Jurisprudence : Cass. civ. 1, 01-06-2022, n° 20-19.623, F-D, Rejet

Cass. civ. 1, 01-06-2022, n° 20-19.623, F-D, Rejet

A806574H

Référence

Cass. civ. 1, 01-06-2022, n° 20-19.623, F-D, Rejet. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/85538861-cass-civ-1-01062022-n-2019623-fd-rejet
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Abstract

► La date de la mise en circulation effective d'un véhicule ainsi que son kilométrage depuis cette date sont des caractéristiques essentielles ; le vendeur qui n'informe pas l'acquéreur de ces éléments, dans le cadre d'une vente d'un véhicule de première main, manque à son obligation de délivrance.


CIV. 1

MY1


COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 1er juin 2022


Rejet


M. CHAUVIN, président


Arrêt n° 438 F-D

Pourvoi n° T 20-19.623


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 1ER JUIN 2022


La Société de diffusion de matériel (SODIMAT), société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° T 20-19.623 contre l'arrêt rendu le 9 juin 2020 par la cour d'appel de Poitiers (1re chambre civile), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. [K] [F],

2°/ à Mme [H] [B], épouse [F],

domiciliés tous deux [Adresse 1],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.


Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Bruyère, conseiller, les observations de Me Brouchot, avocat de la Société de diffusion de matériel, après débats en l'audience publique du 5 avril 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Bruyère, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, Mme Catherine, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.


Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 9 juin 2020), le 8 septembre 2014, M. et Mme [F] (les acquéreurs) ont acquis auprès de la Société de diffusion de matériel (le vendeur) un véhicule automobile qui, selon le bon de commande, était de première main et avait parcouru 78 000 km depuis sa mise en circulation en juin 2012.

2. La livraison du véhicule est intervenue le 3 octobre 2014 et s'est accompagnée de la remise aux acquéreurs du carnet d'entretien faisant apparaître une intervention effectuée sur celui-ci le 31 mai 2012 alors qu'il avait déjà parcouru 23 283 km.

3. Les acquéreurs ont assigné la société en résolution de la vente au titre de la non-conformité du véhicule.


Examen du moyen

Enoncé du moyen

4. Le vendeur fait grief à l'arrêt de prononcer la résolution de la vente, de le condamner à restituer aux acquéreurs la somme de 27 392,44 euros avec intérêts de droit au taux légal et à leur payer la somme de 2 500 euros à titre de dommages-intérêts, et de rejeter sa demande indemnitaire, alors :

« 1°/ que tout vendeur professionnel d'un véhicule automobile est tenu à une obligation de délivrance comportant l'obligation d'information et de renseignement des acquéreurs sur les caractéristiques essentielles du véhicule vendu, de manière loyale et sincère ; que tout en constatant que, lors de la livraison du véhicule, la société avait remis aux acquéreurs le carnet d'entretien indiquant l'année de mise en circulation effective, 2010, l'intervention effectuée le 31 mai 2012 et le kilométrage à cette date, la cour d'appel a cependant considéré que la société avait manqué à son obligation de délivrance quant aux caractéristiques du véhicule cédé, impliquant une information loyale et sincère ; qu'en se déterminant ainsi, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations induisant la réalité d'une information complète et loyale, au regard des articles 1604, 1644 et 1645 du code civil🏛 et L. 111-1 du code de la consommation🏛 qu'elle a ainsi violés ;

2°/ que le vendeur n'est pas tenu des vices apparents et dont l'acheteur a pu se convaincre lui-même ; que la cour d'appel a constaté que, lors de la livraison du véhicule, la société avait remis aux acquéreurs le carnet d'entretien indiquant l'année de mise en circulation effective, 2010, l'intervention effectuée le 31 mai 2012 et le kilométrage à cette date, avant de retenir que ledit carnet avait été examiné peu de temps après la vente par les acquéreurs qui s'étaient alors rendus dans les locaux de la société aux fins de réclamation ; qu'en considérant que la société avait manqué à son obligation de délivrance quant aux caractéristiques du véhicule cédé, impliquant une information loyale et sincère, sans rechercher, ainsi qu'il le lui était demandé, si les acquéreurs n'avaient pas manqué à leur propre obligation de se renseigner sur les caractéristiques précises du véhicule au terme d'un examen approfondi qui s'imposait à eux, du carnet d'entretien du véhicule cédé, ce qui était de nature à exonérer la société de tout manquement à ses propres obligations d'information et de renseignement, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles 1604, 1642, 1644 et 1645 du code civil🏛 et L. 111-1 du code de la consommation🏛 qu'elle a ainsi violés. »


