4ème Chambre
ARRÊT N° 135
R.G 09/05764
BD
Copie exécutoire délivrée
le
à
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 14 MARS 2013
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ
Monsieur André CHAPELLE, Président,
Madame Brigitte DELAPIERREGROSSE, Conseiller,
Madame Christine GROS, Conseiller,
GREFFIER
Madame Françoise BERNARD, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS
A l'audience publique du 10 Janvier 2013
ARRÊT
Contradictoire, prononcé publiquement le 14 Mars 2013 par mise à disposition au greffe, date indiquée à l'issue des débats 21 Février 2013 prorogée au 07 Mars 2013 puis au 14 Mars 2013
****
APPELANT
Monsieur Georges Z -Décédé-
TREGUEUX
Rep/assistant la SCP GAUVAIN -DEMIDOFF, Postulant (avocats au barreau de RENNES)
Rep/assistant Me Jean-charles ..., Plaidant (avocat au barreau de RENNES)
INTIMÉ
Monsieur Gilbert Y
HILLION
Rep/assistant la SCP CASTRES COLLEU PEROT LE COULS BOUVET, Postulant (avocats au barreau de RENNES)
Rep/assistant Me Michelle ..., Plaidant (avocat au barreau de SAINT-MALO) INTERVENANTES
Madame Josiane Jacqueline Armande Z veuve Z, ès qualités d'héritière de M. Georges Z
née le ..... à PLEDRAN (22960)
TREGUEUX
Rep/assistant la SCP GAUVAIN -DEMIDOFF, Postulant (avocats au barreau de RENNES)
Rep/assistant Me Jean-charles ..., Plaidant (avocat au barreau de RENNES)
Mademoiselle Delphine Brigitte Michèle Z
née le ..... à ST BRIEUC (22000)
PLENEUF VAL ANDRE
Rep/assistant la SCP GAUVAIN -DEMIDOFF, Postulant (avocats au barreau de RENNES)
Rep/assistant Me Jean-charles ..., Plaidant (avocat au barreau de RENNES)
Madame Aline Josiane Jacqueline Z
née en à
Passage Massaguer 11-3° 1
BARCELONE
Rep/assistant la SCP GAUVAIN -DEMIDOFF, Postulant (avocats au barreau de RENNES)
Rep/assistant Me Jean-charles ..., Plaidant (avocat au barreau de RENNES)
· I-Exposé du litige
Le 5 novembre 2003, Monsieur Y a régularisé avec Monsieur Z un contrat de construction de maison individuelle avec fourniture de plans, portant sur l'édification d'une maison sur une parcelle sise à PLANGUENOUAL, pour un montant de 309000euros, sans mention de travaux à la charge du maître de l'ouvrage. Les travaux devaient être réalisés dans un délai de douze mois à compter de la déclaration d'ouverture du chantier.
Un second contrat de la même date a fixé la durée des travaux à 14 mois, substituant la compagnie AVIVA à l'assureur CEGI-CAMKA déclaré initialement et indiqué au titre des travaux à la charge du maître de l'ouvrage une somme de 49583,29euros, le prix convenu demeurant de 309000euros. Le chantier a été déclaré ouvert à compter du 15 janvier 2004. Le 17 mars 2004, un avenant a porté la durée des travaux à 20 mois.
Monsieur Y n'a pas réglé le quatrième appel de fonds du 4 août 2004 d'un montant de 61800euros TTC, malgré une mise en demeure de Monsieur Z du 14 octobre 2004, précisant qu'invoquant l'exception d'inexécution, il suspendait les travaux.
Alléguant diverses malfaçons et désordres, le maître de l'ouvrage a sollicité en référé afin de justifier sur le fond une demande de résolution du contrat aux torts du constructeur une mesure d'expertise, à laquelle il a été fait droit par ordonnance du 16 décembre 2004, qui a débouté Monsieur Z de sa demande de provision de 60000euros. L'expert a déposé son rapport le 28 février 2006.
Monsieur Y par exploit du 3 novembre 2006 a fait assigner Monsieur Z devant le tribunal de grande instance de St BRIEUC en exécution sous astreinte des travaux de reprises définis par l'expert chargé d'une mission de bonne fin et indemnisation de divers préjudices. Une mesure d'expertise relative à de nouveaux désordres a été confiée à Monsieur ... par le juge de la mise en état suivant ordonnance du 11 décembre 2007. L'expert a déposé son rapport le 9 juillet 2008.
