Jurisprudence : Cass. civ. 2, 03-03-2022, n° 20-20.017, F-B, Cassation

Cass. civ. 2, 03-03-2022, n° 20-20.017, F-B, Cassation

A24677P3

Référence

Cass. civ. 2, 03-03-2022, n° 20-20.017, F-B, Cassation. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/81829972-cass-civ-2-03032022-n-2020017-fb-cassation
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Abstract

Mots clés : appel • dispositif des conclusions • chefs du jugement critiqués • mention • infirmation Dans son arrêt du 3 mars 2022, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation clarifie sa jurisprudence relative au dispositif des conclusions d'appel en considérant que, si l'appelant qui poursuit la réformation du jugement frappé d'appel, doit, dans le dispositif de ses conclusions, mentionner, d'une part, qu'il demande l'infirmation du jugement, et d'autre part, formuler une ou des prétentions, il n'est toutefois pas exigé qu'il précise, dans le dispositif des conclusions, les chefs de dispositif du jugement dont il est demandé l'infirmation. ► La deuxième chambre civile de la Cour de cassation, dans son arrêt rendu le 3 mars 2022, vient préciser que lorsque l'appelant principal, dans le dispositif de ses conclusions, ne se borne pas à demander de réformer la décision entreprise, mais formule plusieurs prétentions, la cour d'appel doit statuer sur ces demandes ; l'appelant n'est pas tenu de reprendre, les chefs de dispositif du jugement dont il sollicite l'infirmation.


CIV. 2

CM


COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 3 mars 2022


Cassation


M. PIREYRE, président


Arrêt n° 244 F-B

Pourvoi n° W 20-20.017


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 3 MARS 2022


La société Entreprise Bonnevie et fils, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° W 20-20.017 contre l'arrêt rendu le 18 mai 2020 par la cour d'appel de Versailles (4e chambre), dans le litige l'opposant à la société Bardage étanchéité couverture isolation bâtiments et travaux publics, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.


Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Durin-Karsenty, conseiller, les observations de Me Haas, avocat de la société Entreprise Bonnevie et fils, de la SCP Foussard et Froger, avocat de la société Bardage étanchéité couverture isolation bâtiments et travaux publics, et l'avis de Mme Trassoudaine-Verger, avocat général, après débats en l'audience publique du 18 janvier 2022 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Durin-Karsenty, conseiller rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.


Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 18 mai 2020), la société Entreprise Bonnevie et fils a relevé appel, le 22 mars 2018, d'un jugement d'un tribunal de commerce, qui l'a notamment condamnée à paiement dans un litige l'opposant à la société Bardage étanchéité couverture isolation bâtiments et travaux publics (BECI BTP).


Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche, ci-après annexé

2.En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile🏛, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le moyen, pris en sa deuxième branche

Enoncé du moyen

3. La société Bonnevie et fils fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement entrepris l'ayant condamnée à payer à la société BECI BTP la somme de 32 753,78 euros avec pénalités de retard calculées au taux d'intérêts appliqué par la banque centrale européenne pour son opération de refinancement la plus récente, augmentée de 10 points de pourcentage à compter du 13 décembre 2015 et l'ayant déboutée de sa demande reconventionnelle alors « que les conclusions d'appel comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, l'énoncé des chefs de jugement critiqués, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu'un dispositif récapitulant les prétentions ; qu'il n'est pas exigé que l'énoncé des chefs de jugement critiqués soit mentionné dans le dispositif ; qu'en se fondant, pour déclarer les conclusions de l'appelante irrecevables et en déduire qu'elle n'était pas saisie régulièrement de l'appel de la société Bonnevie, sur l'absence, dans le dispositif des conclusions de l'appelante, des dispositions du jugement dont il est sollicité la réformation, cependant, d'une part, que les chefs de jugement critiqués étaient mentionnés dans lesdites conclusions et, d'autre part, que le dispositif de celles-ci sollicitait l'infirmation du jugement et récapitulait les prétentions de l'appelante, la cour d'appel a violé l'article 954 du code de procédure civile🏛, dans sa rédaction issue du décret n° 2017-891🏛 du 6 mai 2017🏛. »


Réponse de la Cour

Vu l'article 954, alinéas 1, 2 et 3 du code de procédure civile🏛, dans sa rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017🏛 applicable au litige :

4. Selon l'alinéa 1er, les conclusions d'appel contiennent, en en-tête, les indications prévues à l'article 961. Elles doivent formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées et de leur numérotation. Un bordereau récapitulatif des pièces est annexé.

