Jurisprudence : Cass. civ. 3, 06-07-2022, n° 21-14.588, F-D, Cassation

Cass. civ. 3, 06-07-2022, n° 21-14.588, F-D, Cassation

A49728AE

Référence

Cass. civ. 3, 06-07-2022, n° 21-14.588, F-D, Cassation. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/86513792-cass-civ-3-06072022-n-2114588-fd-cassation
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Abstract

► Il résulte de l'article 3-2 de la loi n° 89-462, du 6 juillet 1989, que le recours à un huissier de justice pour faire établir l'état des lieux de sortie dans le cadre d'un bail d'habitation n'est prescrit qu'à défaut, pour les parties, de pouvoir y procéder contradictoirement et amiablement ; ► le locataire devait répondre des dégradations ainsi constatées dans l'état des lieux, à moins de prouver qu'elles avaient eu lieu sans sa faute.


CIV. 3

JL


COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 6 juillet 2022


Cassation


Mme TEILLER, président


Arrêt n° 565 F-D

Pourvoi n° R 21-14.588

Aide juridictionnelle totale en défense
au profit de Mme [Aa].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 5 juillet 2021.


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 6 JUILLET 2022


La société Schmitt, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° R 21-14.588 contre le jugement rendu le 4 février 2021 par le tribunal judiciaire de Sarreguemines (juge des contentieux de la protection), dans le litige l'opposant :

1°/ à Mme [M] [Aa], domiciliée [Adresse 3],

2°/ à M. [I] [Y], domicilié [… …],

défendeurs à la cassation.


Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Gallet, conseiller référendaire, les observations de Me Balat, avocat de la société Schmitt, de Me Ridoux, avocat de Mme [Aa], après débats en l'audience publique du 31 mai 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Gallet, conseiller référendaire rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, et Mme Berdeaux, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.


Faits et procédure

1. Selon le jugement attaqué (tribunal judiciaire de Sarreguemines, 4 février 2021), rendu en dernier ressort, la société civile immobilière Schmitt (la SCI) a donné à bail un appartementAaà Mme [P].

2. Le bail ayant pris fin, Mme [Aa] a formé opposition à une ordonnance lui enjoignant de payer à la SCI une certaine somme au titre de dégradations locatives.


Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. La SCI fait grief au jugement de rejeter ses demandes, alors :

« 1°/ d'une part, que le locataire est obligé de répondre des dégradations et pertes qui surviennent pendant la durée du contrat dans les locaux dont il a la jouissance exclusive, à moins qu'il ne prouve qu'elles ont eu lieu par cas de force majeure, par la faute du bailleur ou par le fait d'un tiers qu'il n'a pas introduit dans le logement ; qu'en relevant que la SCI Schmitt, bailleresse, produisait aux débats « à titre de preuve l'état des lieux signé contradictoirement par Mme [M] [Aa] et le gérant de la SCI Schmitt, dont il ressort que différents dégâts et un état de saleté ont été relevés en fin de bail », puis en rejetant néanmoins la demande indemnitaire de la SCI Schmitt au motif qu'en sa qualité de « demanderesse à la condamnation », cette dernière était « tenue de rapporter la charge de la preuve », et qu'elle échouait en l'occurence « à rapporter une preuve plus convaincante que celle opposée en défense par Mme [M] [Aa] », le tribunal judiciaire a inversé la charge de la preuve et a violé l'article 1353 du code civil🏛 et l'article 7 c). de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989🏛 ;

2°/ d'autre part, que ce n'est que si l'état des lieux de sortie ne peut être établi contradictoirement et amiablement par les parties ou par un tiers mandaté par elles que cet état des lieux est établi par huissier de justice ; qu'en relevant que la SCI Schmitt, bailleresse, produit aux débats « à titre de preuve l'état des lieux signé contradictoirement par Madame [M] [Aa] et le gérant de la SCI Schmitt, dont il ressort que différents dégâts et un état de saleté ont été relevés en fin de bail », puis en écartant cet élément de preuve au motif que les parties s'étaient « abstenues de faire établir des preuves par un tiers neutre, notamment un procès-verbal de constat d'état des lieux de sortie par huissier de justice dans les conditions de l'article 3-2 précité de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989🏛, formalité qui apparaît aujourd'hui nécessaire pour permettre d'établir une preuve certaine dans le présent litige », le tribunal judiciaire a violé l'article 3-2 de la loi n° 89-462🏛 du 6 juillet 1989🏛. »


Réponse de la Cour

Vu les articles 3-2 et 7, c), de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989🏛 :

4. Il résulte du premier de ces textes que le recours à un huissier de justice pour faire établir l'état des lieux de sortie n'est prescrit qu'à défaut, pour les parties, de pouvoir y procéder contradictoirement et amiablement.

