République française
Au nom du Peuple français
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 3
ORDONNANCE DU 21 MAI 2013
Numéro d'inscription au répertoire général 13/09946
Décision déférée à la Cour Jugement du 17 Mai 2013 du Tribunal d'Instance de BOISSY SAINT LEGER - RG N° 1113000577
Nature de la décision Contradictoire
NOUS, Joëlle BOURQUARD, Président de chambre, agissant par délégation du Premier Président de cette Cour, assistée de Véronique COUVET, Greffière aux débats.
Vu l'appel interjeté par
Madame Valérie ... née le 6 octobre 1965
VILLIERS SUR MARNE
comparante en personne
assistée de Me Isabelle BERCHEL (avocat au barreau de Créteil) substituant Me Dan NAHUM, avocat au barreau du Val de MARNE(toque PC 36)
Madame Jeannette ... veuve ... née le 23 mai 1934
VILLIERS SUR MARNE
comparante en personne
assistée de Me Isabelle BERCHEL (avocat au barreau de Créteil) substituant Me Dan NAHUM, avocat au barreau du Val de MARNE(toque PC 36)
Monsieur Benoit ... né le 18 février
CHENNEVIERES SUR MARNE
comparant en personne
assisté de Me Isabelle BERCHEL (avocat au barreau de Créteil) substituant Me Dan NAHUM, avocat au barreau du Val de MARNE(toque PC 36)
DEMANDEURS
à
Madame Patricia Z veuve Z née 1er 2 août 1964
SUCY EN BRIE
comparante en personne
assistée de Me Xavier KREMER (avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, toque PN214)
DÉFENDERESSE
Et après avoir entendu les conseils des parties lors des débats de l'audience en chambre du conseil du 21 mai 2013
Et après avoir entendu Madame Michèle ..., avocat général en ses observations lors des débats en chambre du conseil du 21 mai 2013.
M. Pascal ..., né le 2 juillet 1961, est décédé le 4 mai 2013 à Sucy en Brie.
Selon acte du 13 mai 2013, M. Benoit ..., son fils, né d'une précédente union, Mme Jeannette ... veuve ..., sa mère et Mme Valérie ..., ont ainsi qu'ils y avaient été autorisés, assigné Mme Patricia Z épouse Z, sa veuve en secondes noces aux fins d'obtenir que l'urne contenant les cendres du défunt soit placée dans le caveau de la famille MASSON devant le tribunal d'instance de Boissy Saint Léger qui, par jugement rendu le 17 mai 2013 à 13 heures 30 a dit que le corps de Pascal ... sera incinéré conformément à ses dernières volontés, désigné Mme Patricia Z épouse Z, veuve du défunt pour pourvoir aux funérailles de M. Pascal ..., les cérémonies devant être ouvertes à tous les membres de la famille, dit que l'urne contenant les cendres du défunt sera inhumée dans une caveau ouvert dans la concession acquise par Mme Patricia Z née Z au cimetière de Sucy en Brie, où celle-ci pourra reposer auprès de lui un jour, Mme Patricia Z née Z devant y pourvoir.
Mme Valérie ..., Mme Jeannette ... veuve ... et M. Benoit ... ont relevé appel de cette décision le 17 mai 2013 à 16 heures 17 et l'audience a été fixée ce jour à 9 heures 30.
Au soutien de leur recours, les appelants font valoir qu'ils n'ont, contrairement à ce que le jugement indique, pas acquiescé à la demande de Mme Patricia Z et ils soutiennent qu'il résulte des attestations qu'ils versent aux débats que le défunt avait exprimé sa volonté d'être enterré auprès de son père dans le caveau familial, qu'ils estiment en tout état de cause, que compte tenu des liens de sang qui l'unissent au défunt, de la nature et de la durée des relations qu'ils entretenaient avec celui-ci, sa mère, sa s'ur et plus particulièrement, son fils comme étant son unique héritier sont les personnes les mieux qualifiés pour organiser ses funérailles et ils demandent d'infirmer le jugement et de dire que l'urne contenant les cendres du défunt leur soit remise afin d'être déposée dans le caveau familial à Ormesson sur Marne. Ils réclament enfin la condamnation de Mme Patricia Z veuve Z à leur payer une indemnité de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Mme Patricia Z veuve Z demande de confirmer le jugement, de débouter les appelants de l'ensemble de leurs prétentions et de les condamner à lui payer une indemnité de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de les condamner aux entiers dépens.
Elle soutient qu'en l'absence de preuve de l'expression de la volonté du défunt quant aux choix de son inhumation, elle a, en tant que conjoint survivant, priorité de choix du lieu de la sépulture de son conjoint ; qu'elle se prévaut de ce qu'elle a vécu en concubinage pendant cinq ans avec le défunt avec lequel elle s'est mariée le 29 septembre 2012 et elle ajoute que l'entente du couple, qui précisément venait depuis peu de rentrer de voyage de noces, était parfaite. Elle fait également valoir que les appelants, qui en première instance ont accepté qu'elle organise les funérailles de son mari, sont mal fondés à critiquer le jugement.