5. Aux termes des alinéas 2 et 3, les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, l'énoncé des chefs de jugement critiqués, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu'un dispositif récapitulant les prétentions. Si, dans la discussion, des moyens nouveaux par rapport aux précédentes écritures sont invoqués au soutien des prétentions, ils sont présentés de manière formellement distincte. La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

6. Pour confirmer le jugement, l'arrêt, après avoir rappelé les dispositions de l'alinéa 1er de l'article 954, énonce en substance qu'elles imposent à la cour de ne statuer que sur les prétentions expresses, récapitulées dans le dispositif des conclusions et que l'absence dans le dispositif des conclusions d'une partie appelante de la demande expresse d'infirmation de dispositions du jugement clairement mentionnées ne la saisit pas de cette demande et ne l'autorise pas à infirmer le jugement.

7. Il ajoute qu' en l'absence d'infirmation préalable de ce qui a déjà été jugé, la cour ne peut pas statuer sur les prétentions figurant dans le dispositif des conclusions des appelants, auxquelles il a été déjà répondu par un jugement qui subsiste à défaut d'infirmation et que la circonstance que des prétentions claires, précises et motivées figurent dans le dispositif des conclusions n'est pas de nature à combler cette absence, dès lors que la cour ne peut y faire droit, ou les rejeter, que si dans le même temps elle infirme, ou confirme, le jugement critiqué sur des dispositions clairement visées.

8. Il relève que la société Bonnevie et fils, appelante principale, sollicite dans le dispositif de ses conclusions d'« infirmer la décision dont appel sur les chefs du dispositif critiqués » mais ce dispositif n'indique nullement les dispositions du jugement dont il est sollicité la réformation de sorte que la cour d'appel n'est pas saisie de demande d'infirmation par l'appelant principal.

9. En statuant ainsi, alors que l'appelante, dans le dispositif de ses conclusions, ne se bornait pas à demander à la cour de réformer la décision entreprise, mais formulait plusieurs prétentions, et qu'elle n'était pas tenue de reprendre, dans celui-ci, les chefs de dispositif du jugement dont elle demandait l'infirmation, la cour d'appel a violé le texte susvisé.


PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 18 mai 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;

Condamne la société Bardage étanchéité couverture isolation bâtiments et travaux publics aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile🏛, rejette la demande formée par la société Bardage étanchéité couverture isolation bâtiments et travaux publics et la condamne à payer à la société Entreprise Bonnevie et fils la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trois mars deux mille vingt-deux. MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par Me Haas, avocat aux Conseils, pour la société Entreprise Bonnevie et fils

La société Bonnevie fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR confirmé le jugement entrepris l'ayant condamnée à payer à la société BECI BTP la somme de 32 753,78 euros avec pénalités de retard calculées au taux d'intérêts appliqué par la banque centrale européenne pour son opération de refinancement la plus récente, augmentée de 10 points de pourcentage à compter du 13 décembre 2015 et l'ayant déboutée de sa demande reconventionnelle ;

ALORS, 1°), QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en relevant d'office, pour considérer qu'elle n'était pas saisie par l'appelante de demandes d'infirmation du jugement et le confirmer, le moyen tiré de l'absence de visa, dans le dispositif des conclusions de l'appelante, des dispositions du jugement dont la réformation est sollicitée, sans avoir préalablement invité les parties à présenter leurs observations sur ce point, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 16 du code de procédure civile🏛 ;

ALORS, 2°), QUE les conclusions d'appel comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, l'énoncé des chefs de jugement critiqués, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu'un dispositif récapitulant les prétentions ; qu'il n'est pas exigé que l'énoncé des chefs de jugement critiqués soit mentionné dans le dispositif ; qu'en se fondant, pour déclarer les conclusions de l'appelante irrecevables et en déduire qu'elle n'était pas saisie régulièrement de l'appel de la société Bonnevie, sur l'absence, dans le dispositif des conclusions de l'appelante, des dispositions du jugement dont il est sollicité la réformation, cependant, d'une part, que les chefs de jugement critiqués étaient mentionnés dans lesdites conclusions et, d'autre part, que le dispositif de celles-ci sollicitait l'infirmation du jugement et récapitulait les prétentions de l'appelante, la cour d'appel a violé l'article 954 du code de procédure civile🏛, dans sa rédaction issue du décret n° 2017-891🏛 du 6 mai 2017🏛 ;

ALORS, 3°) et subsidiairement, QUE le principe de sécurité juridique et le droit à un procès équitable s'opposent à l'application immédiate d'une règle nouvelle d'origine prétorienne à une instance en cours ; qu'en procédant à une application immédiate de la règle tirée de l'absence, dans le dispositif des conclusions de l'appelante, des dispositions du jugement dont il est sollicité la réformation, cependant que cette règle de procédure résulte de l'interprétation nouvelle d'une disposition au regard de la réforme de la procédure d'appel avec représentation obligatoire issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017🏛 qui n'a jamais été affirmée par la Cour de cassation dans un arrêt publié antérieurement à la déclaration d'appel de la société Bonnevie, la cour d'appel, qui a privé l'appelante de son droit à un procès équitable, violé l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales🏛.

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