Jurisprudence : Cass. civ. 1, 14-12-2022, n° 21-22.037, F-B, Cassation

Cass. civ. 1, 14-12-2022, n° 21-22.037, F-B, Cassation

A49718Z7

Référence

Cass. civ. 1, 14-12-2022, n° 21-22.037, F-B, Cassation. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/90681678-cass-civ-1-14122022-n-2122037-fb-cassation
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Abstract


CIV. 1

MY1


COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 14 décembre 2022


Cassation partielle


M. CHAUVIN, président


Arrêt n° 899 F-B

Pourvoi n° N 21-22.037


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 14 DÉCEMBRE 2022


M. [O] [C], domicilié [… …], a formé le pourvoi n° N 21-22.037 contre l'arrêt rendu le 1er juin 2021 par la cour d'appel de Pau (1re chambre), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. [K] [Y], domicilié [… …],

2°/ à la société Ceram Tec GmbH, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 6] (Allemagne), société de droit allemand, venant aux droits de la société CeramTec AGInnovative, CeramTec Engineering,

3°/ à la société Johnson & Johnson Medical, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 1], venant aux droits de la société Depuy France,

4°/ à la caisse primaire d'assurance maladie des Landes, dont le siège est [Adresse 3], représentée par la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 7], et actuellement [Adresse 3],

5°/ à la société Msanté Mutuelle Familiale Landaise, dont le siège est [Adresse 4], et actuellement [Adresse 4],

défendeurs à la cassation.


Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Kerner-Menay, conseiller, les observations de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de M. [C], de la SCP Gatineau, Aa et Rebeyrol, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie des Landes, de la SCP Thomas-Raquin, Le Guerer, Bouniol-Brochier, avocat des sociétés Ceram Tec GmbH et Ab & Ab Ac, et l'avis de M. Chaumont, avocat général, après débats en l'audience publique du 8 novembre 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Kerner-Menay, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Tinchon, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.


Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Pau, 1er juin 2021), à la suite de la pose d'une prothèse de hanche, pratiquée le 10 février 2003 par M. [C] (le chirurgien) dans l'exercice d'une activité libérale au sein d'un établissement de santé public, M. [Ad] a présenté plusieurs luxations ayant nécessité des réinterventions comportant la pose d'un dispositif anti-luxation et un changement de prothèse.

2. Les 27 février 2012 et 10 juillet 2013, il a assigné en responsabilité et indemnisation, d'une part, la société Depuy France, fabricant de la prothèse, aux droits de laquelle est venue la société Johnson & Johnson Médical, qui a mis en cause la société Ceramtec, fabricant de la tête fémorale, d'autre part, le chirurgien. Il a appelé à l'instance la caisse primaire d'assurance maladie des Landes (la caisse), qui a sollicité le remboursement de ses débours.

3. La responsabilité des sociétés Depuy France et Ceramtec a été écartée.



Examen du moyen

Enoncé du moyen

4. Le chirurgien fait grief à l'arrêt de le déclarer responsable d'une faute commise lors de l'intervention du 10 février 2003 et de le condamner à payer différentes sommes à M. [Ad] et à la caisse, alors « que même lorsqu'ils ont recours à des produits de santé pour l'accomplissement d'un acte médical, les professionnels de santé n'engagent leur responsabilité qu'en cas de faute ; qu'il appartient au patient de prouver que son dommage est imputable à une telle faute ; qu'il résulte des termes de l'expertise judiciaire de M. [Ae], confortée par celle préalable de l'expert M. [Af], qu'« il n'y a pas eu de fautes, erreurs, maladresses, ou négligence dans la pose de prothèse totale de hanche droite par le chirurgien, le 10 février 2003 » et que « la prothèse de hanche droite posée le 10 février 2003 par le chirurgien était tout à fait adaptée à la morphologie et à l'âge de M. [Y] »; qu'en jugeant que « le chirurgien a néanmoins commis une faute en ne tirant pas les conséquences des caractéristiques morphologiques de son patient […] qui commandaient d'implanter un dispositif anti-luxation », sans préciser quels éléments probants et médicaux lui permettaient de retenir une telle faute médicale pourtant écartée par les deux seuls experts judiciaires consultés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique🏛 ».


