Jurisprudence : CA Versailles, 02-04-2013, n° 12/02449, Infirmation

CA Versailles, 02-04-2013, n° 12/02449, Infirmation

A4449KBE

Référence

CA Versailles, 02-04-2013, n° 12/02449, Infirmation. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/8055411-ca-versailles-02042013-n-1202449-infirmation
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Abstract

Dans un arrêt rendu le 2 avril 2013, la cour d'appel de Versailles retient que la clause contenue dans l'acte de vente d'un logement occupé disposant que l'acquéreur s'oblige à appliquer les plafonnements des loyers résultant des normes PLI (prêt locatif intermédiaire), si elle peut valablement être invoquée par le locataire, ne fait pas obstacle à l'application des dispositions d'ordre public de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 en cas de loyer manifestement sous-évalué, et n'empêche pas alors une réévaluation substantielle du loyer (CA Versailles, 2 avril 2013, n° 12/02449).



COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac 51I
1ère chambre 2ème section
ARRÊT N°
CONTRADICTOIRE DU 02 AVRIL 2013
R.G. N° 12/02449
AFFAIRE
SCI SAINT LOUIS
C/
Stéphanie Y
Décision déférée à la cour Jugement rendu le 02 Février 2012 par le Tribunal d'Instance de SAINT GERMAIN EN LAYE
Chambre
N° Section
N° RG 1111001269
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le
à
Me Martine X de la SCP LISSARRAGUE X & ASSOCIÉS,
Me Philippe V,
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE DEUX AVRIL DEUX MILLE TREIZE,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre
SCI SAINT LOUIS
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés

BEAUCHAMP
représentée par Me Martine DUPUIS de la SCP LISSARRAGUE DUPUIS & ASSOCIÉS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES - N° du dossier 1250224
APPELANTE
****************
Madame Stéphanie Y
née le ..... à VERSAILLES
de nationalité Française

CHATOU
représentée par Me Philippe RAOULT, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire C 172 - N° du dossier P12155
INTIMÉE
****************

Composition de la cour
En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 22 Février 2013 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant M. Serge PORTELLI, Président chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de
M. Paul-André RICHARD, Président,
M. Serge PORTELLI, Président,
Mme Véronique CATRY, Conseiller,
Greffier, lors des débats Madame Marie-Pierre QUINCY,

FAITS ET PROCÉDURE,
Mme Y était locataire d'un appartement situé Résidence Le Petit Chêne, 61A rue Jules
Ferry à Chatou depuis le 31 août 1999, le propriétaire étant alors la société Aerospatiale Matra. Cet appartement et d'autres appartenant à la société Aerospatiale ont été vendus à la SCI Saint Louis.
Les locataires étaient informés à l'occasion de cette cession par un courrier du groupe EADS qu'il était stipulé dans l'action de cession que l'acquéreur conserverait un caractère social aux différents appartements concernés.
Après passage en commission de conciliation, le bail était renouvelé le 18 juin 2006 entre la SCI Saint Louis et Mme Y pour une durée de six années à compter du 1er septembre 2005 pour se terminer le 31 août 2011.
Le loyer annuel s'élevait à la somme en principal de 5.716.44euros.
La SCI Saint Louis estimant le loyer manifestement sous évalué il a été proposé à la locataire, aux termes d'un courrier recommandé avec accusé de réception en date du 3 février 2011, un nouveau contrat d'une durée de six années sur le fondement des dispositions de l'article 17 c de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989, moyennant le prix annuel en principal de 8.652,60euros, à compter du 1er septembre 2011.
Mme Y a refusé cette proposition au motif qu'il entraînait une augmentation de 102% du loyer et a proposé un renouvellement calculé au coût de la vie.
Faute d'accord entre les parties, la commission départementale de conciliation des Yvelines a été saisie par la bailleresse par lettre du 20 mai 2011. Les parties ont été convoquées devant la commission le 29 juin 2011. Aucune conciliation n'a pu avoir lieu. Le terme du bail intervenant 31 août 2011, la SCI Saint Louis a saisi le Tribunal d'instance pour voir fixer les conditions du bail renouvelé sur la base de 8.652,60euros.
La SCI Saint Louis demandait qu'il soit dit que
- le bail consenti sera renouvelé pour une durée de 6 années à compter du 1er septembre 2011
- le loyer sera fixé sur la base de 8.652,60euros en principal et par an,
- faute par le preneur de signer le nouveau bail dans les conditions judiciairement fixées, la décision à intervenir vaudra bail aux clauses et conditions du bail expiré non contraire à celles-ci;
- Mme Y sera condamnée aux dépens ainsi qu'au paiement de la somme de 1000e par application de l'article 700,
- très subsidiairement, une expertise sera ordonnée.
En réplique aux conclusions de Mme Y la SCI Saint Louis a demandé qu'il soit dit que les stipulations de l'acte de vente ne pouvaient être invoquées par la locataire et qu'au surplus celle-ci ne rapportait pas la preuve que l'augmentation proposée dépassait le plafond PLI.
Devant le tribunal d'instance, Mme Y contestait la demande, faisant valoir que la proposition d'augmentation était excessive, compte tenu du caractère à vocation sociale du logement qui avait été vendu par EADS et précisait que le loyer aux termes de l'acte de vente était soumis aux règles de plafonnement PLI. Elle faisait une proposition d'augmentation de loyer mensuel de 8euros.

