Vu la requête, enregistrée lc 27 novembre 2011 à 13h 30, présentée pour M. Aa A, demeurant … … … … … … … … … … … … … (…), par Me Benamghar ; M. SEDJRO demande au tribunal :
1°) de l’admettre provisoirement au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;
2°) d’annuler l’arrêté du 25 novembre 2011 n°BINUR/201 1/197 par lequel le préfet du Lot l’a obligé à quitter le territoire français, ainsi que l'arrêté du même jour par lequel il l’a placé en rétention administtative ;
4°) de mettre à la charge de l’État la somme de 1 000 euros à verser à son conscil par application des dispositions de l’
article L.761-1 du code de justice administrative🏛 sous réserve que ledit conseil renonce à percevoir la pari contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée :
- que la décision de placement en centre de rétention administrative est insuffisamment motivée ; que sclon une jurisprudence constante du Conseil d'Etat, « la reproduction d’une formule stéréotypée ne satisfait pas à l'obligation de motivation » ; que les éléments de la cause n’ont pas été sérieusement pris en considération et ne sont pas conformes aux exigences posées par la
loi du 11 juillet 1979🏛 : qu’également, l'arrêté portant obligation de quitter le territoire français sans délai est opportunément imprécis quant aux conditions dans lesquelles il évolue sur le soi de la République alors qu’il est porté mention de l'existence d’un père français au domicile duquel il réside :
- qu’en ce qui concerne Îles garanties de représentation, l’illégalité de sa rétention doit être relevée ; qu’en effet, il est identifiable et la présence de son père, ressortissant français, sur le sol de la République n’est ni contestée, ni contestable ; qu’il précise bénéficier ainsi d’un logement dont la
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réalité n’a jamais été mise en doute par l’administration ; que le défaut de nécessité de la rétention est en l'occurrence patent tant il est avéré qu'il a une adressc connue ; que de plus, il répond aux convocations faites par les représentants des forces de l’ordre publique puisque, sur convocation, il s’est présenté le lendemain du contrôle d'identité auprès de la brigade territoriale de gendarmerie ;
- qu’en outre, cette décision est entachée d’une crreur manifeste d’appréciation ; qu’en effet, il ne présente aucun risque de fuite : qu’il n’a pas fait preuve d’un comportement qui vise à éviter son éloignement ;
- que la mesure portant obligation de quitter le territoire français envisagée par le préfet demeure insuffisamment motivée et est entachée de défaut de base légale dans la mesure où il n°est pas justifié de la nécessité d’une interdiction de retour de 6 mois ; qu’en effet, d’une part, l’
article 8 de la convention européenne des droits de l’Homme🏛 pose le principe du respect de la vie privée et familiale ; que la notion de vie familiale supposerait que l’administration soit en mesure de prouver l’existence de relations étroites avec sa famille et ses enfants ; que ceci n’est pas le cas en l’espèce, d’autant que ses difficultés de vie sur le sol togolais anéantissent toute existence de ce lien ; que d'autre part, l’article 3 de cette même convention interdit d'exposer quiconque à des tortures ou des traitements inhumains ou dégradants ; que par ailleurs, un procédé déloyal a été utilisé au cas d’espèce, consistant à lui faire croire qu’il doit se présenter le lendemain avec espoir qu’enfin sa situation personnelle administrative puisse être instruite voire réglée ; qu'enfin, l’interdiction de retour n’est manifestement pas motivée ct devra être annulée ; qu'en effet, l’administration ne s’explique pas sur ce choix ;
Vu, le mémoire en défense, enregistré le 28 novembre 2011, présenté par le préfet du lot, tendant au rejet de la requête ;
TI soutient :
- que les décisions contestées ont été motivées ; qu’en effet, sa mise en rétention est motivée par le fait qu’il est depuis 2010 sur le territoire sans avoir, à ce jour, fait de démarches en vue de régulariser sa situation au regard du séjour ou sollicité l’asile ; que l'interdiction de retour fait également l'objet d'une motivation particulière liée à sa situation ; qu’elle a été fimitée à 6 mois, au lieu de trois ans, pour tenir compte notamment de la présence de son père en France ; que les motivations ne sont en aucun cas stéréotypées, mais résultent de l’examen de sa situation personnelle ;
- qu’en ce qui concerne les garanties de représentation, le fait que le père de M. A, qui a acquis la nationalité française par mariage en 2007, dise l’héberger n’est pas contesté ; que cependant, il faut rappeler que l'intéressé, présent en France depuis un an, n’a fait aucune démarche pour tenter de régulariser sa situation ; que par ailleurs, aucun élément, en dehors des dires de son père, ne prouve que M. A réside bien à cette adresse chez son père à Figeac ;
- qu’un pointage auprès de la gendarmerie n’est pas de nature à lui seul à éviter une fuite de l'intéressé ; qu’il ne produit aucun élément permettant de donner unc raisonnable assurance à l’administration qu’il présente des garanties de représentation ; que de ce fait, il ne peut être considéré que la décision prise constitue une erreur manifeste d'appréciation dans sa situation ;
- qu’en ce qui concerne l'interdiction de retour, dès lors qu'il est avéré au travers des déclarations de l'intéressé, qu’il a son épouse et ses enfants ainsi que cing frères au Togo ou dans un
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pays voisin, il ne peut être considéré que la décision d’éloignement porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée ct familiale en cas d’éloignement ; que ses affirmations concernant les craintes qu’il formule en cas de retour dans son pays ne sont étayées d’aucun élément probant ; que la décision d'interdiction de retour en cas de séjour irrégulier sur le territoire peut être fixée à trois ans ; que comple tenu de sa situation irrégulière depuis un an, sans qu’il ait fait de démarches pour tenter de la régulariser, il a paru nécessaire de décider d’une interdiction de retour ;
Vu les décisions attaquées ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;
