Jurisprudence : Cass. soc., 28-09-2022, n° 21-19.092, F-B, Rejet

Cass. soc., 28-09-2022, n° 21-19.092, F-B, Rejet

A34018LK

Référence

Cass. soc., 28-09-2022, n° 21-19.092, F-B, Rejet. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/88477410-cass-soc-28092022-n-2119092-fb-rejet
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Abstract

D'abord, il résulte des articles L. 1233-61 et L. 1233-58 du code du travail, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1718 du 20 décembre 2017, que les conditions d'effectifs et de nombre de licenciements dont dépend l'obligation d'établir un plan de sauvegarde de l'emploi s'apprécient au niveau de l'entreprise que dirige l'employeur. Il n'en va autrement que lorsque, dans le cadre d'une unité économique et sociale (UES), la décision de licencier a été prise au niveau de l'UES. Ensuite, aux termes de l'article 539 du code de procédure civile, le délai de recours par une voie ordinaire suspend l'exécution du jugement. Le recours exercé dans le délai est également suspensif. Il en résulte qu'une décision frappée d'appel ne peut servir de base à une demande en justice tendant à la réalisation des effets qu'elle comporte. Est en conséquence approuvé, l'arrêt, qui, après avoir constaté que le jugement ayant reconnu l'existence de l'UES non assorti de l'exécution provisoire faisait l'objet d'un appel formé par la société employeur, toujours pendant lors de l'engagement de la procédure de licenciement, décide que c'est au seul niveau de la société employeur que doivent s'apprécier les conditions de mise en oeuvre d'un plan de sauvegarde de l'emploi


SOC.

CH9


COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 28 septembre 2022


Rejet


Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président


Arrêt n° 1087 F-B

Pourvoi n° M 21-19.092


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 28 SEPTEMBRE 2022


M. [G] [J], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° M 21-19.092 contre l'arrêt rendu le 5 mai 2021 par la cour d'appel de Versailles (15e chambre), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société MMJ, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 4], mandataire, prise en la personne de M. [R] [P], pris en qualité de mandataire liquidateur de la société Modulaire Système Services (MSS), sise [Adresse 3],

2°/ à la société MMJ, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 4], mandataire, prise en la personne de M. [R] [P], pris en qualité de mandataire liquidateur de la société Elteo, sise [Adresse 3],

3°/ à l'Unédic AGS-CGEA d'Ile-de-France Est, dont le siège est [Adresse 2],

défenderesses à la cassation.


Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Prache, conseiller référendaire, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. [J], de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de la société MMJ, après débats en l'audience publique du 12 juillet 2022 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Prache, conseiller référendaire rapporteur, M. Seguy, conseiller, et Mme Aubac, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.


Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 5 mai 2021), M. [Aa] a été engagé à compter du 2 décembre 2013 en qualité d'exploitant par la société Modulaire Système Service (MSS), qui appartenait à un groupe de huit sociétés dont la société Elteo, société holding.

2. Par jugement du 3 janvier 2017, dont les sociétés MSS et Elteo ont relevé appel le 9 janvier 2017, un tribunal d'instance a déclaré que ces huit sociétés formaient une unité économique et sociale (UES) au sein de laquelle devaient être organisées les élections du personnel.

3. Par jugement du 4 septembre 2017, un tribunal de commerce a ordonné l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire à l'encontre de la société MSS et désigné M. [R] [P] en qualité de liquidateur.

4. Convoqué le 6 septembre 2017 à un entretien préalable au licenciement, fixé au 14 septembre 2017, le salarié s'est vu notifier, le 18 septembre 2017 le motif économique de la rupture du contrat de travail et a adhéré au contrat de sécurisation professionnelle qui lui avait été proposé.