5. Aux termes du second, le preneur répond des dégradations et pertes qui surviennent pendant la durée du contrat dans les locaux dont il a la jouissance exclusive, à moins qu'il ne prouve qu'elles ont eu lieu par cas de force majeure, par la faute du bailleur ou par le fait d'un tiers qu'il n'a pas introduit dans le logement.

6. Pour rejeter la demande en paiement de la SCI, le jugement retient que l'état des lieux de sortie signé contradictoirement entre les parties fait ressortir différents dégâts et un état de saleté du logement, que, néanmoins, et au vu des éléments de preuve contraires produits par Mme [Aa], il aurait été nécessaire de faire établir un constat par huissier de justice, à défaut de quoi la SCI, demanderesse à la condamnation et ainsi tenue de rapporter la charge de la preuve, doit être déboutée de sa demande.

7. En statuant ainsi, alors, d'une part, qu'elle avait constaté que les parties avaient établi un état des lieux de sortie contradictoirement et amiablement, et, d'autre part, que la locataire devait répondre des dégradations ainsi constatées, à moins de prouver qu'elles avaient eu lieu sans sa faute, le tribunal a violé les textes susvisés.


PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 4 février 2021, entre les parties, par le tribunal judiciaire de Sarreguemines ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant le tribunal judiciaire de Sarreguemines, autrement composé ;

Condamne Mme [Aa] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile🏛, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du six juillet deux mille vingt-deux et signé par lui et Mme Letourneur, greffier de chambre, qui a assisté au prononcé de l'arrêt.


MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par Me Balat, avocat aux Conseils, pour la société Schmitt

La SCI Schmitt reproche au jugement attaqué d'avoir rejeté ses demandes dirigées contre Mme [Aa] et M. [Y] ;

ALORS, D'UNE PART, QUE le locataire est obligé de répondre des dégradations et pertes qui surviennent pendant la durée du contrat dans les locaux dont il a la jouissance exclusive, à moins qu'il ne prouve qu'elles ont eu lieu par cas de force majeure, par la faute du bailleur ou par le fait d'un tiers qu'il n'a pas introduit dans le logement ; qu'en relevant que la SCI Schmitt, bailleresse, produisait aux débats « à titre de preuve l'état des lieux signé contradictoirement par Madame [M] [Aa] et le gérant de la SCI Schmitt, dont il ressort que différents dégâts et un état de saleté ont été relevés en fin de bail » (jugement attaqué, p. 4, alinéa 5), puis en rejetant néanmoins la demande indemnitaire de la SCI Schmitt au motif qu'en sa qualité de « demanderesse à la condamnation », cette dernière était « tenue de rapporter la charge de la preuve », et qu'elle échouait en l'occurrence « à rapporter une preuve plus convaincante que celle opposée en défense par Mme [M] [Aa] » (jugement attaqué, p. 5, alinéa 1er), le tribunal judiciaire a inversé la charge de la preuve et a violé l'article 1353 du code civil🏛 et l'article 7 c) de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989🏛 ;

ALORS, D'AUTRE PART, QUE ce n'est que si l'état des lieux de sortie ne peut être établi contradictoirement et amiablement par les parties ou par un tiers mandaté par elles que cet état des lieux est établi par huissier de justice ; qu'en relevant que la SCI Schmitt, bailleresse, produisait aux débats « à titre de preuve l'état des lieux signé contradictoirement par Madame [M] [Aa] et le gérant de la SCI Schmitt, dont il ressort que différents dégâts et un état de saleté ont été relevés en fin de bail » (jugement attaqué, p. 4, alinéa 5), puis en écartant cet élément de preuve au motif que les parties s'étaient « abstenues de faire établir des preuves par un tiers neutre, notamment un procès-verbal de constat d'état des lieux de sortie par huissier de justice dans les conditions de l'article 3-2 précité de la loi n° 89-462 du 06 juillet 1989, formalité qui apparaît aujourd'hui nécessaire pour permettre d'établir une preuve certaine dans le présent litige » (jugement attaqué, p. 4 in fine), le tribunal judiciaire a violé l'article 3-2 de la loi n° 89-462🏛 du 6 juillet 1989🏛.

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