Réponse de la Cour

5. Dès lors qu'elle a constaté que le véhicule livré avait, contrairement aux énonciations du bon de commande, été mis en circulation sans immatriculation le 19 août 2010 et utilisé comme véhicule de démonstration par un concessionnaire automobile et avait parcouru au moins 23 282 kilomètres lors de sa première immatriculation et que ces caractéristiques essentielles n'avaient pas été transmises aux acquéreurs de façon précise et compréhensible lors de la vente et qu'elle a retenu que la date de mise en circulation effective du véhicule comme son kilométrage étaient des éléments déterminants de leur consentement, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à la recherche prétendument omise sur les mentions du carnet d'entretien remis lors de la livraison, a pu en déduire que le vendeur avait manqué à son obligation de délivrance.

6. Le moyen n'est donc pas fondé.


PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la Société de diffusion de matériel aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile🏛, rejette la demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du premier juin deux mille vingt-deux, signé par lui et Mme Tinchon, greffier de chambre, qui a assisté au prononcé de l'arrêt.



MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par Me Brouchot, avocat aux Conseils, pour la Société de diffusion de matériel.

La société Sodimat fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR prononcé la résolution de la vente intervenue le 8 septembre 2014 entre elle et les époux [F] du véhicule de marque BMW, de l'AVOIR condamnée à restituer aux époux [F] la somme de 27.392,44 euros avec intérêts de droit au taux légal et à leur verser la somme de 2.500 euros à titre de dommages-intérêts et de l'AVOIR déboutée de sa demande formée à titre indemnitaire ;

AUX MOTIFS QUE la société Sodimat a, à l'égard de M. et Mme [F], qualité de professionnel ; que le professionnel doit communiquer au consommateur, de manière lisible et compréhensible, toutes informations quant aux caractéristiques essentielles du bien, cela de manière loyale et sincère ; que la société Sodimat ne justifie nullement avoir informé M. et Mme [F], préalablement à la vente, de ce que le véhicule présenté comme ayant été mis pour la première fois en circulation au mois de juin 2012, était en réalité mis en circulation sans immatriculation le 19 août 2010 selon estimation de valeur des établissements Cormier, concessionnaire de la marque ; que M. et Mme [F] ont en effet réalisé, après la vente, qu'une intervention sur le véhicule avait été effectuée le 31 mai 2012 et que le véhicule avait parcouru à cette date 23.283 kms, alors que la première mise en circulation du véhicule était du 8 juin 2012, soit à une date postérieure ; que si cette information apparaissait à la lecture du carnet d'entretien remis au jour de la livraison du véhicule, aucun grief ne peut être fait aux acquéreurs non professionnels de ne pas avoir scruté ce document pour analyser ces données alors qu'ils n'avaient pas de motifs de procéder à une telle vérification, que le vendeur lui-même ne justifie d'aucune transmission d'information sur ce point et que M. et Mme [F] se manifestaient, d'abord par déplacement à la société Sodimat "dans les jours suivants la livraison", puis par courriers des 09 puis 13 octobre 2014 ; que la société Sodimat ne peut arguer de ce que M. et Mme [F] s'étaient déplacés avant la vente pour choisir leur véhicule sur photographie, entre deux proposés, et auraient choisi le moins cher car le plus ancien, sans apporter par ailleurs, la moindre preuve d'une information sincère quant au réel historique du véhicule ; que s'il est exact que la date de première mise en circulation doit correspondre à la date de première immatriculation, le véhicule devant être, en l'espère, considéré comme de première main puisqu'une seule immatriculation précédente est recensée, le vendeur ne pouvait néanmoins taire le fait que ce véhicule circulait effectivement près de deux ans avant sa première immatriculation, en tant que véhicule de concession, et qu'il avait ainsi acquis un important kilométrage ; que le sort du véhicule de M. et Mme [F] ne peut être ainsi comparé avec celui d'un véhicule produit puis stocké seulement quelques mois en restant immobilisé ; qu'il a donc été livré aux appelants un véhicule qui avait parcouru au moins 23.282 kms en qualité de véhicule de démonstration d'une concession belge avant sa date de "première mise en circulation", sans que cette information essentielle et substantielle ne soit transmise de façon précise et compréhensible à M. et Mme [F] ; que dans ces conditions d'opacité, les acquéreurs ne pouvaient que retenir l'information explicitement transmise, soit une première mise en circulation au mois de juin 2012 ; que si la référence à l'année modèle a été abandonnée à compter du 1er juillet 2000, il doit être retenu que la date de mise en circulation effective du véhicule comme son kilométrage sont des éléments particulièrement déterminants du consentement ; qu'il XP/19.519 s'agit de l'une de ses caractéristiques essentielles du bien vendu qui doit être communiquée à l'acquéreur ; que le véhicule délivré aux époux [F] était un modèle de 2010 série 3 - 320 D 163 CH Efficient Dynamics Edition, et non le modèle fabriqué en 2012 Efficient Dynamics Edition Luxury, les acquéreurs pouvant interpréter la mention "Lux" comme la référence à Luxery dès lors que la seule information préhensible qui leur était transmise était une première mise en circulation du véhicule au mois de juin 2012 ; que compte tenu de ces éléments, il convient de retenir qu'existe de la part de la société Sodimat un défaut de délivrance d'un véhicule conforme à la commande passée ;