Le 2 février 2012, le tribunal de Saint Germain en Laye a débouté la SCI Saint Louis de toutes ses demandes, a donné acte à Mme Y de son offre d'augmentation de 8euros par mois et a laissé à la charge de la SCI Saint Louis les dépens de l'instance, rejetant le surplus.
Dans ses dernières conclusions l'appelant, la société Saint Louis, formule les demandes suivantes

- Déclarer recevable et fondé l'appel interjeté par la SCI Saint Louis.
Y faisant droit,
- Infirmer la décision entreprise, et statuant à nouveau,
- Juger que Mme Y ne peut se prévaloir de l'engagement souscrit par la SCI Saint Louis aux termes de l'acte en vertu duquel elle est devenue propriétaire des locaux loués,
- Juger en tout état de cause que cet engagement est nul et de nul effet, Subsidiairement,
- Juger que le loyer de renouvellement proposé par la SCI Saint Louis est conforme au plafond de loyer résultant des normes PLI applicables en 2011,
- Dire que le bail consenti sera renouvelé pour une durée de six années à compter du 1er septembre 2011,
- Dire que le loyer sera fixé sur la base de 8.652,60euros en principal et par an, la majoration entrant en vigueur conformément à la loi,
- Dire que, faute par le preneur de signer le nouveau bail dans les conditions qui seront judiciairement fixées, la décision à intervenir vaudra bail aux clauses et conditions du bail expiré non contraires à ladite décision,
Très subsidiairement,
- Désigner tel expert qu'il plaira à la Cour avec pour mission de
- se rendre sur les lieux, les décrire ainsi que leur environnement, leur situation géographique et leur orientation,
- préciser la date de construction,
- décrire l'état des façades, des fenêtres et des balcons,
- donner un descriptif des parties communes escaliers, ascenseurs, locaux annexes,
- vérifier la superficie du logement,
- décrire le logement pièce par pièce en précisant si des travaux ont été effectués récemment,
- donner son avis sur la valeur locative des lieux en faisant référence aux loyers habituellement constatés au cours des trois dernières années dans le voisinage pour de logement comparables,
- répondre aux observations faites par les parties dans les limites de sa mission,
- dire que l'expert devra déposer son rapport ou pré-rapport dans un délai de trois mois à compter de sa saisine.
En tout état de cause
- Condamner Mme Y au paiement d'une somme de 2.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,
- Condamner Mme Y aux entiers dépens.
- Dire que les dépens d'appel pourront être recouvrés directement par la S.C.P. Lissarrague Dupuis Boccon-gibod - Lexavoue Paris-versailles, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
Dans ses dernières conclusions l'intimée formule les demandes suivantes
- Déclarer la SCI Saint Louis mal fondée en son appel ainsi qu'en l'ensemble de ses demandes, l'en débouter,
- Fixer le montant du loyer renouvelé au montant résultant du renouvellement du 18 juin 2006 renouvelé,
- Condamner la SCI Saint Louis au paiement d'une somme de 2.000euros au titre de l'article 700, et aux dépens.