Par jugement du 15 juillet 2009, le tribunal a
écarté des débats la pièce datée du 3 mars 2004, intitulée " transaction ",
prononcé la résiliation du contrat de construction de maison individuelle conclu entre les parties le 5 novembre 2003, aux torts de Monsieur Z,
condamné Monsieur Z à verser à Monsieur Y les sommes suivantes
*169229euros au titre des pénalités de retard arrêtés à la date du jugement prononçant la résiliation judiciaire du contrat,
* 189482,05euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice financier,
*8000euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
débouté les parties de leurs plus amples demandes, fins et conclusions,
condamné Monsieur Z aux dépens y compris le coût des deux expertises juridiciaires,
ordonné l'exécution provisoire du jugement à concurrence des 4/5 des condamnations prononcées.
Monsieur Z a interjeté appel par déclaration déposée le 5 août 2009. Suite à son décès en décembre 2011, Monsieur Y a fait assigner en intervention et reprise d'instance, ses héritiers, Mesdames ... ..., veuve Z, Delphine et Aline Z.
Par conclusions du 16 mai 2012, les consorts Z demandent en substance la réformation du jugement, le rétablissement de la pièce n° 12, " transaction " du 3 mars 2004, la résolution du contrat aux torts partagés à effet d'avril 2007, la limitation de l'obligation au titre des pénalités de retard à la somme de 49440euros, la compensation entre la
somme de 61800euros augmentée des intérêts de retard conventionnels au taux de 12% l'an à compter d'août 2004 et la somme de 70154,07euros montant des réparations, le débouté de la demande de remboursement de la facture de chaumier, la condamnation de Monsieur Y au paiement d'une indemnité de 4000euros par application de l'article 700 du code de procédure civile.
Les appelantes font valoir que la pièce dénommée transaction du 3 mars 2004 a été communiquée pour le compte de Monsieur Y depuis le début de la procédure, qu'elle est importante puisqu'elle détermine le délai de livraison prévisible de l'immeuble et donc la détermination des retards et pénalités consécutives.
Elles font grief au premier juge d'avoir dénaturé les termes du contrat et la volonté des parties, en considérant que la toiture en chaume était incluse dans le prix convenu. Sans méconnaître
l'obligation pour le constructeur de distinguer et de chiffrer les prestations comprises dans le prix convenu et celles à la charge du maître de l'ouvrage, elles observent que le prix convenu de 309000euros TTC énoncé correspond très exactement au montant cumulé des lots décrits, en excluant le devis du chaumier, distinction que reprend le second contrat et qui a été appliquée par les parties, puisque Monsieur Y a traité directement avec cet artisan.
S'agissant de l'arrêté des comptes, elles contestent l'estimation d'ABC Création, bureau d'étude, qu'elles estiment surévaluée, ne s'agissant pas de devis précis établis par des entreprises de chaque spécialité. Elles ajoutent que le coût du vandalisme et la réparation des poutres sont déjà inclus dans l'évaluation d'ABC et ne peuvent faire l'objet de demandes complémentaires et que la décision conduit à régler à Monsieur Y l'achèvement de la construction. Elles offrent d'apurer les comptes en retenant les travaux impayés (61800euros) et le coût des réparations énoncé dans les deux expertises.
Elles observent en outre que Monsieur Y avait énoncé dès sa demande d'expertise, qu'il souhaitait une résolution judiciaire du contrat, ce que Monsieur Z avait souhaité également dès ses premières conclusions au fond en avril 2007, compte tenu du contexte relationnel, de sorte que Monsieur Y pouvait en tirer les conséquences pour substituer un autre entrepreneur au besoin dans le cadre de l'article 1144 du code civil, ou actionner le garant de livraison. Elle en déduisent qu'au delà du mois d'avril 2007, Monsieur Y a choisi de prolonger inutilement la situation, situation dont il doit supporter seul les conséquences.
Par conclusions du 6 décembre 2012, Monsieur Y demande la confirmation du jugement s'agissant de la résiliation du contrat conclu le 5 novembre 2003 aux torts de Monsieur Z de la condamnation aux frais irrépétibles de première instance.
Il forme appel incident sur la date d' effet de la résiliation et sollicite les sommes de 184061euros au titre des pénalités de retard et 223835,99euros de préjudice financier, outre une indemnité de 8000euros au titre des frais d'appel.
