Jurisprudence : CA Reims, 15-11-2022, n° 22/01225, Confirmation

CA Reims, 15-11-2022, n° 22/01225, Confirmation

A54598UQ

Référence

CA Reims, 15-11-2022, n° 22/01225, Confirmation. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/90079281-ca-reims-15112022-n-2201225-confirmation
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ARRET N°

du 15 novembre 2022


N° RG 22/01225 - N° PortalAas DBVQ-Ab-B7G-AbGDV


[U]


c/


[K]

[K]


Formule exécutoire le :

à :


la SCP DELVINCOURT - CAULIER-RICHARD - CASTELLO AVOCATS ASSOCIES


la SELARL DUTERME-MOITTIE-ROLLAND

COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE CIVILE-1° SECTION

ARRET DU 15 NOVEMBRE 2022



APPELANT :

d'une ordonnance de référé rendue le 07 juin 2022 par le TJ de CHALONS EN CHAMPAGNE


MonsieurAa[M] [U]

[Adresse 4]

[Localité 10]

Représenté par Me Mélanie CAULIER-RICHARD de la SCP DELVINCOURT - CAULIER-RICHARD - CASTELLO AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de REIMS, avocat postulant et Me Isabelle LOREAUX, avocat au barreau de CHALONS-EN-CHAMPAGNE, avocat plaidant


INTIMES :


MonsieurAb[Ac] [K]

[Adresse 6]

[Localité 10]

Représenté par Me Elisabeth DUTERME de la SELARL DUTERME-MOITTIE-ROLLAND, avocat au barreau de CHALONS-EN-CHAMPAGNE


MonsieurAb[Ad] [K]

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représenté par Me Elisabeth DUTERME de la SELARL DUTERME-MOITTIE-ROLLAND, avocat au barreau de CHALONS-EN-CHAMPAGNE



COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS :


Monsieur Cédric LECLER, conseiller, et Madame Sandrine PILON, conseillère, ont entendu les plaidoiries, les parties ne s'y étant pas opposées. Ils en ont rendu compte à la cour lors de son délibéré.


COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :


Madame Elisabeth MEHL-JUNGBLUTH, présidente de chambre

Monsieur Cédric LECLER, conseiller

Madame Sandrine PILON, conseillère


GREFFIER :


Monsieur Nicolas MUFFAT-GENDET, greffier lors des débats et Madame Yelena MOHAMED-DALLAS, greffière lors du prononcé


DEBATS :


A l'audience publique du 04 octobre 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 15 novembre 2022,


ARRET :


Contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe le 15 novembre 2022 et signé par Madame Elisabeth MEHL-JUNGBLUTH, présidente de chambre, et Madame Yelena MOHAMED-DALLAS, greffière, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.



MM [Ad] et [Ac] [Ab] sont propriétaires de parcelles de vignes situées sur la commune de [Localité 10] (Marne) et cadastrées section C, numéro [Cadastre 7], [Cadastre 2] et [Cadastre 3].


M. [M] [Aa] est propriétaire d'une parcelle contiguë, cadastrée section C numéro [Cadastre 8] et locataire de la parcelle voisine C[Cadastre 9].


M.[Aa] a fait exécuter des travaux sur ses parcelles.


Dénonçant plusieurs désordres causés à leurs fonds par ces travaux, MM [Ab] ont fait assigner M. [Aa] devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Châlons-en-Champagne par acte du 31 mars 2022 afin d'obtenir l'organisation d'une expertise sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile🏛, destinée à faire constater l'étendue de ces désordres et leurs conséquences et à déterminer les travaux propres à y remédier, ainsi que leur coût.


M. [Aa] a sollicité l'annulation de l'assignation qui lui avait été délivrée au motif qu'elle n'avait pas été précédée d'une tentative de conciliation ou de médiation. Subsidiairement, il a conclu à l'irrecevabilité de la demande d'expertise faute d'une telle tentative préalable de résolution amiable du litige. A titre infiniment subsidiaire, il a invoqué l'irrecevabilité de la demande d'expertise en l'absence d'un motif légitime.



Par ordonnance du 7 juin 2022, le juge des référés du tribunal judiciaire de Châlons-en-Champagne a :

- rejeté le moyen tiré de l'exception de nullité de l'assignation,

- rejeté les fins de non-recevoir soulevées par M. [Aa] et déclaré recevable la demande d'expertise de AbM [K],

- ordonné une mesure d'expertise, confiée à M. [R] [Y].


