Jurisprudence : Cass. soc., 12-01-2022, n° 20-16.545, F-D, Cassation

Cass. soc., 12-01-2022, n° 20-16.545, F-D, Cassation

A51147IA

Référence

Cass. soc., 12-01-2022, n° 20-16.545, F-D, Cassation. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/77316930-cass-soc-12012022-n-2016545-fd-cassation
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Abstract

► Lorsque survient un litige en matière de harcèlement moral, le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.


SOC.

CDS


COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 12 janvier 2022


Cassation partielle


M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président


Arrêt n° 69 F-D

Pourvoi n° X 20-16.545


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 12 JANVIER 2022

M. [H] [Aa], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° X 20-16.545
contre l'arrêt rendu le 29 janvier 2020 par la cour d'appel de Lyon (chambre sociale A), dans le litige l'opposant à la société Hôtel Saint-Paul, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.


Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Techer, conseiller référendaire, les observations de la SCP Delamarre et Jehannin, avocat de M. [Aa], de la SCP Gatineau, Ab et Rebeyrol, avocat de la société Hôtel Saint-Paul, après débats en l'audience publique du 17 novembre 2021 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Techer, conseiller référendaire rapporteur, Mme Cavrois, conseiller, et Mme Lavigne, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.


Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Lyon, 29 janvier 2020), M. [Aa] a été engagé le 20 avril 2012 par la société Hôtel Saint-Paul en qualité de veilleur de nuit, suivant contrat soumis à la convention collective nationale des hôtels, cafés restaurants du 30 avril 1997. Dans le dernier état de la relation contractuelle, il occupait un poste de réceptionniste.

2. Le salarié a saisi la juridiction prud'homale le 18 septembre 2013 de diverses demandes au titre de l'exécution de son contrat de travail.

3. Le 24 avril 2014, il a été licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement.


Examen des moyens

Sur les premier et deuxième moyens, ci-après annexés


4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile🏛, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le troisième moyen, pris en sa deuxième branche

Enoncé du moyen

5. Le salarié fait grief à l'arrêt de dire que son licenciement n'est pas nul et qu'il est fondé sur une cause réelle et sérieuse, de le débouter en conséquence de ses demandes de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnité de préavis, outre congés payés afférents, et de dommages-intérêts pour harcèlement moral, alors « qu'en tout état de cause, pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L. 1152-1 du code du travail🏛 ; que, dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a exactement constaté que les éléments invoqués par le salarié laissaient présager l'existence d'un harcèlement moral ; que pour dire que le fait d'avoir mis en œuvre une procédure de licenciement à l'encontre de M. [Aa] en raison du mouvement de grève qu'il a initié n'établirait pas que le salarié avait été victime de harcèlement moral, la cour d'appel a retenu que l'employeur a renoncé à la procédure de licenciement, ce qui témoigne de la reconnaissance du caractère non fondé de la procédure qu'il a mise en œuvre ; que cette circonstance, même à l'admettre, ne démontrait aucunement que la mise en œuvre de la procédure était justifiée par un élément objectif étranger à tout harcèlement, de sorte qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article L. 1154-1 du code du travail🏛. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail🏛, le second dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016🏛 :

6. Aux termes du premier de ces textes, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

7. Il résulte du second que, lorsque survient un litige, le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

8. Pour débouter le salarié de ses demandes de nullité du licenciement et de dommages-intérêts pour harcèlement moral, l'arrêt relève que l'intéressé a reçu un avertissement pour avoir réceptionné et signé un courrier recommandé avec accusé de réception adressé à la personne du gérant de l'hôtel alors qu'il ne disposait pas de l'accréditation nécessaire pour agir de la sorte et que l'employeur a engagé une procédure de licenciement à son encontre en raison du mouvement de grève qu'il a initié. Après avoir estimé que ces deux éléments pris dans leur ensemble étaient susceptibles de laisser présumer un harcèlement moral, il retient que l'employeur a renoncé à la procédure de licenciement, ce qui témoigne de la reconnaissance du caractère non fondé de la procédure mise en œuvre, et que l'avertissement repose sur des faits non contestés par le salarié, que son motif apparaît légitime dés lors que la réception des lettres recommandées adressées à l'employeur n'entrait manifestement pas dans les attributions du salarié, et qu'il ne constitue nullement une brimade, mais l'expression des prérogatives hiérarchiques de l'employeur. Il déduit de l'ensemble de ces éléments que le salarié n'a pas été victime de harcèlement de la part de son employeur.

