Jurisprudence : TA Amiens, du 08-11-2022, n° 2203116

TA Amiens, du 08-11-2022, n° 2203116

A47458TW

Référence

TA Amiens, du 08-11-2022, n° 2203116. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/89869113-ta-amiens-du-08112022-n-2203116
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Abstract

Mots-clés : référé précontractuel • offre • dématérialisation • erreur du soumissionnaire • profil de l'acheteur Par une ordonnance du 8 novembre 2022, le tribunal administratif d'Amiens a imposé à un pouvoir adjudicateur de tenir compte d'une offre qui avait été remise, par erreur, dans le " tiroir numérique " d'une autre consultation que celle à laquelle elle était destinée et qui était également en cours sur le profil de l'acheteur.


Références

Tribunal Administratif d'Amiens

N° 2203116


lecture du 08 novembre 2022
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 27 septembre et 13 octobre 2022, la société routière de la Vallée de la Marne (RVM), représentée par Me Carle, demande au juge des référés, statuant sur le fondement des articles L. 551-1 et suivants du code de justice administrative🏛 :

1°) d'enjoindre à la communauté d'agglomération de la région de Château-Thierry de reprendre la procédure de passation, à compter du stade de l'ouverture des candidatures et des offres, du marché n° 2022S13 relatif à la réalisation de travaux de séparation de réseaux unitaires sur l'agglomération Castelle (secteur 3 "commune de Château-Thierry") ;

2°) de condamner la communauté d'agglomération de la région de Château-Thierry à lui verser une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛.

Elle soutient que la communauté d'agglomération de la région de Château-Thierry ne pouvait rejeter son offre comme irrégulière au motif qu'elle l'a déposée sur le mauvais profil de candidature dématérialisée, dès lors qu'elle a immédiatement averti le gestionnaire de la plateforme et l'acheteur de son erreur et que son dossier, rendu dans les délais prescrits, était complet et correspondait aux prescriptions de la consultation du marché n° 2022S13.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 30 septembre et 10 octobre 2022, la communauté d'agglomération de la région de Château-Thierry, représentée par Me Gauch, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la société RVM une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛.

Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 octobre 2022, la société Colas France, représentée par Me Henochsberg, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la société RVM une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛.

Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la commande publique ;

- le code de justice administrative.

La présidente du tribunal a désigné M. Thérain, vice-président, pour statuer sur les demandes de référé.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Thérain, vice-président,

- et les observations de Me Carle, représentant la société RVM, qui conclut aux mêmes fins que ses écritures par les mêmes moyens, celles de Me Millard, représentant la communauté d'agglomération de la région de Château-Thierry, qui conclut aux mêmes fins que ses écritures par les mêmes moyens, ainsi que celles de Me Frigaux, représentant la société Colas France, qui conclut aux mêmes fins que ses écritures par les mêmes moyens.

La clôture de l'instruction a été prononcée à l'issue de l'audience.

Considérant ce qui suit :

1. La communauté d'agglomération de Château-Thierry a engagé le 12 août 2022 une procédure adaptée en vue de l'attribution du marché à bons de commande n° 2022S13 relatif à la réalisation de travaux de séparation de réseaux unitaires sur l'agglomération Castelle (secteur 3 "commune de Château-Thierry"). La société routière de la Vallée de la Marne (RVM), qui souhaitait se porter candidate à l'obtention de ce marché, demande au juge des référés, sur le fondement des articles L. 551-1 et suivants du code de justice administrative🏛, d'enjoindre à la communauté d'agglomération de la région de Château-Thierry de reprendre la procédure de passation à compter du stade de l'ouverture des candidatures.

2. Aux termes de l'article L. 551-1 du code de justice administrative🏛 : " Le président du tribunal administratif, ou le magistrat qu'il délègue, peut être saisi en cas de manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence auxquelles est soumise la passation par les pouvoirs adjudicateurs de contrats administratifs ayant pour objet l'exécution de travaux, la livraison de fournitures ou la prestation de services, avec une contrepartie économique constituée par un prix () ". Il appartient au juge du référé précontractuel de rechercher si l'entreprise qui le saisit se prévaut de manquements qui, eu égard à leur portée et au stade de la procédure auquel ils se rapportent, sont susceptibles de l'avoir lésée ou risquent de la léser, fût-ce de façon indirecte, en avantageant une entreprise concurrente.

