Jurisprudence : CE 3/8 SSR, 20-03-2013, n° 349834, mentionné aux tables du recueil Lebon

CE 3/8 SSR, 20-03-2013, n° 349834, mentionné aux tables du recueil Lebon

A8560KAB

Identifiant européen : ECLI:FR:CESSR:2013:349834.20130320

Identifiant Legifrance : CETATEXT000027198426

Référence

CE 3/8 SSR, 20-03-2013, n° 349834, mentionné aux tables du recueil Lebon. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/8044621-ce-38-ssr-20032013-n-349834-mentionne-aux-tables-du-recueil-lebon
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Abstract

Aux termes d'une décision rendue le 20 mars 2013, le Conseil d'Etat retient que la condition d'agrément attachée au transfert d'une créance née d'un report de déficit à la société absorbante n'est pas contraire au Premier protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales (CE 3° et 8° s-s-r., 20 mars 2013, n° 349834, mentionné aux tables du recueil Lebon).



CONSEIL D'ETAT

Statuant au contentieux

349834

MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES
c/ société Bellon

Mme Anne Egerszegi, Rapporteur
Mme Emmanuelle Cortot-Boucher, Rapporteur public

Séance du 1er mars 2013

Lecture du 20 mars 2013

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


Le Conseil d'Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 3ème et 8ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 3ème sous-section de la section du contentieux


Vu le pourvoi du ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, porte-parole du gouvernement, enregistré le 3 juin 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat ; le ministre demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt n° 08MA00793 du 14 avril 2011 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille, d'une part, a rejeté son recours tendant à l'annulation du jugement du 3 décembre 2007 par lequel le tribunal administratif de Marseille a ordonné la restitution à la SA Bellon de la somme de 139 175, 23 euros au titre d'une créance de report en arrière des déficits de l'exercice clos le 31 août 1995 et, d'autre part, faisant droit à l'appel incident de la société, a porté à 912 929, 66 euros le montant de la somme devant lui être restituée ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son premier protocole additionnel ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu la loi n° n°2001-1275 du 28 décembre 2001 de finances pour 2002 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Anne Egerszegi, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la société Bellon,

- les conclusions de Mme Emmanuelle Cortot-Boucher, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la société Bellon ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la SA Financière Sodexo a constaté, au titre de l'exercice clos le 31 août 1995, un déficit qu'elle a reporté en arrière ; que l'administration fiscale a estimé que, dès lors que l'agrément requis par le second alinéa du II de l'article 220 quinquies du code général des impôts n'avait pas été sollicité, la créance sur le Trésor public née du report en arrière du déficit n'avait pas été transmise à la SA Bellon, qui a absorbé la SA Financière Sodexo le 1er septembre 1997 ; qu'elle a donc refusé de faire droit à la demande de remboursement de cette créance présentée par la société absorbante ; que le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, porte-parole du gouvernement, se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 14 avril 2011 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel qu'il a interjeté du jugement du 3 décembre 2007 du tribunal administratif de Marseille qui a fait droit à la demande de la société Bellon tendant au remboursement de la créance en cause ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes " ;

3. Considérant qu'aux termes du I de l'article 220 quinquies du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l'année 1997: " (.) le déficit constaté au titre d'un exercice ouvert à compter du 1er janvier 1984 par une entreprise soumise à l'impôt sur les sociétés peut, sur option, être considéré comme une charge déductible du bénéfice de l'antépénultième exercice et, le cas échéant, de celui de l'avant-dernier exercice puis de celui de l'exercice précédent, dans la limite de la fraction non distribuée de ces bénéfices (.)// L'excédent d'impôt sur les sociétés résultant de l'application du premier alinéa fait naître au profit de l'entreprise une créance d'égal montant. La constatation de cette créance, qui n'est pas imposable, améliore les résultats de l'entreprise et contribue au renforcement des fonds propres./ La créance est remboursée au terme des cinq années suivant celle de la clôture de l'exercice au titre duquel l'option visée au premier alinéa a été exercée. Toutefois, l'entreprise peut utiliser la créance pour le paiement de l'impôt sur les sociétés dû au titre des exercices clos au cours de ces cinq années. Dans ce cas, la créance n'est remboursée qu'à hauteur de la fraction qui n'a pas été utilisée dans ces conditions./ La créance est inaliénable et incessible, sauf dans les conditions prévues par les articles L. 313-23 à L. 313-35 du Code monétaire et financier, ou dans des conditions fixées par décret " ; qu'aux termes du second alinéa du II du même article : " En cas de fusion ou opération assimilée, intervenant au cours des cinq années suivant celle de la clôture de l'exercice au titre duquel l'option visée au I a été exercée, le transfert de tout ou partie de la créance de la société apporteuse ou absorbée à la société bénéficiant de l'apport ou absorbante, peut être autorisé sur agrément délivré dans les conditions prévues à l'article 1649 nonies " ; qu'il résulte de ces dispositions, dans leur rédaction en vigueur à l'époque des faits, que le législateur a seulement entendu subordonner la transmission à la société absorbante de la créance détenue par la société absorbée, qui était née du fait de l'exercice, par celle-ci, d'une option ouverte par la loi et dont le législateur a précisé qu'elle était inaliénable et incessible, à la délivrance de l'agrément alors prévu au second alinéa du II de l'article 220 quinquies du code général des impôts, lequel constituait ainsi un des éléments du régime légal de cette créance particulière ; que, dès lors, en jugeant que les dispositions du second alinéa du II de l'article 220 quinquies du code général des impôts, au seul motif qu'elles subordonnaient à la délivrance d'un agrément la transmission à la société absorbante de la créance née de l'option pour le report en arrière exercée par la société absorbée, méconnaissaient les stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en ce qu'elles portaient atteinte à un bien qui aurait dû entrer automatiquement dans le patrimoine de la société absorbante, la cour administrative d'appel de Marseille a commis une erreur de droit ; que par suite, le ministre est fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque ;

4. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;

D E C I D E :

Article 1er : L'arrêt du 14 avril 2011 de la cour administrative de Marseille est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée devant la cour administrative d'appel de Marseille.

Article 3 : Les conclusions présentées par la société Bellon au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'économie et des finances et à la société Bellon.

Délibéré dans la séance du 1er mars 2013 où siégeaient : M. Alain Ménéménis, Président adjoint de la Section du Contentieux, présidant ; M. Gilles Bachelier, M. Jean Courtial, Présidents de sous-section ; M. Patrick Stefanini, Mme Marie-Hélène Mitjavile, Mme Caroline Martin, M. Stéphane Gervasoni, M. Régis Fraisse, Conseillers d'Etat et Mme Anne Egerszegi, Maître des Requêtes-rapporteur.

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