Jurisprudence : CE 3/8 ch.-r., 14-02-2022, n° 431760, mentionné aux tables du recueil Lebon

CE 3/8 ch.-r., 14-02-2022, n° 431760, mentionné aux tables du recueil Lebon

A25697NH

Référence

CE 3/8 ch.-r., 14-02-2022, n° 431760, mentionné aux tables du recueil Lebon. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/78545290-ce-38-chr-14022022-n-431760-mentionne-aux-tables-du-recueil-lebon
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Abstract

36-04-01 Le retrait de l’acte portant nomination de l’agent désigné pour remplacer un agent illégalement évincé et réintégré dans l’emploi unique qu’il occupait, prononcé pour l’exécution d’un jugement d’annulation, ne constitue pas une mesure de licenciement et peut intervenir sans que soit recherché au préalable le reclassement de l’intéressé.



CONSEIL D'ETAT

Statuant au contentieux

N° 431760

Séance du 21 janvier 2022

Lecture du 14 février 2022

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d'Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 3ème et 8ème chambres réunies)


Vu la procédure suivante :

M. B D a demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler, d'une part, l'arrêté n° ARR1600525 du 8 mars 2016 par lequel le président de la collectivité territoriale de Corse a retiré son arrêté de nomination en qualité de directeur de l'agence de tourisme de la Corse et a mis fin à ses fonctions à compter du 14 mars 2016 ainsi que le rejet implicite de son recours gracieux contre cette décision, et d'autre part, l'arrêté n° ARR1600526 du 8 mars 2016 par lequel cette même autorité a réintégré M. A C dans ses fonctions de directeur de l'agence du tourisme de la Corse à compter du 14 mars 2016.

Par un jugement nos 1600571, 1600573 du 16 mars 2017, le tribunal administratif de Bastia⚖️ a annulé l'arrêté n° ARR1600525 du 8 mars 2016 et le rejet implicite du recours gracieux formé par M. D contre cette décision, a enjoint à la collectivité territoriale de Corse de réintégrer M. D dans un délai de deux mois suivant sa notification et rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Par un arrêt n° 17MA01858 du 23 avril 2019, la cour administrative d'appel de Marseille⚖️ a, sur appel de la collectivité territoriale de Corse, annulé les articles 2 et 3 de ce jugement et rejeté la demande de M. D tendant à l'annulation de l'arrêté n° ARR1600525 du 8 mars 2016 et du rejet implicite de son recours gracieux formé contre cette décision.

Par un pourvoi, enregistré le 18 juin 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. D demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de la collectivité de Corse ;

3°) de mettre à la charge la collectivité de Corse la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983🏛 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984🏛 ;

- le décret n° 88-145 du 15 février 1988 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Thomas Janicot, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Marie-Gabrielle Merloz, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP de Nervo, Poupet, avocat de M. D et à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la collectivité de Corse ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 3 février 2022, présentée par M. D ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que par un arrêté du 23 janvier 2014, le président du conseil exécutif de la collectivité territoriale de Corse a mis fin aux fonctions de directeur de l'agence du tourisme de la Corse, exercées par M. A C. Par un arrêté du 24 janvier 2014, cette autorité a nommé M. B D directeur de cet établissement à compter du 27 janvier suivant. Par un jugement du 14 janvier 2016, le tribunal administratif de Bastia a annulé l'arrêté du 23 janvier 2014 et a enjoint à la collectivité territoriale de Corse et à l'agence du tourisme de la Corse de procéder à la réintégration juridique de M. C. En exécution de ce jugement, le président du conseil exécutif de la collectivité a, par un arrêté n° ARR1600525 du 8 mars 2016, retiré son arrêté du 24 janvier 2014 portant nomination de M. D et a mis fin aux fonctions de ce dernier à compter du 14 mars 2016. Par un arrêté n° ARR1600526 du même jour, il a réintégré M. C dans ses fonctions de directeur de l'agence du tourisme de la Corse à compter du 14 mars 2016. M. D a demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler, d'une part, l'arrêté n° ARR1600525 du 8 mars 2016 par lequel le président de la collectivité territoriale de Corse a retiré son arrêté de nomination en qualité de directeur de l'agence de tourisme de la Corse et a mis fin à ses fonctions à compter du 14 mars 2016 ainsi que le rejet implicite de son recours gracieux contre cette décision, et d'autre part, l'arrêté n° ARR1600526 du 8 mars 2016 par lequel M. C a été réintégré dans ses fonctions de directeur de l'agence du tourisme de la Corse à compter du 14 mars 2016. Par un jugement du 16 mars 2017, le tribunal administratif de Bastia a annulé l'arrêté n° ARR1600525 du 8 mars 2016 et le rejet implicite du recours gracieux formé par M. D contre cette décision, a enjoint à la collectivité territoriale de Corse de réintégrer M. D dans un délai de deux mois suivant sa notification et rejeté le surplus des conclusions de sa demande. M. D se pourvoit contre l'arrêt du 23 avril 2019 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a, sur appel de la collectivité territoriale de Corse, annulé les articles 2 et 3 de ce jugement et rejeté la demande de M. D tendant à l'annulation de l'arrêté n° ARR1600525 du 8 mars 2016 et du rejet implicite de son recours gracieux formé contre cette décision.