3. Aux termes de l'article R. 2132-3 du code de la commande publique🏛 : " Le profil d'acheteur est la plateforme de dématérialisation permettant notamment aux acheteurs de mettre les documents de la consultation à disposition des opérateurs économiques par voie électronique et de réceptionner par voie électronique les documents transmis par les candidats et les soumissionnaires. Un arrêté du ministre chargé de l'économie figurant en annexe du présent code détermine les fonctionnalités et les exigences minimales qui s'imposent aux profils d'acheteur ". Selon l'article R. 2132-8 du même code : " Les moyens de communication électronique ainsi que leurs caractéristiques techniques ne sont pas discriminatoires et ne restreignent pas l'accès des opérateurs économiques à la procédure de passation () ".

4. Il résulte de l'instruction que la société RVM, qui souhaitait se porter candidate à l'obtention du marché litigieux référencé n° 2022S13, a déposé, par erreur, son dossier de candidature et d'offre sur le profil d'acheteur du pouvoir adjudicateur dans le tiroir numérique dédié au marché référencé n° 2022S14 relatif à un autre lot de l'opération, dont les dates limites de remise des offres et candidatures étaient identiques. Il résulte également de l'instruction et n'est au demeurant pas contesté que les pièces transmises par la société requérante au titre de cette dernière procédure correspondaient en tout point au marché référencé n° 2022S13, ainsi que le précisait l'ensemble des pièces qu'elle avait remises dans les délais impartis. Dans ces conditions, alors que ces pièces ne pouvaient être manifestement regardées comme présentées au titre d'une autre procédure et que leur rétablissement au titre de la procédure de passation litigieuse ne nécessitait en l'espèce aucune analyse non plus qu'aucune contrainte particulière pour le pouvoir adjudicateur, l'erreur commise par la société requérante ne pouvait dispenser celui-ci de prendre en considération sa candidature et son offre. Il s'ensuit qu'en considérant que cette société n'était pas candidate au marché référencé n° 2022S13 et en n'analysant pas à ce titre l'offre qu'elle avait remise, la communauté d'agglomération de la région de Château-Thierry a manqué à ses obligations de mise en concurrence, ce qui a directement lésé la société requérante.

5. Il appartient au juge des référés précontractuels de donner leur exacte portée aux conséquences des manquements qu'il relève. Au cas d'espèce, le manquement relevé ci-dessus implique nécessairement que la procédure de passation litigieuse soit annulée à compter du stade de l'examen des candidatures et des offres. Il y a lieu de prononcer cette annulation et d'enjoindre à la communauté d'agglomération de la région de Château-Thierry de reprendre cette procédure à compter de ce stade, sauf si elle entend renoncer à passer le marché.

6. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions que les parties présentent sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛.

O R D O N N E :

Article 1er : La procédure de passation du marché de travaux n° 2022S13 relatif à la réalisation de travaux de séparation de réseaux unitaires sur l'agglomération Castelle (secteur 3 "commune de Château-Thierry") est annulée à compter du stade de l'examen des candidatures et des offres.

Article 2 : Il est enjoint à la communauté d'agglomération de la région de Château-Thierry, sauf si elle entend renoncer à passer le marché, de reprendre la procédure de passation à compter de ce stade.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête, ainsi que les conclusions que la communauté d'agglomération de la région de Château-Thierry et la société Colas présentent sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛, sont rejetés.

Article 4 : La présente ordonnance sera notifiée à la société routière de la Vallée de la Marne (RVM), à la communauté d'agglomération de la région de Château-Thierry et à la société Colas France.

Fait à Amiens, le 8 novembre 2022.

Le président de la 3ème chambre,

Juge des référés

Signé :

S. ThérainLa greffière,

Signé :

S. Grare

La République mande et ordonne au préfet de l'Aisne en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.

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