Jurisprudence : CE 5/6 ch.-r., 21-03-2022, n° 451678, mentionné aux tables du recueil Lebon

CE 5/6 ch.-r., 21-03-2022, n° 451678, mentionné aux tables du recueil Lebon

A99177QD

Référence

CE 5/6 ch.-r., 21-03-2022, n° 451678, mentionné aux tables du recueil Lebon. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/82666525-ce-56-chr-21032022-n-451678-mentionne-aux-tables-du-recueil-lebon
Copier

Abstract

01-01-06-02-01 1) L’autorisation administrative d’exploiter une installation de production d’électricité prévue par l’article L. 311-1 du code de l’énergie fixe le mode de production, la capacité et le lieu d’implantation des installations de production d’électricité pour laquelle elle est délivrée. ...Dès lors, elle doit être regardée comme créant des droits au profit de son titulaire, en sa qualité d’exploitant de cette installation. ...2) Modification de la répartition du capital d’une société postérieurement à la délivrance à son profit d’une autorisation d’exploiter trois parcs éoliens off-shore. ...D’une part, le cahier des charges de l’appel d’offres ayant précédé la délivrance de l’autorisation ne prévoyait aucune condition de stabilité de l’actionnariat. ...D’autre part, le maintien de la participation d’une société dans le capital de la société détentrice de l’autorisation d’exploiter ne constituait pas une condition de délivrance de celle-ci, non plus que la modification du capital de la société titulaire était soumise à une autorisation....Par suite, le refus d’abroger l’autorisation d’exploiter ces trois parcs éoliens ne méconnaît pas l’article L. 242-2 du code des relations entre le public et l’administration (CRPA).



CONSEIL D'ETAT

Statuant au contentieux

N° 451678

Séance du 25 février 2022

Lecture du 21 mars 2022

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d'Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 6ème et 5ème chambres réunies)


Vu les procédures suivantes :

1° Sous le n° 451678, par une requête, un mémoire en réplique et un nouveau mémoire, enregistrés les 14 avril 2021, 3 septembre 2021 et 4 janvier 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association Libre Horizon et la Société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France (SPPEF) demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision implicite née du silence gardé par la ministre de la transition écologique sur leur demande du 11 décembre 2020 tendant à l'abrogation de la décision du 6 avril 2012 désignant l'exploitant du parc éolien au large de Courseulles-sur-Mer et de la décision du 18 avril 2012 autorisant la société Eolien Maritime France a` exploiter une installation de production d'électricité sur le domaine public maritime au large de Courseulles-sur-Mer ;

2°) d'enjoindre a` la ministre de la transition écologique de procéder à l'abrogation demandée dans un délai de deux mois, sous astreinte de 5 000 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛.

2° Sous le n° 451683, par une requête, un mémoire en réplique et un nouveau mémoire, enregistrés les 14 avril 2021, 3 septembre 2021 et 4 janvier 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association pour la protection du site et de l'environnement de Sainte-Marguerite (PROSIMAR) et le Groupement des résidents pour la sauvegarde environnementale de la Baule (GRSB) demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision implicite née du silence gardé par la ministre de la transition écologique sur leur demande du 11 décembre 2020 tendant à l'abrogation de la décision du 6 avril 2012 désignant l'exploitant du parc éolien au large de Saint-Nazaire et de la décision du 18 avril 2012 autorisant la société Eolien Maritime France a` exploiter une installation de production d'électricité sur le domaine public maritime au large de Saint-Nazaire ;

2°) d'enjoindre a` la ministre de la transition écologique de procéder à l'abrogation demandée dans un délai de deux mois, sous astreinte de 5 000 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛.

3° Sous le n° 451684, par une requête, un mémoire en réplique et un nouveau mémoire, enregistrés les 14 avril 2021, 3 septembre 2021 et 4 janvier 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association de protection du site des Petites-Dalles et la Société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France (SPPEF) demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision implicite née du silence gardé par la ministre de la transition écologique sur leur demande du 11 décembre 2020 tendant à l'abrogation de la décision du 6 avril 2012 désignant l'exploitant du parc éolien au large de Fécamp et de la décision du 18 avril 2012 autorisant la société Eolien Maritime France a` exploiter une installation de production d'électricité sur le domaine public maritime au large de Fécamp ;

2°) d'enjoindre a` la ministre de la transition écologique de procéder à l'abrogation demandée dans un délai de deux mois, sous astreinte de 5 000 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛.