9. En statuant ainsi, par des motifs impropres à établir, s'agissant de la procédure de licenciement engagée contre le salarié, que l'employeur la justifiait par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement, la cour d'appel a violé les textes susvisés.


PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que le licenciement de M. [Aa] n'est pas nul et qu'il est fondé sur une cause réelle et sérieuse, et en ce qu'il déboute ce dernier de ses demandes de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnité de préavis, outre congés payés afférents, et de dommages-intérêts pour harcèlement moral, l'arrêt rendu le 29 janvier 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Lyon autrement composée ;

Condamne la société Hôtel Saint-Paul aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile🏛, rejette la demande formée par la société Hôtel Saint-Paul et la condamne à payer à M. [Aa] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze janvier deux mille vingt-deux.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Delamarre et Jehannin, avocat aux Conseils, pour M. [Aa]

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, d'avoir débouté M. [Aa] de sa demande en paiement des heures supplémentaires de nuit ;

AUX MOTIFS QUE : « sur les heures supplémentaires : qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production de tous éléments suffisamment précis pour permettre à l'employeur de répondre en apportant, le cas échéant, la preuve contraire M. [Aa] verse aux débats des plannings de juin 2012 à décembre 2013 inclus ; qu'il soutient qu'il cumulait les fonctions de réceptionniste, le jour, et de veilleur de nuit, ces dernières fonctions n'étant pas rémunérées ; qu'il indique que ses heures de présence, la nuit, constituent du temps de travail effectif sans que ce temps puisse être qualifié d'astreinte, faute d'astreinte contractuellement prévue ; que M. [Aa] demande le paiement : - pour la période d'avril à août 2012, de 54, 4 nuits, soit la somme totale de 5 076 euros outre les congés payés afférents, - pour la période de septembre 2012, de 88 heures de nuit, - pour le dernier trimestre 2012, de 132, 25 heures de nuit, - pour l'année 2013, de 396, 75 heures de nuit non rémunérées ; que la Sarl Saint Paul fait valoir que M. [Aa] déclarait lui-même les heures complémentaires qu'il effectuait chaque mois, à l'employeur, lesquelles étaient systématiquement récupérées ou payées ; qu'elle conteste toute intervention de M. [Aa] pendant la nuit, soulignant que les portes de l'établissement ferment tous les jours à partir de 23 heures ou minuit selon le taux de remplissage ; que la Sarl Saint Paul indique enfin que comme la quasi-totalité des établissements de ce secteur d'activité, elle faisait une application directe des dispositions conventionnelles permettant de moduler la durée du travail sur une durée supérieure à la semaine et que M. [Aa] qui était autorisé à dormir dans l'établissement lorsqu'il était de service le soir, n'effectuait pas pour autant un travail de nuit ; que M. [Aa] s'appuie d'une part sur l'intitulé initial de son poste, "veilleur de nuit", et d'autre part, sur le compte-rendu de l'entretien préalable à son licenciement du 13 janvier 2014 qui comporte l'aveu de M. [Ac], gérant de l'hôtel, que la revendication de M. [Aa] portant sur 127 nuits est légitime et qui propose de payer les 127 nuits en question à hauteur de 30 euros par nuit ; que ces éléments sont suffisants pour étayer la demande de M. [Aa] ; que chacune des parties verse, pour la période de juin 2012 à décembre 2013 inclus, des plannings qui se présentent, pour le salarié, sous forme de tableaux mensuels informatiques précisant les tranches horaires et le prénom des salariés présents par tranche horaire et par jour de la semaine, et pour l'employeur, sous forme de tableaux individuels, en l'espèce, ceux de M. [Aa], remplis manuellement, précisant les heures de départ et d'arrivée pour chaque jour, ainsi que le différentiel en nombre d'heures par rapport à l'horaire contractuel ; qu'ainsi par exemple, le planning du mois de juillet 2012 mentionne 82,25 heures supplémentaires, celui d'avril 2013 mentionne 12, 75 heures supplémentaires; le planning du mois de décembre 