Jurisprudence : Cass. crim., 15-12-2021, n° 20-85.075, F-D, Cassation

Cass. crim., 15-12-2021, n° 20-85.075, F-D, Cassation

A25547H3

Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2021:CR01545

Identifiant Legifrance : JURITEXT000044524951

Référence

Cass. crim., 15-12-2021, n° 20-85.075, F-D, Cassation. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/76587271-cass-crim-15122021-n-2085075-fd-cassation
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Abstract

Mots-clés : confiscation • proportionnalité • motivation • produit de l'infraction • nue-propriété • clause d'inaliénabilité Il incombe au juge qui décide de confisquer un bien, après s'être assuré de son caractère confiscable en application des conditions légales, de préciser la nature et l'origine de ce bien ainsi que le fondement de la mesure et, le cas échéant, de s'expliquer sur la nécessité et la proportionnalité de l'atteinte portée au droit de propriété du prévenu.


N° M 20-85.075 F-D

N° 01545


ECF
15 DÉCEMBRE 2021


CASSATION PARTIELLE


M. SOULARD président,


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 15 DÉCEMBRE 2021



Mme [F] [E] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, chambre 5-13, en date du 29 mars 2019, qui, pour escroquerie en bande organisée et blanchiment aggravé, l'a condamnée à deux ans d'emprisonnement dont un an avec sursis, à une interdiction définitive de gérer, a ordonné une mesure de confiscation et a prononcé sur les intérêts civils.


Un mémoire a été produit.

Sur le rapport de M. Turcey, conseiller, les observations de la SCP Boullez, avocat de Mme [F] [E], et les conclusions de M. Salomon, avocat général, après débats en l'audience publique du 17 novembre 2021 où étaient présents M. Soulard, président, M. Turcey, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Coste-Floret, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale🏛, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. A l'issue d'une information judiciaire ouverte le 4 avril 2011 des chefs d'escroquerie en bande organisée et blanchiment en bande organisée, concernant la conception et la commercialisation de placements financiers dans des oeuvres d'art, Mme [E] a été renvoyée, avec sept autres prévenus, devant le tribunal correctionnel qui, par jugement du 4 novembre 2016, l'a condamnée pour escroquerie en bande organisée et blanchiment aggravé, à deux ans d'emprisonnement dont un an avec sursis, cinq ans d'interdiction de gérer une entreprise commerciale, a ordonné une mesure de confiscation et a prononcé sur les intérêts civils.

3. Elle a relevé appel de cette décision. Le ministère public ainsi que certaines parties civiles ont formé appel incident.


Examen du moyen

Enoncé du moyen

4. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a ordonné la confiscation des sommes préalablement saisies figurant au compte bancaire ouvert au nom de Mme [F] [E] dans les livres de la banque [3] à [Localité 2] et transféré au compte de l'OESC (PV n° 032577/20 Notice : BR. CAR 422/3914 du juge d'instruction Van Espen à Bruxelles), alors « qu'il résulte des dispositions des articles premier du Protocole additionnel n° 1 à la Convention européenne des droits de l'homme🏛, 132-1 et 131-21, alinéa 6, du code pénal, 485 du code de procédure pénale, que le juge qui prononce une mesure de confiscation de tout ou partie d'un patrimoine doit motiver sa décision au regard de la gravité des faits, de la personnalité de son auteur et de sa situation personnelle et apprécier le caractère proportionné de l'atteinte portée au droit de propriété de l'intéressé ; que méconnaît ces dispositions la cour d'appel qui justifie le prononcé, à titre de peine complémentaire, d'une mesure de confiscation de la propriété du prévenu qu'elle déclare coupable de faits de blanchiment par le seul constat de ce que cette peine est adaptée à la nature des faits délictueux commis ; que, pour confirmer la peine de confiscation, la cour d'appel s'est seulement déterminée au regard de la gravité objective des faits, des circonstances de leur commission et des éléments de personnalité, étant rappelé qu'elle a, en connaissance de cause de l'interdiction de gérer de M. [Aa] [H], mis son nom et son compte bancaire à la disposition de ce dernier et persisté alors qu'elle n'ignorait rien de leur clôture par les banques ; qu'elle a également retenu que la cour ne dispose pas des éléments suffisants, alors que le seul élément de personnalité qui lui est soumis est un certificat médical, émanant de l'hôpital de [Localité 1], qui semble être un EHPAD, faisant état d'une impossibilité de se déplacer devant la cour sans autre précision, lui permettant d'aménager immédiatement la peine d'emprisonnement ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel de Paris s'est déterminée par des motifs impropres à établir que la peine de confiscation était proportionnée, en violation des dispositions précitées. »


Réponse de la Cour

Vu les articles 131-21 et 132-1 du code pénal🏛 et 593 du code de procédure pénale :

5. Il résulte des deux premiers textes qu'il incombe au juge qui décide de confisquer un bien, après s'être assuré de son caractère confiscable en application des conditions légales, de préciser la nature et l'origine de ce bien ainsi que le fondement de la mesure et, le cas échéant, de s'expliquer sur la nécessité et la proportionnalité de l'atteinte portée au droit de propriété du prévenu.

6. Il résulte du troisième que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision. L'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence.

7. Pour confirmer la confiscation des sommes saisies sur le compte de Mme [E], l'arrêt énonce qu'elle a, connaissant l'interdiction de gérer de son co-prévenu M. [G] [H], mis son nom et son compte bancaire à la disposition de ce dernier, et persisté alors qu'elle n'ignorait rien des clôtures de compte effectuées par les banques.

8. En statuant ainsi, par des motifs qui ne précisent pas à quel titre les sommes saisies ont été confisquées, la cour d'appel, qui ne met pas la Cour de cassation en mesure de s'assurer que les exigences de motivation rappelées ci-dessus ont été respectées, n'a pas justifié sa décision.

9. La cassation est par conséquent encourue.


PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE et ANNULE, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Paris, en date du 29 mars 2019, mais en ses seules dispositions relatives aux peines prononcées à l'encontre de Mme [E], toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Paris, et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le quinze décembre deux mille vingt et un.

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