Jurisprudence : Cass. civ. 2, 16-12-2021, n° 20-20.443, FS-B, Cassation

Cass. civ. 2, 16-12-2021, n° 20-20.443, FS-B, Cassation

A30277G9

Référence

Cass. civ. 2, 16-12-2021, n° 20-20.443, FS-B, Cassation. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/75727447-cass-civ-2-16122021-n-2020443-fsb-cassation
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Abstract

► La deuxième chambre civile de la Cour de cassation, dans son arrêt rendu le 16 décembre 2021, vient préciser qu'il est nécessaire que les parties soient informées de la décision du juge de statuer sans audience ; l'information par tout moyen que le magistrat envisage de statuer sans audience peut être délivrée aux avocats des parties, notamment par RPVA ou, à défaut, par courriels à leur adresse professionnelle, ou encore, par tout autre mode assurant l'effectivité de cette transmission ; les Hauts magistrats énoncent que dans le cas d'espèce la cour d'appel devait rechercher si la note transmise au bâtonnier de l'ordre des avocats par un magistrat chargé de la coordination du pôle civil de la cour d'appel avait été portée à la connaissance des parties.


CIV. 2

LM


COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 16 décembre 2021


Cassation


M. PIREYRE, président


Arrêt n° 1248 FS-B

Pourvoi n° J 20-20.443⚖️


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 16 DÉCEMBRE 2021


1°/ Mme [Aa] [Ab], épouse [Ac], domiciliée [Adresse 3],

2°/ M. [W] [Ac],

3°/ Mme [Ad] [Ae], épousAc [B],

domiciliés tous deux [Adresse 2],

ont formé le pourvoi n° J 20-20.443⚖️ contre l'arrêt rendu le 18 juin 2020 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-5), dans le litige les opposant :

1°/ à M. [Af] [Ag],

2°/ à Mme [X] [P], épousAg [Y],

domiciliés tous deux [Adresse 1],

défendeurs à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.


Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Jollec, conseiller référendaire, les observations de la SCP Boré, Ah de Bruneton et Mégret, avocat de Mme [Aa] [Ab], M. [W] [Ac] et Mme [G] [Ac], de la SCP Gatineau, Ai et Rebeyrol, avocat de M. et Mme [Ag], et l'avis de Mme Trassoudaine-Verger, avocat général, après débats en l'audience publique du 3 novembre 2021 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Jollec, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, Mmes Kermina, Durin-Karsenty, M. Delbano, conseillers, Mme Bohnert, M. Cardini, Mmes Dumas, Latreille, Bonnet, conseillers référendaires, Mme Trassoudaine-Verger, avocat général, et Mme Thomas, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire🏛, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.


Faits et procédure

1. Par acte du 6 mai 2015, Mme [Aa] [Ab], M. [W] [Ac] et Mme [G] [Ac] (les consorts [Ac]) ont assigné M. et Mme [Ag] devant un tribunal de grande instance à fin de condamnation, sous astreinte, à procéder à la reconstruction d'un mur et à leur payer des dommages-intérêts.

2. Par jugement du 26 mars 2018, un tribunal de grande instance a débouté de leurs demandes les consorts [Ac], qui ont interjeté appel le 23 avril 2018.

3. L'ordonnance de clôture est intervenue le 3 mars 2020 et les consorts [Ac] ont déposé leur dossier de plaidoirie le 12 mars 2020 en vue de l'audience de plaidoirie prévue le 16 mars 2020.

4. Cette audience, fixée en période d'état d'urgence sanitaire, ne s'est pas tenue, le juge ayant usé de la faculté prévue à l'article 8 de l'ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020, modifiée🏛 par l'ordonnance n° 2020-595 du 20 mai 2020🏛.

5. Par arrêt du 18 juin 2020, une cour d'appel a confirmé le jugement ayant rejeté les demandes des consoActs [B].

6. Par arrêt du 8 avril 2021 (2e Civ., 8 avril 2021, pourvoi n° 20-20.443), la deuxième chambre civile de la Cour de cassation a dit n'y avoir lieu à transmettre la question prioritaire de constitutionnalité posée par les consorts [Ac].


Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche, ci-après annexé

7. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile🏛, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le moyen, pris en ses deuxième et troisième branches

Enoncé du moyen

8. Les consorts [Ac] font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes tendant à voir condamner M. et Mme [Ag] à remettre en état le mur de soutènement jouxtant leur propriété en procédant à la reconstruction d'un muret en pierres sèches sur fondation béton sur les 90 mètres de long sur la limite séparative, sous astreinte d'un montant de 100 euros par jour de retard à compter de l'assignation et à les voir condamner à leur verser la somme de 15 000 euros en indemnisation des préjudices subis, alors :

« 2°/ qu'en toute hypothèse les parties à l'instance doivent être effectivement informées de la décision du juge ou de la formation de jugement de statuer sans audience afin d'être en mesure de faire opposition à cette décision ; qu'en affirmant que les parties auraient été régulièrement avisées de la décision du juge de statuer sans audience, quand il résulte des échanges entre l'avocate des consorts [Ac] et la juridiction que ceux-ci n'avaient pas été informés personnellement ou par l'intermédiaire de leur avocate de la décision de statuer sans audience et qu'ils ont été ainsi privés du droit de s'opposer à cette décision, la cour d'appel a violé l'article 8 de l'ordonnance n° 2020-304🏛 du 25 mars 2020🏛, ensemble l'article 6§1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales🏛 ;