Si Monsieur Y admet que la pièce n° 12 a bien été versée aux débats non signée du constructeur, il observe qu'une nouvelle copie est produite en annexe de la note en délibéré du 2 juin 2009 de Monsieur Z, signée cette fois du constructeur, dont il est indiqué, que la mention " lu et approuvé, bon pour transaction " a été rédigée par Madame Z,
document qu'il allègue de faux et estime indifférent à la solution du litige.
Il soutient que la date d'effet de la résiliation ne peut être fixée en avril 2007, puisqu'à cette époque, il demandait sur la foi de la seule première expertise devant le juge du fond, l'exécution de la convention, qu'au surplus le garant CEGI a refusé d'intervenir. Il estime que la résiliation doit prendre effet au 9 septembre 2009, date à laquelle il a obtenu
de Monsieur Z les clés de la maison, que les pénalités doivent s'appliquer jusqu'à cette date depuis le 15 janvier 2005, date à laquelle selon le contrat du 5 novembre 2003 seul applicable l'immeuble aurait dû être achevé. Il ajoute en effet que les autres documents qui méconnaissent les dispositions d'ordre public du code de la construction et de l'habitation, lui sont inopposables.
Il estime qu'en application de ce contrat, le constructeur devait réaliser sans supplément de prix l'ensemble des travaux indispensable à la construction en ce compris la toiture en chaume et le système de relevage, ne mentionnant aucune prestation à la charge du maître de l'ouvrage.
Il relève par ailleurs que l'achèvement de la maison sur la base du contrat représentait une somme de 156606,30euros, qu'il est établi que la reprise des désordres et la poursuite de la construction représentent une somme très supérieure comme le montre le devis de la société ABC Création dont la pertinence n'a pas été critiquée par l'expert. Il fait observer que doivent également être prises en compte les dégradations intervenues sur le chantier, le coût du lot électricité exclu du devis ABC Création et diverses moins-values, de sorte que son préjudice financier représente une somme de 223835,99euros.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et prétentions des parties, la cour se réfère expressément au jugement critiqué et les écritures visées ci-dessus.
II-Motifs
Sur la communication de pièce n° 12 de Monsieur Y
Le bordereau de communication de pièces de Monsieur Y atteste de la communication devant le tribunal d'une pièce n° 12 intitulée " Avenant de prolongation du délai de réalisation des travaux " du 3 mars 2004 ; document qui a été recommuniqué devant la cour cette fois par les consorts Z l'ayant obtenu en copie du garant de livraison . Cependant, il résulte des échanges entre les parties à l'occasion d'une note en délibéré demandée par le premier juge et des mentions de l'expert dans son premier rapport (page 3), que la signature de ce document est contestée par le maître de l'ouvrage, que par ailleurs, certaines mentions y ont été portées par Madame Z. Dans ces conditions, au regard de la sincérité discutable de ce document, il doit être écarté des débats. Le jugement sera confirmé sur ce point.
Sur l'étendue et le montant du contrat liant les parties
Il n'est pas discuté que le contrat liant les parties est un contrat de construction de maison individuelle avec fourniture de plans, soumis dès lors aux dispositions d'ordre public des articles L230-1 et suivants du code de la construction et de l'habitation, comprenant outre les conditions générales et particulières du contrat, une notice descriptive de l'immeuble et des travaux et les plans, en l'espèce les plans du permis de construire.
Sont produites aux débats plusieurs conventions aux dates et contenus différents - un premier contrat daté du 5 novembre 2003, indiquant un prix convenu de 309000euros, accompagné d'une notice descriptive du 11 octobre 2003, - un second contrat également date du 5 novembre 2003, portant mention d'un prix convenu de 309000 euros et de travaux à la charge du maître de l'ouvrage pour 49583,29euros, - deux contrats du 17 mars 2004 portant au titre du prix convenu le chiffrage de certains lots. Comme le relève l'intimé, seul le premier contrat du 5 novembre 2003, nonobstant le caractère très succinct de la notice, répond aux exigences de l'article L 231-2 du CCH, le second contrat, dépourvu de notice descriptive, et bien que daté du 5 novembre 2003 n'ayant pu être établi à cette date puisqu'il contient en annexe une attestation d'assurance délivré le 4 janvier 2004, les contrats du 17 mars 2004 ne concernant pas quant à eux l'entier ouvrage.
