'infirmer le jugement déféré, et d'annuler la reconnaissance de filiation paternelle souscrite par M. [P] [A] à l'égard de l'enfant [K] [W] [T] [D].


Sur le nom de l'enfant


L'annulation de la reconnaissance n'aura aucune incidence sur le nom de l'enfant dès lors qu'il ressort de l'acte de naissance versé en procédure qu'elle porte depuis sa naissance le nom de sa mère, accolé à celui du mari de cette dernière. A ce jour, il apparaît contraire à l'intérêt de l'enfant âgée de 16 ans de changer de nom.


Il est dit que l'enfant continuera de porter le nom de famille [T] [D].


Sur l'octroi de dommages-intérêts à l'enfant


Il est constant que le montage frauduleux mis en place par la mère et M. [P] [A] ne saurait être imputé à l'enfant, qui a, au contraire, été instrumentalisée dans cette fraude.


La contestation de cette reconnaissance qui va conduire à l'apposition d'une mention marginale sur son acte de naissance donnant lieu à une publicité potentielle, certes réduite à la production de copies intégrales dudit acte, outre les conséquences sur sa propre situation administrative au regard de la nationalité française qui pourrait désormais se voir remise en cause, sauf démarches et procédures ad hoc, sont de nature à lui causer un préjudice personnel.


Aussi, M. [P] [A] sera condamné à verser à [K] [T] [D], représentée par Mme la présidente de la commission du droit des mineurs es qualites d' administrateur ad hoc la somme de 2000 euros (deux mille euros) en réparation de ses préjudices toutes causes confondues.


Sur les dépens


La charge des dépens tant de première instance que de la procédure d'appel sera laissée à Mme [Ad] [T] et M. [P] [A].



Par ces motifs,


La Cour,


Statuant par arrêt par défaut,


Infirme le jugement du tribunal judiciaire de Lyon du 05 janvier 2022,


Statuant à nouveau


Dit que M. [M] [P] [A], se disant né le … … … à … (…), n'est pas le père de [K] [W] [T] [D], née le … … … à …,Haute-Savoie,


Annule la reconnaissance de paternité de M. [M] [P] [A], se disant né le … … … à … (…), souscrite le 07 février 2007 auprès de l'officier de l'état civil de [Localité 10] (Ain), à l'égard de l'enfant [K] [W] [T] [D] née le … … … à Ambilly,


Ordonne que la mention du présent dispositif soit portée par l'officier de l'état civil compétent sur les actes de l'état civil et notamment en marge de l'acte de naissance n° 789 de l'année 2007 de la mairie d'Ambilly (Haute-Savoie) de l'enfant [K] [W] [T] [D] et l'acte de reconnaissance litigieux détenu par l'officier de l'état civil de [Localité 10] (Ain) ,


Dit que l'enfant porte le nom de [T] [D],


Condamne M. [P] [A] à verser à [K] [W] [T] [D] représentée par Mme la présidente de la commission du droit des mineurs es qualites d' administrateur ad hoc, la somme de 2000 euros (deux mille euros) en réparation de ses préjudices,


Condamne Mme [H] [T] et M. [P] [A] à supporter les dépens de première instance et d'appel.


Signé par Isabelle BORDENAVE, présidente de chambre et par Sophie PENEAUD, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.


LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

Agir sur cette sélection :

Revues liées à ce document

Ouvrages liés à ce document

Chaîne du contentieux

Décisions similaires

  • Tout désélectionner
Lancer la recherche par visa

Domaine juridique - FILIATION NATURELLE

  • Tout désélectionner
Lancer la recherche par thème
La Guadeloupe
La Martinique
La Guyane
La Réunion
Mayotte
Tahiti

Utilisation des cookies sur Lexbase

Notre site utilise des cookies à des fins statistiques, communicatives et commerciales. Vous pouvez paramétrer chaque cookie de façon individuelle, accepter l'ensemble des cookies ou n'accepter que les cookies fonctionnels.

En savoir plus

Parcours utilisateur

Lexbase, via la solution Salesforce, utilisée uniquement pour des besoins internes, peut être amené à suivre une partie du parcours utilisateur afin d’améliorer l’expérience utilisateur et l’éventuelle relation commerciale. Il s’agit d’information uniquement dédiée à l’usage de Lexbase et elles ne sont communiquées à aucun tiers, autre que Salesforce qui s’est engagée à ne pas utiliser lesdites données.

Réseaux sociaux

Nous intégrons à Lexbase.fr du contenu créé par Lexbase et diffusé via la plateforme de streaming Youtube. Ces intégrations impliquent des cookies de navigation lorsque l’utilisateur souhaite accéder à la vidéo. En les acceptant, les vidéos éditoriales de Lexbase vous seront accessibles.

Données analytiques

Nous attachons la plus grande importance au confort d'utilisation de notre site. Des informations essentielles fournies par Google Tag Manager comme le temps de lecture d'une revue, la facilité d'accès aux textes de loi ou encore la robustesse de nos readers nous permettent d'améliorer quotidiennement votre expérience utilisateur. Ces données sont exclusivement à usage interne.