Jurisprudence : CE 9/10 SSR, 17-04-2013, n° 337194, mentionné aux tables du recueil Lebon

CE 9/10 SSR, 17-04-2013, n° 337194, mentionné aux tables du recueil Lebon

A4173KCK

Identifiant européen : ECLI:FR:CESSR:2013:337194.20130417

Identifiant Legifrance : CETATEXT000027378710

Référence

CE 9/10 SSR, 17-04-2013, n° 337194, mentionné aux tables du recueil Lebon. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/8194704-ce-910-ssr-17042013-n-337194-mentionne-aux-tables-du-recueil-lebon
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CONSEIL D'ETAT

Statuant au contentieux

337194

MINISTRE DE L'IMMIGRATION, DE L'INTEGRATION, DE L'IDENTITE NATIONALE ET DU DEVELOPPEMENT SOLIDAIRE
c/ M. Ouazene

M. Tanneguy Larzul, Rapporteur
Mme Delphine Hedary, Rapporteur public

Séance du 27 mars 2013

Lecture du 17 avril 2013

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


Le Conseil d'Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 10ème et 9ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 10ème sous-section de la Section du contentieux


Vu le pourvoi, enregistré le 2 mars 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire ; le ministre demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 31 décembre 2009 par lequel le tribunal administratif de Nantes a annulé sa décision implicite rejetant la demande de M. Mouloud Ouazene tendant à la communication de la déclaration recognitive de nationalité française souscrite par son grand-père, M. Saïd Ouazene, après l'indépendance de l'Algérie ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. Ouazene devant ce tribunal ;

3°) de mettre à la charge de M. Ouazene le versement de la somme de 700 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'ordonnance n° 62-825 du 21 juillet 1962 ;

Vu la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Tanneguy Larzul, Conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Delphine Hedary, rapporteur public ;

1. Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 1er de la loi du 17 juillet 1978 : " Sont considérés comme documents administratifs, (.), quels que soient leur date, leur lieu de conservation, leur forme et leur support, les documents produits ou reçus, dans le cadre de leur mission de service public, par l'Etat, les collectivités territoriales ainsi que par les autres personnes de droit public ou les personnes de droit privé chargées d'une telle mission. Constituent de tels documents notamment les dossiers, rapports, études, comptes rendus, procès-verbaux, statistiques, directives, instructions, circulaires, notes et réponses ministérielles, correspondances, avis, prévisions et décisions " ; que, selon l'article 2 de la même loi : " Sous réserve des dispositions de l'article 6, les autorités mentionnées à l'article 1er sont tenues de communiquer les documents administratifs qu'elles détiennent aux personnes qui en font la demande (.) " ; qu'il résulte du II de cet article 6, dans sa rédaction applicable en l'espèce, que " Ne sont communicables qu'à l'intéressé les documents administratifs : / - dont la communication porterait atteinte au secret de la vie privée et des dossiers personnels (.) " ;

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. Ouazene, de nationalité algérienne, a demandé que lui soit communiquée une copie de la déclaration recognitive de la nationalité française qu'en qualité de ressortissant de statut civil de droit local originaire d'Algérie son grand-père, M. Saïd Ouazene, avait souscrite en application de l'article 2 de l'ordonnance du 21 juillet 1962 ; qu'en dépit de l'avis favorable assorti de la réserve qu'il établisse l'existence d'un lien de filiation avec son ascendant, rendu par la commission d'accès aux documents administratifs, le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire a implicitement rejeté cette demande ; que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a annulé cette décision ;

3. Considérant qu'il résulte des dispositions de l'ordonnance du 21 juillet 1962 et du titre VII du code de la nationalité française, alors en vigueur, que la déclaration en vue de la reconnaissance de la nationalité française souscrite par les ressortissants de statut civil de droit local originaires d'Algérie avait pour objet et pour effet de leur conserver la nationalité française, si les autorités administratives ne s'y opposaient pas, sans que les autorités judiciaires aient à intervenir ; que, par suite, la déclaration recognitive de la nationalité française souscrite par M. Saïd Ouazene présente le caractère d'un document administratif qui est en principe communicable en vertu de l'article premier de la loi du 17 juillet 1978 ;

4. Considérant, toutefois, qu'en jugeant que la communication de cette déclaration ne pouvait être refusée à M. Ouazene, en dépit des éléments relatifs à la vie privée de M. Saïd Ouazene qu'elle contenait, alors que M. Ouazene, qui ne s'est prévalu d'aucune qualité lui permettant d'être regardé comme étant lui-même directement concerné, était un tiers vis-à-vis du souscripteur de cette déclaration, le tribunal administratif a méconnu les dispositions du II de l'article 6 de la loi du 17 juillet 1978 ; que, par suite et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, le ministre est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué ;

5. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L 821-2 du code de justice administrative ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que M. Ouazene ne peut être regardé comme la personne intéressée, au sens de l'article 6 de la loi du 17 juillet 1978, par la situation de son grand-père en ce qui concerne les conditions dans lesquelles la nationalité française de ce dernier a été reconnue ; qu'il n'est, dès lors, pas fondé à se prévaloir des dispositions de cette loi pour avoir accès à la déclaration recognitive de la nationalité française souscrite par M. Saïd Ouazene ni, par suite, à demander l'annulation de la décision attaquée ;

7. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par le ministre au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nantes e du 31 décembre 2009 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. Ouazene devant ce tribunal est rejetée.

Article 3 : Les conclusions présentées par le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire au titre des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'intérieur et à M. Mouloud Ouazene.

Délibéré dans la séance du 27 mars 2013 où siégeaient : M. Jacques Arrighi de Casanova, Président adjoint de la Section du Contentieux, présidant ; M. Thierry Tuot, M. Jean-Pierre Jouguelet, Présidents de sous-section ; M. Alain Christnacht, M. Jean-François Mary, Mme Eliane Chemla, Conseillers d'Etat ; M. Tanneguy Larzul, Conseiller d'Etat-rapporteur ; M. Philippe Josse et M. Pierre Collin, Conseillers d'Etat.

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