Jurisprudence : CE 9/10 ch.-r., 08-02-2022, n° 458277

CE 9/10 ch.-r., 08-02-2022, n° 458277

A68107M8

Référence

CE 9/10 ch.-r., 08-02-2022, n° 458277. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/78310279-ce-910-chr-08022022-n-458277
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Abstract

► La question de la conformité à la Constitution des deux premiers alinéas de l'article 1732 du CGI est renvoyée au Conseil constitutionnel.



CONSEIL D'ETAT

Statuant au contentieux

N° 458277

Séance du 28 janvier 2022

Lecture du 08 février 2022

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d'Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 9ème et 10ème chambres réunies)


Vu la procédure suivante :

M. F, à l'appui de la demande qu'il a formée devant le tribunal administratif de Grenoble tendant notamment à la décharge de l'amende prévue au a) de l'article 1732 du code général des impôts à laquelle il a été assujetti au titre des années 2011 à 2014, a présenté, en application de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, un mémoire distinct, enregistré le 28 avril 2021 au greffe de ce tribunal, par lequel il a soulevé une question prioritaire de constitutionnalité.

Par une ordonnance n° 1908463 du 3 novembre 2021, enregistrée le 9 novembre 2021 au greffe du secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Grenoble, a décidé, par application des dispositions de l'article 23-2 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, de transmettre au Conseil d'Etat la question ainsi soulevée, portant sur la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution de l'article 1732 du code général des impôts.

Dans la question prioritaire de constitutionnalité transmise, M. F soutient que l'article 1732 du code général des impôts, applicable au litige, méconnait le principe de nécessité et de proportionnalité des délits et des peines garantis par l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.

Par un mémoire, enregistré le 17 septembre 2021, le ministre de l'économie des finances et de la relance soutient que les conditions posées par l'article 23-4 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 ne sont pas remplies et, en particulier, que la question n'est ni nouvelle, ni sérieuse.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution, notamment son article 61-1 ;

- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Catherine Fischer-Hirtz, conseillère d'Etat,

- les conclusions de Mme Céline Guibé, rapporteure publique ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 28 janvier 2022, présentée par M. F.

Considérant ce qui suit :

1. Il résulte des dispositions de l'article 23-4 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel que, lorsqu'une juridiction relevant du Conseil d'Etat a transmis à ce dernier, en application de l'article 23-2 de cette même ordonnance, la question de la conformité à la Constitution d'une disposition législative, le Conseil constitutionnel est saisi de cette question de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux.

2. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 74 du livre des procédures fiscales : " Les bases d'imposition sont évaluées d'office lorsque le contrôle fiscal ne peut avoir lieu du fait du contribuable ou de tiers ". Aux termes de l'article 1732 du code général des impôts : " La mise en œuvre de la procédure d'évaluation d'office prévue à l'article L. 74 du livre des procédures fiscales entraîne : / a. L'application d'une majoration de 100 % aux droits rappelés ou aux créances de nature fiscale qui doivent être restituées à l'Etat () ". Enfin, aux termes du 1 de l'article 1746 de ce même code : " 1. Le fait de mettre les agents habilités à constater les infractions à la législation fiscale dans l'impossibilité d'accomplir leurs fonctions est puni d'une amende de 25 000 euros, prononcée par le tribunal correctionnel. En cas de récidive de cette infraction, le tribunal peut, outre cette amende, prononcer une peine de six mois d'emprisonnement ".

3. Les dispositions précitées de l'article 1732 du code général des impôts sont applicables au litige dont est saisi le tribunal administratif de Grenoble. Elles n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution par le Conseil constitutionnel. Le moyen tiré de ce que ces dispositions portent atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution et notamment au principe de nécessité et de proportionnalité des délits et des peines en tant qu'elles permettent, lorsqu'un contribuable a fait opposition au contrôle des agents de l'administration fiscale, d'assortir les droits mis à sa charge d'une amende fiscale de 100 % alors que ce contribuable peut également être condamné par le tribunal correctionnel au paiement d'une amende de 25.000 euros, et, en cas de récidive, à une peine de six mois d'emprisonnement, sur le fondement des dispositions précitées du 1 de l'article 1746 du code général des impôts, soulève une question présentant un caractère sérieux. Par suite, il y a lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La question de la conformité à la Constitution des deux premiers alinéas de l'article 1732 du code général des impôts est renvoyée au Conseil constitutionnel.

Article 2 : La présente décision sera notifiée M. F et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel, au Premier ministre et au tribunal administratif de Grenoble.

Délibéré à l'issue de la séance du 28 janvier 2022 où siégeaient : M. Christophe Chantepy, président de la section du contentieux, présidant ; M. H G, M. Frédéric Aladjidi, présidents de chambre; Mme J B, M. K C, Mme A L, M. D E, M. Alain Seban, conseillers d'Etat et Mme Catherine Fischer-Hirtz, conseillère d'Etat-rapporteure.

Rendu le 8 février 2022.

Le président:

Signé : M. Christophe Chantepy

La rapporteure

Signé : Mme Catherine Fischer-Hirtz

La secrétaire:

Signé : Mme I M458277M8ZIENBS

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