Jurisprudence : Cass. crim., 25-05-2022, n° 20-86.306, F-D, Rejet

Cass. crim., 25-05-2022, n° 20-86.306, F-D, Rejet

A40197YI

Référence

Cass. crim., 25-05-2022, n° 20-86.306, F-D, Rejet. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/85180305-cass-crim-25052022-n-2086306-fd-rejet
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Abstract

► Un prévenu, familier des règles fiscales d'un secteur professionnel dans lequel il évoluait depuis longtemps, ne saurait justifier de sa propre négligence pour échapper à ses obligations fiscales.


N° Z 20-86.306 F-D

N° 00621


SL2
25 MAI 2022


REJET


Mme DE LA LANCE conseiller doyen faisant fonction de président,


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 25 MAI 2022



M. [M] [Aa] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Versailles, 9e chambre, en date du 5 novembre 2020, qui, pour fraude fiscale, l'a condamné à dix mois d'emprisonnement avec sursis et 30 000 euros d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils.

Des mémoires en demande et en défense, ainsi que des observations complémentaires ont été produits.

Sur le rapport de M. Wyon, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. [M] [Aa], les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat du directeur général des finances publiques et du directeur départemental des finances publiques des Yvelines, et les conclusions de Mme Zientara-Logeay, avocat général, après débats en l'audience publique du 13 avril 2022 où étaient présents Mme de la Lance, conseiller doyen faisant fonction de président en remplacement du président empêché, M. Wyon, conseiller rapporteur, Mme Planchon, conseiller de la chambre, et Mme Lavaud, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale🏛, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.


Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. La société [1], dont M. [M] [Aa] était le gérant, a acquis en 1995 un immeuble à [Localité 2], l'a rénové et divisé en plusieurs appartements, lesquels ont été mis en location, avant d'être vendus en 2011 et 2012.

3. La société [1] a déclaré les plus-values générées par la vente de ces appartements au titre de l'impôt sur les sociétés, pour lequel elle avait antérieurement opté, en leur appliquant le régime des plus-values à long terme provenant de la cession d'éléments d'actif immobilisé, qui sont taxées au taux de 15 %, alors que, selon l'administration fiscale, les produits déclarés étaient assujettis à l'impôt sur les sociétés au taux de droit commun, et que les plus-values immobilières ainsi réalisées auraient dû être soumises, pour la partie supérieure à 38 120 euros, à un taux de 33,1/3 %.

4. M. [Aa] a été poursuivi devant le tribunal correctionnel, en sa qualité de gérant de la société [1], pour s'être frauduleusement soustrait à l'établissement ou au paiement de l'impôt sur les sociétés pour les exercices clos les 31 décembre 2011 et 2012.

5. Par jugement du 18 février 2019, le tribunal correctionnel de Versailles l'a déclaré coupable de ce délit et condamné à six mois d'emprisonnement avec sursis et 50 000 euros d'amende. Il a par ailleurs été déclaré solidairement tenu avec la société [1] au paiement de l'impôt fraudé ainsi qu'à celui des majorations et pénalités.

6. M. [Aa] a relevé appel de cette décision.

Examen des moyens

Sur le second moyen

7. Il n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale🏛.

Sur le premier moyen

Énoncé du moyen

8. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré M. [Aa] coupable de soustraction frauduleuse à l'établissement ou au paiement de l'impôt et a statué sur la peine et les intérêts civils, alors :

« 1°/ que le manquement à une réglementation fiscale n'est pénalement punissable que s'il est commis en connaissance de cause ; qu'en l'état de poursuites reprochant à M. [Aa] d'avoir déclaré des plus-values immobilières réalisées par la société [1] à un taux indu d'impôt sur les sociétés, la cour d'appel, en retenant, pour le condamner, qu'il ne pouvait ignorer que cette société était soumise à l'impôt sur les sociétés, n'a pas caractérisé l'élément intentionnel correspondant au manquement reproché au prévenu, et a par suite violé les articles 1741 du code général des impôts🏛, L. 227 du livre des procédures fiscales🏛 et 121-3 du code pénal ;

2°/ que l'accusation doit prouver que la tentative de soustraction à l'impôt reprochée au contribuable a été faite en connaissance de cause ; que le seul fait d'indiquer un taux d'imposition erroné dans une déclaration fiscale qui ne contient aucune dissimulation sur la nature et le montant des sommes assujetties à l'impôt, n'est pas constitutif d'une fraude à l'impôt ; qu'en l'état de poursuites reprochant à M. [Aa] d'avoir soumis des plus-values immobilières à un taux d'imposition de 15 % applicable aux plus-values à long terme, à des éléments d'actifs immobilisés qui auraient dû être soumis, pour la partie supérieure à 38 120 euros, à un taux de 33,1/3 %, la cour d'appel, en retenant pour le condamner, qu'il avait été gérant dans le secteur immobilier depuis de nombreuses années et qu'il aurait dû, en cas de doute et compte-tenu de l'importance de l'opération, prendre l'attache de l'administration pour vérifier le régime fiscal applicable, n'a pas constaté la connaissance par le prévenu du caractère erroné du taux qu'il faisait figurer sur cette déclaration et a par suite violé les articles 121-3 du code pénal🏛, 1741 du code général des impôts et L. 227 du livre des procédures fiscales🏛 ;

3°/ qu'en se déterminant ainsi sans répondre aux conclusions de M. [Aa] faisant valoir qu'il avait cru de bonne foi, sur les conseils de son expert-comptable, que le taux applicable à cette plus-value était de 15 % puisque ce taux s'appliquait lors de l'acquisition des biens litigieux, qu'au surplus ce taux avait été modifié à près de trente reprises depuis 1995 et qu'il n'avait en outre jamais, jusqu'aux opérations litigieuses, été amené à faire application du taux d'imposition spécial de 33,1/3 %, la cour d'appel a violé les articles 485 et 593 du code de procédure pénale🏛. »


Réponse de la Cour

9. Pour établir l'élément intentionnel du délit de fraude fiscale dont il déclare le prévenu coupable, l'arrêt attaqué énonce, notamment, par motifs propres et adoptés, que le prévenu, s'il avait auparavant exercé dans la restauration, était cependant gérant dans le secteur immobilier depuis de nombreuses années, et qu'il ne peut donc valablement invoquer sa méconnaissance des règles fiscales et de mauvais conseils du notaire et de son expert-comptable, puisqu'il a antérieurement personnellement géré son bien immobilier et bénéficié d'une imposition favorable pendant de nombreuses années.

10. Les juges ajoutent qu'il lui appartenait, compte tenu de l'importance de l'opération et en cas d'hésitation, de prendre l'attache de l'administration afin de s'assurer du régime fiscal applicable.

11. En l'état de ces seules énonciations, dont il résulte que le prévenu, familier des règles fiscales d'un secteur professionnel dans lequel il évoluait depuis longtemps, et qui ne saurait exciper de sa propre négligence pour échapper à ses obligations fiscales, a volontairement appliqué aux plus-values déclarées un taux d'imposition inférieur, la cour d'appel, qui a en outre ainsi répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie, a justifié sa décision.

12. Dès lors, le moyen doit être écarté.

13. Par ailleurs l'arrêt est régulier en la forme.


PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-cinq mai deux mille vingt-deux.

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