CONSEIL D'ETAT
Statuant au Contentieux
N° 26738
Mlle Arlette HOEGY - M. Ralph SCHLAEPFER
Lecture du 13 Decembre 1982
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)
Sur le rapport de la 9ème Sous-Section
Vu, 1°) la requête sommaire, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 27 août 1980, sous le N° 26 738, et le mémoire complémentaire, enregistré le 23 avril 1981, présentés pour Mlle Arlette HOEGY, demeurant à Luttenbach (Haut-Rhin), 102 rue du village et tendant à ce que le Conseil d'Etat: 1°) annule le jugement du 19 juin 1980 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à la décharge de la taxe sur la valeur ajoutée à laquelle elle a été assujettie au titre des périodes biennales 1973-1974 et 1975-1976; 2°) lui accorde la décharge de l'imposition contestée;
Vu, 2°) la requête sommaire, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 27 août 1980, sous le n° 26 739, et le mémoire complémentaire, enregistré le 23 avril 1981, présentés pour M. Ralph SCHLAEPFER, demeurant à Luttenbach (Haut-Rhin), 102 a, rue du village et tendant à ce que le Conseil d'Etat: 1°) annule le jugement du 19 juin 1980 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à la décharge de la taxe sur la valeur ajoutée à laquelle il a été assujetti au titre de la période correspondant aux années 1973 à 1977; 2°) lui accorde la décharge de l'imposition contestée;
Vu le code général des impôts;
Vu le code des tribunaux administratifs;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953;
Vu la loi du 30 décembre 1977.
Considérant que les requêtes de Mlle HOEGY et de M. SCHLAEPFER concernent les mêmes impositions; qu'il y a lieu de les joindre pour y être statué par une seule décision;
Considérant que, d'une part, Mlle HOEGY et M. SCHLAEPFER demandent l'un et l'autre décharge des droits de taxe sur la valeur ajoutée auxquels ils ont été assujettis, au titre des périodes biennales 1973-1974 et 1975-1976 sous le régime du forfait, en tant que co-exploitants d'un hôtel regardé par l'administration comme exploité par eux en société de fait; que, d'autre part, M. SCHLAEPFER présente une demande semblable pour la période comprise entre le 1er janvier et le 31 décembre 1977;
Sur le moyen tiré par M. SCHLAEPFER de l'autorité de la chose jugée:
Considérant que l'autorité de la chose jugée en matière pénale ne s'attache qu'aux décisions des juridictions qui sont définitives et qui statuent sur le fond de l'action publique; que M. SCHLAEPFER n'est, dès lors, pas fondé à se prévaloir de l'autorité de chose jugée qui s'attacherait à une ordonnance de non lieu dont il a bénéficié à l'occasion des poursuites pénales engagées contre lui pour exploitation d'un hôtel sans autorisation;
Sur le principe de l'imposition:
Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mlle HOEGY et M. SCHLAEPFER ont exploité conjointement un hôtel durant les périodes d'imposition litigieuses; dans des conditions d'ailleurs irrégulières, tant dans les locaux dont disposait, en vertu d'un bail emphythéotique, une association mise précédemment en règlement judiciaire, que dans un immeuble appartenant à M. SCHLAEPFER personnellement; que les intéressés ont mis en commun leurs apports personnels, en biens et en industrie, à cette entreprise qu'ils géraient ensemble, en en assurant la direction en commun, en participant aux bénéfices et aux pertes et en disposant librement, contrairement à ce qu'ils soutiennent, du produit de cette exploitation, fût-ce pour acquitter certaines dettes; qu'il résulte de l'ensemble de ces faits que Mlle HOEGY et M. SCHLAEPFER avaient constitué entre eux une société de fait exploitant un hôtel; que cette exploitation avait lieu dans des conditions comparables à celles d'hôtels gérés par des entreprises commerciales; que, dès lors, elle était passible de la taxe sur la valeur ajoutée, en application des dispositions de l'article 256 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable en l'espèce; que les requérants ne sont pas fondés à contester le caractère commercial de l'exploitation en se prévalant de ce que, le droit d'utilisation des locaux reposant sur la qualité supposée de Mlle HOEGY, qui s'était présentée, d'ailleurs à tort, comme présidente de l'association titulaire du bail emphytéotique, elle-même à but non lucratif, ou sur une location consentie par le syndic du règlement judiciaire de cette association, l'activité de l'entreprise devrait être regardée comme de nature non lucrative; que les requérants ne peuvent davantage invoquer utilement la circonstance qu'ils auraient affecté les produits tirés de l'exploitation de l'hôtel au remboursement des dettes contractées par l'association ou le fait que l'entreprise pratiquait des prix modiques et n'employait pas de personnel salarié;
Sur le procédure d'imposition et la charge de la preuve:
Considérant qu'il résulte de l'instruction que les forfaits assignés à la société de fait constituée entre Mlle HOEGY et M. SCHLAEPFER ont été fixés, au titre des périodes biennales 1973-1974 et 1975-1976, ainsi que, en ce qui concerne M. SCHLAEPFER, au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 1977, par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, conformément aux dispositions de l'article 256-6 du code général des impôts; qu'il appartient, dès lors, aux requérants, en application des mêmes dispositions, de fournir tous éléments, comptables et autres, de nature à permettre d'apprécier l'importance du chiffre d'affaires que l'entreprise pouvait réaliser normalement, compte tenu de sa situation propre;
Sur le montant des bases d'imposition:
Considérant, d'une part, que, pour fixer le montant des forfaits litigieux, la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires s'est fondée sur le coefficient d'occupation de l'hôtel, tel qu'il résultait d'une enquête approfondie de l'administration, et sur les prix pratiqués dans l'entreprise; qu'en se bornant à soutenir que l'hôtel pratiquait des prix modiques et qu'en raison des emplois salariés qu'occupait ailleurs Mlle HOEGY, il lui était matériellement impossible d'accueillir une clientèle de l'importance de celle qu'a retenue la commission départementale des impôts, les requérants n'apportent pas la preuve que les forfaits litigieux ont été établis sur des bases exagérées;
Considérant, d'autre part, que, si M. SCHLAEPFER soutient que le montant des bases d'imposition retenues pour l'année 1977 par l'administration est exagéré, il n'assortit ce moyen d'aucun élément qui permette d'en apprécier le bien fondé;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mlle HOEGY et M. SCHLAEPFER ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes.
DECIDE
Article 1er: Les requêtes de Mlle HOEGY et de M. SCHLAEPFER sont rejetées.