Le juge des référés a considéré que la demande d'expertise constitue une demande indéterminée en lien avec le droit de propriété des demandeurs, de sorte que la tentative préalable de conciliation ou de médiation visée par l'article 750-1 du code de procédure civile🏛 n'était pas un préalable obligatoire.


Il a estimé que MM [Ab] justifient de leur qualité à agir en justice dès lors qu'ils sont propriétaires des parcelles qu'ils disent atteintes par un empiétement et des dommages causés à l'occasion des travaux réalisés par le propriétaire voisin.


Il a considéré que MM [Ab] avaient un motif légitime de voir ordonner une expertise dès lors qu'il existe un risque d'éboulement de leur parcelle, d'autant plus que M. [Aa] conteste formellement l'existence d'une atteinte à leur propriété du fait des travaux qu'il a réalisés.



Par déclaration du 16 juin 2022, M. [Aa] a interjeté appel de cette ordonnance.


Par conclusions notifiées le 19 juillet 2022, il demande à la cour d'appel de réformer l'ordonnance en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau :

- à titre principal, de prononcer l'annulation de l'assignation signifiée le 31 mars 2022,

- à titre subsidiaire, de déclarer irrecevable la demande de MM [Ab], sur le fondement de l'article 750-1 du code de procédure civile🏛,

- à titre infiniment subsidiaire, de déclarer irrecevable la demande de MM [Ab], sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile🏛,

toutes causes confondues, de condamner MM [Ab] à lui payer la somme de 2 442,20 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile🏛 pour les frais de première instance et la somme de 2 268 euros pour les frais en cause d'appel, ainsi qu'aux entiers dépens.


Il estime que l'action de MM [Ab] à son encontre est relative à un trouble anormal de voisinage au sens de l'article 750-1 du code de procédure civile🏛 et que ceux-ci sont dépourvus d'intérêt à agir en l'absence d'un motif légitime à ce qu'une expertise soit ordonnée.


Par conclusions transmises le 9 août 2022, MM [Ab] demandent à la cour de :

- débouter M. [Aa] de son appel,

- confirmer l'ordonnance du juge des référés en toutes ses dispositions,

en conséquence,

- rejeter le moyen tiré de l'exception de nullité de l'assignation,

- rejeter les fins de non-recevoir soulevées par Aa. [U],

- déclarer recevable leur demande d'expertise,

- ordonner l'expertise,

- condamner M. [Aa] à verser à chacun d'eux la somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile🏛,

l - e condamner aux dépens.


Ils affirment que leur action ne porte pas sur des troubles anormaux du voisinage, mais sur un empiétement et une atteinte à leur droit de propriété. Ils ajoutent que l'article 750-1 du code de procédure civile🏛 n'impose pas une tentative préalable de résolution amiable du litige en présence d'une demande d'expertise indéterminée.


Ils estiment avoir un intérêt à agir en leur qualité de propriétaires des parcelles voisines de celles de M [Aa], se prévalant d'un empiétement et de préjudices causés par des travaux réalisés par ce dernier.


Ils soutiennent qu'en l'état des constatations réalisées par l'huissier qu'ils ont mandaté, ils justifient d'un intérêt légitime à voir ordonner une expertise pour établir et conserver avant tout procès au fond la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution du litige.


En cours de délibéré, la cour a invité les parties à présenter leurs observations éventuelles sur les conséquences qu'il convenait de tirer dans la présente instance de l'arrêt n°436939 rendu par le Conseil d'Etat le 22 septembre 2022, invalidant l'article 750-1 du code de procédure civile🏛 dans son ensemble.


M. [Aa] a fait parvenir des observations par message électronique du 14 octobre 2022 et MM [Ab], par message du 18 octobre suivant.



MOTIFS


Sur l'exception de nullité et les fins de non-recevoir


M. [Aa] invoque les dispositions de l'article 750-1 du code de procédure civile🏛 pour soutenir que l'assignation qui lui a été délivrée est nulle sur le fondement de l'article 57 du code de procédure civile🏛, qui impose la mention des diligences entreprises en vue d'une résolution amiable du litige ou la justification de la dispense d'une telle tentative lorsqu'elle doit être précédée d'une tentative de conciliation, de médiation ou de procédure participative et pour soutenir que la demande de MM [Ab] est irrecevable comme le prévoit l'article 750-1 précité.


Toutefois, par un arrêt du 22 septembre 2022, le Conseil d'Etat (CE, 6e et 5e ch. réun., 22 sept. 2022, nos 436939 et 437002) a décidé que l'article 750-1 du code de procédure civile🏛 était annulé.


