Jurisprudence : CE 3/8 SSR, 24-06-2013, n° 348207, publié au recueil Lebon

CE 3/8 SSR, 24-06-2013, n° 348207, publié au recueil Lebon

A7720KHE

Référence

CE 3/8 SSR, 24-06-2013, n° 348207, publié au recueil Lebon. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/8882350-ce-38-ssr-24062013-n-348207-publie-au-recueil-lebon
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Abstract

Un litige relatif à l'occupation sans titre d'emplacements dans les halles, foires et marchés d'une commune relève de la compétence du juge judiciaire.



CONSEIL D'ÉTAT

Statuant au contentieux

N° 348207

SARL ELDORADO

Mme Marie-Astrid Nicolazo de Barmon, rapporteur

Mme Nathalie Escaut, rapporteur public

Lecture du 24 juin 2013

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d'Etat statuant au contentieux

Section du contentieux, 8ème et 3ème sous-sections réunies


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 7 avril et 6 juillet 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SARL Eldorado, dont le siège est 2 rue des Vergers à Alès (30100), représentée par son gérant, Mme Martine Dorado-Araguas, et pour cette dernière, demeurant ... ; elles demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 08MA03590 du 7 février 2011 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté leur requête tendant à l'annulation du jugement n° 0503013 du 7 mai 2008 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande tendant à l'annulation des deux titres exécutoires émis le 1er avril 2005 pour des montants respectifs de 21 879,48 euros et 3 646,58 euros et des deux commandements de payer émis le 7 février 2007 pour des montants respectifs de 101 551,87 euros et de 2 471 euros ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à leur appel ;

3°) de mettre à la charge de la commune d'Alès la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Marie-Astrid Nicolazo de Barmon, Maître des Requêtes,

- les conclusions de Mme Nathalie Escaut, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la SARL Eldorado et de Mme Martine Dorado-Araguas et à la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat de la commune d'Alès ;

1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2331-3 du code général des collectivités territoriales : " Les recettes fiscales de la section de fonctionnement peuvent comprendre : (...) b) les recettes suivantes : (...) 6° Le produit des droits de place perçus dans les halles, foires et marchés d'après les tarifs dûment établis " ; qu'il résulte des termes mêmes de ces dispositions que le produit des droits de place, fixés selon un tarif établi par le conseil municipal et perçus directement par la commune dans les halles, foires et marchés, constitue une recette fiscale ; que ce produit entre par sa nature dans la catégorie des taxes assimilées aux contributions indirectes ; qu'il n'appartient, par suite, qu'à la juridiction judiciaire de connaître de l'opposition formée contre les états exécutoires émis par le maire de la commune et de la contestation de l'obligation de payer procédant du commandement de payer émis par le comptable public en vue du recouvrement des droits de place afférents à l'occupation d'emplacements dans les halles, foires et marchés d'une commune, alors même que cette occupation porte sur une dépendance du domaine public de cette personne publique ;

2. Considérant qu'en cas d'occupation sans titre de tels emplacements, la commune est fondée à réclamer à l'occupant, tenu de réparer le dommage causé au gestionnaire du domaine par cette occupation irrégulière, une indemnité calculée par référence aux tarifs applicables ou, en leur absence, au revenu tenant compte des avantages de toute nature qu'aurait pu produire l'occupation régulière de la dépendance en cause ; que la juridiction judiciaire est également compétente pour connaître des litiges relatifs aux états exécutoires ou à la contestation de l'obligation de payer résultant des commandements de payer émis à l'encontre de l'occupant sans titre de tels emplacements pour avoir paiement de cette indemnité ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la commune d'Alès a concédé à la Société Auxiliaire du Parc (SAP), par une convention conclue le 18 juin 1991, la construction et l'exploitation d'un ensemble immobilier comprenant notamment un marché couvert ; que, par un contrat conclu le 21 septembre 1993, la SAP s'est engagée à louer à la SARL Eldorado, par bail commercial, un local situé au rez-de-chaussée et au premier étage de ce marché pour l'exploitation d'un commerce de bar-restaurant, après que le terrain d'assiette de la halle eut fait l'objet d'un déclassement pour être intégré au domaine privé de la commune ; que, le 20 décembre 1995, la commune a résilié le contrat de concession conclu avec la SAP et repris la gestion du marché couvert en régie directe ; que la commune, qui n'avait pas procédé au déclassement du local occupé par la SARL Eldorado, a proposé à cette dernière, par un courrier du 25 octobre 1996, de conclure une convention portant autorisation temporaire d'occupation du domaine public ; que la SARL Eldorado a refusé cette offre par lettre du 20 novembre suivant ; que, par un arrêt du 27 février 2007, devenu définitif, la cour administrative d'appel de Marseille a enjoint à la SARL Eldorado ainsi qu'à tous occupants de son chef de libérer le local appartenant au domaine public communal qu'elle occupait sans droit ni titre ; que, le 1er avril 2005, le maire de la commune d'Alès a émis à l'encontre de la SARL Eldorado et de Mme Dorado-Araguas, sa gérante, deux titres exécutoires pour avoir paiement des sommes de 21 879,48 euros et de 3 646,58 euros correspondant aux indemnités d'occupation du local en cause au titre de l'année 2004 et au titre des mois de janvier et février 2005 ; que le trésorier municipal d'Alès a émis le 7 février 2005 deux commandements de payer en vue du recouvrement des indemnités relatives à l'occupation du local en cause au titre des années 1999 à 2003 pour un montant de 101 551,87 euros et aux extensions de terrasse lors des férias des années 2002 et 2003 pour un montant de 2 472 euros ;

4. Considérant qu'en rejetant comme non fondée la requête de la SARL Eldorado et de Mme Dorado-Araguas, formée contre le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 7 mai 2008 rejetant leur demande d'annulation de ces titres exécutoires et de décharge de l'obligation de payer les sommes mentionnées sur ces commandements de payer, sans relever d'office l'incompétence de la juridiction administrative pour connaître du litige dont elle était saisie, la cour administrative d'appel de Marseille a méconnu son office et, par suite, commis une erreur de droit ; que, dès lors et sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens du pourvoi, l'arrêt attaqué doit être annulé pour ce motif ;

5. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

6. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, la juridiction administrative n'est pas compétente pour se prononcer sur la demande présentée par la SARL Eldorado et par Mme Dorado-Araguas ; que le jugement par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leurs conclusions tendant à l'annulation des titres exécutoires en litige et à la décharge de l'obligation de payer les sommes correspondantes doit, par suite, être annulé ;

7. Considérant qu'il y a lieu, pour le Conseil d'Etat, d'évoquer, de statuer immédiatement sur ces conclusions et de les rejeter comme portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître ;

8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de la commune d'Alès qui ne peut être regardée comme la partie perdante dans la présente instance ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SARL Eldorado et de Mme Dorado-Araguas les sommes demandées par la commune d'Alès au titre de ces dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 7 février 2011 et le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 7 mai 2008 sont annulés.

Article 2 : La demande présentée par la SARL Eldorado et par Mme Dorado-Araguas devant le tribunal administratif de Nîmes est rejetée comme portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.

Article 3 : Les conclusions présentées par la SARL Eldorado, par Mme Dorado-Araguas et par la commune d'Alès au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la SARL Eldorado, à Mme Martine Dorado-Araguas et à la commune d'Alès.

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