Jurisprudence : Cass. crim., 01-02-2023, n° 22-82.368, F-B, Rejet

Cass. crim., 01-02-2023, n° 22-82.368, F-B, Rejet

A01889BL

Référence

Cass. crim., 01-02-2023, n° 22-82.368, F-B, Rejet. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/92850550-cass-crim-01022023-n-2282368-fb-rejet
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Abstract

Le délit de banqueroute, lorsqu'il consiste pour l'auteur à frauduleusement augmenter le passif de son entreprise, en application de l'article L. 654-2, 3°, du code de commerce, texte qui n'exclut aucune modalité d'augmentation du passif, peut être constitué par l'omission, manifestement délibérée, de s'acquitter des cotisations sociales dues


N° K 22-82.368 F- B

N° 00129


GM
1ER FÉVRIER 2023


REJET


M. BONNAL président,


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 1ER FÉVRIER 2023



M. [C] [K] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Rennes, 11e chambre, en date du 9 mars 2022, qui, pour banqueroute, l'a condamné à dix-huit mois d'emprisonnement avec sursis probatoire et a prononcé sur les intérêts civils.


Un mémoire personnel a été produit.

Sur le rapport de M. de Lamy, conseiller, et les conclusions de Mme Viriot-Barrial, avocat général, après débats en l'audience publique du 5 janvier 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, M. de Lamy, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et M. Maréville, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale🏛, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.



Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. L'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) a délivré de multiples contraintes contre M. [C] [K] qui exploitait, en qualité de travailleur indépendant, un fonds de commerce de remise en forme.

3. En effet, ce dernier, après avoir adhéré au Mouvement pour la libération de la protection sociale (MLPS), n'a pas réglé la contribution sociale généralisée (CSG) et la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) dues à l'URSSAF au titre du régime obligatoire.

4. M. [K] a contesté ces contraintes devant le tribunal des affaires de sécurité sociale puis devant la cour d'appel. Il a été condamné à devoir s'acquitter des cotisations non réglées auprès de l'URSSAF, soit la somme de 45 818 euros ainsi que la somme de 35 905,86 euros au titre des dommages et intérêts et des frais irrépétibles.

5. Le recouvrement des créances de l'URSSAF a été confié à un huissier de justice dont les démarches se sont heurtées au retrait par M. [K] des sommes figurant sur ses comptes bancaires et au transfert d'une grande partie de son patrimoine, personnel et professionnel, à son fils, ne laissant sur ses comptes bancaires que des sommes inférieures aux quotités saisissables.

6. Compte tenu de la persistance des impayés, l'URSSAF a déposé plainte à l'encontre de M. [K] du chef de la contravention de défaut de conformité aux prescriptions de la législation de sécurité sociale prévue par l'article R. 244-4 du code de la sécurité sociale🏛 et elle a saisi le tribunal de commerce afin de faire constater l'état de cessation des paiements et de voir ouvrir une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire.

7. La procédure de redressement judiciaire, d'abord ouverte, a été convertie, ensuite, en liquidation judiciaire. Le passif total de l'entreprise a été évalué à la somme de 91 256,19 euros dont 81 723,86 euros correspondant aux cotisations non réglées à l'URSSAF, outre les frais résultant des différentes procédures judiciaires diligentées par M. [K].

8. Le ministère public a ouvert une enquête sur les conditions de la liquidation judiciaire de l'entreprise de M. [K] et a joint au dossier la procédure découlant de la plainte déposée par l'URSSAF.

9. Convoqué devant le tribunal correctionnel, M. [K] a été déclaré coupable, par un jugement du 8 octobre 2020, de banqueroute par augmentation frauduleuse du passif.

10. M. [K] et le ministère public ont formé appel contre cette décision.


Examen des moyens

Sur les premier et deuxième moyens, le troisième moyen pris en sa première branche et le quatrième moyen

11. Ils ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale🏛.

Sur le troisième moyen pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

12. Le moyen, en sa seconde branche, critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a condamné M. [K] du chef de banqueroute par augmentation frauduleuse du passif alors que la cour d'appel a estimé que le comportement, non seulement passif mais revendiqué comme actif de M. [K], avait un caractère frauduleux et alors que la notion d'emploi de moyens frauduleux suppose des actes positifs et non une simple abstention de payer une dette ; dès lors la cour d'appel a méconnu l'article L. 654-2, 3° du code de commerce🏛.


Réponse de la Cour

13. Pour déclarer le prévenu coupable de banqueroute par augmentation frauduleuse du passif, l'arrêt attaqué énonce, notamment, que s'il découle de la jurisprudence de la chambre criminelle de la Cour de cassation que la fraude ne peut se limiter à une simple inaction, en l'espèce M. [K] a agi délibérément, en ce sens que le défaut de paiement de l'intégralité des cotisations URSSAF n'est pas le résultat d'un oubli mais d'une volonté.

14. Les juges relèvent que M. [K] a d'ailleurs, à de multiples reprises, saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale afin de contester les contraintes délivrées par l'URSSAF, puis la cour d'appel après avoir été débouté. Son comportement s'analyse ainsi, non comme une inaction, mais comme des agissements répétés.

15. Les juges précisent qu'il résulte d'un arrêt de la chambre commerciale de la Cour de cassation qu'une augmentation frauduleuse du passif peut résulter du fait de soustraire volontairement une société à l'impôt en France ce qui est à l'origine d'un redressement fiscal ayant entraîné une augmentation des charges de la société en état de cessation des paiements.

16. Ils ajoutent que le manquement imputable à M. [K] s'analyse en une infraction pénale constitutive de la contravention de l'article R. 244-4 du code de la sécurité sociale🏛 incriminant le défaut de conformité aux prescriptions de la législation de sécurité sociale.

17. Les juges concluent que le caractère frauduleux des agissements du prévenu est corroboré par le fait, d'une part, qu'il a soustrait une partie des sommes non payées à l'URSSAF des comptes de son entreprise afin de les rendre insaisissables par les créanciers de celle-ci et, d'autre part, que son comportement a conduit à la cessation des paiements et a perduré après la date de celle-ci, augmentant le passif de l'entreprise, non seulement des cotisations URSSAF impayées depuis plusieurs années, alors que les résultats de l'entreprise permettaient de s'en acquitter, mais également des dommages et intérêts ainsi que des frais irrépétibles qui n'auraient pas été dus si M. [K] s'était conformé aux dispositions du code de la sécurité sociale.

18. En se déterminant ainsi, la cour d'appel n'a méconnu aucun des textes visés au moyen pour les motifs qui suivent.

19. En premier lieu, l'article L. 654-2, 3° du code de commerce🏛 n'exclut aucune modalité d'augmentation du passif.

20. En second lieu, le comportement du prévenu est frauduleux dès lors qu'il consiste en une omission, manifestement délibérée, de s'acquitter des cotisations sociales dues.

21. Ainsi, le moyen n'est pas fondé.

22. Par ailleurs, l'arrêt est régulier en la forme.


PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du premier février deux mille vingt-trois.

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