Jurisprudence : CE 8/9 SSR, 15-12-1982, n° 25106

CONSEIL D'ETAT

Statuant au Contentieux

N° 25106

M. xxxxx

Lecture du 15 Decembre 1982

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)



Sur le rapport de la 8ème Sous-Section

Vu la requête, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 4 juillet 1980, présentée pour M. xxxxx, demeurant à xxxxx, agissant tant en son nom personnel que pour le compte de la succession de M. xxxxx, son beau-père, décédé, et tendant à ce que le Conseil d'Etat: 1°) annule le jugement du 8 mai 1980, par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande en décharge des suppléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti, en son nom personnel, au titre des années 1969, 1970, 1971 et 1972, ainsi que des suppléments d'impôt sur le revenu auxquels la succession de M. xxxxx, son beau-père, décédé, a été assujetti au titre de l'année 1972, dans les rôles de la commune de; 2°) lui accorde la décharge des impositions litigieuses;

Vu le code général des impôts;

Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953;

Vu la loi du 30 décembre 1977.
Considérant que, par acte du 22 novembre 1972, MM. xxxxx et xxxxx ont cédé à la communauté urbaine de xxxxx, pour un prix total de 900 000 F, une parcelle de terre de 41 198 mètres carrés située sur le territoire de la commune de xxxxx ( ), dont ils étaient propriétaires indivis et qu'ils n'avaient pas inscrite à l'actif du bilan de leur exploitation agricole; que, se fondant sur cette dernière circonstance, l'administration a estimé que les plus-values réalisées à l'occasion de cette cession ne pouvaient bénéficier du régime particulier d'imposition des plus-values professionnelles définies, en ce qui concerne les exploitants agricoles imposés d'après leur bénéfice réel, à l'article 8 du décret n° 71-964 du 7 décembre 1971, dont les dispositions ont été ultérieurement reprises à l'article 38 sexdecies G de l'annexe III au code général des impôts; qu'en conséquence, s'agissant de plus-values réalisées à l'occasion de la cession de terrains à bâtir au sens de l'article 150 ter du même code, alors en vigueur, elle les a imposées selon le régime défini à cet article; que M. xxxxx demande la décharge des impositions supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquels il a été, dans ces conditions, personnellement assujetti au titre des années 1969 à 1972, après application de l'étalement prévu à l'article 163 du code; que M. xxxxx, agissant commune unique héritier de M. xxxxx, son beau-père décédé, demande également la décharge de l'imposition supplémentaire à l'impôt sur le revenu au titre de l'année 1972 qui a été, pour les mêmes motifs et dans les mêmes conditions, assignée à M. xxxxx;
Considérant qu'il ressort de l'examen du jugement attaqué que le tribunal administratif a omis de se prononcer sur le moyen tiré devant lui par M. xxxxx, sur le fondement de l'article 1649 quinquies E du code général des impôts, de l'interprétation donnée par l'administration, dans une instruction du 14 avril 1973, des dispositions du décret déjà cité du 7 décembre 1971, telles qu'elles ont été modifiées par le décret n° 75-105 du 29 janvier 1973; que M. xxxxx est dès lors fondé à demander l'annulation dudit jugement comme insuffisamment motivé;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande de première instance de M. xxxxx;
Considérant qu'aux termes de l'article 150 ter du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l'année d'imposition 1972: "I-1. Les plus-values réalisées par les personnes physiques à l'occasion de la cession à titre onéreux ou de l'expropriation de terrains non bâtis, situés en France ou de droits portant sur ces terrains, sont soumis à l'impôt sur le revenu dans les conditions fixées par le présent article... IV. Les dispositions du présent article ne sont pas applicables: ... 2°) aux plus-values afférentes à des immeubles figurant à l'actif d'une entreprise relevant de l'impôt sur le revenu... au titre des bénéfices agricoles imposés selon le régime du bénéfice réel"; qu'aux termes de l'article 4 du décret du 7 décembre 1971, pris sur le fondement de l'article 9 de la loi du 21 décembre 1970 et codifié ultérieurement sous l'article 38 sexdecies C de l'annexe III au code général des impôts: "Sous réserve des dispositions des articles 38 sexdecies D à 38 sexdecies R, le bénéfice réel de l'exploitation agricole est déterminé et impsé selon les règles applicables en matière de bénéfices industriels et commerciaux"; qu'enfin, aux termes de l'article 5 du même décret, codifié ultérieurement sous l'article 38 sexdecies D de l'annexe III: "Les immeubles bâtis ou non bâtis, appartenant à l'exploitant et utilisés pour les besoins de l'exploitation, sont obligatoirement inscrits à l'actif du bilan";
Considérant que, si l'article 1er du décret du 29 janvier 1973, codifié ultérieurement sous le même article 38 sexdecies D de l'annexe III, dispose que "Toutefois, le redevable peut demander à conserver les terres dans son patrimoine privé, à la condition de faire connaître son choix au plus tard lors de la déclaration des résultats du troisième exercice au titre duquel il est imposé d'après le régime du bénéfice réel", cette disposition ne pouvait trouver légalement application que pour l'imposition des bénéfices des exercices clos après son entrée en vigueur; qu'il est constant que les plus-values litigieuses ont été réalisées au cours d'un exercice clos le 31 décembre 1972; qu'à cette date, l'article 5 précité du décret du 7 décembre 1971 ne prévoyait aucune exception à l'obligation d'inscrire au bilan des exploitants agricoles les immeubles bâtis ou non bâtis, y compris les terres; qu'il suit de là qu'en n'inscrivant pas la parcelle de terre qui devait être cédée à la communauté urbaine de xxxxx à l'actif du bilan d'entrée de l'exercice clos le 31 décembre 1972, MM. xxxxx et xxxxx ont méconnu l'obligation qui leur était faite par les dispositions précitées de l'article 5 du décret du 7 décembre 1971; que, ce faisant, ils n'ont pas pris une décision de gestion qui leur serait opposable, mais ont commis une simple erreur comptable dont la rectification peut être demandée devant le juge de l'impôt; que l'inscription omise doit, en conséquence, être rétablie au bilan dont il s'agit, de sorte que les plus-values réalisées à l'occasion de la cession faite à la communauté urbaine de Bordeaux étaient passibles du régime d'imposition particulier prévu à l'article 8 du décret précité du 7 décembre 1971 et devaient bénéficier, par voie de conséquence, de l'exonération prévue au IV-2° de l'article 150 ter du code général des impôts, alors en vigueur; que c'est, par suite, à tort que lesdites plus-values ont été imposées selon le régime défini audit article 150 ter;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. xxxxx est fondé à demander la décharge des impositions supplémentaires litigieuses.
DECIDE
Article 1er: Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux en date du 8 mai 1980 est annulé.
Article 2: Il est accordé décharge à M. xxxxx des impositions supplémentaires à l'impôt sur le revenu mises à sa charge au titre des années 1969, 1970, 1971 et 1972 tant en son nom personnel qu'en qualité d'unique héritier de M. xxxxx.

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