Jurisprudence : CA Paris, 4, 6, 09-09-2011, n° 08/07929, Infirmation

CA Paris, 4, 6, 09-09-2011, n° 08/07929, Infirmation

A4302H7H

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Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE aux parties le AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS Pôle 4 - Chambre 6
ARRÊT DU 09 SEPTEMBRE 2011 (n°, 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général 08/07929
Décision déférée à la Cour Jugement du 18 Mars 2008 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 05/11163

APPELANT
Monsieur Didier Z
demeurant SEVRAN
représenté par la SCP GRAPPOTTE BENETREAU et PELIT JUMEL, avoués à la Cour
assisté de Maître Charlotte GUESPIN, avocat au barreau de PARIS (P435)
INTIMÉES
Société d'HLM IMMOBILIÈRE 3 F
prise en la personne des ses représentants légaux
ayant son siège social PARIS
représentée par la SCP NABOUDET-HATET, avoués à la Cour
assistée de Maître QUINTON substituant Me Frédéric ..., avocat au barreau de PARIS (A609)
Société EURO SERVICES LABO
prise en la personne des ses représentants légaux
ayant son siège social IVRY SUR SEINE
représentée par la SCP NARRAT PEYTAVI, avoués à la Cour
assistée de Maître Olivier DOUYERE, avocat au barreau de BOBIGNY (PB 153)
Société AXA FRANCE IARD ès qualités d'assureur de la société EURO SERVICES LABO
prise en la personne des ses représentants légaux ayant son siège social PARIS
représentée par la SCP MIRA-BETTAN, avoués à la Cour
assistée de Maître Valérie BENAMOUR, avocat au barreau de PARIS (P778)

COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 juin 2011, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. MAZIERES, président et M. RICHARD, conseiller.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de
M. MAZIERES, président
M. RICHARD, conseiller
Mme MESLIN, conseiller
Greffier, lors des débats Mademoiselle Camille RENOUX
ARRÊT
-contradictoire
-rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
-signé par Monsieur Jean-Louis MAZIERES, président et par Mademoiselle Camille RENOUX, greffier.

La SA d'habitations à loyers modérés Immobilière 3F a acquis selon acte de vente en date du 3 mai 2004 un terrain avec des bâtiments industriels destinés à être démolis et remplacés par des immeubles d'habitation.
Dans l'acte de vente était annexé, en application des dispositions légales relatives à la protection contre l'amiante, une attestation établie par M. Didier Z mentionnant notamment que les 'morceaux de plaques prélevées dans les bâtiments A, B, C et D en sous-face de la toiture ne contiennent pas d'amiante.'
Toutefois lors de l'ouverture du chantier à la demande de la CRAMIF, un nouveau diagnostic d'amiante a été demandé.
Il a été établi par M. Alain ... qui a conclu dans son rapport daté du 20 juin 2004 qu'il existait 'sur le site des matériaux de construction avec présence de fibres d'amiante' notamment 'les panneaux intérieurs beiges sous rampants et en périphérie dans le hangar'. Ces constatations concernent les bâtiments A et C.
Au vu de ces résultats, Immobilière 3F a sollicité en référé d'heure à heure la désignation d'un expert.
M. Hervé ... nommé par ordonnance du 13 août 2004 a rendu son rapport le 15 mars 2005. Il conclut que 'les panneaux en sous face de toiture du hangar principal et du bâtiment C contiennent de l'amiante.'
Compte tenu des délais convenus dans les marchés de travaux, Immobilière 3F a fait procéder au retrait de l'amiante dans le cadre de l'expertise et sous le contrôle de l'expert.
Immobilière 3F considère qu'elle a été victime d'un dommage à la suite d'une information erronée lors du contrat de vente. Elle recherche en conséquence la responsabilité délictuelle des auteurs de cette information, M. Z et la société Euroservice Labo.

Suivant jugement dont appel du 18 mars 2008 le Tribunal de Grande Instance de Paris s'est ainsi prononcé
'Condamne in solidum M. Z et la société Euroservice Labo à payer à la société Immobilière 3F les sommes de
-41458,14 euros au titre des travaux supplémentaires de désamiantage -67417,32 euros au titre du préjudice financier
Dit que ces sommes seront augmentées des intérêts au taux légal à compter de la date de prononcé du présent jugement et ordonne la capitalisation des intérêts.
Fixe le partage de responsabilité à 50% et dit que M. Z et la société Euroservice Labo supporteront chacun à hauteur de ce pourcentage le montant des dommages-intérêts.
Rejette la demande de Immobilière 3F formée à l'encontre d'AXA, assureur de M. Z jusqu'au 31 décembre 2002,
Condamne AXA FRANCE in solidum avec la société Euroservice Labo à payer les montants précités dans les limites de la police d'assurance,
Condamne AXA FRANCE à garantir la société Euroservice Labo des condamnations prononcées à son encontre dans les limites de la police d'assurance,
Dit que M. Z sera garanti des condamnations prononcées à son encontre par Euroservice Labo et Axa France Iard à proportion du partage de responsabilité précisé précédemment,
Déboute les parties de leurs demandes en surplus,
Condamne in solidum M. Z, la société EURO SERVICES LABO et son assureur Axa à payer à Immobilière 3F la somme de 6000 euros,
Dit que dans les rapports entre M. Z et la société EURO SERVICES LABO cette somme sera répartie entre eux à parts égales,
Ordonne l'exécution provisoire du présent jugement,
Condamne M. Z et la société EURO SERVICES LABO aux dépens qui comprendront les frais d'expertise judiciaire qui sera répartie à parts égales entre eux.'

