Jurisprudence : TA Paris, du 30-11-2022, n° 2119145

TA Paris, du 30-11-2022, n° 2119145

A35678XE

Référence

TA Paris, du 30-11-2022, n° 2119145. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/90431961-ta-paris-du-30112022-n-2119145
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Abstract

► Est confirmée la décision de la maire de Paris et du préfet de police d'abaisser la vitesse maximale de circulation des automobiles de 50 à 30 km/h sur l'ensemble des voies de la ville de Paris.



N° 2119145/3-2

ASSOCIATION ROULER LIBRE BY UDELCIM et autres

Mme Aa, Rapporteure

Mme Privet, Rapporteure publique

Audience du 17 novembre 2022

Décision du 30 novembre 2022

**R ÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
**
Le Tribunal administratif de Paris

(3ème section - 2ème chambre)



Vu la procédure suivante :

Par une requête et des mémoires enregistrés le 9 septembre 2021, le 20 juin et
le 5 juillet 2022, l'association Rouler libre by Udelcim, l'association Union
Parisienne, le comité Marais Paris, l'intersyndicale nationale des VTC « INV
», M. AEA XA, Mme AbA AcA, M. BA CA, Mme AUA BCA, M. XdA
ZA, M. YA AAA, Mme ZA AG Ae Af, Mme AgA de Romanis, M. ARA
MA, M. XA AHA, M. AIA AJA, M. AIA ACA, Mme AhA AiA, M. AjA
AKA, Mme ALA AkA, Mme AMA AlA, M. ANA AmA, Mme AOA APA, M.
AQA AA, M. ARA, M. ASA ATA, Mme AUA CA, M. AnA TA, M. FA
UA, Mme AoA AVA, M. AWA ApA, M. AqA WA, M. AVA JA, Mme PA
ALA, Mme AXA ArA, M. AYA AsA et Mme AZA KA, représentés par Me
Tabet, demandent au tribunal :

1°) d'annuler l'arrêté n° 2021P110904 du 8 juillet 2021 du préfet de police et
de la maire de Paris limitant la vitesse à 30 km/h sur l'ensemble des voies de
la Ville de Paris ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 800 euros en application de
l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛.

Ils soutiennent que :

- l'arrêté a été signé par une autorité incompétente dès lors qu'il n'est pas
établi que Mme APA AXA, directrice de la voirie et des déplacements,
disposait d'une délégation de signature régulièrement publiée ;

- l'arrêté est entaché d'une erreur d'appréciation au regard de l'article L.
2213-1-1 du code général des collectivités territoriales et porte une atteinte
disproportionnée à la liberté de circulation ;

- l'arrêté litigieux a pour effet d'aggraver la pollution de l'air dans la
capitale et méconnaît ainsi les dispositions des articles L. 221-1 et R. 221-1
du code de l'environnement🏛
🏛
ainsi que le droit à la vie et à la santé garanti
par la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des
libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense enregistré le 17 mai 2022, la Ville de Paris conclut
au rejet de la requête.

Elle soutient que :

- l'association Rouler Libre by UDELCIM, le comité Marais Paris, le syndicat
INV et les personnes physiques, ne justifient pas d'un intérêt leur donnant
qualité pour agir ;

- le moyen tiré de la méconnaissance des articles L. 221-1 et R. 211-1 du
code de l'environnement est inopérant et, en tout état de cause, infondé ;

- les autres moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense enregistré le 17 mai 2022, le préfet de police
conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- l'association Rouler Libre by UDELCIM et le syndicat INV ont un champ
d'action national et ne justifient donc pas d'un intérêt leur donnant qualité
pour agir à l'encontre de l'arrêté qui a une portée locale ;

- le moyen tiré de ce que la limitation de vitesse à 30 km/h aurait pour
effet de détériorer la cohabitation entre les usagers de la voie publique est
inopérant et, en tout état de cause, infondé ;

- le moyen tiré de ce que l'arrêté vise à empêcher les automobilistes de
circuler est inopérant ;

- les autres moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 22 juin 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 22
juillet 2022 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des
libertés fondamentales ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de la route ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Aa,

- les conclusions de Mme Privet, rapporteure publique,

- et les observations de M. BAA, représentant la Ville de Paris.