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- le code de l'énergie ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Pauline Hot, auditrice,

- les conclusions de M. Stéphane Hoynck, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Marlange, de la Burgade, avocat de l'association Libre Horizon et autres, au cabinet Briard, avocat de la société Eolien Maritime France et autres ;

Vu les notes en délibéré, enregistrées le 25 février 2022, présentées par l'association Libre Horizon et autre, par l'association pour la protection du site et de l'environnement de Sainte-Marguerite et autre et par l'association de protection du site des Petites-Dalles et autre ;

Vu les notes en délibéré, enregistrées le 1er mars 2022, présentées par la société Eolien Maritime France et la société Eoliennes offshore du Calvados, par la société Eolien Maritime France et la société Parc du Banc de Guérande et par la société Eolien Maritime France et la société Eoliennes offshores des Hautes Falaises ;

Considérant ce qui suit :

1. Les trois requêtes visées ci-dessus présentent à juger les mêmes questions. Il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision.

2. Aux termes de l'article L. 311-1 du code de l'énergie🏛, dans sa rédaction en vigueur à la date des décisions attaquées : " L'exploitation d'une installation de production électrique est subordonnée à une autorisation administrative délivrée selon la procédure prévue aux articles L. 311-5 et L. 311-6 ou au terme d'un appel d'offres en application de l'article L. 311-10. Dans le cadre de la programmation pluriannuelle des investissements de production, les nouvelles installations de production sont exploitées par toute personne () dès lors que cette personne est titulaire de l'autorisation d'exploiter () ". Aux termes de l'article L. 311-5 du même code🏛 : " L'autorisation d'exploiter une installation de production d'électricité est délivrée par l'autorité administrative en tenant compte des critères suivants : / 1° La sécurité et la sûreté des réseaux publics d'électricité, des installations et des équipements associés ; / 2° Le choix des sites, l'occupation des sols et l'utilisation du domaine public ; / 3° L'efficacité énergétique ; / 4° Les capacités techniques, économiques et financières du candidat ou du demandeur ; / 5° La compatibilité avec les principes et les missions de service public, notamment avec les objectifs de programmation pluriannuelle des investissements et la protection de l'environnement ; / 6° Le respect de la législation sociale en vigueur () ". Selon l'article L. 311-10 du même code🏛 : " Lorsque les capacités de production ne répondent pas aux objectifs de la programmation pluriannuelle des investissements, notamment ceux concernant les techniques de production et la localisation géographique des installations, l'autorité administrative peut recourir à la procédure d'appel d'offres. / Les critères mentionnés à l'article L. 311-5 servent à l'élaboration du cahier des charges de l'appel d'offres () toute personne exploitant ou désirant construire et exploiter une unité de production, installée sur le territoire d'un Etat membre de l'Union européenne ou, dans le cadre de l'exécution d'accords internationaux, sur le territoire de tout autre Etat, peut participer à l'appel d'offres () ". Enfin, l'article L. 311-11 du même code🏛 dispose que : " L'autorité administrative désigne le ou les candidats retenus et délivre les autorisations prévues à l'article L. 311-5 dans des conditions fixées par voie réglementaire () ".