MOTIFS
- Sur l'application des dispositions du contrat de vente du 19 novembre 2003
Le tribunal a justement analysé le contrat de vente du 19 novembre 2003 passé entre EADS et la SCI Saint Louis. A la page 26 sous la rubrique 'plafonnement des loyers', il est stipulé 'A la demande expresse du vendeur, l'acquéreur s'oblige à appliquer les plafonnements de loyers résultant des normes ci-après aux salariés et retraités du vendeur figurant au nombre des titulaires de bail ci-après nommés au paragraphe 'Situation locatives- convention entre les parties' ci-après, aux normes PLI (prêt locatif intermédiaire) pour les sites de Chatou.'
Le tribunal en avait déduit à juste titre que le bien loué à Mme Y entrait dans la catégorie prévue à l'acte de vente et que la SCI Saint Louis n'était pas fondée à soutenir que les stipulations de l'acte de vente ne pouvaient être invoquées par Mme Y.
Devant la cour l'appelante soutient à nouveau que la locataire ne saurait se prévaloir de stipulations d'un contrat auquel elle n'est pas partie, en vertu de l'effet relatif des contrats résultant des dispositions de l'article 1165 du Code civil.
Mais la clause du contrat de vente passée entre le vendeur et l'acheteur du bien et prévoyant des modalités de calcul du loyer que l'acheteur s'engage à respecter constitue une stipulation pour autrui créant une obligation de l'acheteur vis à vis du locataire bénéficiaire. Il ne peut donc être fait état en l'espèce d'un effet relatif du contrat de vente. Ce contrat fait loi pour les parties.
La SCI demande que soit prononcé la nullité d'une clause d'un contrat qu'elle a signé en 2003 au motif qu'il serait contraire aux dispositions d'ordre public de la loi du 6 juillet 1989 prise en son article 7c qui prévoit un dispositif de révision du loyer lors du renouvellement du contrat lorsque ce loyer est 'manifestement sous-évalué'. Mais la clause de l'acte de vente concernant le plafonnement du loyer ne contrevient en rien à l'article 7c; elle prévoit simplement un plafonnement qui, selon les propres conclusions de l'appelante, n'empêcherait pas une réévaluation substantielle du loyer. Il y a donc lieu de rejeter la demande de la SCI Saint Louis aux fins de juger que l'engagement qu'elle a pris dans l'acte de vente du du 19 novembre 2003 est nul et de nul effet.
- Sur la fixation du loyer
Les dispositions de l'article 17c de la loi du 6 juillet 1989 ont été respectées. Aucun accord n'a pu intervenir devant la commission départementale de conciliation des Yvelines. La SCI Saint Louis a saisi le Tribunal d'instance pour voir fixer les conditions du bail renouvelé sur la base de 8.652,60euros annuel ou 721,05euros par mois soit 12,78euros le m2 . La SCI indique que le prix qu'elle propose est inférieur au plafond de loyer résultant des normes PLI en application desquelles le loyer intermédiaire sur la commune de Chatou ressort à 14,56 le m2 en 2011 et 12,92euros si l'on retient, comme le suggère Mme Y une superficie de 55,79m2.
La SCI justifie de ce que le montant du loyer payé par Mme Y est manifestement sous-évalué par rapport au prix ordinairement pratiqué sur la commune de Chatou même si l'évolution de deux loyers cités dans les conclusions de Mme Y contredit cette constatation générale.
Il y a donc lieu d'infirmer le jugement sur ce point de dire que le loyer en renouvellement au 1er septembre 2011 sera fixé sur la base de 8.652,60euros en principal et par an, la majoration entrant en vigueur conformément à la loi.
Il n'y a donc pas lieu à désignation d'un expert, la cour disposant dans les pièces du dossier d'éléments d'appréciation suffisants.
- Sur l'article 700 et les dépens
Il n'y a pas lieu, en équité, à condamner Mme Y en application de l'article 700 mais elle supportera les dépens.

PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement et contradictoirement,
Infirme le jugement déféré, statuant à nouveau,
- Dit que le loyer de renouvellement proposé par la SCI Saint Louis est conforme au plafond de loyer résultant des normes PLI applicables en 2011,
- Dit que le bail consenti sera renouvelé pour une durée de six années à compter du 1er septembre 2011,
- Dit que le loyer sera fixé sur la base de 8.652,60euros en principal et par an, la majoration entrant en vigueur conformément à la loi,
- Dit que, faute par le preneur de signer le nouveau bail dans les conditions qui seront judiciairement fixées, la décision à intervenir vaudra bail aux clauses et conditions du bail expiré non contraires à ladite décision,
- Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700
- Condamne Mme Y aux dépens qui seront recouvrés par les avocats dans les termes de l'article 699 du CPC.
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par M. Serge ..., Président, pour M. Paul-André ..., Président empêché, et par Madame ..., greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le GREFFIER, Le PRÉSIDENT,

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