Le contrat du 5 novembre 2003, qui prévoyait un délai de construction de douze mois à compter de l'ouverture du chantier, énonce un prix convenu de 309000euros, sans mentionner de travaux à la charge du maître de l'ouvrage, tandis que la notice ne fait pas état de travaux non compris dans le prix, ce dont Monsieur Y s'empare pour considérer que le coût de la couverture en chaume, dont il ne conteste pas qu'elle était prévue dès l'origine était inclus dans le prix de 309000euros.
Cependant, si l'article L 231-2 du code civil qui prévoit l'indication dans le contrat du coût des travaux restant à la charge du maître de l'ouvrage constitue certes une disposition d'ordre public dont la méconnaissance est susceptible de justifier l'annulation de la convention, qui n'a jamais été demandée en l'espèce, cette règle, mesure de protection édictée dans l'intérêt du maître de l'ouvrage ne déroge cependant pas à l'obligation de bonne foi qui doit présider à la conclusion et l'exécution des conventions et ne saurait priver le constructeur de la possibilité de rapporter la preuve de l'accord du maître de l'ouvrage pour conserver des travaux à sa charge et en assurer l'exécution.
Sur ce point, est produite aux débats une attestation sur l'honneur certes non datée, mais dont la signature par Monsieur Y n'a jamais été discutée, qui indique que le lot couverture ne faisait pas partie du contrat de construction signé avec le constructeur. Par ailleurs, la notice descriptive qui contient un récapitulatif du coût de chaque corps d'état ne porte aucune somme pour le lot couverture CHAUME, qui ne figure pas non plus dans la désignation des ouvrages.
Comme le font justement remarquer les appelants, il résulte des factures et courriers émanant de l'artisan qui a réalisé la couverture, qu'il a établi le 26 septembre 2004 une facture au nom de Monsieur Y pour un montant de 35733,47euros TTC, somme que ce dernier lui a réglée directement au moyen de deux versements sans la moindre remarque ou réserve sur son obligation à paiement. De plus, ces documents établissent que la couverture a fait l'objet d'une réception directe entre eux, aucune pièce ne démontrant que Monsieur Z y ait pris part. L'ensemble de ces éléments suffit à établir que Monsieur Y s'était réservé l'exécution des travaux de couverture en chaume, prestation dont il a traité le coût et l'exécution avec l'entrepreneur de son choix, en dehors de toute intervention de Monsieur Z, de sorte qu'il ne peut prétendre qu'elle était comprise dans le prix de 309000euros, montant forfaitaire des travaux à la charge du constructeur. En conséquence le jugement qui a inclus le coût de la couverture dans le montant réglé par Monsieur Y doit être réformé, cette somme devant s'ajouter au prix convenu de 309000euros.
Sur la rupture des relations contractuelles
Par application de l'article 1184 du code civil, la condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l'une des parties ne satisfait pas à son engagement. La résolution doit alors être demandée en justice.
Par ailleurs, il est également admis dans ce type de contrat, qu'en présence d'un grave manquement d'une partie, son cocontractant mette fin de façon unilatérale au contrat à ses risques et périls sans intervention judiciaire.
En l'espèce, il est établi que Monsieur Z régulièrement payé de ses appels de fond antérieurs, a adressé à Monsieur Y le 4 août 2004 un nouvel appel de fonds d'un montant de 61800euros correspondant au stade de la mise hors d'eau de la construction ; qu'en l'absence de paiement par le maître de l'ouvrage averti de divers désordres, comme le montre la mention portée par le couvreur sur la facture du 21 juillet 2004, le constructeur lui a signifié par courrier du 13 octobre 2004, la suspension des travaux jusqu'au paiement, se prévalant de l'exception d'inexécution. Or, si le maître de l'ouvrage est tenu d'effectuer les paiements selon l'échéancier
prévu par l'article R231-7 du code de la construction et de l'habitation, repris dans le contrat liant les parties, encore faut-il que le paiement demandé corresponde au stade d'avancement de travaux, conformes aux dispositions contractuelles et aux règles de l'art et exempts de vices majeurs, le premier juge ayant justement rappelé l'obligation de résultat souscrite sur ce point par le constructeur à l'égard du maître de l'ouvrage.
Or, il est démontré par les mentions sur la facture de Monsieur ..., couvreur, du 21 juillet 2004 et par son courrier de septembre, que les travaux de mise hors d'eau de l'immeuble ont été achevés la première semaine de septembre 2004 et qu'à la date de l'appel de fonds en août 2004, il était impossible d'étancher les devants de lucarnes qui devaient subir des modifications en accord avec le menuisier, indications que les appelants ne contestent pas.