3. Par un avis publié au Journal Officiel de l'Union européenne du 5 juillet 2011, le ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement et le ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé de l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique, ont recouru, en application des dispositions de l'article L. 311-10 du code de l'énergie🏛, à une procédure d'appel d'offres portant sur cinq lots en vue de la sélection des opérateurs chargés de répondre aux objectifs de développement de la production électrique à partir de l'énergie éolienne en mer. Au terme de cette procédure, par une décision en date du 6 avril 2012, la société Eolien Maritime France a été déclarée attributaire du lot n° 2 portant sur une installation de production d'énergie électrique au large de la commune de Fécamp (Seine-Maritime), du lot n° 3 portant sur une installation de production d'énergie électrique au large de la commune de Courseulles-sur-Mer (Calvados) et du lot n° 5 portant sur une installation de production d'énergie électrique au large de la commune de Saint-Nazaire (Loire-Atlantique). Par trois arrêtés en date du 18 avril 2012, cette même société a été autorisée à exploiter, sur ces sites, trois parcs éoliens d'une capacité maximale de production de respectivement 498 MW, 450 MW et 480 MW. Par un arrêté en date du 6 novembre 2012, ces autorisations d'exploiter ont été transférées, respectivement, à la société Eoliennes Offshore des Hautes Falaises, à la société Eoliennes Offshore du Calvados et à la société Parc du Banc de Guérande, détenues majoritairement ou exclusivement par la société Eolien Maritime France, dont le capital était lui-même composé à 60 % de la société EDF Energies Nouvelles France et à 40 % de la société Dong Energy. Depuis septembre 2016, le capital de la société Eolien Maritime France est détenu à 50 % par la société EDF Energies Nouvelles France et à 50 % par la société Enbridge. Les associations requérantes soutiennent que ce changement dans le capital de la société Eolien Maritime France aurait exigé une nouvelle mise en concurrence et demandent l'annulation des trois décisions implicites par lesquelles la ministre de la transition écologique a refusé d'abroger les décisions des 6 et 18 avril 2012.

Sur le refus d'abroger la décision du 6 avril 2012 attribuant à la société Eolien Maritime France les lots n° 2, n° 3 et n° 5 :

4. Pour l'application des dispositions citées au point 2, la décision qui, au terme de la procédure d'appel d'offres, retient une candidature pour l'exploitation d'une installation de production d'électricité, a pour seul objet de désigner le ou les candidats retenus à l'issue de cette procédure. Elle précède la décision qui constitue l'autorisation administrative d'exploiter une installation de production d'électricité, prévue par l'article L. 311-1 du code de l'énergie🏛, délivrée au candidat retenu, laquelle désigne le titulaire de cette autorisation et fixe le mode de production et la capacité autorisée ainsi que le lieu d'implantation de l'installation.

5. Compte tenu de leur objet statutaire, qui vise à la protection de l'environnement, et eu égard à la portée de la décision du 6 avril 2012 qui a pour seul objet de retenir, au terme de la procédure d'appel d'offres, la candidature de la société Eolien Maritime France pour les lots n° 2, n° 3 et n° 5, les associations requérantes ne justifient pas d'un intérêt leur donnant qualité pour agir contre le refus d'abroger cette décision du 6 avril 2012 attribuant à la société Eolien Maritime France les lots n° 2, n° 3 et n° 5. Leurs conclusions relatives à ce refus d'abroger sont ainsi, en tout état de cause, irrecevables.

Sur le refus d'abroger les arrêtés du 18 avril 2012 autorisant la société Eolien Maritime France à exploiter trois parcs éoliens offshore :

6. Aux termes de l'article L. 242-2 du code des relations entre le public et l'administration🏛 : " () l'administration peut, sans condition de délai : 1° Abroger une décision créatrice de droits dont le maintien est subordonné à une condition qui n'est plus remplie () ".

7. Ainsi qu'il est dit au point 4, l'autorisation administrative d'exploiter une installation de production d'électricité prévue par l'article L. 311-1 du code de l'énergie🏛 fixe le mode de production, la capacité et le lieu d'implantation des installations de production d'électricité pour laquelle elle est délivrée. Dès lors, elle doit être regardée comme créant des droits au profit de son titulaire, en sa qualité d'exploitant de cette installation.

8. D'une part, il ressort des pièces du dossier que si le cahier des charges de l'appel d'offres n° 2011/S 126-208873 portant sur des installations éoliennes de production d'électricité en mer en France métropolitaine comportait, à la rubrique " Maîtrise des risques techniques et financiers ", deux critères d'expérience en matière de construction, de développement et d'exploitation de parcs éoliens en mer, pour une note de six sur cent, il ne prévoyait aucune condition de stabilité de l'actionnariat.

