Jurisprudence : Cass. civ. 1, 16-02-2022, n° 21-23.087, F-B, Cassation

Cass. civ. 1, 16-02-2022, n° 21-23.087, F-B, Cassation

A33397NY

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Cass. civ. 1, 16-02-2022, n° 21-23.087, F-B, Cassation. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/78598216-cass-civ-1-16022022-n-2123087-fb-cassation
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Abstract

► Lorsque la demande d'audition formée par le mineur est refusée par le juge, les motifs du refus doivent impérativement être mentionnés dans la décision au fond, par application des dispositions de l'article 338-4 du Code de procédure civile, à défaut de quoi la Cour de cassation n'est pas en mesure d'exercer son contrôle.


CIV. 1

SG


COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 16 février 2022


Cassation


M. CHAUVIN, président


Arrêt n° 264 F-B

Pourvoi n° D 21-23.087


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 16 FÉVRIER 2022


Mme [B] [V], domiciliée [Adresse 1], a formé le pourvoi n° D 21-23.087 contre l'arrêt rendu le 7 juillet 2021 par la cour d'appel d'Orléans (chambre de la famille), dans le litige l'opposant à M. [Aa] [W], domicilié [… …], défendeur à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.


Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Azar, conseiller référendaire, les observations de la SCP Duhamel Rameix Gury Maitre, avocat de Mme [V], et l'avis de Mme Marilly, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 1er février 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Azar, conseiller référendaire rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, et Mme Berthomier, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.


Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Orléans, 7 juillet 2021), de l'union de M. [Ab] et Mme [V] est issue [F], née le … … ….

2. Après la séparation des parents, le juge aux affaires familiales a fixé la résidence de l'enfant au domicile de la mère et accordé au père un droit de visite et d'hébergement.

3. A la suite du déménagement de Mme [Ac], M. [Ab] a saisi le juge aux affaires familiales d'une demande de transfert de la résidence de l'enfant.


Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. Mme [V] fait grief à l'arrêt de fixer la résidence habituelle de l'enfant au domicile du père, alors « que les juges doivent motiver la décision par laquelle ils refusent l'audition d'un mineur dans la décision au fond ; qu'en l'espèce, [F] [V] a formellement demandé à être entendue par la cour d'appel d'Orléans dans le cadre de la procédure la concernant et opposant ses parents quant à la fixation de sa résidence ; que dès lors, en fixant la résidence de l'enfant au domicile du père sans avoir ni auditionné l'enfant ni s'être expliquée sur les raisons d'un refus d'audition, la cour d'appel a violé l'article 388-1 du code civil🏛 ensemble l'article 338-4 du code de procédure civile🏛 et l'article 12 de la Convention de New York relative aux droits de l'enfant. »


Réponse de la Cour

Vu les articles 388-1 du code civil🏛 et 338-4 du code de procédure civile :

5. Selon le premier de ces textes, dans toute procédure le concernant, le mineur capable de discernement peut être entendu par le juge et cette audition est de droit lorsqu'il en fait la demande.

6. Selon le second, lorsque la demande d'audition est refusée dans les conditions qu'il prévoit, le mineur et les parties en sont avisées par tout moyen et les motifs du refus sont mentionnés dans la décision au fond.

7. Il résulte des pièces de la procédure que l'enfant [F] avait formé une demande d'audition au cours de l'instance opposant ses deux parents sur la fixation de sa résidence, à laquelle il a été répondu défavorablement, par voie de courriel, sans que les motifs de ce refus aient été repris dans la décision au fond.

8. En statuant ainsi, la cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, a violé les textes susvisés.


PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 7 juillet 2021, entre les parties, par la cour d'appel d'Orléans ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Orléans autrement composée ;

Condamne M. [Ab] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile🏛, rejette la demande ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize février deux mille vingt-deux.

Le conseiller referendaire rapporteur le president


Le greffier de chambre MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Duhamel Rameix Gury Maitre, avocat aux Conseils, pour Mme [V]

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Mme [V] FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement du 07 janvier 2021 en ce qu'il a, à compter du 29 août 2021, fixé la résidence habituelle de l'enfant au domicile du père, supprimé à compter du 29 août 2021 la contribution du père aux frais d'entretien et d'éducation de l'enfant et fixé à compter du 29 août 2021 à 180 euros par mois la contribution de la mère aux frais d'entretien et d'éducation de l'enfant ;

1°) ALORS QUE les juges doivent motiver la décision par laquelle ils refusent l'audition d'un mineur dans la décision au fond ; qu'en l'espèce, [F] [V] a formellement demandé à être entendue par la Cour d'appel d'Orléans dans le cadre de la procédure la concernant et opposant ses parents quant à la fixation de sa résidence (production n° 5) ; que dès lors, en fixant la résidence de l'enfant au domicile du père sans avoir ni auditionné l'enfant ni s'être expliquée sur les raisons d'un refus d'audition, la cour d'appel a violé l'article 388-1 du Code civil🏛 ensemble l'article 338-4 du Code de procédure civile🏛 et l'article 12 de la Convention de New-York relative aux droits de l'enfant ;