2012 comporte 1,5 heures supplémentaires ; qu'il apparaît par ailleurs que les bulletins de paie correspondent au nombre d'heure supplémentaires mentionnées sur les plannings produits par l'employeur, de sorte que ce dernier justifie qu'il a effectivement payé les heures supplémentaires effectuées en journée telles qu'elles ont été déclarées par M. [Aa] qui n'est par conséquent pas fondé en sa demande au titre des heures supplémentaires de jour ; que le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a débouté M. [Aa] au titre de sa demande de paiement d'heures supplémentaires de jour ; qu'en ce qui concerne les heures de nuit, la Sarl Saint Paul les conteste mais se trouve, ce faisant, en contradiction, d'une part, avec les déclarations de M. [Ac] dans le cadre de l'entretien préalable au licenciement qui admet être redevable de 127 nuits, et d'autre part, avec certaines mentions portées sur les plannings qu'elle produit ; qu'en effet il résulte de ses plannings que sont mentionnées, notamment, une nuit en mai 2013, 6 nuits en juin 2013, ce qui correspond au planning produit par le salarié, et 5 nuits en juillet 2013 conformément au planning du salarié ; que la cour doit donc s'interroger sur la question de savoir si les nuits ainsi mentionnées correspondent à un travail effectif ou à une période d'astreinte, soit une période pendant laquelle le salarié, sans être à la disposition permanente et immédiate de l'employeur, doit être en mesure d'intervenir pour accomplir un travail au service de l'entreprise ; que la société Saint Paul invoque un usage consistant à autoriser M. [Aa] à dormir sur son lieu de travail, par commodité compte tenu de l'éloignement du domicile de ce salarié, mais ne justifie par aucune pièce, de cette tolérance ou avantage accordé au salarié, et cette explication est également en contradiction avec les propos de M. [Ac] lors de l'entretien préalable au licenciement ; que M. [Aa] verse également au débat une annonce passée par l'hôtel Saint Paul en novembre 2013 dans les termes suivants : "nous recherchons une étudiante pour une présence la nuit dans un hôtel du centre de [Localité 3]......Sortir les poubelles et être là en cas d'alarme incendie. Rien à faire et bien sûr un lit à disposition pour dormir" et cela pour 50 euros ; que M. [Aa] établit en conséquence que l'hôtel Saint Paul fonctionnait bien avec un salarié d'astreinte la nuit, et que sa présence sur son lieu de travail, certaines nuits, ne relevait nullement d'une convenance personnelle mais bien d'une demande de son employeur ; que cependant, il ne résulte pas du débat que la société Saint Paul ait exigé un travail pendant les heures de nuit, et M. [Aa] ne justifie d'aucune intervention particulière au cours des nuits qu'il a effectivement passées sur son lieu de travail ; que dès lors, M. [Aa] n'est pas fondé à exiger le paiement des heures de nuit comme un travail effectif, mais doit en revanche être indemnisé sur la base d'un temps d'astreinte, qui bien que non prévu contractuellement, correspond à la réalité de la relation contractuelle ; que l'indemnité proposée par la Sarl Saint-Paul à hauteur de 16, 47 euros pour chaque nuit concernée n'est pas satisfaisante au regard de la proposition qui avait été faite au salarié dans le cadre de l'entretien préalable au licenciement, soit 30 euros par nuit et de celle mentionnée dans l'annonce sus-visée ; que dans ces conditions, M. [Aa] qui comptabilise environ 114 nuits de présence en 2012 et 85 nuits en 2013, soit un total de 199 nuits, sera indemnisé de ces astreintes, sur la base de la proposition qui lui avait été faite d'une indemnité de 30 euros par nuit, ce qui représente une somme totale de 5 970 euros qui sera arrondie à 6 000 euros ; que le jugement déféré sera donc infirmé en ce sens ; que compte tenu de l'issue du litige, la Sarl Saint Paul deva remettre à M. [Aa] des bulletins de salaires conformes au présent arrêt, de sorte que plus aucun préjudice ne subsistera du fait du défaut de mention des temps d'astreinte sur les bulletins de salaires ; que la demande de dommages-intérêts au titre de l'absence de mention des heures supplémentaires sur les bulletins de salaires n'est en conséquence pas justifiée et sera rejetée. » ;

