Jurisprudence : CE Contentieux, 30-06-1982, n° 16391

CE Contentieux, 30-06-1982, n° 16391

A8501AK3

Référence

CE Contentieux, 30-06-1982, n° 16391. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/919917-ce-contentieux-30061982-n-16391
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CONSEIL D'ETAT

Statuant au Contentieux

N° 16391

M. xxxxx

Lecture du 30 Juin 1982

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)



Sur le rapport de la 7ème Sous-Section


Vu la requête enregistrée au Secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 16 février 1979 présenté par M. xxxxx demeurant xxxxx et tendant à ce que le Conseil d'Etat: 1°) annule le jugement du 10 janvier 1979 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande en décharge de l'imposition supplémentaire à l'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 1971 dans les rôles de la ville de xxxxx; 2°) lui accorde la décharge de l'imposition contestée;


Vu le code général des impôts;


Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953;


Vu la loi du 30 décembre 1977.

Considérant qu'aux termes de l'article 161 du code général des impôts, "le boni attribué lors de la liquidation d'une société aux titulaires de droits sociaux en sus de leur apport n'est compris, le cas échéant, dans les bases de l'impôt sur le revenu que jusqu'à concurrence de l'excédent du remboursement des droits sociaux annulés sur le prix d'acquisition de ces droits dans le cas où ce dernier est supérieur au montant de l'apport. -La même règle est applicable dans le cas où la société rachète au cours de son existence les droits de certains associés, actionnaires ou poteurs de parts bénéficiaires";

Considérant que le conseil d'administration de la société anonyme "xxxxx" a décidé le 11 janvier 1971 de proposer aux actionnaires de cette société que celle-ci rachète, à leur valeur nominale, les actions détenues à cette date par certains d'entre eux; que M. xxxxx, administrateur de la société, avait cédé quelques jours auparavant, le 29 décembre 1970, à leur valeur nominale, 10 000 actions de ladite société à une banque de la place de Grenoble; que la société, "xxxxx" a racheté trois mois plus tard ces mêmes actions, toujours à leur valeur nominale, à la banque grenobloise, conformément à la décision en date du 24 mars 1971 de l'assemblée générale extraordinaire de ses actionnaires; que le service a estimé qu'en cédant les 10 000 actions susmentionnées à un tiers, opération qui pouvait être réalisée en franchise de toute imposition jusqu'au 31 décembre 1970, l'acquéreur étant d'ailleurs en mesure, selon toute vraisemblance, de se les faire racheter au même prix, M. xxxxx n'avait eu d'autre but que de se soustraire à l'impôt auquel il aurait été assujetti, en vertu de l'article 161 précité à raison des bonis dégagés par cette opération de rachat, s'il avait, comme les autres actionnaires de la société "xxxxx", fait procéder au rachat direct de ses actions par la société elle-même;

Considérant qu'en vertu de l'article 1649 quinquies B du code général des impôts, lorsque l'administration estime que certains actes dissimulent la portée véritable d'un contrat ou d'une convention sous l'apparence de stipulations déguisant soit une réalisation, soit un transfert de bénéfices ou de revenus et ne lui sont pas opposables, elle supporte, à défaut d'avoir pris l'avis du comité consultatif prévu audit article, la charge de prouver que ces actes ont un caractère fictif ou qu'ils n'ont pu être inspirés par aucun motif autre que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que l'intéressé, s'il n'avait passé ces actes, aurait normalement supportées eu égard à sa situation et à ses activités réelles; qu'en conséquence, il lui appartient, en l'espèce, d'apporter la preuve qu'en ne revendant pas directement les titres litigieux à la société "xxxxx" et en les cédant à un tiers quelques mois plus tôt que prévu, le requérant n'a pu être inspiré par aucun motif autre que celui d'éluder l'impôt;