M. [Aa] fait valoir que la Haute juridiction administrative a décidé de déroger au principe de l'effet rétroactif des décisions d'annulation d'un acte administratif et souligne que l'arrêt précise qu'il y a lieu de regarder comme définitifs les effets produits par l'article 750-1, en arguant de ce que l'assignation lui a été signifiée à la requête de MM [Ab] le 31 mars 2022, donc avant l'annulation du texte.


Mais si le Conseil d'Etat précise effectivement au point 69 de son arrêt qu'il entend déroger au principe de l'effet rétroactif des annulations contentieuses eu égard aux conséquences manifestement excessives sur le fonctionnement du service public de la justice qui résulteraient de l'annulation rétroactive de l'article 750-1, il précise que cette dérogation intervient «'sous réserve des actions contentieuses engagées à la date de la présente décision'», c'est-à-dire sous réserve des instances en cours, pour lesquelles il n'est donc pas dérogé au principe de rétroactivité.


La présente instance en appel, engagée par l'assignation du 31 mars 2022, était en cours à la date de l'arrêt du Conseil d'Etat. Elle est donc atteinte par l'effet rétroactif de l'annulation de l'article 750-1 du code de procédure civile🏛, que M. [Aa] ne peut donc plus invoquer.


En conséquence, l'exception de nullité et la fin de non-recevoir qu'il invoquait à raison du non respect de ce texte doivent être rejetées. L'ordonnance sera donc confirmée de ces chefs.


Sur la demande d'expertise


L'article 145 du code de procédure civile🏛 dispose que s'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé.


MM [Ab] affirment que M [Aa] a fait réaliser des travaux sur ses parcelles et que cela a eu pour conséquence :

- un empiétement sur leur parcelle, sur le chevet qui se situe à l'entrée,

- une modification de la fourrière,

- une modification de la pente naturelle du terrain et donc de l'écoulement des eaux de ruissellement,

- un risque d'effondrement de leur propriété.


Ils dénoncent une atteinte à leur droit de propriété, qu'ils imputent aux travaux réalisés paAa M. [U].


Ils ont sollicité un huissier aux fins de constat, qui a établi un procès-verbal le 2 février 2022, dont il résulte que M. [Aa] a procédé à d'importants travaux de décaissement sur plusieurs mètres de hauteur, de sorte que la fourrière s'arrête nette sur un trou de plus de deux mètres de hauteur, sans qu'aucune structure n'ait été installée pour soutenir les terres.


Ils produisent en outre des photographies montrant le ruissellement d'eaux sur la fourrière et une partie de leurs terres.


M. [Aa] conteste tout désordre et tout risque d'éboulement. Il produit également un procès-verbal de constat d'huissier, établi le 2 mai 2022, donc postérieurement au précédent, qui fait, notamment, état de travaux sur le talus situé au pied de la parcelle de MM [Ab], sur une hauteur variant entre 30 cm et 1 mètre au maximum et de l'absence de décaissement flagrant.


Il verse en outre aux débats l'attestation de l'exploitant d'une parcelle proche, qui affirme n'avoir constaté aucune modification de l'écoulement des eaux du fait des travaux.


Il existe donc bien un litige potentiel entre les parties sur les conséquences des travaux réalisés par M. [Aa] sur les parcelles appartenant à MM [Ab] et ceux-ci ont tout intérêt à faire établir, avant tout procès au fond, les faits en cause et à recueillir l'avis d'un technicien sur l'existence d'éventuels désordres et les moyens d'y remédier.


MM [Ab] justifient ainsi d'un motif légitime et l'ordonnance de référé sera confirmée dans toutes ses dispositions relatives à la mesure d'expertise.


L'ordonnance sera également confirmée en ses dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles.


M. [Aa], qui succombe en son appel, doit supporter les dépens de cette instance. Sa demande en paiement pour ses frais irrépétibles d'appel sera donc rejetée.


Il est équitable d'allouer à MM [Ab] la somme de 800 euros chacun pour leurs frais irrépétibles d'appel.



PAR CES MOTIFS


La cour, statuant et publiquement et contradictoirement,


Confirme l'ordonnance rendue le 7 juin 2022 par le juge des référés du tribunal judiciaire de Châlons-en-Champagne en toutes ses dispositions ;


Y ajoutant,


Condamne M.[M] [Aa] à payer à MM [Ac] et [Ad] [Ab] la somme de 800 euros chacun pour leurs frais irrépétibles d'appel ;


Déboute M. [M] [Aa] de sa demande en paiement pour ses frais irrépétibles d'appel ;


Condamne M. [M] [Aa] aux dépens d'appel.


LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

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