5. Le salarié a saisi la juridiction prud'homale aux fins de voir dire son licenciement sans cause réelle et sérieuse.


Examen du moyen

Enoncé du moyen

6. Le salarié fait grief à l'arrêt de dire le licenciement justifié par un motif économique et de le débouter de ses demandes indemnitaires au titre de l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement, alors :

« 1°/ que lorsque les projets de licenciement ont été décidés au niveau d'une UES, c'est à ce niveau qu'il convient se placer pour vérifier si les conditions d'effectif et de nombre de licenciements imposant la mise en oeuvre d'un plan de sauvegarde de l'emploi sont remplies ; qu'en l'espèce, le salarié soutenait expressément que la décision de licencier les salariés pour motif économique avait été prise au niveau de l'UES ; qu'il appartenait en conséquence à la juridiction judiciaire, dès lors qu'il était soutenu devant elle que les licenciements avaient été décidés au niveau de cette UES, d'apprécier l'incidence de la reconnaissance d'une UES quant à la mise en oeuvre d'un plan de sauvegarde de l'emploi et à la validité des licenciements ; qu'en retenant, pour débouter le salarié, que si en principe le jugement reconnaissant l'existence d'une unité économique et sociale a un caractère déclaratif à la date introductive d'instance, en l'espèce il était établi qu'au jour du licenciement du salarié par Me [P], la procédure d'appel étant toujours en cours, la décision du Tribunal d'instance n'était pas définitive, que celle-ci n'était au demeurant pas assortie de l'exécution provisoire et donc qu'elle ne s'imposait pas à Me [P] peu important que celui-ci se soit ultérieurement désisté de son appel, que le licenciement du salarié n'avait pu être décidé au niveau de l'UES dont la reconnaissance était alors privée d'effet, que c'était donc au seul niveau de la société MSS que devaient s'apprécier les conditions pouvant justifier la mise en place d'un PSE, la cour d'appel a statué par des motifs impropres à justifier sa décision, la privant de toute base légale au regard des articles L. 1233-61 et L. 1233-58 du code du travail🏛 ;

2°/ que le jugement reconnaissant l'existence d'une unité économique et sociale a un caractère simplement déclaratif à la date introductive d'instance ; que le jugement reconnaissant l'existence d'une UES, même frappée d'appel et non assortie de l'exécution provisoire, a autorité de chose jugée entre les parties jusqu'à réformation éventuelle devant la cour d'appel pour tout ce qui concerne les éléments établis par les premiers juges ; qu'il s'en déduit que le jugement reconnaissant l'existence d'une unité économique et sociale, ayant un caractère déclaratif et rétroactif, a autorité de chose jugée, même si le jugement est frappé d'appel et non assorti de l'exécution provisoire ; qu'en retenant, pour débouter le salarié, que si en principe le jugement reconnaissant l'existence d'une unité économique et sociale a un caractère déclaratif à la date introductive d'instance, en l'espèce il était établi qu'au jour du licenciement du salarié par Me [P], la procédure d'appel étant toujours en cours, la décision du Tribunal d'instance n'était pas définitive, que celle-ci n'était au demeurant pas assortie de l'exécution provisoire et donc qu'elle ne s'imposait pas à Me [P] peu important que celui-ci se soit ultérieurement désisté de son appel, que le licenciement du salarié n'avait pu être décidé au niveau de l'UES dont la reconnaissance était alors privée d'effet, que c'était donc au seul niveau de la société MSS que devient s'apprécier les conditions pouvant justifier la mise en place d'un PSE, la cour d'appel a violé l'article 539 du code de procédure civile🏛, ensemble des articles L. 1233-61 et L. 1233-58 du code du travail🏛. »


Réponse de la Cour

7. D'abord, il résulte des articles L. 1233-61 et L. 1233-58 du code du travail🏛, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1718 du 20 décembre 2017🏛, que les conditions d'effectifs et de nombre de licenciements dont dépend l'obligation d'établir un plan de sauvegarde de l'emploi s'apprécient au niveau de l'entreprise que dirige l'employeur. Il n'en va autrement que lorsque, dans le cadre d'une unité économique et sociale (UES), la décision de licencier a été prise au niveau de l'UES.

8. Ensuite, aux termes de l'article 539 du code de procédure civile🏛, le délai de recours par une voie ordinaire suspend l'exécution du jugement. Le recours exercé dans le délai est également suspensif. Il en résulte qu'une décision frappée d'appel ne peut servir de base à une demande en justice tendant à la réalisation des effets qu'elle comporte.