Considérant ce qui suit :

1. Par la présente requête, les requérants demandent au tribunal d'annuler
l'arrêté n° 2021P110904 du 8 juillet 2021 par lequel le préfet de police et la
maire de Paris ont limité la vitesse à 30 km/h sur l'ensemble des voies de la
Ville de Paris.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article R. 413-4 du code de la route🏛 : « En agglomération,
la vitesse des véhicules est limitée à 50 km/ h (A) ». L'article R. 413-1 du
même code dispose que : « Lorsqu'elles sont plus restrictives, les vitesses
maximales édictées par l'autorité investie du pouvoir de police prévalent sur
celles autorisées par le présent code ».

3. Aux termes de l'article L. 2213-1 du code général des collectivités
territoriales : « Le maire exerce la police de la circulation sur (A)
l'ensemble des voies publiques ou privées ouvertes à la circulation publique à
l'intérieur des agglomérations (A) ». L'article L. 2213-1-1 de ce code
dispose que : « Sans préjudice de l'article L. 2213-1, le maire peut, par
arrêté motivé, fixer pour tout ou partie des voies de l'agglomération ouvertes
à la circulation publique une vitesse maximale autorisée inférieure à celle
prévue par le code de la route, eu égard à une nécessité de sécurité et de
circulation routières, de mobilité ou de protection de l'environnement (A)
». Enfin en application de l'article L. 2512-14 du même code : « I. - Le maire
de Paris exerce les pouvoirs conférés au maire par la section 1 du chapitre
III du titre Ier du livre II de la présente partie [cela renvoie not. à
l'article L. 2213-1 CGCT précité], sous réserve des II à VII du présent
article. II. - Sur certains sites, voies ou portions de voies fixés par arrêté
du préfet de police après avis du maire de Paris, le préfet de police
réglemente de manière permanente les conditions de circulation ou de
stationnement ou en réserve l'accès à certaines catégories d'usagers ou de
véhicules pour des motifs liés à la sécurité des personnes et des biens ou
pour assurer la protection du siège des institutions de la République et des
représentations diplomatiques. (A) III. - Sur les axes essentiels à la
sécurité à Paris et au bon fonctionnement des pouvoirs publics, le maire de
Paris exerce la police de la circulation et du stationnement dans le respect
des prescriptions prises par le préfet de police pour les aménagements de
voirie projetés par la Ville de Paris. Ces prescriptions visent à garantir la
fluidité de la circulation des véhicules de sécurité et de secours. La liste
de ces axes est fixée par décret. / IV. - Sur les axes dont l'utilisation
concourt à la sécurité des personnes et des biens à Paris en situation de
crise ou d'urgence, le maire de Paris exerce, en tenant compte des motifs qui
ont présidé à l'élaboration de la liste de ces axes, la police de la
circulation et du stationnement, après avis du préfet de police. La liste de
ces axes est fixée par arrêté du préfet de police, pris après avis du maire de
Paris. / V. - Pour l'application du présent article, le contrôle administratif
et le pouvoir de substitution conférés au représentant de l'Etat dans le
département sont exercés, au nom de l'Etat, par le préfet de police. / VI. -
Les pouvoirs conférés par le code de la route au préfet sont exercés, à Paris,
par le préfet de police ».

4. En premier lieu, l'arrêté du 8 juillet 2021 a été signé par le préfet de
police et, pour la maire de Paris et par délégation, par Mme APA AXA,
directrice de la voirie et des déplacements. D'une part, en application de
l'article 24 de l'arrêté du 12 octobre 2017 régulièrement publié au bulletin
officiel de la Ville le 20 octobre 2017, la direction de la voirie et des
déplacements de la Ville de Paris définit et met en œuvre la politique des
déplacements et pilote la circulation et en assure la réglementation sur
l'ensemble du domaine de voirie. D'autre part, en application de l'article 1er
de l'arrêté du 5 janvier 2018🏛
portant délégation de signature de la maire de
Paris à la direction de la voirie et des déplacements, régulièrement publié au
bulletin officiel de la Ville de Paris le 12 janvier 2018, Mme BBA, en sa
qualité de directrice, a reçu délégation pour signer au nom de la maire « dans
la limite de ses attributions, tous les arrêtés, actes et décisions préparés
par les services placés sous son autorité ». Par suite, et eu égard à l'objet
de l'arrêté attaqué, le moyen tiré de l'incompétence du signataire doit être
écarté.