Réponse de la Cour

Vu l'article L. 1142-1 du code de la santé publique🏛 :

5. Selon ce texte, la responsabilité des professionnels de santé au titre d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins n'est engagée qu'en cas de faute.

6. Pour condamner le chirurgien à payer différentes sommes à M. [Ad] et à la caisse, après avoir constaté que les deux expertises judiciaire et administrative réalisées n'avaient retenu aucune faute, erreur, maladresse ou négligence du chirurgien, l'arrêt retient, au vu des luxations intervenues après l'intervention initiale, que celui-ci aurait dû tirer les conséquences des caractéristiques morphologiques de son patient en implantant, dès la première intervention, un dispositif anti-luxation, que la survenance des luxations était la preuve de cette mauvaise appréciation initiale, que ce dispositif s'était avéré efficace puisque les luxations ne s'étaient pas reproduites et que cette faute était à l'origine de l'entier dommage subi par M. [Y].

7. En se déterminant ainsi, sans préciser sur quels éléments médicaux elle se fondait pour parvenir à cette conclusion contraire à celles des expertises judiciaire et administrative réalisées, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

Mise hors de cause

8. En application de l'article 625 du code de procédure civile🏛, il y a lieu de mettre hors de cause, sur leur demande, les sociétés Depuy France, aux droits de laquelle vient la société Johnson & Ab Ac et Ceramtec GmbH, dont la présence n'est pas nécessaire devant la cour d'appel de renvoi.


PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il confirme le jugement en ce qu'il a exonéré de toute responsabilité les sociétés Depuy France et Ceramtec GmbH, l'arrêt rendu le 1er juin 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ;

Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;

Met hors de cause les sociétés Depuy France aux droits de laquelle vient la société Johnson&Ab Ac et Ceramtec GmbH ;

Condamne M. [Y] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile🏛, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze décembre deux mille vingt-deux.


MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SARL Le Prado - Gilbert, avocat aux Conseils, pour M. [C].

M. [C] fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué,

De l'AVOIR déclaré responsable sur le fondement de l'article 1147 du code civil🏛 du préjudice actuel de M. [Y] du fait de la faute commise lors de l'opération chirurgicale pratiquée le 10 février 2003 sous le statut de praticien libéral et de lui AVOIR en conséquence enjoint de réparer le préjudice corporel de M. [Y] évalué à 124 637, 88 euros et de payer la somme de 59 531,04 euros à M. [Y] outre intérêts et la somme de 65 106, 84 euros à la caisse primaire d'assurance maladie des Landes outre intérêts et la somme de 1 091,00 euros au titre de la rémunération forfaitaire réglementée ;

ALORS QUE même lorsqu'ils ont recours à des produits de santé pour l'accomplissement d'un acte médical, les professionnels de santé n'engagent leur responsabilité qu'en cas de faute ; qu'il appartient au patient de prouver que son dommage est imputable à une telle faute ; qu'il résulte des termes de l'expertise judiciaire de M. [Ae], confortée par celle préalable de l'expert [H], qu' « il n'y a pas eu de fautes, erreurs, maladresses, ou négligence dans la pose de prothèse totale de hanche droite par le Docteur [C], le 10 février 2003 » et que « la prothèse de hanche droite posée le 10 février 2003 par le Docteur [C] était tout à fait adaptée à la morphologie et à l'âge de Monsieur [Y] » (rapport d'expertise de M. [Ae], p. 14) ; qu'en jugeant que « le chirurgien a néanmoins commis une faute en ne tirant pas les conséquences des caractéristiques morphologiques de son patient […] qui commandaient d'implanter un dispositif anti-luxation » (arrêt, p. 5 dernier §), sans préciser quels éléments probants et médicaux lui permettaient de retenir une telle faute médicale pourtant écartée par les deux seuls experts judiciaires consultés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique🏛.

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