9. La cour d'appel, qui a constaté que le jugement ayant reconnu l'existence de l'UES non assorti de l'exécution provisoire faisait l'objet d'un appel formé par les sociétés, dont la société MSS, toujours pendant lors de l'engagement de la procédure de licenciement, en a exactement déduit, sans être tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, que c'était au seul niveau de la société employeur que devaient s'apprécier les conditions de mise en oeuvre d'un plan de sauvegarde de l'emploi.

10. Le moyen n'est donc pas fondé.


PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. [Aa] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile🏛, rejette les demandes.

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, prononcé et signé par Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, en ayant délibéré en remplacement du conseiller référendaire rapporteur empêché, en l'audience publique du vingt-huit septembre deux mille vingt-deux, conformément aux dispositions des articles 452 et 1021 du code de procédure civile🏛.



MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. [Aa]

M. [Aa] fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit le licenciement justifié par un motif économique et de l'AVOIR en conséquence débouté de ses demandes indemnitaires au titre de l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement ;

1) ALORS d'abord QUE lorsque les projets de licenciement ont été décidés au niveau d'une UES, c'est à ce niveau qu'il convient se placer pour vérifier si les conditions d'effectif et de nombre de licenciements imposant la mise en oeuvre d'un plan de sauvegarde de l'emploi sont remplies ; qu'en l'espèce, le salarié soutenait expressément que la décision de licencier les salariés pour motif économique avait été prise au niveau de l'UES (écritures d'appel p. 20 et s.) ; qu'il appartenait en conséquence à la juridiction judiciaire, dès lors qu'il était soutenu devant elle que les licenciements avaient été décidés au niveau de cette UES, d'apprécier l'incidence de la reconnaissance d'une UES quant à la mise en oeuvre d'un plan de sauvegarde de l'emploi et à la validité des licenciements ; qu'en retenant, pour débouter le salarié, que si en principe le jugement reconnaissant l'existence d'une unité économique et sociale a un caractère déclaratif à la date introductive d'instance, en l'espèce il était établi qu'au jour du licenciement du salarié par Me [P], la procédure d'appel étant toujours en cours, la décision du Tribunal d'instance n'était pas définitive, que celle-ci n'était au demeurant pas assortie de l'exécution provisoire et donc qu'elle ne s'imposait pas à Me [P] peu important que celui-ci se soit ultérieurement désisté de son appel, que le licenciement du salarié n'avait pu être décidé au niveau de l'UES dont la reconnaissance était alors privée d'effet, que c'était donc au seul niveau de la société MSS que devaient s'apprécier les conditions pouvant justifier la mise en place d'un PSE, la cour d'appel a statué par des motifs impropres à justifier sa décision, la privant de toute base légale au regard des articles L. 1233-61 et L. 1233-58 du code du travail🏛 ;

2) ALORS en tout état de cause QUE le jugement reconnaissant l'existence d'une unité économique et sociale a un caractère simplement déclaratif à la date introductive d'instance ; que le jugement reconnaissant l'existence d'une UES, même frappée d'appel et non assortie de l'exécution provisoire, a autorité de chose jugée entre les parties jusqu'à réformation éventuelle devant la cour d'appel pour tout ce qui concerne les éléments établis par les premiers juges ; qu'il s'en déduit que le jugement reconnaissant l'existence d'une unité économique et sociale, ayant un caractère déclaratif et rétroactif, a autorité de chose jugée, même si le jugement est frappé d'appel et non assorti de l'exécution provisoire ; qu'en retenant, pour débouter le salarié, que si en principe le jugement reconnaissant l'existence d'une unité économique et sociale a un caractère déclaratif à la date introductive d'instance, en l'espèce il était établi qu'au jour du licenciement du salarié par Me [P], la procédure d'appel étant toujours en cours, la décision du Tribunal d'instance n'était pas définitive, que celle-ci n'était au demeurant pas assortie de l'exécution provisoire et donc qu'elle elle ne s'imposait pas à Me [P] peu important que celui-ci se soit ultérieurement désisté de son appel, que le licenciement du salarié n'avait pu être décidé au niveau de l'UES dont la reconnaissance était alors privée d'effet, que c'était donc au seul niveau de la société MSS que devient s'apprécier les conditions pouvant justifier la mise en place d'un PSE, la cour d'appel a violé l'article 539 du code de procédure civile🏛, ensemble des articles L. 1233-61 et L. 1233-58 du code du travail🏛.

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