1/ ALORS QUE les périodes d'astreinte sont les périodes pendant lesquelles le salarié, tenu de rester à son domicile ou à proximité, doit se tenir prêt à répondre à un éventuel appel de son employeur pour effectuer un travail au service de l'entreprise ; que le salarié, tenu d'intervenir dans l'entreprise quand les circonstances l'exigent, et qui ne peut, de ce fait, vaquer librement à ses occupations personnelles, n'est pas d'astreinte mais en période de travail effectif ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a exactement constaté que M. [Aa] avait été contraint par son employeur à demeurer sur son lieu de travail durant 127 nuits, cette sujétion étant imposée par l'employeur (arrêt, p. 6) ; que pour qualifier les heures ainsi passées d'astreinte et non d'heures de travail effectif, elle s'est bornée à considérer qu' « il ne résulte pas du débat que la société Saint Paul ait exigé un travail pendant les heures de nuit, et M. [Aa] ne justifie d'aucune intervention particulière au cours des nuits qu'il a effectivement passées sur son lieu de travail » (arrêt, p. 7, alinéa 3) ; qu'en statuant ainsi, sans aucunement rechercher si, indépendamment des tâches effectivement confiées à M. [Aa], celui-ci était en mesure de vaquer à ses occupations personnelles, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3121-1 du code du travail🏛 ;

2/ ALORS QUE M. [Aa] faisait valoir dans ses conclusions qu'en vertu des dispositions de la convention collective applicable, les heures de nuit que lui imposait son employeur devaient être qualifiées d'heures de travail effectif ; qu'il soulignait que « l'annexe d'application n° 2 (Accord du 2 mars 1998) de la convention collective des hôtels, cafés et restaurants précise que trois ans après la conclusion de l'accord une heure de présence du personnel veilleur de nuit correspond à une heure de travail effectif » ; que M. [Aa] indiquait que cette disposition lui était applicable dès lors qu' « il est manifeste en l'espèce que M. [Aa] cumulait les fonctions de réceptionniste la journée et de veilleur la nuit (pour lesquelles il n'était pas rémunéré) » (conclusions, p. 10) ; qu'en s'abstenant totalement de répondre à ce chef déterminant de ses conclusions, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile🏛.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. [H] [Aa] de ses demandes au titre du repos compensateur pour travail de nuit, des heures de repos journalières et de non-respect des amplitudes de travail ;

AUX MOTIFS QUE : « sur le non-respect des amplitudes de travail et sur le repos compensateur au titre du travail de nuit : que compte tenu de ce qui vient d'être dit, M. [Aa] qui n'est pas fondé à invoquer un travail effectif de nuit, sera débouté de sa demande en paiement de la somme de 1 967, 27 euros au titre du non-respect des amplitudes de travail, de la somme de 270 euros au titre du repos compensateur pour travail de nuit, et de la somme de 1 967 euros au titre des heures de repos journalières » ;

ALORS QUE pour débouter M. [Aa] de ses demandes au titre du repos compensateur pour travail de nuit, des heures de repos journalières et de non-respect des amplitudes de travail, la cour d'appel s'est bornée à renvoyer à « ce qui vient d'être dit » au titre des heures supplémentaires ; que la censure à intervenir sur le premier moyen, s'agissant des heures supplémentaires, emportera donc la censure des chefs de l'arrêts relatifs aux demandes au titre du repos compensateur pour travail de nuit, des heures de repos journalières et de non-respect des amplitudes de travail, en application de l'article 624 du code de procédure civile🏛.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué, infirmatif de ces chefs, d'avoir dit que le licenciement de M. [H] [Aa] notifié par lettre recommandée avec accusé de réception du 24 avril 2014 n'est pas nul et qu'il est fondé sur une cause réelle et sérieuse, de l'avoir débouté en conséquence de ses demandes de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et au titre de l'indemnité de préavis et des congés payés afférents, et d'avoir débouté M. [H] [Aa] de sa demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral ;