2°) ALORS QU'en toute hypothèse, le juge doit apprécier concrètement le discernement du mineur et ne peut statuer par voie de considérations générales et abstraites en se bornant à se référer à son âge ; qu'en l'espèce, le greffe de la mise en état de la cour d'appel d'Orléans, chambre de la famille, a fait savoir au conseil d'[F] [V] que « la Présidente a décidé qu'il ne sera pas procédé à l'audition de l'enfant du fait de son âge ne lui permettant pas la capacité de discernement » (production n° 6) ; qu'en se bornant ainsi, pour rejeter la demande d'audition présentée par [F] [V] dans le cadre de la procédure la concernant et opposant ses parents quant à la fixation de sa résidence, à se référer, par voie de considération abstraite, à son seul âge, sans expliquer en quoi celle-ci n'était pas capable de discernement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 388-1 du Code civil🏛 ensemble l'article 338-4 du Code de procédure civile🏛 et l'article 12 de la Convention de New-York relative aux droits de l'enfant


SECOND MOYEN DE CASSATION :

Mme [V] FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement du 07 janvier 2021 en ce qu'il a, à compter du 29 août 2021, fixé la résidence habituelle de l'enfant au domicile du père, supprimé à compter du 29 août 2021 la contribution du père aux frais d'entretien et d'éducation de l'enfant et fixé à compter du 29 août 2021 à 180 euros par mois la contribution de la mère aux frais d'entretien et d'éducation de l'enfant ;

1°) ALORS QUE le juge règle les questions qui lui sont soumises dans le cadre de l'exercice de l'autorité parentale par les parents séparés en veillant spécialement à la sauvegarde des intérêts des enfants mineurs ; qu'en fixant la résidence de l'enfant au domicile paternel au seul motif que Mme [V], en déménageant dans une région éloignée de sa région d'origine aurait porté atteinte au principe du respect des droits de l'autre parent quand cette considération ne peut qu'être secondaire au regard de l'intérêt primordial de l'enfant, intérêt que les juges du fond se sont abstenus de rechercher concrètement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 373-2, 373-2-6 et 373-2-11 du Code civil🏛 et de l'article 3.1 de la Convention de New-York relative aux droits de l'enfant ;

2°) ALORS QUE le juge règle les questions qui lui sont soumises dans le cadre de l'exercice de l'autorité parentale par les parents séparés en veillant spécialement à la sauvegarde des intérêts des enfants mineurs ; que la cour d'appel a relevé que l'enfant [F] a toujours vécu au domicile de sa mère et que celle-ci produit une attestation témoignant de ses qualités éducatives (arrêt, p. 5) ; que dès lors en fixant la résidence d'[F] au domicile du père, au seul motif du déménagement de Mme [Ac], alors qu'il résulte de ses propres constatations que l'intérêt de l'enfant est de rester avec sa mère, dotée de qualités éducatives et avec qui elle a toujours vécu, la cour d'appel a violé les articles 373-2, 373-2-6 et 373-2-11 du Code civil🏛 et l'article 3.1 de la Convention de New-York relative aux droits de l'enfant ;

3°) ALORS QUE le juge règle les questions qui lui sont soumises dans le cadre de l'exercice de l'autorité parentale par les parents séparés en veillant spécialement à la sauvegarde des intérêts des enfants mineurs ; que Mme [V] faisait valoir que la qualité des conditions d'accueil proposées pour [F] chez son père n'était pas établie, puisque ce dernier ne justifiait que d'un CDD et avait pour domicile un gîte (conclusions d'appel de Mme [V], p. 8) ; qu'elle faisait également valoir que M. [Ab] ne s'est jamais préoccupé du suivi psychologique ni de la scolarité de sa fille, qui diagnostiquée HPI, demande pourtant une prise en charge particulière, sauf à refuser de contribuer aux sorties scolaires puisqu'il part du principe que celles-ci étant gratuites dans une école publique, il ne doit pas assumer celles liées à l'école privée où [F] était inscrite (conclusions d'appel de Mme [V], p. 8) ; que dès lors, en fixant la résidence d'[F] au domicile du père sans aucunement examiner, comme cela lui était pourtant demandé, les conditions d'accueil matérielles d'[F] chez son père, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 373-2, 373-2-6 et 373-2-11 du Code civil🏛 et de l'article 3.1 de la Convention de New-York relative aux droits de l'enfant ;

4°) ALORS QUE, subsidiairement, que le fait de déménager dans une région éloignée de sa région d'origine ne constitue pas une atteinte au principe du respect des droits de l'autre parent ; que Mme [V] démontrait avoir dû déménager en octobre 2020 afin de pouvoir exercer un emploi, puisque la perception ses allocations prenait fin à cette date et qu'elle ne pouvait refuser une telle opportunité professionnelle au regard du contexte économique lié à la crise sanitaire (conclusions d'appel de Mme [V], p. 8) ; que la cour d'appel a elle-même relevé que Mme [V] avait signé un contrat de travail à durée indéterminée dans le Loir-et-Cher le 5 octobre 2020 après avoir été inscrite sur la liste des demandeurs d'emplois depuis 2017 (arrêt, p. 5) ; que dès lors, en retenant, pour fixer la résidence de l'enfant au domicile du père, que Mme [Ac] aurait porté atteinte au principe du respect des droits de l'autre parent en déménageant pour trouver un emploi, au motif inopérant qu'elle ne justifiait pas de recherches d'emploi infructueuses dans sa région d'origine, la cour d'appel a violé les articles 373-2, 373-2-6 et 373-2-11 du Code civil🏛.

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