Vu les dernières écritures des parties,
M. Didier Z a conclu à l'infirmation du jugement et à sa mise hors de cause, à titre subsidiaie à sa garantie par la société EURO SERVICES LABO et son assureur AXA FRANCE.
La Société EURO SERVICES LABO a conclu à l'infirmation du jugement et à sa mise hors de cause et subsidiairement à la garantie de M.ZZ et de son assureur AXA FRANCE.
La société AXA FRANCE IARD assureur de EURO SERVICES LABO a conclu à l'infirmation du jugement qui a retenue sa garantie.
La Société IMMOBILIÈRE 3F a conclu à la confirmation du jugement sauf en ce qui concerne le point de départ des intérêts.

SUR CE
Considérant que la Cour adopte l'exposé des faits et des moyens des parties des premiers juges ainsi que leurs motifs non contraires au présent arrêt.
Considérant que les conclusions du rapport d'expertise sont que 'les conclusions erronées du diagnostic de M.ZZ proviennent d'une erreur du laboratoire EURO LABO SERVICES dans l'énoncé des résultats de l'analyse de l'échantillon prélevé par M.ZZ... cette erreur provient - sans pouvoir en apporter la preuve formelle- d'une méthode d'analyse mal adaptée au problème posé'.
Considérant que l'expert relève que 'le rapport de diagnostic amiante réalisé par M.ZZ pêchait par un défaut de repérage et de traçabilité des échantillons, sans pouvoir pour autant, mettre en évidence le moindre lien de causalité entre ce défaut et l'erreur de laboratoire'.
Considérant qu'il est rappelé dans le corps du rapport que le diagnostic réalisé par M.ZZ mentionne la présence d'amiante dans les plaques de fibro-ciment en toiture et dans les conduits de chauffage des bâtiments A et B mais indique que 'les morceaux de plaques prélevées dans les bâtiments ABC D en sous face de la toiture ne contiennent pas d'amiante'.
Considérant que l'expert précise encore que 'ce diagnostic n'est pas en parfaite adéquation avec les dispositions de l'arrêté du 2 janvier 2002, puisque celui précise que le repérage peut nécessiter des sondages destructifs ou des démontages particuliers alors que M.ZZ précise que son diagnostic est visuel sans démontage ni investigation destructive. Par ailleurs aucun rapport de repérage n'est joint à ce diagnostic, indiquant notamment de manière précise la liste et la localisation des matériaux prélevés, ce qui interdit toute traçabilité des échantillons envoyés au laboratoire.
Considérant que s'agissant du rapport du Laboratoire l'expert précise que annexé au rapport de M.ZZ 'il indique que l'échantillon N° E 1093202 concernant un matériau prélevé en sous face des toitures des bâtiments ABC ne contient pas d'amiante' et encore 'il semble qu'un seul échantillon parmi les 4 indiqués avoir été prélevés par M.ZZ ait fait l'objet d'une recherche d'amiante. Par ailleurs la méthode utilisée ne paraît pas la mieux adaptée pour cette recherche qualitative d'amiante. Enfin la norme citée par ce laboratoire concerne la détermination de la concentration en fibres d'amiante dans les atmosphères ambiantes et n'a donc rien à voir avec la recherche de présence d'amiante dans un matériau.'
Considérant que de ce rapport les premiers juges ont pu conclure à des fautes respectives de M.ZZ et de la société EURO SERVICES LABO à égalité de partage entre eux, la faute de M.ZZ consistant essentiellement en un examen visuel hâtif sans démontage ni investigation autre.
Considérant que pour faire triompher sa demande la société IMMOBILIÈRE 3 F doit cependant établir non seulement les fautes commises par ses adversaires mais aussi un préjudice et un lien de causalité direct entre ce préjudice et les fautes commises.
Considérant que le préjudice vérifié par l'expert quant aux montants invoqués et repris par le Tribunal est ainsi constitué et caractérisé
- 41.458,14 euros TTC au titre des travaux supplémentaires nécessités pour le désamiantage
- 67.417,32 euros au titre de la perte de loyers supportée par la société IMMOBILIÈRE 3F 'du fait du retard de 3 mois à la livraison de ce programme immobilier en raison des conventions de réservation de logements déjà signées depuis plus d'un an'.
Considérant que la société IMMOBILIÈRE 3 F n'est pas un particulier ayant acquis un pavillon pour y habiter, mais un professionnel de l'achat, de la vente, de la construction, de la réhabilitation et de la location d'immeuble.