Il est surtout établi par les deux expertises diligentées à la demande de Monsieur Y, qu'à la date à laquelle le constructeur a demandé paiement et suspendu les travaux, ceux-ci présentaient des désordres importants pouvant pour certains compromettre la pérennité de l'ouvrage dans le temps et affectant entre autre, les seuils des portes fenêtres, l'imperméabilisation des parties enterrées (pourtant prévue dans la notice descriptive), l'étanchéité, l'empoutrellement décoratif en chêne se déformant, la pose de poutres de dimension inférieure à celle prévue dans le contrat, l'encastrement inepte selon l'expert des appuis et rejets d'eau des fenêtres, la hauteur d'allège de certaines fenêtres, outre un défaut de respect de la norme thermique RT 2000 applicable à cette construction ; désordres, malfaçons et non conformités dont l'expert a chiffré la reprise à la somme totale de 73154,07euros y compris les frais de maîtrise d'oeuvre, soit 63% du montant de la construction déjà réglée par le maître de l'ouvrage. Il résulte de l'ensemble de ces constatations que Monsieur Z ne justifiait pas d'un manquement suffisamment grave de son cocontractant pour suspendre les travaux, tandis que Monsieur Y était au contraire fondé à contester le paiement de l'appel de fonds, compte tenu du stade d'avancement et des désordres présentés par l'immeuble qui ne pouvaient être traités dans le cadre de simples finitions de la construction avant réception, mais devaient être repris avant d'en poursuivre l'achèvement, ce que Monsieur Z n'a jamais proposé de faire, ayant seulement installé une fenêtre en pignon.
Dès lors, comme le demandent les appelants, le contrat doit être résolu par application de l'article 1184 du code civil et non résilié, la cour observant que le contrat en cause est un contrat instantané et non un contrat à exécution successive. Par contre, cette résolution, au regard des graves manquements du constructeur à ses obligations doit être prononcée à ses torts exclusifs. Le jugement sera réformé en ce sens.
Sur l'apurement des comptes et les demandes indemnitaires de Monsieur Y
La résolution du contrat pour exécution imparfaite par une des parties de ses obligations entraîne son anéantissement rétroactif, ce qui implique la remise en état des parties dans leur situation antérieure, comme si le contrat n'avait pas existé.
Cet anéantissement s'étendant à l'ensemble des stipulations du contrat, hormis celles destinées à réparer les conséquences dommageables de la résolution, Monsieur Y ne peut solliciter l'application de la clause prévue à l'article 2/6 du contrat, relative à la pénalité de 1/3000 du prix convenu, applicable en cas de retard dans l'achèvement de la construction par Monsieur Z, ce qui implique donc un achèvement de l'immeuble par le constructeur. Le jugement qui a accordé à Monsieur Y une somme de 169229 euros à ce titre sera en conséquence réformé et ce dernier qui n'invoque aucun élément de préjudice autre généré par le retard dans la réalisation de la construction, sera débouté de sa demande majorée devant la cour à 184061euros.
Dans la mesure où Monsieur Y, comme le montre le procès-verbal de constat du 9 septembre 2009, a conservé la construction commencée par Monsieur Z, pour en achever la réalisation avec d'autres constructeurs, la situation doit être apurée entre les parties par équivalent. Le maître de l'ouvrage doit donc régler le prix des travaux réalisés à l'époque où le chantier a été interrompu par Monsieur Z en octobre 2004. A cette date, l'immeuble était mis hors d'eau depuis début septembre, de sorte que les consorts Z sont fondés à obtenir paiement de l'appel de fonds de 61800euros.
Par contre, il est établi par les expertises que les travaux étaient affectés de désordres et de non conformités importantes, dont la reprise, nécessaire avant le poursuite de l'ouvrage, est évaluée au total par l'expert à la somme de 73154,07euros, y compris le coût de la maîtrise d'oeuvre, somme qui doit être mise à la charge des appelants, les travaux devant être exempts de vices ou malfaçons.
De la même façon, doivent être supportés par le constructeur, le coût du dispositif de relevage, non prévu, mais indispensable à l'utilisation de l'immeuble, soit 2109,74euros, la moins value afférente à la fourniture et pose de sept portes postformées soit 1423,24euros TTC. Monsieur Y ne justifie par contre pas de la somme de 23154,56euros demandée titre de la fourniture des poutres d'une section de 40X40 au lieu de 30X30 posées. Cette non conformité doit être indemnisée par la moins-value fixée par l'expert à la somme de 4583,57euros TTC, ce d'autant qu'il résulte des factures d'achèvement produites par l'intimé que les poutres n'ont pas été changées. Au total sera supportée par les consorts Z une somme de 8116,55euros.
