Jurisprudence : Cass. civ. 2, 16-12-2021, n° 20-15.735, F-B, Cassation

Cass. civ. 2, 16-12-2021, n° 20-15.735, F-B, Cassation

A30137GP

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Cass. civ. 2, 16-12-2021, n° 20-15.735, F-B, Cassation. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/75727433-cass-civ-2-16122021-n-2015735-fb-cassation
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Abstract

► La deuxième chambre civile de la Cour de cassation, dans son arrêt rendu le 16 décembre 2021, vient préciser que l'ordonnance du président de chambre, statuant sur la recevabilité de la déclaration de saisine après renvoi de cassation, n'est pas revêtue de l'autorité de la chose jugée ; dès lors, l'irrégularité portant sur la première déclaration de saisine, constitue une fin de non-recevoir, qui peut être régularisée par une nouvelle déclaration de saisine régulièrement formée.


CIV. 2

LM


COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 16 décembre 2021


Cassation


M. PIREYRE, président


Arrêt n° 1227 F-B

Pourvoi n° S 20-15.735


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 16 DÉCEMBRE 2021


Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 2], représenté par son syndic, la société Hellier du Verneuil, dont le siège est [Adresse 5], a formé le pourvoi n° S 20-15.735 contre l'arrêt rendu le 29 novembre 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 1), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Axa France IARD, dont le siège est [Adresse 3],

2°/ à la société Holding Socotec, dont le siège est [Adresse 4],

3°/ à la société Paris Villiers, dont le siège est [Adresse 1],

4°/ à la société Socotec construction, dont le siège est [Adresse 4],

défenderesses à la cassation.


Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Kermina, conseiller, les observations de Me Occhipinti, avocat du syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 2], de Me Bouthors, avocat de la société Holding Socotec, de la société Socotec construction, de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Axa France IARD, de la SCP Delamarre et Jéhannin, avocat de la société Paris Villiers, et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 3 novembre 2021 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Kermina, conseiller rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.


Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué statuant sur renvoi après cassation (Paris, 29 novembre 2019) et les productions, la société Paris Villiers (la société) a acquis, en 2003, un immeuble qu'elle a rénové, puis divisé, et vendu par lots de copropriété, les actes de vente comportant, en annexe, un rapport de la société Socotec relatif à l'état de la couverture. Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 2] (le syndicat des copropriétaires) a, après une expertise judiciaire, assigné la société, la société Axa France IARD, son assureur, et la société Socotec, afin qu'ils soient déclarés solidairement responsables des désordres survenus en toiture.

2. Par un jugement du 3 avril 2012, un tribunal de grande instance a déclaré le syndicat des copropriétaires irrecevable en ses demandes à l'encontre de la société et son assureur et l'a débouté de ses demandes à l'encontre de la société Socotec.

3. Par un arrêt du 16 janvier 2014, une cour d'appel a confirmé le jugement déféré.

4. Par un arrêt du 24 juin 2015, la troisième chambre civile de la Cour de cassation (3e Civ., 24 juin 2015, pourvoi n° 14-15.205⚖️) a cassé cet arrêt.

5. Le 14 octobre 2015, le syndicat des copropriétaires a adressé au greffe de la cour d'appel de renvoi une déclaration de saisine par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, laquelle a été déclarée irrecevable par une ordonnance du président de chambre du 26 septembre 2018.

6. Le 12 septembre 2018, le syndicat des copropriétaires a déposé au greffe de la cour d'appel une nouvelle déclaration de saisine sur renvoi après cassation par la voie électronique.


Sur le premier moyen, ci-après annexé

7. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile🏛, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.


Mais sur le second moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

8. Le syndicat des copropriétaires fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable la déclaration de saisine de la cour effectuée par message électronique du 12 septembre 2018, alors « que l'irrégularité découlant de la saisine de la juridiction de renvoi par lettre est une fin de non-recevoir, susceptible d'être régularisée tant qu'aucune décision définitive n'a déclaré irrecevable ledit acte de saisine ; qu'il résulte des constatations de la cour d'appel que celle-ci a été saisie par lettre recommandée avec accusé de réception, qu'une nouvelle déclaration de saisine a été régularisée par voie électronique le 12 septembre 2018 et que la première déclaration a été jugée irrecevable par ordonnance du conseiller de la mise en état du 26 septembre 2018 ; qu'en estimant que la seconde déclaration de saisine n'avait pas pu régulariser la fin de non-recevoir tirée de l'irrégularité du mode de transmission de la première, la cour d'appel a violé les articles 126, 1032 et 1034 du code de procédure civile🏛. »


Réponse de la Cour

Vu les articles 126, alinéa 1, 775, 907, 914 et 916 du code de procédure civile🏛 :

9. Selon le premier de ces textes, dans le cas où la situation donnant lieu à fin de non-recevoir est susceptible d'être régularisée, l'irrecevabilité sera écartée si sa cause a disparu au moment où le juge statue.