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que le prix des actions cédées le 29 décembre 1970 par M. xxxxx à la banque grenobloise a été porté à un compte bloqué et "affecté au nantissement pour servir de garantie à des opérations" futures; qu'ainsi, d'une part, ladite cession ne pouvait procurer à M. xxxxx aucune disponibilité immédiate, ce qui contredit ses allégations selon lesquelles il aurait procédé à cette cession dès la fin de 1970 pour faire face à des pressants besoins financiers de l'entreprise qu'il dirigeait à Grenoble, la "Société des Etablissements xxxxx; que, d'autre part, la présentation de l'opération de cession, assortie du blocage de son produit, comme ayant pour objet de permettre ou de faciliter des concours bancaires à son entreprise n'est aucunement convaincante dès lors qu'il est constant qu'entre le 29 décembre 1970 et le 10 septembre 1971, période au cours de laquelle les fonds sont restés en tout ou en partie effectivement bloqués, la banque n'a été saisie d'aucun projet d'opération, ni de demande d'aucune sorte si ce n'est en une seule occasion, d'escompte commercial; qu'enfin l'instruction n'a pas permis d'éclairer l'intérêt réel que pouvait présenter en 1970, pour l'établissement bancaire, une prise de participation, de surcroît minoritaire, dans une société qui n'avait distribué aucun dividende de 1962 à 1969 et dont la situation financière restait fragile;

Considérant, en second lieu, que M. xxxxx ne pouvait ignorer, dès le début de l'année 1970, époque à laquelle, selon ses propres allégations, il aurait engagé les premières négociations avec la banque grenobloise, ni le souhait des actionnaires, comme lui même minoritaires, d'être remboursés de leur participation, ni le fait que la société "xxxxx", qui venait de percevoir une importante indemnité à la suite de l'expropriation d'un immeuble lui appartenant à Paris, était désormais en mesure d'effectuer le rachat des participations minoritaires; que le requérant ne pouvait pas non plus ignorer, au début de novembre 1970, époque à laquelle il a informé du projet de cession de ses actions le président directeur général de la société xxxxx société essentiellement constituée et administree par les membres d'une même famille, les préparatifs de rachat des participations minoritaires, dont l'autorisation devait, en effet, être donnée, sur proposition en date du 11 janvier 1971 du conseil d'administration, par délibération de l'assemblée générale du 24 mars 1971;

Considérant qu'en faisant état de l'ensemble de ces circonstances et de ces constatations, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve que la vente par le requérant, le 29 décembre 1970, de ses titres à la banque grenobloise, opération exonérée d'impôt par application des dispositions encore en vigueur de l'article 5 de l'ordonnance n° 67-834 du 28 septembre 1967, suivie le 24 mars 1971 de la cession, au même prix, des mêmes titres par la banque à la société xxxxx, n'avait pas d'autre objet que la réalisation, sans charges fiscales pour le requérant ni d'ailleurs pour la banque utilisée comme intermédiaire, d'une opération de rachat des titres par la société elle-même; que, par suite, c'est à bon droit que l'administration, après avoir restitué aux opérations réalisées par le requérant leur véritable caractère de rachat direct de ses titres par la société "xxxxx" l'a assujetti à l'impôt sur le revenu au titre de l'année 1971 sur le fondement de l'article 161 précité du code;

Considérant, enfin, que M. xxxxx demande, à titre subsidiaire, la réduction des bases de l'imposition litigieuse en soutenant que l'administration aurait dû, en application des dispositions des articles 109 à 115 du code général des impôts, retrancher du prix de rachat de ses actions la valeur qu'elles avaient atteinte au 1er janvier 1949 et non, comme l'a fait le service, la valeur, moins élevée, pour laquelle ces actions sont entrées dans son patrimoine; que, toutefois, aucune disposition de l'article 161, seul applicable en l'espèce, ne prévoit pareil mode de calcul des bases d'imposition;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

DECIDE

ARTICLE 1er: - La requête de M. xxxxx est rejetée.

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