Monsieur Y est par ailleurs fondé à voir indemniser le préjudice qu'il subit du fait de la résolution du contrat imputable au constructeur. Sur ce point, il apparaît qu'au stade où le constructeur a interrompu l'ouvrage, son achèvement représentait une somme 194400euros ( 309000euros dont à déduire les paiements déjà effectués pour 114600euros). Monsieur Y produit aux débats un devis de la société ABC CRÉATION, concernant les travaux restant à réaliser pour les différents lots, hors électricité et chauffage, qui met en évidence un coût de 215252,20euros TTC. Le lot électricité incluant le chauffage est évalué par un devis de Monsieur ... à la somme de 29074,01euros TTC, soit un coût total de 244326,21euros TTC. Les appelants soutiennent que ces sommes sont surévaluées. Cependant, force est de constater que les prestations contenues dans ces devis correspondent aux travaux décrits de façon extrêmement succincte et peu précise comme l'a relevé l'expert dans la notice descriptive du constructeur, qu'ils ont été validés par ce dernier, et que les consorts Z ne produisent aux débats aucune évaluation des travaux restant à faire, étayant leur affirmation. Se trouve dès lors caractérisé un surcoût à la charge du maître de l'ouvrage, pour obtenir une construction équivalente d'un montant de 49926,21euros TTC directement imputable à la résolution aux torts de Monsieur Z et qui doit donc être supportée par les appelants.
Il est de plus établi par les procès-verbaux produits aux débats, que l'immeuble a subi des dégradations suite à des actes de vandalisme à deux reprises en 2006, puis en 2008, soit à une époque où le chantier était sous la garde du constructeur et où il devait en assurer la protection. Les constatations et auditions opérées par les services d'enquête mettent en évidence que les vitres des fenêtres et porte-fenêtres ont été cassées, certaines huisseries également dégradées, de même que de parties d'isolant et d'électricité comme le montre le constat du 9 septembre 2009. Ces dégradations justifient un surcoût supplémentaire de travaux d'un montant de 25107,63euros TTC (20993,50eurosHT) selon la situation de travaux de la société ABC CRÉATION du 23 février 2010, produite aux débats, outre 3887euros TTC de réparation d'électricité selon évaluation de Monsieur ... du 29 janvier 2010. Ce surcoût total de 28994,63euros doit donc être supporté par les appelants, le constructeur ayant manqué à son obligation de protéger l'ouvrage en construction.
En conséquence, les appelants justifient d'une créance de 61800euros, tandis que Monsieur Y justifie d'une créance à l'encontre des consorts Z de 160191,46euros, les intérêts au taux légal étant dus sur ces deux sommes à compter de la date respective de leur demande en justice. Le jugement sera réformé sur ce point. Il sera ordonné compensation entre ces deux créances à due concurrence.
S'il est équitable que Monsieur Y ne supporte pas les frais qu'il a dû engagés dans cette procédure, n'ayant eu d'autre choix que d'agir en justice, il n'y a cependant pas lieu de lui accorder une indemnité au delà de la somme accordée par le premier juge. Il sera débouté de sa demande d'indemnisation complémentaire.
Les appelants qui succombent supporteront les dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
III-Par ces motifs
La Cour,
Infirme partiellement le jugement,
Reprenant le dispositif sur le tout pour une meilleure compréhension,
Ordonne le rejet des débats de la pièces n° 12 intitulée " avenant de prolingation du délai de réalisation des travaux " du 3 mars 2004,
Prononce la résolution du contrat du 5 novembre 2003 aux torts exclusifs du constructeur,
Dit que le montant de la couverture en chaume est exclu du prix convenu de 309000euros mentionné au contrat,
Déboute Monsieur Y de sa demande au titre des pénalités de retard,
Condamne Monsieur Y à payer aux consorts Z la somme de 61800euros au titre de l'appel de fonds impayé,
Condamne les consorts Z à payer à Monsieur Y la somme de 160191,46euros, Dit que ces sommes produiront intérêts au taux légal à compter de leur demande en justice,
Ordonne la compensation des créances à due concurrence,
Condamne les consorts Z à payer à Monsieur Y la somme de 8000euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel,
Condamne les consorts Z aux dépens de première instance et d'appel, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Le Greffier, Le Président,