2. Lorsque le juge administratif annule une décision ayant évincé un agent occupant un emploi unique, l'intéressé bénéficie, en exécution de cette annulation, d'un droit à réintégration dans l'emploi unique dont il a été écarté, au besoin après retrait de l'acte portant nomination de l'agent irrégulièrement désigné pour le remplacer. Seule une nouvelle décision légalement prise par l'autorité compétente mettant fin, sans effet rétroactif, aux fonctions de l'agent illégalement évincé est susceptible de faire obstacle à sa réintégration effective dans les fonctions relevant de cet emploi unique.

3. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que l'exécution du jugement du 14 janvier 2016 par lequel le tribunal administratif de Bastia avait annulé pour excès de pouvoir l'arrêté du 23 janvier 2014🏛🏛 mettant fin aux fonctions de M. C comme directeur de l'agence du tourisme de la Corse impliquait non seulement la réintégration juridique de M. C mais également sa réintégration effective dans l'emploi même qu'il occupait, cet emploi étant unique et M. C n'ayant pas fait l'objet d'une nouvelle mesure d'éviction légalement prise par la collectivité de Corse. Par suite, le moyen tiré de ce que la cour, laquelle a suffisamment motivé son arrêt, aurait méconnu l'autorité de la chose jugée attachée au jugement du 14 janvier 2016 en jugeant que l'exécution de ce jugement impliquait non seulement la réintégration juridique de M. C mais également sa réintégration effective dans l'emploi même qu'il occupait doit être écarté.

4. En deuxième lieu, il résulte de ce qui a été dit au point 2 qu'en jugeant que, pour respecter l'autorité de la chose jugée par le jugement du tribunal administratif de Bastia du 14 janvier 2016, annulant l'arrêté du 23 janvier 2014 portant éviction de M. C de ses fonctions, le président du conseil exécutif de la collectivité était tenu de retirer l'arrêté du 24 janvier 2014 par lequel il avait précédemment nommé M. D à ces mêmes fonctions à compter du 27 janvier 2014, la cour n'a pas commis d'erreur de droit.

5. En troisième lieu, le retrait de l'acte portant nomination de l'agent désigné pour remplacer un agent illégalement évincé et réintégré dans l'emploi unique qu'il occupait, prononcé pour l'exécution d'un jugement d'annulation, ne constitue pas une mesure de licenciement et peut intervenir sans que soit recherché au préalable le reclassement de l'intéressé. Par suite, le moyen tiré de ce que la cour aurait commis une erreur de droit et inexactement qualifié les faits qui lui étaient soumis en jugeant que le retrait de l'arrêté portant nomination de M. D comme directeur de l'agence du tourisme de la Corse ne pouvait être regardé comme une mesure de licenciement et pouvait être prononcé sans préavis et sans que soit recherché au préalable son reclassement doit être écarté.

6. En dernier lieu, le moyen tiré de ce que la cour aurait commis une erreur de droit en jugeant que l'autorité de nomination devait retirer, et non abroger, l'arrêté du 24 janvier 2014 nommant M. D au poste de directeur de l'agence de tourisme de la Corse, en conséquence de l'annulation de la décision d'éviction de M. C, est nouveau en cassation et, par suite, sans incidence sur le bien-fondé de l'arrêt attaqué.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. D n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque, qui est suffisamment motivé.

8. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la collectivité de Corse au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛. Ces mêmes dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de la collectivité de Corse qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de M. D est rejeté.

Article 2 : Les conclusions présentées par la collectivité de Corse au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛 sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. B D, à la collectivité de Corse et à l'agence du tourisme de la Corse.431760

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