3°/ qu'en toute hypothèse les parties à l'instance doivent être effectivement informées de la décision du juge ou de la formation de jugement de statuer sans audience afin d'être en mesure de faire opposition à cette décision ; qu'en affirmant que les parties auraient été régulièrement avisées de la décision du juge de statuer sans audience sans constater que les consorts [Ac] ou leur avocate avaient été effectivement informés que leur affaire serait jugée sans audience à défaut d'opposition de leur part dans un délai de quinze jours, une telle information ne résultant par ailleurs d'aucune pièce de la procédure, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 8 de l'ordonnance n° 2020-304🏛 du 25 mars 2020🏛, ensemble l'article 6§1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales🏛. »


Réponse de la Cour

Vu l'article 8 de l'ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020, modifiée🏛 par l'ordonnance n° 2020-595 du 20 mai 2020🏛 :

9. Selon ce texte, lorsque la représentation est obligatoire ou que les parties sont assistées ou représentées par un avocat, le juge ou le président de la formation de jugement peut, à tout moment de la procédure, décider qu'elle se déroule selon la procédure sans audience. Les parties sont informées de cette décision par tout moyen. Hors les procédures d'urgence, elles peuvent s'y opposer dans un délai de 15 jours.

10. L'information par tout moyen de ce que le juge envisage de statuer sans audience peut être communiquée aux avocats des parties, notamment par messages via le Réseau privé virtuel des avocats (RPVA) conformément à l'article 748-1 du code de procédure civile🏛 ou, à défaut, par courriels à leur adresse professionnelle, ou, à défaut encore, par tout autre mode assurant l'effectivité de cette transmission.

11. Pour statuer sans audience, l'arrêt relève qu'en application de l'article 8 de l'ordonnance du 25 mars 2020, les parties ont été régulièrement avisées de la mise en oeuvre de la procédure sans audience et qu'à défaut d'opposition dans le délai de quinze jours, les parties ayant déposé leurs dossiers de plaidoirie, l'affaire a été mise en délibéré.

12. En se déterminant ainsi, sans rechercher si l'information, qui avait consisté en une note transmise au bâtonnier de l'ordre des avocats par un magistrat chargé de la coordination du pôle civil de la cour d'appel, avait été portée à la connaissance des parties, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.


PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief du pourvoi, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 18 juin 2020, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;

Condamne M. et Mme [Ag] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile🏛, rejette la demande formée par M. et Mme [Ag] et les condamne à payer à Mme [Aa] [Ab], M. [W] [Ac] et Mme [G] [Ac] la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize décembre deux mille vingt et un. MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Boré, Ah de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour Mme [Aa] [Ab], M. [W] [Ac] et Mme [G] [Ac]

Les consorts [Ac] font grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté leurs demandes tendant à voir condamner les époux [Ag] à remettre en état le mur de soutènement jouxtant leur propriété en procédant à la reconstruction d'un muret en pierres sèches sur fondation béton sur les 90 mètres de long sur la limite séparative, sous astreinte d'un montant de 100 euros par jour de retard à compter de l'assignation et à les voir condamner à leur verser la somme de 15 000 euros en indemnisation des préjudices subis ;

1°) ALORS QUE la déclaration d'inconstitutionnalité des dispositions de l'article 8 de l'ordonnance du 25 mars 2020, en ce qu'il dispose que les parties peuvent être informées par tout moyen de la décision de statuer sans audience, entraînera par voie de conséquences l'annulation de l'arrêt qui a fait application de cette disposition à l'instance ;

2°) ALORS QU'en toute hypothèse les parties à l'instance doivent être effectivement informées de la décision du juge ou de la formation de jugement de statuer sans audience afin d'être en mesure de faire opposition à cette décision ; qu'en affirmant que les parties auraient été régulièrement avisées de la décision du juge de statuer sans audience (arrêt, p. 4, antépén. al.), quand il résulte des échanges entre l'avocate des consorts [Ac] et la juridiction que ceux-ci n'avaient pas été informés personnellement ou par l'intermédiaire de leur avocate de la décision de statuer sans audience et qu'ils ont été ainsi privés du droit de s'opposer à cette décision, la cour d'appel a violé l'article 8 de l'ordonnance n° 2020-304🏛 du 25 mars 2020🏛, ensemble l'article 6§1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales🏛 ;

3°) ALORS QU'en toute hypothèse les parties à l'instance doivent être effectivement informées de la décision du juge ou de la formation de jugement de statuer sans audience afin d'être en mesure de faire opposition à cette décision ; qu'en affirmant que les parties auraient été régulièrement avisées de la décision du juge de statuer sans audience (arrêt, p. 4, antépén. al.) sans constater que les consorts [Ac] ou leur avocate avaient été effectivement informés que leur affaire serait jugée sans audience à défaut d'opposition de leur part dans un délai de quinze jours, une telle information ne résultant par ailleurs d'aucune pièce de la procédure, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 8 de l'ordonnance n° 2020-304🏛 du 25 mars 2020🏛, ensemble l'article 6§1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales🏛 ;

4°) ALORS QU'en toute hypothèse la renonciation à l'exercice d'une voie de recours ne se présume pas et ne peut résulter que de circonstances établissant sans équivoque la volonté des parties de ne pas former le recours ; que le dépôt du dossier de plaidoirie des consorts [Ac] effectué antérieurement à la période d'état d'urgence sanitaire en vue de l'audience fixée le 16 mars 2020 ne saurait donc être retenu comme valant renonciation à s'opposer à la décision de statuer sans audience sans que soit violé l'article 1134 du code civil🏛, devenu 1103, ensemble l'article 8 de l'ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020🏛.

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