10. Il résulte des trois derniers de ces textes que l'ordonnance du président de chambre, statuant sur la recevabilité de la déclaration de saisine après renvoi de cassation, n'est pas revêtue de l'autorité de la chose jugée.

11. Pour déclarer irrecevable la déclaration de saisine du 12 septembre 2018, l'arrêt retient que par une ordonnance du 26 septembre 2018, qui n'a pas été déférée à la cour d'appel, le président de chambre a déclaré irrecevable la déclaration de saisine du 14 octobre 2015, sans que le syndicat des copropriétaires ne se prévale de sa régularisation, de sorte qu'il a été conféré force de chose jugée au jugement du 3 avril 2012.

12. En statuant ainsi, alors que l'ordonnance du président de chambre du 12 septembre 2018 n'ayant pas autorité de la chose jugée, l'irrégularité de la première déclaration de saisine, constituant une fin de non-recevoir, pouvait être régularisée par une nouvelle déclaration de saisine régulièrement formée, la cour d'appel a violé les textes susvisés.


PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 29 novembre 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Condamne les sociétés Axa France IARD, Holding Socotec, Socotec construction et Paris Villiers aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile🏛, rejette les demandes formées par les sociétés Axa France IARD, Holding Socotec, Socotec construction et Paris Villiers et les condamne à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 2] la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize décembre deux mille vingt et un.



MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par Me Occhipinti, avocat aux Conseils, pour le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 2]

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré irrecevable la déclaration de saisine de la cour effectuée par le syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] par message électronique du 12 septembre 2018

AUX MOTIFS QU'aux termes de l'article 53-II bis du décret du 6 mai 2017 relatif aux exceptions d'incompétence et à l'appel en matière civile, crée par l'article 1er-2°-b du décret du 2 août 2017 applicable à la déclaration de saisine du 12 septembre 2018, les articles 7 à 21 du décret s'appliquent aux instances consécutives à un renvoi après cassation. En conséquence, les dispositions de l'article 905-2 du code de procédure civile🏛 qui résultent des dispositions de l'article 17 du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017🏛 s'appliquent à la présente déclaration de saisine. En conséquence, l'article 1037-1 du code de procédure civile🏛 relatifs à la procédure de renvoi devant la cour d'appel qui dispose, en son dernier alinéa, que les ordonnances du président de la chambre ou du magistrat désigné par le premier président statuant sur la caducité de la déclaration de saisine et l'irrecevabilité des conclusions de l'intervenant forcé ou volontaire ont autorité de la chose jugée n'a pas pour effet de limiter la compétence du président de la chambre dont les pouvoirs s'étendent, en cas de renvoi après cassation, à ceux dont dispose le président de la chambre aux termes des dispositions de l'article 905-2 du même code. L'article 905-2 dispose que les ordonnances du président de la chambre ou au magistrat désigné par le premier président statuant sur la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de l'appel ont autorité de la chose jugée. Il résulte donc de ce qui précède que le président de la chambre a compétence pour statuer sur la recevabilité de la déclaration de saisine de la cour d'appel ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE les dispositions de l'article 1037-1 du code de procédure civile🏛 ne limitent pas la compétence du président de chambre ou du magistrat désigné par le premier président aux incidents relatifs à la caducité de la déclaration de saisine et à l'irrecevabilité des conclusions de l'intervenant forcé ou volontaire mais étend celle-ci à tous les incidents relatifs à l'instance devant la cour d'appel de renvoi ; qu'en outre, en application de l'article 53-11 bis du décret du 6 mai 2017 créé par l'article 1er-2°-b du décret du 2 août 2017, les dispositions de l'article 930-2 du code de procédure civile🏛 s'appliquent aux instances consécutives à un renvoi après cassation ; que ce dernier texte donne compétence au président de la chambre saisie ou au magistrat désigné par le premier président pour statuer sur la recevabilité de l'appel et, par conséquent, sur la recevabilité de la déclaration de la saisine de la cour d'appel