Vu la directive n°2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers au séjour irrégulier ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n°79-587 du 11 juillet 1979 modifiée relative à la motivation des actes administratifs et à l’amélioration des relations entre l’administration et le public ;
Vula
loi n°91-647 du 10 juillet 1991 modifiée🏛 relative à l’aide juridique ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 novernbre 2011, à laquelle les parties avaient été régulièrement convoquées :
- le rapport de M. Arroucau, magistrat désigné ;
- les observations orales de Me Benamghar, pour M. A qui confirme ses écritures ;
-les observations de Mlle Ac, représentant le préfet de la Haute-Garonne, qui confirme les écritures du préfet du Lot ;
Sur la demande d’aide juridictionnelle provisoire :
Considérant qu’aux termes de l’
article 20 de la loi du 10 juillet 1991🏛 susvisée: « Dans le cas d'urgence, sous réserve de l’appréciation des règles relatives aux commissions ou désignations d’office, l'admission provisoire à l’aide juridictionnelle peut être prononcée soit par le président du bureau ou de la section compétente du bureau d’aide juridictionnelle, soit par la juridiction compétente ou son président » ; : qu’il y a lieu, eu égard à l’urgence qui s'attache à ce qu’il soit statué sur la requête de M. A, de prononcer à sa demande son admission provisoire à l’aide juridictionnelle ;
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Sur les conclusions en annulation de l’arrêté portant OQTF :
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
Considérant qu’aux termes de l'
article L.511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile🏛 : « L — L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité » ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, de nationalité togolaise, ne peut justifier d’une entrée régulière en France et n’a présenté aucune demande de titre de séjour ; qu’il entre donc dans le cas prévu par les dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile permettant à l’autorité administrative de lui faire obligation de quitter le territoire français ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
Considérant que M. A ne fournit aucun élément de nature à établir qu’il pourrait, cn cas de retour au Togo, être soumis à des traitements inhumains et dégradants contraires aux stipulations de l’article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ; que par suite, il n’est pas fondé à soutenir que la décision prononçant son renvoi dans son pays d’origine méconnaitrait ces stipulations ;
En ce qui concerne la décision d'interdiction de retour :
Considérant qu’aux termes de l’article L..51 1-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile : « II. — L'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. (…) L'interdiction de retour et sa durée sont décidées par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'unc mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français » :
Considérant qu’il n’est ni établi ni même allégué que M. A aurait déjà fait l’objet d’une mesure d’éloignement ou que sa présence en France représenterait une menace pour l’ordre public ; que, par suite, dans les circonstances de l’espèce, le préfet du Lot a fait une application inexacte des dispositions précitées en prononçant à son encontre, par l’article 2 de l’arrêté contesté, une interdiction de retour d’une durée de six mois ; que M. A est par suite fondé à demander l’annulation de cette décision ;
Sur les conclusions en annulation de l’arrêté de placement en rétention :
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Considérant qu’aux termes de l’
article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile🏛 : « À moins qu'il ne soit assigné à résidence en application de l'article E. 561-2, l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français peut être placé en rétention par l'autorité administrative dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée de cing jours, lorsque cet étranger : (…) 6° Fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise moins d'un an auparavant et pour laquelle le délai pour quitter le territoire est expiré ou n'a pas été accordé (.…) » ; qu’aux termes de l’
article L. 551-2 du même code🏛 : « La décision de placement (… ) est écrite et motivée (…) » : qu’aux termes de l’
article L.561- 2 du même code🏛 : « Dans les cas prévus à l'article L. 551-1 l'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger pour lequel l'exécution de l'obligation de quitter le territoire demeure une perspective raisonnable et qui présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque, mentionné au JI de l'articie L.511-1, qu'il se soustraie à cette obligation. (.…) » ; qu’aux termes du 3°) du II de l’article L. 511-1 du même code : « Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : a) si l’étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n’a pas sollicité la délivrance d’un titre de séjour :(…) f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, ou qu'il à dissimulé des éléments de son identité, ou qu'il n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente, ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues par les articles L. 513-4, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2 (...) » :
Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que M. A dispose de documents d'identité en cours de validité et qu’il n’est pas sérieusement contesté qu’il était hébergé par son père qui est de nationalité française ; que dans ces conditions, le préfet du Lot a fait une inexacte application des dispositions précitées en considérant qu’il ne présentait pas de garanties de représentation suffisantes pour prévenir un risque de fuite et en le plaçant en centre de rétention administrative ; que M. A est par suite fondé à demander l’annulation de l'arrêté susvisé ;
Sur les conclusions tendant au bénéfice des dispositions combinées des articles L.761-1 du code de justice administrative et 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que, sous réserve que A obtienne définitivement l'aide juridictionnelle et que Me Benamghar, son avocat, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l’Etat, il y a lieu de mettre à la charge de l’Etat le versement à Me Benamghar de la somme de 1000 euros qu’il demande ;
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