5. En deuxième lieu, d'une part, il ressort des pièces du dossier que
l'abaissement de la vitesse maximale de circulation de 50 à 30km/h permet de
limiter le risque de collision en divisant par deux la distance de freinage et
en agrandissant le champ de vision des conducteurs de véhicules motorisés. En
outre, il ressort également des études versées aux débats que cet abaissement
de la vitesse maximale diminue drastiquement le risque d'accident grave voire
mortel pour un piéton. L'exemple de la métropole de Grenoble où l'abaissement
de la vitesse maximale à 30 km/h depuis le mois de septembre 2015 a permis de
diminuer le nombre d'accidents mortels ou entraînant des blessures nécessitant
une hospitalisation pour les piétons corrobore ces données. La circonstance
que d'autres facteurs, notamment le comportement des usagers des voies
publiques, puissent être à l'origine d'accidents n'est pas de nature à
remettre en cause le fait que l'abaissement du seuil de vitesse maximale
permet une diminution des risques d'accidents graves pour les usagers les plus
vulnérables, en particulier les piétons. D'autre part, bien que l'impact de la
mesure litigieuse sur le développement des mobilités dites « actives » soit
moins aisément quantifiable, il ressort des études versées aux débats qu'une
politique de réduction de vitesse de circulation des véhicules motorisés
favorise l'essor de ce type de mobilité, notamment parce qu'elle facilite et
sécurise la cohabitation des différents usagers de la voie publique. Enfin, si
les effets de la limitation de la vitesse maximale sur les nuisances sonores
sont plus incertains, il ressort des termes mêmes de l'arrêté attaqué que le
principal objectif de cette mesure de police était d'améliorer la sécurité
routière, les autres objectifs étant secondaires. Par ailleurs, comme que le
relèvent les défendeurs, la limitation de vitesse à 50km/h a été maintenue sur
certains axes. Ainsi, eu égard à la marge d'appréciation dont disposent la
maire de Paris et le préfet de police pour assurer la sécurité routière et à
la nécessaire conciliation entre, d'une part, les exigences de protection des
personnes et, d'autre part, la liberté en particulier d'aller et de venir,
l'arrêté attaqué n'est pas entaché d'une erreur d'appréciation compte tenu des
bénéfices attendus, notamment en ce qui concerne la réduction des accidents
graves et mortels.

6. En dernier lieu, contrairement à ce que soutiennent les requérants, il
n'est pas établi que la diminution de la vitesse maximale de circulation à
30km/h au sein de l'agglomération parisienne provoquerait une hausse de la
pollution de l'air ni qu'une telle limitation de vitesse serait nécessairement
moins favorable en termes d'émissions qu'une limitation de vitesse à 50km/h.
Par suite, ils ne sont en tout état de cause pas fondés à soutenir que
l'arrêté attaqué méconnaît les dispositions des articles L. 221-1 et R. 221-1
du code de l'environnement🏛
🏛
, ni qu'une telle mesure porterait atteinte au droit
à la vie et à la santé des Parisiens protégé par l'article 2 de la convention
européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

7. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer
sur les fins de non-recevoir soulevées en défense, que les requérants ne sont
pas fondés à demander l'annulation de l'arrêté.

Sur les frais liés au litige :

8. L'Etat n'étant en tout état de cause pas la partie perdante, les
dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛 font
obstacle à ce que soit mise à sa charge la somme demandée par les requérants.


DECIDE :

Article 1er : La requête présentée par l'association Rouler libre by Udelcim
et autres est rejetée.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à l'association Rouler libre by
Udelcim, première dénommée pour l'ensemble des requérants, à la Ville de Paris
et au préfet de police.


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