1) ALORS QUE tout vendeur professionnel d'un véhicule automobile est tenu à une obligation de délivrance comportant l'obligation d'information et de renseignement des acquéreurs sur les caractéristiques essentielles du véhicule vendu, de manière loyale et sincère ; que tout en constatant que, lors de la livraison du véhicule, la société Sodimat, venderesse, avait remis aux époux [F] le carnet d'entretien indiquant l'année de mise en circulation effective, 2010, l'intervention effectuée le 31 mai 2012 et le kilométrage à cette date, la cour d'appel a cependant considéré que la société venderesse avait manqué à son obligation de délivrance quant aux caractéristiques du véhicule cédé, impliquant une information loyale et sincère ; qu'en se déterminant ainsi, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations induisant la réalité d'une information complète et loyale, au regard des articles 1604, 1644 et 1645 du code civil🏛 et L. 111-1 du code de la consommation🏛 qu'elle a ainsi violés ;

2) ET ALORS QUE le vendeur n'est pas tenu des vices apparents et dont l'acheteur a pu se convaincre lui-même ; que la cour d'appel a constaté que, lors de la livraison du véhicule, la société Sodimat, venderesse, avait remis aux époux [F] le carnet d'entretien indiquant l'année de mise en circulation effective, 2010, l'intervention effectuée le 31 mai 2012 et le kilométrage à cette date, avant de retenir que ledit carnet avait été examiné peu de temps après la vente par les époux [F] qui s'étaient alors rendus dans les locaux de la société aux fins de réclamation ; qu'en considérant que la société Sodimat avait manqué à son obligation de délivrance quant aux caractéristiques du véhicule cédé, impliquant une information loyale et sincère, sans rechercher, ainsi qu'il le lui était demandé, si les époux [F] n'avaient pas manqué à leur propre obligation de se renseigner sur les caractéristiques précises du véhicule au terme d'un examen approfondi qui s'imposait à eux, du carnet d'entretien du véhicule cédé, ce qui était de nature à exonérer la société venderesse de tout manquement à ses propres obligations d'information et de renseignement, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles 1604, 1642, 1644 et 1645 du code civil🏛 et L. 111-1 du code de la consommation🏛 qu'elle a ainsi violés.

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