AUX MOTIFS QUE : « sur le licenciement : que l'article L. 1226-2 du code du travail🏛 dispose que : "Lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. Cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise. L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail." ; que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse lorsque le comportement fautif de l'employeur est à l'origine de l'inaptitude du salarié ; que si le médecin du travail a constaté l'inaptitude physique d'origine non professionnelle d'un salarié, l'employeur est tenu à une obligation de reclassement de ce salarié; à ce titre, il doit faire des propositions loyales et sérieuses, et doit assurer l'adaptation du salarié à son emploi en lui assurant une formation complémentaire; l'obligation de reclassement s'impose à l'employeur; à défaut, le licenciement est privé de cause réelle et sérieuse ; que M. [Aa] soutient que son licenciement est irrégulier d'une part parce que l'inaptitude résulte du comportement de l'employeur, et d'autre part, parce que l'employeur n'a pas fait une recherche sérieuse de reclassement, l'inaptitude à tout poste dans l'entreprise ne le libérant pas d'une recherche de reclassement sérieuse, conformément aux dispositions de l'article L. 1226-2 du code du travail🏛 ; I - sur l'origine de l'inaptitude : que M. [Aa] invoque une situation de harcèlement à l'origine de son inaptitude physique, caractérisée par une succession de faits comme : - l'avertissement qui lui a été notifié le 28 novembre 2013 pour avoir réceptionné un courrier recommandé, - la mise en oeuvre d'une procédure de licenciement à son encontre à compter du 18 décembre 2013 pour grève illicite ; qu'aux termes des dispositions de l'article L. 1152-1 du code du travail🏛, le harcèlement moral se caractérise par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits et à la dignité du salarié, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; qu'il est constant que M. [Aa] a reçu un avertissement pour avoir réceptionné et signé un courrier recommandé avec accusé de réception adressé à la personne du gérant de l'hôtel Saint Paul et qu'il lui a été rappelé qu'il ne disposait pas de l'accréditation nécessaire pour agir de la sorte ; qu'il est par ailleurs établi que la Sarl Hôtel Saint Paul a engagé une procédure de licenciement à son encontre en raison du mouvement de grève qu'il a initié ; que ces deux éléments pris dans leur ensemble sont susceptibles de laisser présumer un harcèlement moral ; mais que l'employeur a renoncé à la procédure de licenciement, ce qui témoigne de la reconnaissance du caractère non fondé de la procédure qu'il a mise en oeuvre ; que quant à l'avertissement du 28 novembre 2013, il repose sur des faits non contestés par le salarié et son motif apparaît légitime dès lors que la réception des lettres recommandées adressées à l'employeur n'entrait manifestement pas dans les attributions de M. [Aa] ; que contrairement à ce qui est soutenu par le salarié, cet avertissement ne constitue nullement une brimade, mais l'expression des prérogatives hiérarchiques de l'employeur ; qu'il ne résulte pas, en conséquence, du débat que M. [Aa] ait été victime de harcèlement de la part de son employeur ; que M. [Aa] sera donc débouté de sa demande tendant à voir prononcer la nullité de son licenciement sur ce fondement, ainsi que de sa demande de dommages-intérêts de ce chef et le jugement déféré sera infirmé en ce sens ; II - sur l'obligation de reclassement pour inaptitude : que M. [Aa] soutient à titre subsidiaire que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse faute pour la Sarl Hôtel Saint-Paul d'avoir effectué une recherche de reclassement ; mais qu'il résulte d'un courrier du 28 mars 2014 que M. [Ac], gérant de l'hôtel Saint Paul a interrogé le médecin du travail afin d'être renseigné sur le type de tâches susceptibles d'être exercées par M. [H] [Aa] et a proposé à cette occasion deux postes disponibles au sein de l'hôtel, soit un poste de chef de réception et le poste actuel de M. [H] ; que le docteur [L] a répondu par courrier du même jour que M. [H] [Aa] était inapte à son poste de réceptionniste/veilleur de nuit ainsi qu'à tout autre poste dans cette entreprise ; que dans ces conditions, il ne peut être reproché à la Sarl Hôtel Saint-Paul d'avoir manqué à son obligation de reclassement, et le licenciement de M. [Aa], en raison de son inaptitude et d'une impossibilité de reclassement est en conséquence fondé sur une cause réelle et sérieuse ; que le jugement déféré sera donc infirmé en ce qu'il a jugé le licenciement de M. [Aa] pour inaptitude non fondé, et en ce qu'il a condamné la société Hôtel Saint Paul à lui payer la somme de 10 000 euros de dommages-intérêts outre une indemnité de préavis et les congés payés afférents » ;