9. D'autre part, il ne ressort pas des pièces du dossier que le maintien de la participation de la société Dong Energy dans le capital de la société Eolien Maritime France constitue une condition de l'autorisation délivrée à la société Eolien Maritime France pour exploiter les parcs éoliens offshore de Fécamp, Courseulles-sur-Mer et Saint-Nazaire, ni que la modification du capital de la société titulaire était soumise à une autorisation.

10. Par suite, les associations requérantes ne sont pas fondées à soutenir que la ministre de la transition écologique aurait méconnu les dispositions de l'article L. 242-2 du code des relations entre le public et l'administration🏛 en refusant d'abroger les arrêtés du 18 avril 2012 autorisant la société Eolien Maritime France à exploiter ces trois parcs éoliens. Leurs conclusions relatives à ce refus ne peuvent ainsi qu'être rejetées, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur leur recevabilité.

11. Il résulte de tout ce qui précède que les requêtes doivent être rejetées, y compris leurs conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées au même titre par les sociétés Eolien Maritime France, Eoliennes offshore du Calvados, Parc du Banc de Guérande et Eolienne offshore des Hautes-Falaises.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Les requêtes des associations Libre Horizon et autres sont rejetées.

Article 2 : Les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛 par la société Eolien Maritime France, la société Eoliennes offshore du Calvados, la société Parc du Banc de Guérande et la société Eolienne offshore des Hautes Falaises sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à l'association Libre Horizon, à l'association pour la protection du site et de l'environnement de Sainte-Marguerite (PROSIMAR), à l'association pour la protection du site des Petites-Dalles, représentants désignés pour les associations requérantes, à la société Eolien Maritime France, à la société Eoliennes offshore du Calvados, à la société Parc du Banc de Guérande à la société Eolienne offshore des Hautes Falaises et à la ministre de la transition écologique.

Délibéré à l'issue de la séance du 25 février 2022 où siégeaient : M. Jacques-Henri Stahl, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Denis Piveteau, M. Fabien Raynaud, présidents de chambre ; M. Jean-Philippe Mochon, Mme Suzanne von Coester, M. Olivier Yeznikian, M. Cyril Roger-Lacan, Mme Bénédicte Fauvarque-Cosson, conseillers d'Etat et Mme Pauline Hot, auditrice-rapporteure.

Rendu le 21 mars 2022.

Le président :

Signé : M. Jacques-Henri Stahl

La rapporteure :

Signé : Mme Pauline Hot

La secrétaire :

Signé : Mme Marie-Adeline Allain451678

Agir sur cette sélection :

Revues liées à ce document

Ouvrages liés à ce document

Chaîne du contentieux

Décisions similaires

Domaine juridique - ACTES LEGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS

  • Tout désélectionner
Lancer la recherche par thème
La Guadeloupe
La Martinique
La Guyane
La Réunion
Mayotte
Tahiti

Utilisation des cookies sur Lexbase

Notre site utilise des cookies à des fins statistiques, communicatives et commerciales. Vous pouvez paramétrer chaque cookie de façon individuelle, accepter l'ensemble des cookies ou n'accepter que les cookies fonctionnels.

En savoir plus

Parcours utilisateur

Lexbase, via la solution Salesforce, utilisée uniquement pour des besoins internes, peut être amené à suivre une partie du parcours utilisateur afin d’améliorer l’expérience utilisateur et l’éventuelle relation commerciale. Il s’agit d’information uniquement dédiée à l’usage de Lexbase et elles ne sont communiquées à aucun tiers, autre que Salesforce qui s’est engagée à ne pas utiliser lesdites données.

Réseaux sociaux

Nous intégrons à Lexbase.fr du contenu créé par Lexbase et diffusé via la plateforme de streaming Youtube. Ces intégrations impliquent des cookies de navigation lorsque l’utilisateur souhaite accéder à la vidéo. En les acceptant, les vidéos éditoriales de Lexbase vous seront accessibles.

Données analytiques

Nous attachons la plus grande importance au confort d'utilisation de notre site. Des informations essentielles fournies par Google Tag Manager comme le temps de lecture d'une revue, la facilité d'accès aux textes de loi ou encore la robustesse de nos readers nous permettent d'améliorer quotidiennement votre expérience utilisateur. Ces données sont exclusivement à usage interne.