Le Ministère Public a conclu oralement à l'audience à la confirmation du jugement.
SUR CE,
Considérant qu'il est constant de ce que le jugement donne acte à M. Benoit ..., Mme Jeannette ... née ... et Mme Valérie ... de ce qu'ils acceptent désormais que M. Pascal ... repose seul dans un caveau dans lequel Mme Patricia Z Née Z pourrait avoir sa place ; que les appelants contestent formellement avoir acquiescé à la démarche de Mme Patricia Z veuve Z ; qu'il sera relevé qu'un donné acte, non constitutif de droit, ne saurait priver les appelants de tout recours à l'encontre du jugement étant de plus estimé, compte tenu de la particularité de ce type de procédure dominée par l'émotion légitime des proches d'un défunt, de son caractère oral, que les appelants ont pu mal exprimer leur position et ce d'autant qu'en cause d'appel, ils ne s'opposent pas à ce que la veuve du défunt puisse le moment venu le rejoindre dans le caveau de famille ;
Considérant qu'il est constant que le défunt n'a laissé aucune disposition testamentaire quant à l'organisation de ses funérailles ; que le jugement a exactement relevé que les parties s'accordaient quant à la volonté du défunt d'être incinéré, qu'il a justement estimé, au vu des attestations versées aux débats que les parties ne pouvaient se constituer de preuve à elles-mêmes et qu'il y avait lieu d'écarter des débats, comme dépourvues de force probante, les attestations émises par les consorts ... (mère, fils et s'ur du défunt) quant à la volonté exprimée par M. ... sur le lieu de sa sépulture, que le jugement a donc à bon droit déduit qu'aucun élément ne permettait de prouver que M. ... avait explicitement manifesté un souhait quelconque quant à la destination de ses cendres ;
Et considérant qu'à défaut de toute expression de volonté démontrée du défunt quant à l'organisation de ses obsèques, il convient de rechercher et désigner la personne la mieux qualifiée pour les organiser ;
Considérant que les parties versent de part et d'autre aux débats des attestations qui en ce qui concerne les appelants tendent à démontrer que le couple formé entre le défunt et sa seconde épouse n'était pas solide et s'agissant de l'intimée qu'au contraire, elle formait avec M. ... un couple très heureux et très uni ; que ces éléments contradictoires sont donc en soit insuffisants pour démontrer que l'une des parties serait plus qualifiée que l'autre pour organiser les funérailles de M. ... ;
Considérant que la présente juridiction d'appel relève, après avoir entendu les parties en leurs observations, que le défunt est décédé à l'âge de 52 ans, qu'il a contracté une première union dont est issu son fils Benoit né le 18 février 1990 et que cette union a duré treize ans, qu'il a vécu en concubinage pendant cinq ans avec l'intimée qu'il a finalement épousée en septembre 2012, qu'il était donc remarié depuis environ sept mois à la date de son décès, qu'il a toujours entretenu des relations régulières et chaleureuses avec sa famille et plus particulièrement avec sa mère, âgée de 79 ans ; que tant les appelants que l'intimée ont témoigné de la force de leur attachement à l'égard du défunt ;
Considérant que ces éléments conduisent à désigner Mme ... Jeannette veuve ..., mère du défunt comme étant la personne la plus qualifiée pour organiser avec l'assistance de sa fille et de son petit-fils les obsèques de M. Pascal ..., dès lors que sa relation affective avec son fils a été forte et constante depuis sa naissance et que c'est elle qui l'a le mieux connu alors que, dans toute la durée de son existence, la relation du défunt avec sa seconde épouse dont il n'a pas eu d'enfant, s'est étalée sur cinq ans et que son union était toute récente ; qu'il sera relevé qu'au demeurant, tant la mère que la s'ur et le fils du défunt ne s'opposent pas à ce que Mme Patricia Z veuve Z puisse, pour le cas où la décision serait infirmée, dans l'avenir rejoindre son époux dans le caveau de famille, qu'il sera donc loisible à sa veuve en secondes noces, lorsque ses relations avec sa belle famille se seront avec le temps apaisées, d'accéder à cette proposition ;
Considérant que la décision doit en conséquence être infirmée ;
Considérant que l'équité commande de ne pas faire application de l'article 700 du code de procédure civile ; que les circonstances du litige justifient que chacune des parties conserve la charge de ses propres dépens.
PAR CES MOTIFS
Infirmons le jugement entrepris,
Statuant à nouveau,
Désignons Mme Jeannette ... veuve ..., mère du défunt pour organiser avec l'assistance de sa fille et de son petit fils les obsèques de M. Pascal ...,
Disons qu'il sera loisible à tous les membres de la famille d'assister aux funérailles du défunt,
Disons que l'urne concernant les cendres du défunt devra en conséquence être remise à Mme Jeannette ... veuve ... afin d'être déposée dans le caveau de la famille MASSON situé à Ormesson sur Marne,
Rejetons toute autre prétention des parties et disons n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,
Disons que chacune des parties conservera la charge des ses entiers dépens.
ORDONNANCE rendue par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Le Greffier
Le Président