1/ ALORS QUE le fait de ne pas reconnaître au salarié la classification qui, aux termes des dispositions de la convention collective devrait être la sienne, constitue un élément de nature à faire présumer un harcèlement moral ; que le refus illégitime de l'employeur de s'acquitter de l'intégralité des heures d'astreinte est également un élément de nature à faire présumer un harcèlement moral ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a elle-même constaté que l'employeur avait fautivement refusé de reconnaître à M. [Aa] la qualification qui correspondait à son poste en vertu de la convention collective, à savoir celle de réceptionniste, niveau II, échelon 2 (arrêt, p. 5) ; que la cour d'appel a encore retenu que M. [Aa] était soumis à l'obligation de rester la nuit sur son lieu de travail, et que ces heures, qu'elle a qualifié d'astreinte, n'avaient pas été rémunérées (arrêt, p. 6, et 7) ; qu'en ne recherchant aucunement si ces éléments, pris dans leur ensemble, n'étaient pas de nature à laisser présager l'existence d'un harcèlement moral, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1152-2 et L. 1154-1 du code du travail🏛 ;

2/ ALORS ET EN TOUT ETAT DE CAUSE QUE pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L. 1152-1 du code du travail🏛 ; que, dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a exactement constaté que les éléments invoqués par le salarié laissaient présager l'existence d'un harcèlement moral ; que pour dire que le fait d'avoir mis en oeuvre une procédure de licenciement à l'encontre de M. [Aa] « en raison du mouvement de grève qu'il a initié » n'établirait pas que le salarié avait été victime de harcèlement moral, la cour d'appel a retenu que « l'employeur a renoncé à la procédure de licenciement, ce qui témoigne de la reconnaissance du caractère non fondé de la procédure qu'il a mise en oeuvre » (arrêt, p. 10, antépénultième et dernier alinéas) ; que cette circonstance, même à l'admettre, ne démontrait aucunement que la mise en oeuvre de la procédure était justifiée par un élément objectif étranger à tout harcèlement, de sorte qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article L. 1154-1 du code du travail🏛 ;

3/ ALORS ET SUBSIDIAIREMENT QUE quelle que soit la position prise par le salarié, l'avis du médecin du travail déclarant un salarié inapte à tout emploi dans l'entreprise ne dispense pas l'employeur de rechercher les possibilités de reclassement au sein de l'entreprise et, le cas échéant, du groupe auquel elle appartient, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu qu' « il résulte d'un courrier du 28 mars 2014 que M. [Ac], gérant de l'hôtel Saint Paul a interrogé le médecin du travail afin d'être renseigné sur le type de tâches susceptibles d'être exercées par M. [H] [Aa] et a proposé à cette occasion deux postes disponibles au sein de l'hôtel, soit un poste de chef de réception et le poste actuel de M. [H] » (arrêt, p. 11, alinéa 6) ; que l'employeur s'était ainsi borné à proposer à M. [H] le poste même pour lequel il était employé, ainsi qu'un autre poste, sans aucunement tenter de mettre en oeuvre des mesures de mutations ou transformations de postes de travail ou d'aménagement du temps de travail ; qu'en retenant qu'il en résultait pourtant que la société Hôtel Saint Paul aurait exécuté son obligation de reclassement, la cour d'appel a violé l'article L. 1226-2 du code du travail🏛.

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Lexbase, via la solution Salesforce, utilisée uniquement pour des besoins internes, peut être amené à suivre une partie du parcours utilisateur afin d’améliorer l’expérience utilisateur et l’éventuelle relation commerciale. Il s’agit d’information uniquement dédiée à l’usage de Lexbase et elles ne sont communiquées à aucun tiers, autre que Salesforce qui s’est engagée à ne pas utiliser lesdites données.

Réseaux sociaux

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Données analytiques

Nous attachons la plus grande importance au confort d'utilisation de notre site. Des informations essentielles fournies par Google Tag Manager comme le temps de lecture d'une revue, la facilité d'accès aux textes de loi ou encore la robustesse de nos readers nous permettent d'améliorer quotidiennement votre expérience utilisateur. Ces données sont exclusivement à usage interne.