Considérant que ni M.ZZ ni le laboratoire ne sont la cause de la présence d'amiante dans les lieux acquis par la société IMMOBILIÈRE 3 F, ni même de sa quantité et donc de l'importance du coût des travaux de désamiantage, qu'ils ne le sont pas plus du calendrier établi par la société IMMOBILIÈRE 3F pour la réalisation de son projet.
Considérant que le rapport de M.ZZ mentionnait bien la présence d'amiante dans des locaux ayant eu un usage industriel et construit à une période où l'amiante était utilisé, ce qu'un professionnel de l'immobilier ne pouvait ignorer, de même que la société IMMOBILIÈRE 3 F savait qu'il lui faudrait au moment de la démolition pratiquer un nouvel examen aux fins de recherche de la présence d'amiante, que la Société IMMOBILIÈRE 3F ne pouvait, en tant que professionnel, se reposer pleinement sur le diagnostic annexé à l'acte de vente pour en conclure qu'elle n'aurait aucun frais ni délais de désamiantage à prévoir dans son projet et son budget de démolition et de construction de l'immeuble lui appartenant, de même qu'elle devait savoir, en tant que professionnel, que le diagnostic établi à l'occasion de la vente ne pouvait en aucun cas lui permettre de savoir sur quelles quantités précises porterait effectivement le désamiantage, 1kilo, 1 tonne ou 10 tonnes, ni quel en serait le coût et pas plus les délais de travaux.
Considérant que si l'absence d'amiante était une condition de son acquisition la société IMMOBILIÈRE 3 F pouvait parfaitement, avant conclusion de la vente, faire procéder à un examen complémentaire des lieux, qu'il n'est pas sérieux de soutenir que cette société aurait été trompée ou aurait perdu quelque chance que ce soit dans la négociation du prix d'achat.
Considérant que s'agissant du retard de livraison, l'expert a dans ses conclusions, très bien caractérisé la causalité tout à fait indirecte existant entre le préjudice invoqué par la société IMMOBILIÈRE 3 F et le désamiantage nécessaire 'du fait du retard de 3 mois à la livraison de ce programme immobilier en raison des conventions de réservation de logements déjà signées depuis plus d'un an', qu'il est ainsi mis en évidence que le retard est dû à la gestion de son projet immobilier par la société IMMOBILIÈRE 3F, dans ses propres intérêts, que c'est en effet la société IMMOBILIÈRE 3F, et non M.ZZ ou EURO SERVICES LABO, qui a décidé de prendre des engagements avec ses locataires pour une date donnée et qui a établi le calendrier de la démolition et de la construction, que des retards de livraison dans un projet de cette ampleur étaient parfaitement prévisibles, qu'ils soient dus au désamiantage - prévisible dans son principe comme dit plus haut- à des incidents de chantier, à la liquidation d'entreprises, à des intempéries, qu'il appartenait à la société maître d'ouvrage de prévoir dans son calendrier les impondérables inévitables, qu' il lui appartient dès lors de supporter les conséquences de ces retards prévisibles sur des engagements qu'elle a elle même pris dans son intérêt exclusif, qu'en tant que professionnelle de l'immobilier la société a sans aucun doute inséré dans ses conventions avec ses locataires des clauses préservant ses droits en cas de retards dans la réalisation de son projet, puisqu'elle ne formule aucune demande à ce titre, que ses pertes de loyers sont directement la conséquence de sa gestion du dossier, que les préjudices invoqués par la société IMMOBILIÈRE 3 F ne sont aucunement en relation de causalité directe suffisante avec les fautes commises par M.ZZ et par la société EURO SERVICES LABO, avec pour conséquence le rejet des demandes.
Considérant qu'il serait inéquitable de laisser à M.ZZ la charge de ses frais irrépétibles, que la société EURO SERVICES LABO ne forme à ce titre aucune demande à l'encontre de la société IMMOBILIÈRE 3F mais seulement contre M.ZZ et contre AXA, que AXA FRANCE conservera ses propres frais.

PAR CES MOTIFS
INFIRME le jugement entrepris,
DÉBOUTE la société IMMOBILIÈRE 3 F de ses demandes,
CONDAMNE la société IMMOBILIÈRE 3F à payer au titre de l'article 700 du Code de procédure civile à M.ZZ la somme de 3000 euros,
CONDAMNE la société IMMOBILIÈRE 3F aux dépens de première instance et d'appel avec distraction au profit des avoués de la cause
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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