Jurisprudence : CE 8 SS, 03-10-2012, n° 337557



CONSEIL D'ETAT


Statuant au contentieux


337557


SOCIETE NATIONSBANK EUROPE LIMITED


M. Jean-Marc Vié, Rapporteur

M. Benoît Bohnert, Rapporteur public


Séance du 11 septembre 2012


Lecture du 3 octobre 2012


REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


Le Conseil d'Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 8ème sous-section)


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 15 mars et 15 juin 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la société Nationsbank Europe Limited, dont le siège est 35 New Broad Street EC2M 1NH à Londres, Royaume Uni ; elle demande au Conseil d'Etat :


1°) d'annuler l'arrêt n° 07PA03119 du 15 janvier 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'article 3 du jugement n° 0010947 du 19 avril 2007 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté ses conclusions tendant au remboursement de l'excédent de retenue à la source versé à raison de la distribution de dividendes par la société française NCH International, résultant du plafonnement de cette retenue au taux de 15 % prévu par la convention fiscale entre la France et le Royaume-Uni et à la restitution de l'avoir fiscal relatif à ces dividendes, sous déduction d'une retenue à la source au taux de 15 % ;


2°) réglant l'affaire au fond, de lui accorder le remboursement de l'excédent de retenue à la source et la restitution de l'avoir fiscal en litige ;


3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;


Vu les autres pièces du dossier ;


Vu la convention du 22 mai 1968 entre la France et le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord, tendant à éviter les doubles impositions et à prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur les revenus ;


Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;


Vu le code de justice administrative ;


Après avoir entendu en séance publique :


- le rapport de M. Jean-Marc Vié, Maître des Requêtes,


- les observations de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la société Nationsbank Europe Limited,


- les conclusions de M. Benoît Bohnert, rapporteur public ;


La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la société Nationsbank Europe Limited ;


1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, le 31 mai 1991, la société Nationsbank Europe Limited, de droit britannique, a acquis auprès de la société américaine NCH Corporation, pour une durée de cinq ans, l'usufruit d'actions à dividende prioritaire sans droit de vote d'une filiale française de cette société ; qu'elle a obtenu à ce titre, après prise en compte d'une retenue à la source au taux résultant de la convention fiscale conclue entre la France et le Royaume-Uni, la restitution d'avoirs fiscaux et de l'excédent de la retenue à la source au titre des dividendes perçus de 1991 à 1993 ; que, le 20 décembre 1995, à la suite d'une vérification de comptabilité de la société NCH Corporation, l'administration a notifié, sur le fondement de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, à la société Nationsbank Europe Limited la remise en cause des restitutions prononcées à ce titre, au motif que le contrat de cession d'usufruit dissimulait un prêt et constituait un abus de droit et mis en recouvrement les droits correspondants, assortis d'intérêts de retard et d'une pénalité pour abus de droit de 80 % ; que, le 19 avril 2007, le tribunal administratif de Paris, après avoir constaté qu'il n'y avait plus lieu de statuer à hauteur du dégrèvement des intérêts de retard et de la pénalité, a rejeté le surplus des conclusions de la société tendant au remboursement de l'excédent de retenue à la source et de la restitution de l'avoir fiscal en litige ; que la société se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 15 janvier 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'article 2 de ce jugement ;


2. Considérant qu'aux termes de l'article 158 bis du code général des impôts alors en vigueur : " Les personnes qui perçoivent des dividendes distribués par des sociétés françaises disposent à ce titre d'un revenu constitué : (.) par un avoir fiscal représenté par un crédit d'impôt ouvert sur le Trésor. Ce crédit d'impôt est égal à la moitié des sommes effectivement versées par la société. Il ne peut être utilisé que dans la mesure où le revenu est compris dans la base de l'impôt sur le revenu dû par le bénéficiaire. Il est reçu en paiement de l'impôt (.) " ; qu'aux termes de l'article L. 55 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction applicable à la présente procédure : " (.) lorsque l'administration des impôts constate une insuffisance, une inexactitude, une omission ou une dissimulation dans les éléments servant de base au calcul des impôts, droits, taxes, redevances ou sommes quelconques dues en vertu du code général des impôts (.), les redressements correspondants sont effectués suivant la procédure de redressement contradictoire (.) " ; qu'aux termes de l'article L. 168 du livre des procédures fiscales : " Les omissions totales ou partielles constatées dans l'assiette de l'impôt, les insuffisances, les inexactitudes ou les erreurs d'imposition peuvent être réparées par l'administration des impôts ou par l'administration des douanes et droits indirects, selon le cas, dans les conditions et dans les délais prévus aux articles L. 169 à L. 189, sauf dispositions contraires du code général des impôts " ;


3. Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 158 bis du code général des impôts que l'avoir fiscal constitue un revenu entrant dans la base imposable ainsi qu'un moyen de paiement de l'impôt ; que, par suite, dès lors que les conventions fiscales autorisant le transfert de l'avoir fiscal ne font qu'étendre ce dispositif à des sociétés de droit étranger non résidentes qui, si elles ne sont pas imposées à l'impôt sur les sociétés, sont assujetties à une retenue à la source qui est calculée sur la base du dividende et de l'avoir fiscal correspondant, l'administration peut faire application des dispositions de l'article L. 168 du livre des procédures fiscales pour procéder à la reprise des avoirs fiscaux dont elle a accordé la restitution ;


4. Considérant que, dès lors, la cour, qui a rappelé le cadre conventionnel et la procédure prévue par l'administration pour la retenue à la source et le transfert de l'avoir fiscal à une société de droit britannique, n'a pas méconnu ces dispositions, en jugeant que les règles relatives au retrait des actes individuels créateurs de droit n'étaient pas applicables aux décisions d'admission d'une demande d'octroi d'un avantage conventionnel et que l'administration pouvait remettre en cause, dans le délai de reprise de trois ans, le transfert de l'avoir fiscal, alors même qu'elle n'avait procédé à aucun rehaussement du montant de la retenue à la source ;


5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le pourvoi de la société Nationsbank Europe Limited doit être rejeté, y compris ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;


D E C I D E :


Article 1er : Le pourvoi de la société Nationsbank Europe Limited est rejeté.


Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société Nationsbank Europe Limited et au ministre de l'économie et des finances.


Délibéré dans la séance du 11 septembre 2012 où siégeaient : M. Gilles Bachelier, Président de sous-section, présidant ; M. Stéphane Gervasoni, Conseiller d'Etat et M. Jean-Marc Vié, Maître des Requêtes-rapporteur.

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