ALORS QUE si, après cassation, le président de chambre de la juridiction de renvoi peut connaître de la caducité de la déclaration de saisine de celle-ci et de la recevabilité de l'appel, aucun texte ne lui donne la compétence de connaître de la recevabilité de la déclaration de saisine ; qu'en estimant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 905-2 et 1037-1 du code de procédure civile🏛.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré irrecevable la déclaration de saisine de la cour effectuée par le syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] par message électronique du 12 septembre 2018 ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE L'article 1034 alinéa 2 du même code🏛, applicable au renvoi après cassation, dispose que l'absence de déclaration dans le délai ou l'irrecevabilité de celle-ci confère force de chose jugée au jugement rendu en premier ressort lorsque la décision cassée avait été rendue sur appel de ce jugement ; Par ordonnance du 26 septembre 2018, le président de chambre chargé de la mise en état a déclaré irrecevable la déclaration de saisine de la cour par le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 2] en date du 14 octobre 2015 suite à l'arrêt de la Cour de cassation du 24 juin 2015 qui a cassé l'arrêt du 16 janvier 2014 et renvoyé les parties devant la même juridiction autrement composée. Cette ordonnance vise les conclusions signifiées le 12 septembre 2018 par lesquelles le syndicat des copropriétaires a demandé au magistrat chargé de la mise en état de prendre acte de ce qu'il s'en rapporte à justice sur les mérites de l'incident, de débouter les défendeurs et de prendre acte de ce qu'il régularise une nouvelle déclaration de saisine. Le magistrat chargé de la mise en état a dit que le fait de « prendre acte » n'est pas créateur de droit et qu'il n'y avait donc pas lieu de « prendre acte » de ce que le syndicat des copropriétaires régularise une nouvelle déclaration de saisine. Il résulte donc des termes de l'ordonnance que le syndicat des copropriétaires ne s'est pas prévalu des dispositions de l'article 126 du code de procédure civile🏛 devant le juge saisi de la recevabilité de sa déclaration de saisine du 14 octobre 2015. Par ailleurs le syndicat des copropriétaires n'a pas contesté cette ordonnance par la voie du déféré. L'ordonnance du 26 septembre 2018 a donc conféré force de chose jugée au jugement rendu le 3 avril 2012 par le tribunal de grande instance de Paris conformément aux dispositions de l'article 1034 alinéa 2 du code de procédure civile🏛 et la déclaration de saisine du 12 septembre 2018 est irrecevable. Par ailleurs, le syndicat des copropriétaires n'est pas fondé à soutenir la disproportion de la sanction qui le prive du droit de saisir la cour de renvoi au visa de l'article 6 1 de la CESDH dès lors qu'il a pu saisir la présente cour et que ce n'est que de son propre fait qu'il se voit privé de la possibilité d'exercer ce recours ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE la décision cassée par l'arrêt de la Cour de cassation du 24 juin 2015 ayant été prononcée sur appel du jugement du 3 avril 2012, l'irrecevabilité de la déclaration de saisine de la cour de renvoi du 14 octobre 2015 confère force de chose jugée à ce jugement ; qu'elle rend en conséquence irrecevable la déclaration de saisine du 12 septembre 2018 tendant à déférer à la cour d'appel ce jugement ;

1°) - ALORS QUE l'irrégularité découlant de la saisine de la juridiction de renvoi par lettre est une fin de non-recevoir, susceptible d'être régularisée tant qu'aucune décision définitive n'a déclaré irrecevable ledit acte de saisine ; qu'il résulte des constatations de la cour d'appel que celle-ci a été saisie par lettre recommandée avec accusé de réception, qu'une nouvelle déclaration de saisine a été régularisée par voie électronique le 12 septembre 2018 et que la première déclaration a été jugée irrecevable par ordonnance du conseiller de la mise en état du 26 septembre 2018 ; qu'en estimant que la seconde déclaration de saisine n'avait pas pu régulariser la fin de non-recevoir tirée de l'irrégularité du mode de transmission de la première, la cour d'appel a violé les articles 126, 1032 et 1034 du code de procédure civile🏛 ;

2°) - ALORS QUE le droit d'accès au juge ne doit pas faire l'objet de limites disproportionnées à l'objectif poursuivi ; que la cour d'appel a été saisie par déclaration du 14 octobre 2015, dont l'irrégularité a fait l'objet d'une ordonnance du 26 septembre 2018, délai pendant lequel les parties ont conclu ; que le mode de transmission erroné de la déclaration d'appel n'a donc au aucun effet sur le déroulement de la procédure, de sorte que la déclaration d'irrecevabilité et l'impossibilité de toute régularisation constituent une atteinte disproportionnée au but de célérité et d'efficacité de la procédure d'appel poursuivi par l'obligation de déposer les actes par voie électronique ; qu'en estimant néanmoins cette restriction régulière, la cour d'appel a violé l'article 6 de la convention européenne des droits de l'homme.

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